[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [9 août 1790.] Cet amendement n’est pas adopté, et l’article 7 est admis ainsi qu’il suit : « Art. 7. En câs'de concurrence entre le& créanciers d’tm débiteur et le receveur de la contribution patriotique, elle sera payée par suite et avec même privilège que les autres impositions. » (Là séance èst levée à trois Heures et demie.) ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. D’ANDRÉ. Séance du lundi 9 août 1790 (1). La séance est ouverte à 9 heures du matin. M. ifcévfrbèl, secrétaire , donne lecture du pro-Cès-vefbal die la séance d’hier. II est adopté; M-Regiidtid, (de Saint-Jean d'Angély.) Vous avez entendu parler des troubles survefrus dans plüsiebrs Villages situés ànX environs de Fon-tenay-te-Comte, dans un moment de disette de gràins; je demande que la sentence rendue à la requête du grand prévôt par le tribunal de cette ville, soit regardée comme non avenue, l’affaire n’étant pas de son ressort, et qn’ellë soit renvoyée par-dèVant les juges dé Saint-Jean-d’Angély. M. Ifôreàu (de Tours). L’Assemblée ne peut dessaisir légèrement des juges qui ont commencé l’instruction d’tine affaire. Je demande le renvoi au comité des rapports, afin qü’il en rende e(jmpte à la première séance du Soir. (Cette motion est adoptée.) M: Géorgès. Dans un des procès-verbaux remis au Comité des rapports, relativement à l’insurrection qui a eu lieu dans le Clermontàis, il esi dit qu’un officier du régiment de Coudé avait annoncé à Stenai que les Autrichiens étaient prêts à entrer en France; ce quia fait rassembler autour de cette ville près de 30,000 gardes nationaux des environs. J’ai appris hier, par Un courrier extraordinaire, que les cavaliers en garnison dans eût lé ville, avant interrogé Un ofti-ciër-chàsseur sur ces bruits; il leur répondit que celàëtàit vrai; qu’ils entreraient et puniraient tous ceux qui ne seraient fias pour le roi. Celte nouvelle répandit de la fermentation, et l’ofiieièr a été obligé de prendre la füitô; Le courrier attend la décision de l’Assemblée, M. RëVrbéll. 11 est d’autant plus instant de s’occuper de cette affairé; qu’il paraît qü’Où travaille de toute part i’arthée, et qu’oh insihue aux sdldatS de renvoyer leürs officiels. La garnison dé Bitche est sortie de là ville tarnboür battant, à déposé seS officiers ët est rentrée dans la Ville le sabré à là main. Je persiste à demander tjüè l’Àssethblée s’occupe incessamment de ces objets. (Cette affaire est renvoyée au comité des recherches.) M. Martineau. Il a été remis au comité des rapports un paquet venant d’Allemagne, et arrêté parla municipalité de Saint-Aubin, qui l’a défi) Cette séance est incomplète au Moniteur. cacheté. Dans le paquet sq trouvent deux lettres, l’une adressée à M. de Montmorin, et l’autre à M. d'üiguy ; elles sont écrites en chiffres. Il est peut-être nécessaire de nommer des commissaires pour assister à l’ouverture de ce paquet, en présence de M. de Montmorin; cela peut servir a détourner toute espèce de soupçons. Je pense aussi que la municipalité doit être réprimandée pour avoir ouvert un paquet qui passait sous le sceau de la foi publique. II est bon d’observer que les lettres en chiffres n’ont rien qui puisse alarmer, que c’est l’usage dans les correspondances diplomatiques. M. le Président. Un des membres du comité des recherches m’a instruit que deux commissaires ont été chargés de remettre cette lettre à M. de Montmorin ; ils en rendront compte à l’Assemblée. M. Pintevillede Cernon, secrétaire,, lit une lettre des habitants de l’île Bourbon qui demandent une représentation particulière et des représentants à l’Assemblée nationale. (Cette lettre est renvoyée au comité colonial.) M. d’EIbhecq. Les habitants des provinces qui composent aujourd'hui le département du Nord, ont fait creuser à grands frais des canaux de communication, pour se procurer une , navigation intérieure libre et facile. Cependant les intendants, qui ont successivement administré ces provinces, ont fait accorder, par des arrêts du conseil, aux bateliers de