758 lA86emblée nationale.J ARCHIVES PARLEMENTAIRES [5 février 1791.) Plusieurs membres : Non ! non ! M. ïe Président. Tant que je serai dans le fauteuil, vous n’empêcherez pas qu’un membre ne présenie sa proposition, parce que c’est la loi de l’Assemblée. L’Assemblée a décidé une question Général1 ; mais la question générale peut avoir besoin d’exception. Voilà ce que l’Assemblée n’a pas décidé. M. Pétion. Ma proposition est de savoir si, dans certains cas que la loi déterminera, il ne sera pas accordé d’indemnité à l’accusé absous; je demande que l’Assemblée en renvoie l’examen au comité de Constitution et de jurisprudence criminelle, pour en faire le rapport incessamment. MM. de La Rochefoucauld, Robespierre, de Choiseul-Prasliu et Ruzot appuient la proposition de M. Pétion. Un grand nombre de membres du côté gauche réclament l’ordre du jour. (L’Assemblée adopte l’ordre du jour.) M. Lefort annonce qu’il est de retour d’un congé qui lui avait été accordé par l’Assemblée. M. de Pardieu. Messieurs, je suis chargé d’annoncer à l’Assemblée nationale que le corps électoral du département de l’Aisne, en exécution de vos décrets, a procédé à la nomination de l’évêque de Soissons et que son choix s’est porté sur M. l’abbé Marolles, membre et secrétaire de cette Assemblée. M. le Président donne lecture d’une lettre de M. de Colbert-Saigmday, évêque de Rodez, qui annonce que sa sauté ne lui permettant pas de faire usage d’un passeport qu’il avait obtenu pour deux mois, il le renvoie à l’Assemblée, en la priant d’agréer sa respectueuse reconnaissance. La discussion sur les jurés est reprise. M. Duport, rapporteur. Nous arrivons maintenant, Messieurs, au titre X (1) qui traite de la manière de former le juré d’accusation. Je vais soumettre à l'Assemblée quelques observations. Il existe quatre classes entre lesquelles les citoyens doivent être choisis pour former et être appelés aux fonctions politiques et publiques : 1° la classe des simples citoyens; 2° celle des citoyens actifs; 3° celle des citoyens éligibles aux assemblées administratives; 4° enfin, celle des citoyens éligibles à i’Assemblée nationale. Nous n’avons pas pensé, et personne ne pensera sûrement que l’on puisse prendre les jurés dans la classe qui est appelée presque exclusivement à vivre de son travail. Quant aux citoyens actifs, nous avons pensé qu’il serait bon, et peut-être nécessaire, de les appeler un jour aux fonctions de juré; mais dans l’origine d’une pareille institution, il nous a paru que ce serait la compromettre. Restreindre la formation du juré aux citoyens éligibles à l’Assemblée nationale, ce serait pousser trop loin la précaution ; d’ailleurs, comme il est de fait que ce n’est jamais dans les deux extrêmes de la société qu’il faut chercher ceux qui pratiquent les devoirs de la justice, nous avons pensé que l’on trouverait ce qui doit former le juré, dans la classe mitoyenne, qui est ordinairement la plus précieuse dans toutes les sociétés. Quelles sont les conditions d’après lesquelles les jurés seront appelés? La voix d’élection n’est pas admissible ici. Reste donc à savoir si les citoyens appelés pour former le juré le seront ou parla voie du sort ou par le choix d’un officier public. Si vous les appeliez par la voie du sort, il faudrait d’abord établir des règles générales d’exception en faveur des aveugles, des sourds et autres infirmes. D'ailleurs, le sort pouvant tomber sur le même homme plusieurs fois de suite et laissant le reste des citoyens dans l’incertitude, personne ne pourrait sortir de son pays. 11 faudra donc former une première liste de gens avertis que, dans l’année ou les trois mois, ils pourraient être maudés comme jurés; la seconde liste serait également formée au sort, et dès lors il n’interviendrait, dans la formation du juré qui doit juger, aucune espèce de choix, ce qui serait très dangereux, car il est des qualités sur lesquelles on ne peut pas transiger, ce sont les qualités nécessaires, et cela du côté de l’esprit, pour que ce ne soit pas un homme privé du sens ordinaire, et du côté de la moralité, pour que ce ne soit pas un homme notoirement connu comme suspect. Ensuite nous avons cru devoir établir le sort, parce qu’entre les hommes égaux c’est la seule manière de choisir, mais à la condition expresse que la première liste ait été formée avec quelque attention et avec choix. Maintenant il ne s’agit plus que de savoir par qui le choix sera fait. Nous avons pensé, Messieurs, qu’il était important que ce choix soit remis à un seul homme. En général, lorsqu’il y a à s’expliquer sur un grand nombre d’individus et à exercer des fonctions délirâtes, jamais je ne conseillerais qu’on le confiât à un corps bon pour conserver, bon pour surveiller, mais jamais pour choisir, parce qu’il n’est pas responsable. C’est donc à un individu seul que je le confierais, par la raison que cet homme est entouré journellement de l’opinion publique. Maintenant je crois qu’il est nécessaire de vous faire remarquer qu’un homme qui choisit 800 personnes, c’est-à-dire 200 par trimestre, et qui par conséquent ne peut jamais avoir eu vue tel fait ou tel homme en particulier dans le choix qu’il fait des citoyens éligibles, est placé dans une situation où il peut faire le bien sans craindre qu’il fasse le mal. Nous avons pensé ensuite que dans la nécessité absolue d’avoir une première énumération de cette liste considérable, ce n’est pas sous le rapport du choix qu’il faut l’envisager, mais sous un rapport plus important qui est celui de l’exclusion des hommes que l’opinion publique demanderait à exclure, et pourquoi elle n’a besoin que d’un organe. C’est dès lors pour ces fonctions seules, que le procureur général syndic est choisi. Si l’on fait attention, d’une part, à la confiance qu’il faut avoir dans les hommes élus par le peuple, si d’une autre on réfléchit qu’il n’y a pas d’autre manière de faire la liste des jurés, je pense que l’avis que nous avons soumis à votre délibération ne souffrira pas de difficulté. (1) Le titre IX a été adopté dans la séance du lor février 1791. M. de Cazalès. La première question que vous ayez à déterminer, c’est d’abord la nature