[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. . [22 septembre 1790.] 141 guart. Les récusations s’opéreront successivement sur chacune d’elles, en commençant par la première. « Art. 25. Lorsqu’il y aura plusieurs accusés, il sera ajouté au premier nombre de trente-six jurés, autant de huit personnes qu’il y aura de coaccusés, et ces huit personnes seront toujours prises sur la colonne du grade ou de l’état du coaccusé. « Art. 26. En pareil cas, chaque accusé,, à commencer par le plus jeune, récusera d’abord huit personnes sur toute la colonne de son grade ou de son état, ce qui réduira le nombre des jurés à trente-six ; alors les récusations se proposeront sur chaque colonne, et d’une colonne à l’autre, par chacun des coaccusés alternativement, à commencer par le plus jeune, et ainsi de suite, jusqu’à ce que chaque colonne soit réduite au quart. « Art. 27. Lorsqu’il s’agira de former, soit le juré de l’accusation, soit le juré du jugement, îe commandant militaire en chef du lieu où se fera l’instruction du procès et où se tiendra la cour martiale désignera le nombre de jurés nécessaires dans chaque colonne, en suivant l’ordre de l’inscription sur chacune, et sans pouvoir l’intervertir. En cas d’absence, de maladie ou d’autre légitime empêchement de quelqu’une des personnes désignées pour former le juré, son tour sera passé, mais sensé rempli. « Art. 28. Il sera suppléé au défaut d’une colonne, d’abord par la colonne immédiatement inférieure, et ensuite parla colonne immédiatement supérieure, sans qu’on puisse descendre plus bas ni monter plus haut, Si ce moyen est insuffisant, on aura recours à la garnison ou au quartier voisin, pour avoir un suppléant ou des suppléants du grade ou de l’état de ceux qu’ils seront appelés à remplacer. » M. Emmery, rapporteur , lit l’article 29. M. Eanjuinais. Je propose un amendement à l’article et je demande qu’il soit spécifié que la dénonciation soit signée par le dénonciateur et que, dans le cas où la chose ne pourrait avoir lieu, la dénonciation soit faite en présence de deux témoins qui sauront signer. (Cet amendement est adopté.) Les articles 29 à 35 inclusivement sont décrétés en ces termes : « Art. 29. Chaque commissaire-auditeur des guerres recevra les dénonciations qui lui seront faites par les chefs ou par toutes autres personnes, de tout délit prétendu commis par des militaires en activité; il aura soin d’exiger du dénonciateur la déclaration circonstanciée des faits, la remise des pièces servant à conviction, et l’indication des témoins qui peuvent servir à la preuve. La dénonciation sera signée par le dénonciateur, s’il sait signer, et s’il ne sait pas signer, par deux témoins, en présence desquels elle devra être faite en pareil cas. « Art. 30. Le commissaire-auditeur des guerres sera tenu de rendre plainte, dans les vingt-quatre heures, de tous délits militaires prétendus commis dans l’étendue de son arrondissement, et qui seront parvenus à sa connaissance par voie de dénonciation, par la clameur publique ou autrement, comme aussi de constater immédiatement par procès-verbal le corps et les circonstances du délit, s’il a laissé des traces permanentes. « Art. 31. Le commissaire-auditeur qui aura connaissance d’un délit militaire commis hors de son arrondissement, sera tenu d’en avertir, sans aucun délai, celui de ses confrères dans l’arrondissement duquel ce délit passera pour avoir été commis, et de lui envoyer tous les renseignements qu’il aura pu se procurer, notamment copie de la dénonciation, s’il en a reçu une. « Art. 32. Sera pareillement tenu le commissaire-auditeur, qui aura connaissance d’un délit civil commis par des militaires en activité dans son arrondissement, d’en avertir immédiatement tel magistrat civil qu’il appartiendra, du lieu dan3 lequel ce délit passera pour avoir été commis, et de lui envoyer tous les renseignements qu’il aura pu se procurer, notamment copie de la dénonciation, s’il en a reçu une. « Art. 33. Le commissaire-auditeur qui sera dans le cas de porter une plainte, la rédigera par écrit, faisant mention du dénonciateur, s’il y en