Condé, le privilège exclusif dë transporter le charbon tiré de toutes lés mines quelconques du Hainaüt, et aux bélandriers de Dün-kerqùe, ceiüi d’exporter de cette ville toutes les marchandises qui arrivent dans sort port : ainsi les bateliers des deux extrémités du départemeüt ont à eux seuls la jouissance exclusive de toutes les rivières et canaux, dont l’entretien est cependant à la charge de tous les habitants. Vous lie souffrirez pas plus longtemps uri àbüs aussi révoltant èt aussi contraire aux intérêts du commerce. Déjà vous avez prondrtcé què les rîtièrês et canaux étaient aussi libres que les gràhds cfië-mins. Je demande donc que celte affaire soitrëti-voyéë à votre comité d’agricültüre et de commence, poiif être rhise Sous vos yëbx dans huitaine. «- (Cette proposition est addptée.) M.dfe lià TëUr-dui-Piri, ministre de la guerre, écrit que, d’après l’àfiS de M. NeCkër, là délivrance des fonds dès invalides lestés au Tfësbr royal né peut sè faire cftië d’après l’opiniou du comité de liquidation. Le miûistrë demandé qU6 le comité veuille bied s’bCctlpër de Dèxameu dë Barrière appartenant aux invalides et des moyens de pourvoir aux besoins actdels de cet établissement. (Cette lettre est renvoyée au comité de liquidation.) M. Salle, député de la Moselle, demande un congé de 15 jours pour vaquer à des affaires très importantes qui l'appellent à Sarrelouis. (Le congé est accordé.) M. de Vismes. Dans la séance du 3i juillet, j’ai eu l’honneur de voos donner lecture d’un projet d'instruction pour les-corps administratifs. Le projet vient de vous être distribué et je prie les membres de l’Assemblée qui auraient des observations à présenter, de vouloir bien les adres- (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [9 août 1“90]. 664 ser au comité, afin qu’il en soit tenu compte dans la rédaction définitive que nous vous soumettrons avant peu. {Voyez ce projet d'instruction annexé à la séance de ce jour , p. 675.) M. 1© Président. L’ordre du jour est maintenant la suite de La discussion du projet de décret sur l'organisation du pouvoir judiciaire . L’Assemblée avait ajourné le titre VII, concernant le ministère public. La discussion va s’ouvrir de nouveau sur cet objet. M. Brioisde Beaumetz. Je propose de poser ainsi la question : Comment seront exercées les accusations publiques ? M. de IKenonville. Il vaudrait mieux poser la question en ces termes : Par qui les poursuites des délits publics seront-elles intentées et dirigées ? M. Thouret.il me semble qu’il faut laisser aux orateurs la faculté de traiter la question d’une manière plus générale. M. Goupil. Messieurs, je commence d’abord par m’élever contre la qualification odieuse du commissaire du roi, donnée aux procureurs du roi. Pourquoi ne pas leur conserver une appellation, qui de tout temps, a été la leur et qu’ils continueront certainement à honorer, comme l’ont fait leurs devanciers ? Les partisans des actions populaires conviennent que le corps social étant blessé seul dans les crimes publics, c’est à lui seul qu’en appartient la poursuite et la vengeance. Cette objection aurait une grande force si l’on pouvait concevoir le roi existant hors du corps social et étranger en quelque sorte à ce qui intéresse sa sûreté. Je conviens cependant qu’un des grands inconvénients pour la liberté serait de laisser, à la seule volonté des officiers du ministère public, le fond de l’accusation publique, si l’on conservait une ordonnance criminelle aussi barbare que celle de 1670; mais l’institution des jurés nous rassure sur le danger de donner ce pouvoir aux officiers du roi. Quant à la négligence de la poursuite des crimes, qui compromettrait la tranquillité des citoyens, vous pouvez rendre ce danger moins grand en ordonnant que, si le procureur du roi retardait ou négligeait la poursuite des crimes, chaque citoyen aura le droit de dénoncer et de stimuler les officiers du ministère public. (L’orateur, après avoir examiné la question sous divers points de vue, termine en proposant les dispositions suivantes) : Art. Ier. Il y