670 [Assemblée nationale.j ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [26 décembre 1790.] Sur l'échange de Dontbes. Sur V acquisition de Lorient. Sur le duché de V alentinois. Sur le duché d'Agénois. Sur le don de Chambord. Sur l’échange de Qhàteau-Thiéry et du duché d’Albert avec la principauté de Sedan. Sur l’échange d'Henrichemont et de Bois-Belle. Don du château de Fougiare, en Bretagne. Sur le don fait à M. de Laverdi du petit hôtel de Conli. Arrentement des marais et terrains , fait à Mademoiselle de Matignon. Sur la Concession faite à M. Boulon-Morange, à M. d'Aspach et Madame de Polignac. Sur les fiefs d'Alsace et la préfecture d’ Hagueneau. Après ces dix-sept objets, le comité des domaines ajoute: autres rapports sur nombre d' aliénations, échanges , dons et autres traités onéreux de cette espèce : il ne les désigné pas. Votre comité des lettres de cachet annonce qu’il fait des recherches sur deux affaires particulières ; l’une est relative à M. de Gréqui, détenu àSteltin en Prusse, l’autre à M. Guichard, détenu dans les prisons de Roehefort : nous n’assignons point de place à ces deux rapports; si ce comité croit devoir vous présenter les moyens de faire rendre la liberté à ces neux particuliers, il vous demandera la parole, et vous la lui accorderez sur-le-ibamp : nous n’en pouvons douter. Nous n’avons point non plus déterminé de rang au rapport sur l’ordre de Malte ; vous eu avez charge vos comités réunis de Constitution, diplomatique et militaire, et vous l’avez ajourné aune époque qui est déjà passée ; nous avons pensé que le soin de vous avertir du moment convenable de tiaiter cette aifaire appartenait naturellement à votre comité diplomatique. Nous n’avons point inséré dans notre classification le rappoit sur les postes et messageries; le moment où vous pourrtz vous en occuper dépend de celui où le ministre vous présentera le bail qu’il aura projeté, et le compte que vous avez ordonne qu’il vous rendît. Il est d’autres rapports, Messieurs, auxquels voire comité n’a pas cru devoir assigner de place, il le-artgardes comme étant, par leur nature, à l’ordre de tous les jours ; ils vous seront présentés Buivânt l’usag»', à l’ouverture où à la tin de vos séances. Tels sont les décrets de détails que vous présentent vos divers comités ; teis sont encore ceux de vos comités d’aliénation, des biens nationaux et de liquidation, dont les rapports ne sont, pour ainsi dire, que l’exécution de vos précédents décrets. Votre comité des pensions procède à la recréation des nouvelles pensions, selon l’application de vos décrets. Il les a classées par âge, les mémoires des p< r.'Otines de l’âge de soixante-quinze ans et au-uesM.s, sont examinés pieeque en totalité : le comité annonce que son tiav,ul va être livré à l’impression, et il se propose de vous en faire le rapport. Enfin, Messieurs, votre comité des colonies s’occupe des instructions annoncées par le decret du 29 novembre. (L’Assemblée ordonne l’impression de ce rapport.) L'ordre du jour est la discussion du projet dè décret sur le jury, présenté par les comités de Constitution et de législation criminelle (1). M. Bac© de la Chapelle. Messieurs, j’ai examiné le travail de vus comités : l’humanité y esi sans cesse invoquée; et j’v ai cherché son influence. Nuire ancienne jurisprudence criminelle était une horreur, et o.i y veut en substituer une autre qui ne mérite pas plus d’éloge. Moi aussi j’ai partagé l’enthousiasme des bons citoyens, qui ne voient, dans la race future, que des hommes dignes de la liberté que nous leur avons conquise; mais appelant à moi l’expérience, son flambeau à la main, scrutant les cœurs, tels qu’ns sont et qu’ils seront, tant que le souverain maîire de l’univers ne (haogera pas nos organes, énumérant les passions dévorantes, les besoins toujours croissants, les vices inséparables des grandes so iétés, vices qui souillent, attristent continuellement nos regards; je frémis de la présomption de vos comités qui pensent que des institutions patriarclmles nous conviennent, et que u’ua coup de leur baguette l’espèce humaine allai! être léformée. Des hypothèses rêvées, hors des œuvres de ce monde, ne renverseront point l’ovidence connue de ceux qui ont vu les faits et cherché les causes. Magistrat, à la télé du ministère public, d'une des premières villes du royaume, obligé