276 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [2-4 avril 1790.] cier pour les exercer contre ses codébiteurs, à la charge de ne les exercer que pour une simple rente foncière, et sans aucune solidarité, et chacun des autres codébiteurs pourra racheter à volonté sa portion divisérnent. » (L’article 5 est relu.) Plusieurs membres demandent l’ajournement. M. le Président consulte l’Assemblée, qui repousse l’ajournement et adopte l’article 5 dans les termes proposés par le comité. M. le Président lève la séance à trois heures et demie. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. LE MARQUIS DE BONNAY. Séance du samedi 24 avril 1790 au matin (1). M. Brevet de Beaujour, secrétaire, donne lecture du procès-verbai de la séance du jeudi 22 avril au soir et de celui de la séance d’hier. M. Frétcau. Je demande qu’il soit ajouté à l’article 2 du décret rendu hier sur la chasse une disposition propre à empêcher la violation des propriétés d’une manière plus déterminante que la peine d’une condamnation pécuniaire. Voici le paragraphe que je propose d’ajouter à l’article 2 : « Sans entendre par l’Assemblée nationale rien innover aux dispositions des autres lois qui protègent la sûreté des citoyens et de leurs propriétés, et qui défendent de violer la clôture des lieux qui forment leur domicile, et qui y sont attachés. » L’Assemblée nationale décrète cet article additionnel, et ordonne qu’il sera envoyé, sans délai, à M. le garde des sceaux, pour être joint au décret rendu sur le fait de la chasse. M. !Le Bols Pesguays affirme que les décrets de l’Assemblée nationale ne sont pas exactement envoyés dans les provinces; que le défaut d’envoi cause de l’inquiétude et peut être nuisible aux populations qui les ignorent. Plusieurs membres présentent des réclamations analogues. M. Fréteau, l’un des quatre commissaires nommés pour surveiller l’envoi des décrets, demande à rendre compte demain de leur travail sur cet objet. L’Assemblée charge, en outre, ses commissaires de faire part à M. le garde des sceaux des réclamations qui viennent de se produire. M. le comte de Marsaane fait une motion relative aux biens des •protestants , et propose que l’Assemblée nationale décrète, comme conséquence de ses principes, que tous les biens ou propriétés, saisis ou confisqués sur les protestants en vertu de la révocation de l’édit de Nantes, et 1) Cette séanco est incomplète au Moniteur. qui se trouvent encore entre les" mains des fermiers de Ja régie, seront rendus aux descendants, héritiers ou représentants des anciens propriétaires, à la charge par eux de justifier de leurs droits, selon les formes que l’Assemblée décrétera à ce sujet. M. Gaultier de Biauzat répond que le principe a été reconnu même avant le rétablissement de la liberté; que les réclamations des ré-ligionnaires fugitifs ou de leurs héritiers, avaient été écoutées dans tous les cas où elles avaient été accompagnées des preuves de filiation ou de succession en collatérale ; qu’ii est vrai qu’ou exigeait anciennement le retour dans le royaume et le certificat de catholicité, mais que la première de ces deux conditions est annulée par les précédents décrets et que la seconde demande un examen sérieux. M. Goupil de Préfeln dit qu’il est à sa connaissance que plusieurs réclamations ont été re-jetées; il demandequela discussion de la motion soit renvoyée à jour fixe. M. Gaultier de Biauzat réplique qu’une motion semblable précédemment faite par M. de Marsanne a été renvoyée au comité des domaines, qui s’occupe de la question, et qui a chargé M. Barrère de Vieuzac de faire le rapport. II demande l’ajournement. L’ajournement est . mis aux voix et prononcé. L’Assemblée reprend la suite de la discussion sur le projet de décret , titre IV, relatif au rachat des droits féodaux supprimés sans indemnité. M. Tronchet, rapporteur , donne lecture de l’article 6 qui est adopté sans changement, ainsi qu’il suit : Art. 6. Pourront les propriétaires de fiefs, ou de fonds censuels, traiter avec les propriétaires de fiefs dont ils sont mouvants, de gré à gré, à telle somme, et sous telles conditions qu’ils jugeront à propos du rachat, tant des redevances annuelles que des droits casuels ; et les traités ainsi faits, de gré à gré, entre majeurs, ne pourront être attaqués sous prétexte de lésion quelconque, encore que le prix du rachat se trouve inférieur ou supérieur à celui qui aurait pu résulter du mode et du prix qui seront ci-après fixés. M. Tronchet lit l’article 7 en ces termes : « Les tuteurs des mineurs ou interdits, les grevés de substitution .les maris dans les pays où. les dots sont inaliénables, même avec le consentement de la femme, ne pourront liquider les rachats des. droits dépendant de fiefs appartenant aux mineurs, anx interdits, à des substitutions et aux femmes mariées, qu’en la forme et au taux ci-après prescrit, et à la charge du remploi. Il en sera de même à l’égard des propriétaires des fiefs, lesquels par les titres sont assujettis au droit de réversion en cas d’extinction de la ligne masculine, ou dans d’autres cas : le redevable qui ne voudra point demeurer garant du remploi, pourra consigner le prix du rachat, lequel ne sera délivré aux personnes qui sont assujetties auremploi qu’eu vertu d’une ordonnance du juge, rendue sur les conclusions du ministère public, auquel il sera justifié du remploi. » M. Mougins de Roquefort demande d’ajouter le mot pupilles dans la teneur de l’article, faisant [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [24 avril 1790.] 277 observer que les mots de pupilles et de mineurs sont très distincts surtout dans les pays de droit écrit. M. Fréteau propose de comprendre dans l’article 7 les tuteurs, curateurs, et tous les administrateurs des biens des mineurs et interdits. M. de Saint-Martin appuie les deux amendements qui sont indispensables pour la bonne exécution de la loi dans'les pays de droit écrit. M. Tronchet, rapporteur, présente une nouvelle rédaction de l’article 7. Il propose, comme conséquence, d’introduire dans l’article 8 le mot recevoir après celui de liquider. Les articles 7 et 8 modifiés, et l’article 9 sont adoptés en ces termes’ : Art. 7. « Les tuteurs, curateurs, et autres administrateurs des pupilles, des mineurs ou interdits, les grevés de substitution, les maris dans les pays où les dots sont inaliénables, même avec le consentement des femmes, ne pourront liquider les rachats des droits dépendant de fiefs appartenant aux pupilles, aux mineurs, aux interdits, à des substitutions, et auxdites femmes mariées, qu’en la forme et au taux ci-après prescrits, et à la charge du remploi. Il en sera de même à l'égard des propriétaires des tiefs, lesquels, par les titres, sont assujettis au droit de réversion en cas d’extinction de la ligne masculine, ou dans d’autres cas. Le redevable, qui ne voudra point demeurer garant du remploi, pourra consigner le prix du rachat, lequel ne sera délivré aux personnes qui sont assujetties au remploi qu’en vertu d’une ordonnance du juge, rendu sur les conclusions du ministère public, auquel il sera justifié du remploi. Art. 8. « Lorsque le rachat aura pour objet des droits dépendant d’un fief appartenant à une communauté d’habitants, les officiers municipaux ne pourront liquider le rachat et en recevoir le prix que sous l’autorité et avec l’avis des assemblées administratives du département, ou de leur directoire; lesquels seront tenus de veiller au remploi du prix. Art. 9. « Si le rachat concerne les droits dépendant de fiefs appartenant à des gens de mainmorte, et dont l’administration serait confiée aune municipalité, le rachat sera iiquidé parles officiers de la municipalité dans te ressort desquels se trouvera situé le chef-lieu du fief. Les officiers municipaux ne pourront procéder à cette liquidation, qu’avec l’autorisation des assemblées administratives