[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [8 juillet 1790.] vain. Vous vous hâterez, Messieurs, de décréter tous les encouragements et de prendre, dès ce moment, toutes les mesures qui doivent un jour vous assurer les mêmes avantages; le rapport et le projet de décret de votre comité vous en préparent les voies. Ces avantages sont précieux, une foule de bras oisifs vous demandent de l’emploi. Considérez surtout le monde immense de femmes et d’enfants que ces manufactures emploieraient et que, sous le rapport de la morale, non moins que sous celui de l’humanité et de la politique, il est si important de soustraire à l’oisiveté, cette éternelle corruptrice des mœurs. Par tous ces motifs j’appuie (sauf de légères modifications sur quelques articles) le projet de décret qui vous est proposé par votre comité, et spécialement la disposition de l’article 4 pour le retour provisoire. J’adopte, toutefois, l’article 21 du projet de décret de M. Nairac (1) parce que je pense, comme lui, que les encouragements effectifs sont nécessaires à la prospérité de nos manufactures de toiles de coton, et qu’il ne suffit pas, pour atteindre à ce but, d’imposer les toiles de l’Inde et les toiles étrangères. Plusieurs membres demandent l’impression du discours de M. Bégouen. L’impression est ordonnée. On demande la clôture de la discussion. M.Rœderer. Les raisons pour et contre n’ont pas toutes été produites. Je demande le renvoi à une autre séance. Ce renvoi est prononcé. La séance est levée à dix heures du soir. ANNEXE A LA SÉANCE DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE DU 8 JUILLET 1790. AFFAIRE DES TROUBLES DE SOISSONS. Lettre de cent-vingt citoyens de Soissons à l’Assemblée nationale. Du 23 juin 1790. Nosseigneurs, Les citoyens de Soissons, après de longs débats, et par la médiation de M. l'abbé Expilly, venaient enfin d’établir une municipalité constitutionnelle. Elle offrait dans son organisation tout ce qui (1) M. Nairac a dit qu’il croit démontré que l’Europe ne reçoit pas assez de coton des colonies et du Levant pour alimenter ses manufactures. Je ne sais de quelle manière cette assertion pourrait être démontrée, mais elle ne fait rien à la question. Nous nous occupons de la France et non de l’Europe. — Or, il est constant que nous fournissons à l’Angleterre une partie des cotons en laine que nous recevons de nos colonies. — Donc nous renvoyons vers nos rivaux des matières premières, au lieu de les employer pour nos propres manufactures. Il est constant encore que nos colonies peuvent doubler leurs cultures de coton par l’extension de nos manufactures, et l’encouragement qui résulterait de l’augmentation de leurs demandes. pouvait contrarier l’amour-propre des partisans de l’ancien régime; de simples bourgeois, marchands, ouvriers, artisans, se trouvaient élevés aux places de municipaux et de notables. Leurs adversaires multipliés et puissants imaginèrent, pour les traverser, de former une société qui, sous le nom de club potriotique , réunissait à peu près tous les ex-privilégiés, dont le nombre est considérable à Soissons. De leur côté, les partisans de la Révolution, pour soutenir la municipalité, qui leur paraissait trop faible contre une pareille coalition, se réunirent en une société qui, peu après, obtint le précieux avantage d’être affiliée à la société des amis de la Constitution de Paris. De cette société étaient membres le maire, les officiers municipaux et plus des trois quarts des notables. Le maire la présida le premier mois, et le procureur de la commune le mois suivant. Alors (s’il est permis de s’exprimer ainsi), les deux partis se trouvèrent fort à fort, et la municipalité soutint avec égalité la lutte contre les ex-privilégiés : mais cet état ne convenait point à ceux qui avaient projeté de s’élever sur le3 ruines de la municipalité. La fixation du chef-lieu du département de l’Aisne dans une ville rivale, fut l’occasion dont on se saisit pour jeter de la défaveur sur les opérations de la municipalité, jusque dans la société des amis de la Constitution. De nouvelles inquiétudes étant survenues pour la fixation du siège épiscopal, les choses en vinrent au point, par les insinuations du parti opposé, que la plupart des officiers municipaux n’osaient déjà plus se rendre dans leur propre club, où on les accusait d’être la cause des pertes que la ville essuyait journellement. Les choses étant en cet état, les anti-municipaux négocièrent une réunion entre les deux sociétés, qui eut effectivement lieu les 12 et 13 juin, et qui eût pu avoir les plus heureux effets, si la municipalité eût été comprise dans la capitulation, et si l’on n’eût point saisi, pour la signer, l’instant de son éloignement. Il résulta de cette réunion que le peuple reprit, sous une forme nouvelle, le joug des ex-privilégiés ; aussi les vrais amis de la Constitution désertèrent-ils incessamment ce club, pour l’abandonner à leurs rivaux. En cet état de choses, le club forma une pétition de cent cinquante citoyens actifs, pour obtenir une assemblée générale de la commune. EUe fut fixée, pour ménager la perte du temps aux ouvriers, au dimanche 13 juin. Nous ne nous étendrons pas sur les scènes mortifiantes de cette assemblée, parce queM. Je maire est porteur de son procès-verbal ; il suffira de dire que les ex-privilégiés y dominèrent, que les officiers municipaux qui y présidèrent y furent honnis, bafoués, vilipendés ; que ce ne fut qu’a-près la séance fermée, et rouverte par la complaisance de M. le maire, qu’un petit nombre (1) (1) Quarante-quatre seulement, sur plus de mille citoyens dont l’assemblée fut composée et qui se retirèrent à neuf heures du soir (hors ces quarante-quatre et trois de ceux que ce petit nombre a nommés députés), après avoir entendu dire à M. le maire que la séance était finie. Qu’on lise le procès-verbal de cette assemblée, et on n’y verra que quarante-sept signatures, y compris celle de ces trois députés. Dans leurs pouvoirs il n’est pas dit un mot sur aucun club. Dans tout ce qu’ils font à cet égard, ils sont sans caractère, et le conseil général n’a point de contradicteurs.