pendant douze ans, avant de dénoncer, de juger les actions, d’appeh r aux consciences dans l’intérie .r du cabinet, j’ai droit d’être réfuté. Je dois dire à celui que souvent j’applaudis dans celle tribune, à M. Duport, qu’il se irompe ; que je crois qu’il ne connaît pas assez les hommes pour rédiger les lois pratiques que nous sommes appelés a donner à l’Emùre; que des notions acquises sur des travaux laits ne sulîisent pas pour a, précier les procédés premiers employés à leur confection ; que, dans tontes les fondions, même celles où l’esprit fait tout, il est une espece de mécanisme, il est des rapports, des convenances, qui ne sont connues que de ceux qui les exercent directement. M. Duport, guidé par son imagination, prend sou vol, et nous invite à le suivre au-dessus des précipices dont il u’a vu ni la proximité ni la profondeur. Nous ne serons pas les compagnons de sa témérité. C’est ici, Messieurs, que i’Assemblee doit rassembler les idées, analyser scrupuleusement les principes, marcher à la suite d’une sérieuse discussion, et se garantir de cette véhémente impulsion, justifiée souvent par le succès, toujours excusable par les motifs, mais qui deviendrait un crime L réparable dans le cas où die repousserait la vérité. On ne saurait trop le répéter, vos tribunaux, vos assemblées adunnistraiives sont nuis ; U n’est plus de patrie, si la loi criminelle ne fappe pas le violateur de l’ordre en temps convenable ; si vous le mettez sous l’abri des formes, ou si vous le livrez a l’arbitraire ou l’ignorance de vos jurés et ne vus juges. Eh bien ! Messieurs, le plan de vos comités a ces deux meen véuients. J,- pourrais, me livrant aux r> Il xions affligeantes que ce projet fait naître, discutant chaque paiagraphe, remplir de nombreuses pages d’observatiuus ; mais je ne veux pas vous faire l'injure de moire qu’elles vous échap. eront à la discussion. J'ai la pen.-ée con oiatiice que vous n’admeürez de projet, que ce qui est la suite né— (1) Voyez plus haut le rapport deM. Duport, pages 42 et suivantes. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 126 décembre 1790.] 671 cessaire de vos décrets. Nos commettants, fatigués de l’ancien régime, n’ont pas la force de parcourir le vague des systèmes. Ce n’est qu’en nous rapprochant de la réalité que nous assurerons leur bonheur. Avant, Messieurs, d’entrer dans quelques détails, il est un principe qui semble avoir dirigé vos comités, et qu’il est bon, peut-être, d’atténuer, si nous ne voulons commettre de grandes fautes. Il vaut mieux, dit-on, que cent coupables échappent, qu'un innocent périsse. Je dirai, avec la franchise et la fermeté d’un ci-devant Breton, que l’accusé déposait dans mon sein, toujours avec confiance, ses chagrins et ses espérances; que mon active commisération s’attachait à son sort et le protégeait; qu’il jouissait de ma s lisibilité; mais que je n’ai jamais pensé que je la lui dusse exclusivement. J’ai versé des pleurs sur les destins des Galas et autres viciimes du mensonge et de l'erreur ; mais j’ai aussi v< rsé des larmes de sang aux récits fréquenis et à la vue des assassinats, commis sur des pères de famille et sur des enfants au berceau, sur les brigandages qui enlevaient, dans une minute, à l’honnête homme, le fruit de pénib es et longs travaux. Ainsi donc je n’ai pu avouer ce déplorable principe, qui console si bien le législateur de son insuffisance, et favorise tant la paresse des juges, il vaut mieux que cent coupables échappent plutôt qu'un innocent périsse ; sans doute, il ne faut pas qu’il p crisse . Par quelle fatalité, aujourd’hui, pour mériter la plume du civisme, est-on obligé de s’attendrir sur ces cent coupables, qui, aguerris par l’épreuve d’un jugement, comptent sur le vice de la loi, et encore dans les fers, projettent de nouveaux forfaits? Serait-ce un bienfait accordé à la société que la promulgation d’une loi, avec laquelle ils seraient toujours innocents? Non, je ne le croirai jamais. Je n’attaquerai point, dans ses divisions, le projet des comités, je chercherai à simplifier la machine qu’ils nous présentent pour faciliter son mouvement, en enlevant les rouages qui l’embarrassent et polissant ceux qui resteront. A cet effet, il me suflira, je crois, d’éclairer l’Assemblée sur les défauts que j’y ai remarqués. J’applaudirai à ce que vos comités ont dit