a un; il la présentera au commandant militaire en chef de la garnison ou du quartier dans lequel le délit aura été commis, et requerra de lui la convocation du juré de l’accusation, que le commandant sera tenu de convoquer sans délai. « Art. 34. Le juré de l’accusation s’assemblera dans la maison du commandant, mais hors de sa présence. Il se rangera autour d’une table disposée à cet effet, à l’une des extrémités de laquelle se placera le commissaire-auditeur, ayant en face le greffier. « Art. 35. Le commissaire-auditeur annoncera que l’objet de cette assemblée est de déterminer si, ou non, il y a lieu à accusation contre un tel, à qui on impute tel crime, ou délit militaire, qu’il énoncera dans les termes les plus précis et les plus clairs; ensuite il requerra des jurés, le serment de donner leur avis en honneur et en conscience, ce que tous les jurés seront tenus de faire à l’instant en levant la main, et prononçant : je le jure. M. Emmery, rapporteur , donne lecture de l’article 36. Un membre demande l’ajournement de cet article afin que l’Assemblée ait le temps de le méditer. M. Prieur propose un amendement pour que « les dépositions des témoins soient , comme par le passé , rédigées par écrit. » Il fait sentir combien il est difficile de retenir les diverses parties des dépositions orales et d’en combiner avec précision l’ensemble et le résultat. M. Emmery répond qu’on peut dès à présent voter l’article en ajournant l’amendement et la forme des dépositions des témoins. L’amendement est ajourné et l’article est décrété en ces termes : « Art. 36. Gela fait, le commissaire-auditeur fera entrer les témoins qu’il voudra produire à l’appui de sa plainte ; il fera connaître leurs noms, leur âge, leur état et qualité ainsique leur domicile, et requerra d’eux le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité, ce qu’ils seront tenus de faire à l’instant en levant la main, et prononçant : je le jure. M. Emmery lit l’article 37. M. Goupil de Préfeln demande si les témoins seront entendus ensemble ou séparément? Un membre propose de dire que les témoins 142 [Assemblée nationale. ] seront entendus « en présence les uns clés autres, à commencer par le plus âgé. » ' On demande l’ajournement de cette portion de l’article. Cette proposition d’ajournement est adoptée. Le reste de l’article est ensuite décrété ainsi qu’il suit : « Art 37. La plainte sera lue par le commissaire-auditeur ainsi que les écrits à l’appui, s’il y en a ; s’il existe des pièces prétendues de conviction, elles seront mises en évidence; les témoins seront ensuite entendus, sans que personne puisse les interrompre tant qu’ils parleront; mais après qu’ils auront tous parié, l’auditeur et chacun des jurés pourront leur faire les questions qu’ils croiront propres à l’éclaircissement des faits, et auxquelles les témoins seront obligés de répondre. » M. Emmery lit les articles 38 et 39 qui sont décrétés sans observation en cos termes : . « Art. 38. Ils se retireront ensuite; et lorsqu’il seront sortis, le commissaire-auditeur fera le résumé des dépositions, présentera ses observations sur le tout, et sortira lui-même avec le greffier, pour laisser les jurés former entre eux leur détermination. « Art. 39. Le juré de l’accusation sera averti par le commissaire-auditeur, qui à cet effet lui donnera lecture du présent article, qu’il a trois questions distinctes à résoudre: , « La première, si le fait dont est plainte, en le supposant prouvé, constitue réellement un crime Ou délit ; « La seconde, si ce crime ou délit est un crime ou délit militaire ; « La troisième, si les indices sont assez considérables pour faire soupçonner que le prévenu soit coupable, et qu’il y ait lieu à suivie la plainte. » M. Emmery lit l’article 40. M. Iloreau propose de substituer à ces mots : « aux juges de paix » ceux-ci : « à tel magistrat civil qu'il appartiendra. » Après une courte discussion l’amendement est adopté. Les articles 40, 41 et 42 sont ensuite décrétés dans les termes ci-dessous : « Art. 40. Supposé que la première de ces questions soit décidée négativement, on ne passera