du département ou de leur directoire, et seront tenus d’en déposer le prix entre les mains du trésorier du département; l'Assemblée nationale se réservant de statuer ultérieurement sur l’emploi du prix desdits rachats. » M. Tronchet, rapporteur, dit que le nouvel ordre de choses commande un nouvel article, depuis que les biens ecclésiastiques sont entre les mains de la nation et que le comité propose d’introduire les dispositions particulières qui deviendraient l’article 10. Le nouvel article 10 et les trois articles qui le suivent sont ensuite mis aux voix et adoptés sans contestation dans les termes suivants : Art. 10. « À l’égard des biens ci-devant possédés par les ecclésiastiques, et dont l’administration a été déférée aux assemblées administratives, les-dites assemblées liquideront le rachat des droits dépendant desdits biens, et en feront déposer le prix entre les mains de leurs trésoriers; l’Assemblée nationale se réservant de statuer ultérieurement sur l’emploi du prix desdits rachats. •» Art. 11. (Ancien art. 10.) « L’Assemblée se réserve pareillement de statuer sur l’emploi du prix des rachats des droits dépendant des fiefs appartenant à la nation, sous les litres de domaines de la couronne, apanages, engagements ou échanges non encore consommés, ainsi que sur les personnes avec lesquelles lesdits rachats pourront être liquidés et auxquelles le payement en devra être fait. » Art. 12. (Ancien art. 11). « Lorsque les parties auxquelles il est libre de traiter de gré à gré, ne pourront point s’accorder sur le prix du rachat des droits seigneuriaux soit fixes on casuels, le rachat sera fait suivant Jes règles et les taux ci-aprè3. » Art. 13. (Ancien art. 12). « Pour liquider le rachat des droits fixes (tels que les cens et redevances annuelles eu argent, grains, denrées ou fruits de récolte) il sera formé d’abord une évaluation du produit annuel total des charges dont le fonds est grevé, et ce produit annuel sera racheté an taux ci-après indiqué. Quant à l’évaluation du produit annuel, elle sera faite pour chaque espèce de redevances ainsi qu’il suit : M. Tronchet, rapporteur, donne lecture de l’article 14 (ancien art. 13) ainsi qu’il suit : « A l’égard des redevances en grains, il sera formé une année commune de leur valeur, sur les dix années antérieures à l’époque du rachat, d’après le prix commun de chacune des dix années, formé sur le prix des grains de même nature, relevé sur les registres du marché du lieu, ou du marché le plus prochain, s’il n’y en a pas dans le lieu. Si, dans ces dix années, il s’en trouve une ou plusieurs dans lesquelles le prix des grains soit monté à un taux excessif, tel que le tiers en sus (par exemple de 10 à 15), cette année ou ces années seront retranchées et l’année commune ne sera formée que sur les années restantes. » M. de Tachèze demande la parole sur cet article. Il représente que laraison qui fait retrancher du tableau de dix années, les années où les grains étaient d’un tiers au-dessus du prix ordinaire doit faire distraire également les années où le blé se vendait à vil prix. M. Fréteau appuie l’observation du préopinant et propose de faire un tableau de 14 années dont on retrancherait les deux années où ie blé aurait été le plus cher et les deux où il aurait été au plus bas prix. M. le comte de Sérent dit que ce moyen ne peut être bon que si tous les droits féodaux sont rachetés d'année prochaine. M. Rewbell observe qu’on ne peut fixer un taux commun en prenant pour base une année de calamité. M. Tronchet déclare que le comité féodal adopte l’amendement. En conséquence, l’article est mis aux voix et décrété en ces termes : Art. 14. (Ancien art. 13). « A l’égard des redevances en grains, pour former une année commune, on prendra les quatorze années antérieures à l’époque du rachat. Sur ces quatorze années, on fera distraction des deux plus fortes années et des deux plus faibles, et cette dis-