des officiers ue police; cependant, je ne donnerai pas ce nom aux officier s de gendarmerie, qui ne doivent jamais être, si nous voulons être libres, que les exécuteurs des mandats de justice, et non les dénonciateurs. Ces olficiers de police, ou juges de paix, en tant qu’il ne sera besoin que de surveillance sur les citoyens honnêtes, qn’nne débauche momentanée, une querelle mal entendue diviserout, auront reçu de vous une autorité suffisante, proportionnée à la nature de leurs fonctions et au caractère qu’en général, une simple éducation leur a donné; mais, lorsqu’il faudra qu’ils étendent leurs vues au delà de la sphère que vous avez déjà circonscrite, qu’il s’agira d’epier le crime, de saisir le fer, encore chaud, à la main du coupable, ne craint-on pas que le juge de paix ne manque de courage ou de confiance en lui-raèine? Le pouvoir que lui donnent les comités de rapporter seul les procès-verbaux, est-il dans la mesure de ses forces? Un attentat est commis ; c’est un assassinat, un empoisonnement ; les faits sont compliqués, les accusés importants, les déclarations nombreuses, les inutilités sont à écarter, la marche du criminel est tortueuse, l’influence de sa réputation ou de la crainte qu’il inspire, est active; cependant le récit des faits doit être exact : cette opération, qui, par les g? ns les plus exercés, se fait difficilement, lorsqu’ils ne veulent rien donner au hasird et à la faveur, se placerait, corn ue par enchantement, dans la tête du juge de paix! Les rédacteurs du projet y ont-ils bien pensé? Est-ce dans la maturité de leurs reflexions qu’ils ont trituré leurs rapports ? La tranquillité de la société et le repos des individus seront à la discrétion d’un juge de paix q li sera distrait, insouciant, ou rédacteur ignorant, des faits qu’il aura vus ou entendus ; qui, tors même qu’il sera un fripon, aura la certitude d’échapper à la responsabilité, auquel on ne pourra reprocher ni son incivisme, ni sa mauvaise foi, parce que les notes de son procès-verbal seront sa preuve, et que le témoignage subséquent des témoins ne signifiera, sinon, que les témoins ont varié, ou qu’ils ont été mal entendus ; nulle trace visible ne démontrant le contraire, qui, conséquemment, par la seule force de son procès-verbal, pourra foire échapper le coupable ou livrer l’innocent! Qu’on ne me dise pas qu’il en sera empêché par ses assesseurs; ses assesseurs seront des gens confiants et crédules ; encore on ne voit pas dans le projet qu’ils seront appelés. Tant que le juge de paix sera libre d’extraire des déclarations ce qu’il voudra, son procès-verbal prouvera ce qu’il voudra. On doit remarquer qu’ici, co nme dans l’ancienne jurisprudence, le procès-verbal sera la base de l’instruction, et que lui seul constatera le délit. Déjà, et dès son principe, cette nouvelle loi criminelle est désastreuse. Suivons-la dans son étendue, et voyons si ses développements seront plus satisfaisants. Vous avez lu dans le projet que le juge de paix est obligé à une information, à un interrogatoire de l’accusé, s’il a plu à celui-ci, sur un mandat d'amener , de respect r le ruban national, et de ne p is profiler des moyens d’évasion qu’on lui laisse. Ces préalables sont importants. En effet, c’est au premier moment du délit que la vérité n’a pas eu le temps de fuir des lèvres des accusés et des témoins, que leurs aveux ou dénégaiions sont précieux. Vous vou Iriez qu’ils fussent recueillis d’une manière non révocable, pour les témoins dont le cœur n’aurait pu être sitôt essayé; pour l'accusé, à qui il serait plus facile de prouver la fausseté de l’acc isation et plus difficile de dénier une vérité dont les témoins seraient là; pour le juge de paix, honnête, qui a à légitimer sa conduite, et pour la justice, qui, dès les premiers casserait éclairée. Ils ne le seront pas, et cependant l’accusation peut être déjà complète. Le procès-verbal du juge ou plutôt l’extrait des faits arrive au district. Le directeur du juré en prend connaissance, examine ce qu’il ne peut examiner, savoir s’il y a lien ou nou à l’accusation. Certes il y a accusation et délit, parce que le juge de paix l’a ainsi décidé par le seul fait de l’envoi du capturé et du procès-verbal qu il a rédigé en conséquence. Ainsi voilà au moins i’exa nen du directeur du juré et celui des juges du district complètement