pas aux deux autres ; supposé que la seconde de ces questions soit décidée négativement, on ne passera pas à la troisième : dans l’un et dans l’autre cas, les jurés rapporteront ou que le fait dont est plainte, n’est pas un délit, ou que la plainte ne porte pas sur un délit militaire, et le commissaire-auditeur ne pourra pas lui donner de suites; seulement dans le dernier cas, il sera obligé de l’envoyer à tel magistrat civil qu’il appartiendra, avec tous les renseignements qu’il aura pu se procurer. » “ Art. 41. Les jurés entre eux seront sous la présidence du premier de la première colonne : ils opineront à voix haute, en commençant par le dernier de la dernière colonne, et ainsi de suite en remontant : ils seront maîtres de motiver leur avis dans le premier tour d’opinions qui aura lieu sur chaque question; ensuite il sera fait un second tour d’opinions, lors duquel les voix seront énoncées simplement par oui, ou par non. La majorité absolue entre les neuf jurés fixera leur détermination. [22 septembre 1790.] « Art. 42. Aussitôt qu’elle aura été prise, les jurés inviteront le commissaire-auditeur à rentrer avec le greffier, et leur feront part du résultat. Le greffier en fera mention sur le procès-verbal qu’il aura tenu de toutes les opérations précédentes; le procès-verbal sera écrit au bas de la plainte, et signé tant par les jurés que par l’auditeur et le greffier, qui restera dépositaire d.e toutes les pièces. » M. Emmery, rapporteur, propose d’ajourner la discussion de l’ai licle 43 afin que le comité puisse en examiner de nouveau les termes,. (Cet ajournement est adopté.) M. Emmery donne lecture des articles 44 et 45, devenus 43 et 44. Ils sont adoptés, sans discussion, comme suit : « Art. 43. Dès que la délibération des jurés aura été ouverte, ils ne pourront se séparer sans l’avoir arrêtée et rapportée; mais s’il est nécessaire de tenir plusieurs séances pour la lecture des pièces, l'audition et l’examen de témoins, l’assemblée pourra se rajourner à la plus prochaine matinée,. Le procès-verbal des opérations de chaque séance sera clos, et signé à chaque séance. « Art. 44. S’il y a lieu de donner suite à la plainte, le commissaire-auditeur fera arrêter .et constituer prisonnier l’accusé, s’il ne l’est pas déjà, en vertu des ordres de ses chefs et des règles de la discipline militaire : s’il l’est, il le feraécrouer sur le registre de la prison ; en même temps, il lui fera donner copie, certifiée par le greffier,, de la plainte et du procès-verbal, ou des procès-verbaux, qui auront été dressés en exéculion des articles 42 et 43. L’accusé sera pareillement averti qu’il lui est libre de prendre ou de demander un conseil ». M. Emmery donne lecture de l’article 46 devenu le 45°. M. de ülurinais propose un amendement pour que les soldats emprisonnés pour crimes fussent séparés de ceux qui le seraient pour-simple fait de police. Divers membres appuient l’amendement. Le rapporteur propose de l’ajourner afin que le comité puisse l'examiner. L’ajournement est prononcé. Les articles 46 à 63, devenus 45 à 62, sont ensuite décrétés ainsi qu’il suit : « Art. 45. La prison est une punition militaire pour les fautes de discipline; mais par rapport à l’homme prévenu ou accusé d’un délit, elle n’est plus qu’un lieu de sûreté; ainsi les chefs qui feront emprisonner quelqu’un comme prévenu d’un délit, ne pourront, sous aucun prétexte., aggraver sa détention, en y ajoutant aucune espèce de peines ou de privations qui ne seraient pas indispensables pour la coriservatiou de sa personne. « Art. 46. En envoyant au grand juge militaire copie de la plainte, avec l’extrait du procès-verbal qui constate qu’elle doit être suivie en vertu de la détermination du juré, le commissaire-auditeur requerra du grand juge l’ordonnance nécessaire pour achever et compléter l’instruction. « Art. 47. Le lieu, le jour et l’heure auxquels le grand juge et ses assesseurs, ou leurs suppléants, devront tenir la cour martiale, seront fixés par cette ordonnance; elle portera réquisition au commandant militaire d’y faire trouver les jurés ARCHIVES PARLEMENTAIRES.