aura en chaque tribunal de district un procureur du roi chargé des fonctions du ministère public. Art. 2. Le procureur du roi sera entendu dans toutes les causes des mineurs, des interdits, des femmes mariées et dans celles où les propriétés et droits, soit de la nation, soit d’une commune, seront intéressés; il sera, en outre, chargé de veiller pour les absents indéfendus. Art. 3. Il pourra intenter de son chef toutes accusations pour crimes auxquels il écherra peine capitlae ou afflictive, ou qui auront troublé directement l’ordre public ; mais il sera pourvu, par les lois qui seront rédigées sur la procédure criminelle, à ce que, par la négligence ou l’inaction du procureur du roi, aucun crime dont l’ordre public exigera la punition, ne demeure sans poursuites. M. Mongins {ci-devant de Roquefort). Le corps social, blessé par l’impunité des crimes, vous demande un homme chargé d’en poursuivre la vengeance et d’en découvrir les preuves. Cet homme doit-il être l’homme du peuple ou l’homme du roi ? Ce doit être l’homme du peuple, parce que l’accusation publique est le droit le plus sacré, et que, d’après tous les principes, il émane des droits du peuple, qui dès lors a incontestablement le pouvoir d’en déléguer l’exercice. Pour démontrer cette vérité, il suffit d’invoquer les maximes consacrées à la nature, dictées par l’humanité et adoptées par les lois de tous les peuples. Le droit naturel investit de la poursuite des crimes l’offensé ou la famille de l’offensé... Cependant, si l’offensé néglige de poursuivre son injure, le crime ne doit pas pour cela rester impuni; c’est cette considération importante qui a fait créer le magistrat chargé de veiller à la punition des méchants. Il le fut d’abord par le peuple; c’est donc le peuple qui doit l’instituer encore aujourd’hui ; c’est donc au nom du peuple, et non à celui du roi, qu’il doit exercer son ministère... Le mode que votre comité de Constitution vous propose, n’est donc qu’un retour à cette institution première que la Constitution que vous donnez à l’E m-pire français ne vous permet pas d’abandonner ••• Il est clair que ce n’était que par la confusion de tous les pouvoirs et de tous les droits nationaux, que le roi exerçait autrefois, que l’accusation publique lui était dévolue. Aujourd’hui que l’on connaît la source et la distinction des pouvoirs, il m’est démontré que l’accusation publique appartient au peuple, et qu’il a seul le droit d’en déléguer l’exercice... Je conclus à l’adoption des articles proposés par votre comité de Constitution. M. Brevet, député de Maine-et-Loire (1). Messieurs, la question qui vous occupe a cela de commun avec toutes les grandes questions que vous avez agitées jusqu’à ce jour, qu’elle renferme un assez grand nombre de questions secondaires, qui d’abord semblent devoir compliquer et embarrasser la discussion. Si cependant on réfléchissait qu’il s’agit uniquement de porter ici une loi générale, et que presque tout le reste appartient à des détails et à des formes de procédure criminelle, également applicables à tous les systèmes, et dont il est possible de différer l'examen, peut-être simplifierait-on beaucoup l'objet actuel de notre travail. C’est du moins la marche que je me suis prescrite à moi-même, convaincu, d’ailleurs, que la question, ainsi limitée, ouvrait encore un assez vaste champ à nos méditations. Une autre pensée, Messieurs, m’a dirigé dans mes recherches. J’ai cru que cette cause, qui est véritablement la cause de l’honneur, de la vie et de tous les droits du citoyen, devait être discutée devant vous, non d’après des lois mobiles et de gothiques usages, mais d’après les règles immuables et de la nature et de la raison; et qu’enfin, ce n’était pas surtout dans cette circonstance solennelle qu’il convenait de faire revivre, au milieu de l’Assemblée nationale, ces jurisconsultes des temps passés, qui, ne voyant et ne (1) Nous donnons le discours de M. Brevet, tel qu’il a été imprimé par ordre de l'Assemblée nationale. Cette version diffère, sur plusieurs points, de celle du Moniteur.