inutiles. Les témoins seront donc appelés et entendus de nouveau, devant un juré, dit d'accusation. Ils diront ce qu’il leur plaira. Les juré-, d’un coup d’œil, saisiront la difficulté et prononceront. Vous remarquerez que vos comités, Messieurs, accordent à ce juré le suprême privilège de faire grâce aux criminels. Les preuves seraient évidentes qu’ils n’en pourront pas moins décider impuuément qu’il n’y a 672 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [26 décembre 1790.] lieu à accusation. S’ils décident autrement, l'accusé, au moins, devrait être entendu, et son interrogatoire mis sous les yeux du juré. Sa personne allant être livrée aux événements d’une loDgue prucédure, il a le plus grand intérêt à ce que les éclaircissements, que lui seul connaît, en arrêtent le cours; mais le rédacteur du projet ne le pense pas ainsi. Est-ce donc par principe d’humanité qu’on prolonge les angoisses des malheureux accusés, en leur faisant jouer trois mortels actes pour arriver au dénouement? Ils ont passé par les guichets de deux tribunaux. Ils ont eu à maudir les formes en chevretesses de vos comités. Ils arrivent au grand tiibunal. C’est ici que, si je ne devais des égards à vos comités, dont le travail, en quelque partie, et surtout par l’in en-lion, mérite des éloges, je dirais que toutes les inconséquences, toutes les folies, sont réduiies en principes. C’est ici, surtout, que je les accuserais d’uneirréflexion perpétuelle, (ju’on veuille se figuier le tribunal formé dans le goût des comités. On y voit accusés, amis et conseils des accusés, témoins, accusateur public, accusateur particulier, juges, commissaire du roi, jurés, le greffier ne sachant auquel entendre, tous aux prises, s’inte; pellunt réciproquement. On les entend s’abandonner à toute Pinlempérie de la discussion, saisir alternativement les faits, les confondre dans le résumé, chercher la vérité, les uns avec l’intention de la truuvi r, ceux-ci de la prouver, ceux-là de l’égarer; dans une pareille cacophonie, s’accuser tous d’avoir mal entendu, mal interpiété, et devenir ainsi l’objet de la dérision du public qui, peut-être aussi, prendra part. Cette perspective me brise la tête, et me ferait maudir celte belle institution des jurés, si je pouvais penser que l’Assemblée se déterminât à sanction m r ia pieuse, mais dangereuse rêverie de ses comités. Que demande la nation? protection pour la propriété, sûreté pour les individus. Que demande l’accusé, coupable ou non? prompte justice. Vos comiiés ne rempliss'.nl l’attente ni de l’un ni de l’autre. Nous avons multiplié nos marét haussées, multiplions donc aussi nos cachois et nos prùons. Décidons-nous à y entasser coupables et inuoieuis, lermons nos cœurs à la piété sur les longues horn urs d’un tel mélange, ou préparons-nous à rendie impunis à la société les scélérats qu'elle repuu.-se; car la loi sera sans vigueur, puisqu’elle sera saus exécution. Mais replaçons-nous devant ce tnbunal et suivons sa marche. Des faits prouvent, mieux que des raisonnements. Un villageois y est appelé en déposition. Témoin du complot u'un lorlait exécuté, ou du fortuit lui-même, il en raconte les détails ; les faits sont bien placés dans sa rnémoue, mais s’ai rangent diliicik mciii dans sa bouche; il talonne ses expressions. Il a besoin de silence, d’indulgence. Sa simplicité rustique ne lui peimet pas l’assurance uu citadin, exercé à pérorer dans nos places publiques. Une menace (i), un geste l’in-teidit, brouille ses pensées. Un cuuseil astucieux, uu ami nun moins subtil et aussi scélérat, peut-être, que celui qu’il défend, arrêtera le témoin (1) Los personnes qui ont suivi le Palais, à Paris, depuis que les informations et que les confrontations sont publiques, ont assuié qu’au passage clans les corridors, les témoins étaient hautement insultés et provoques par les amis des accuses. Je laisse à pcnseï, si le témoin, qui n’aura pas piecédemment signé sa déposition, aura le courage de s’exposer au ressentiment cle ces bienveillants amis. à chaque phrase, quelques précautions que l’on prenne pour l’en empêcher. Pressé que sera le témoin par sa conscience de dire la vérité, intimidé par tant d’interprétatcurs de sa déposition, il ne dira cependant que ce qu’on voudra qu’il dise, et peut-être croira-t il avoir rempli son devoir ; car il est possible qu’il ne voie dans ce rassemblement de personnes que des protecteurs du criminel. 11 aura haché son récit et se croira heureux d’être délivré de cette inquisition judiciaire. Ce n’est pas connaître les hommes que de penser que le témoin n’en agira pas ainsi. Il faut apprendre au rédacteur du projet, ce dont j’aurais été dispensé s’il avait voulu consulter les registres des greffes criminels; il faut lui apprendre, dis-je, que ce n’est pas des gens à éducation , ou jadis comme il faut, dont la justice n’a jamais espéré la vér lé. Ils s’enveloppent de leur sensibilité et croient ainsi justilier un silence coupable sur les laits qui h-ur sont connus. Si donc vous abandonnez l’homme simple et hoo-nêie au subterfuge oratoire des avoués et des amis de l’accusé, sans lui donner l’appui d’une déposition qu’il aura faite dans le sang-froid et avec l’idée de l’importance de son obligation, encore une fois il divaguera sans cesse, et toutes les preuves ëchappero ta la justice. Elles lui échapperont par une autre raison toute aussi forte que celle-ci, parle seul effet de la lassitude et de, l’ennui de ceux appelés fréquemment à juger. Ce qui se passe dans les tribunaux actuels n’apprend-il pas que vos comités n’auraient pas dû faire une abstraction absolue des habitude-, des hommes, et qu’ils ont trop compté sur la coalition de toutes les volontés, selon eux les jurés s’assembleront tous les quinze jours pour décider du déiit. Mais voilà une foule de difficultés qui s’élèvent. Difficultés échappées à vos comités, et cependant si aisées à prévoir. Les témoins appelés en indiquent d’autres. L’accusé en oppo.-e à ceux entendus ou indiqués. L’affaire demande des instructions ultérieures sur l’état des lieux, par exemple lors d’un vol, dans le cas de l’alibi, etc. Les preuves pour ou contre ne peuvent se rassembler que partiellement. Des témoins sont malades. Les délits ont éié commis dans plusieurs départements. Les suites n’en peuvent être divisées, parce que la marche des accusés ne saurait être examinée par section, si on peut parler ainsi ; les détails se prêtant mutuellement secours pour la conviction du crime ou de l'innocence. Dans tous ces cas, que feront les jurés, les juges? Su transporteront-ils? Gomment les dépositions seront-elles reçues? Quelle foi les jurés auront-ils dans celles dont iis n’auront pas été témoins? Les délits sei ont-ils réunis sous une seule procédure? Quel sera le tribunal de département compétent, lorsqu’une procédure sera instruite dans deux départements contre tes mêmes accuses? Quel sera le lien d’unité qui, dans les matières criminelles, resserrera les tribunaux? Gemment la loi de la responsabilité de chaque département s’appliquera-t-elle? Je dirai aux comités : Aplanissez donc ces dilticuliés, si vous vouiez que je croie à la boulé de votre projet. Condamnez-vous les citoyens à habiter, constamment et sans fruit, les chambres criminelles? Ne craignez-vous pas que le peuple, excédé de ces lenteurs, qu’il s’expliquera mal et que difficilement \ous lui persuaderez avoir été établies pour sa sûreté, ne s’arme lui-même du glaive de la justice et ne renverse le berceau de notre Constitution? [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. Mais écartons ce3 sinistres idées ! Supposons ! que les jurés, qui seront toujours en scène; des témoins que, par trois fois, vous enlevez de leur domicile; les accusés, Je peuple, pénétrés de la sublimité de l’institution des jurés, sachent la raisonner et veuillent, Signé : M.-L.-F. DüPORT. M. le Président fait lecture d’une lettre du roi, signée de Sa Majesté, et contresignée du ministre de la justice, dont la teneur suit : « Messieurs, je viens d’accepter le décret du 27 novembre dernier. Eu déférant au vœu de l’Assemblée nationale, je suis bien aise de m’expliquer sur les motifs qui m’avaient déterminé à retarder cette acceptation; sur ceux qui me déterminent à la donner en ce moment : je vais le faire ouvertement, franchement, comme il convient à mon caractère. Ge genre de communication entre l’Assemblée nationale et moi doit resserrer les liens de cette confiance mutuelle, si nécessaire au bonheur de la France. « J’ai fait plusieurs fois connaître à l’Assemblée nationale la disposition invariable où je suis d’appuyer, par tous les moyens qui sont en moi, la Constitution que j'ai acceptée et juré de maintenir.