[États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage d’Évreux.J 295 Novales. Les nouvelles lois relatives aux novales se trouvant contraires aux droits des curés qui ne sont pas à portion congrue, les députés demanderont que lesdites novales soient réglées comme elles l’étaient avant 1768. Sanctification des fêtes et dimanches. La sanctification des fêtes et dimanches doit être regardée comme une partie essentielle du culte qui est dû à la Divinité ; le clergé renouvelle les instances qu’il a faites dans tous les temps, pour faire interdire les foires et marchés dans ces saints jours et les assemblées aux jours de fêtes de paroisses. Hôpitaux et retraite des prêtres. Le clergé sollicite la faculté d’assigner sur les biens de FEglisedes pensions aux anciens prêtres, à qui leur âge et leurs infirmités ne permettent pas de continuer l’exercice de leurs fonctions, et aux ecclésiastiques dans les ordres sacrés, infirmes ou indigents. Sages-femmes, charlatans. Les mêmes motifs de charité engagent le clergé à solliciter les Etats généraux de s’occuper des moyens de former des cours d’accouchement pour l’instruction des sages-femmes, et de procurer rétablissements desdites sages-femmes dans les campagnes, où une multitude de femmes en couches périssent, victimes de l’ignorance des personnes qui leur donnent leurs soins ; l’intérêt que toute âme sensible prend à l’humanité souffrante inspire au clergé le désir de faire dénoncer, par ses députés aux Etats généraux, Tairas effrayant qui résulte de la tolérance accordée aux empiriques. Collèges. On se plaint du peu de succès de l’instruction dans nos collèges ; les députés du clergé représenteront aux Etats généraux que le moyen de remédier aux abus de l’instruction de la jeunesse serait d’employer quelques corps réguliers ou congrégations séculières dans les colleges, ou de les inviter d’établir des collèges dans leurs maisons, en rappelant les religieux à la sévérité des anciennes maximes des cloîtres ; ils seraient plus à portée de perfectionner le plan d’enseignement, qui deviendrait uniforme et perpétuel entre leurs mains. Les réguliers et les congrégations seraient soumis à l’inspection des évêques dans ce qui concerne renseignement et le temporel des collèges qui y auraient été réunis. Agents du clergé. Il est important que les agents du clergé soient membres des Etats généraux ; ils furent admis en cette qualité à ceux de 1614. Le clergé ne peut traiter aucune affaire sans agents ; leur procuration les charge de toutes les affaires du clergé ; ils sont donc les députés du clergé dans toutes les assemblées où l’on convoque cet ordre et où l’on peut traiter de ses intérêts. Le présent cahier, arrêté et rédigé par MM. les commissaires, approuvé par rassemblée du clergé, a été transcrit sur le brouillon qui avait été signé et paraphé par Mgr l’évêque d’Evreux, et la collation faite par MM. les commissaires soussignés, et ceux de MM. les curés désignés pour suppléer à ceux de MM. les commissaires aui n’ont pu attendre la transcription : et la présente copie servira de minute ainsi qu’il a été arrêté. Noms de MM. les députés de l'ordre du clergé des bailliages principal et secondaire d*Evreuxt pour les Etats généraux. DIOCÈSE D’ÉVREUX. M. de Lalande , docteur de Sorbonne, curé d’11- liers-l’Evêque. DIOCÈSE DE LISIEUX. M. Lindet, docteur de Sorbonne, curé de Sainte-Croix de Bernay. CAHIER DE L’ORDRE DE LA NOBLESSE DU BAILLIAGE D’ÉVREUX, Rédigé par MM. les commissaires nommés en l’assemblée de tout l'ordre, tenue le 18 mars 1789, devant M. le grand bailli , contenant les demandes et réclamations dudit ordre, remis à M. le comte de Bonneville et à M. le marquis de Chambrai/, députés aux Etats généraux en 1789(1). L’assemblée de l’ordre de la noblesse du bailliage d’Evreux, Considérant que les malheurs qui affligent la France prennent leur source dans les violations répétées qui ont été faites aux lois constitutives du royaume et aux droits imprescriptibles de la nation, qui en sont une partie intégrante et es sentielle ; Que ces lois ne sont tombées en désuétude que parce que, n’étant pas rassemblées en un seul corps, elles ont donné plus de facilité aux ministres de tromper la religion de plusieurs de nos souverains, et de leur présenter les secours volontaires que leur offrait une nation libre et généreuse, comme le tribut d’un peuple asservi ; Considérant enfin que le temps, les abus, des actes multipliés et illégaux de l’autorité souveraine ont fait perdre de vue les vrais principes de la monarchie, pour y substituer l’usage du pouvoir arbitraire dont nous éprouvons actuellement les funestes effets*, L’assemblée pense que le premier, l’unique moyen qu’on puisse et qu’on doive employer pour remédier efficacement aux majjp. actuels de l’Etat et prévenir ceux dont il est menacé, est de rappeler la constitution française h ses vrais principes ; Que tous les moyens qu’on pourrait employer, si on négligeait celui-là, ne seraient que des palliatifs dont l’effet serait encore plus funeste que les maux actuels ; et en conséquence, les sentiments profonds d’attachement et de fidélité que l’ordre de la noblesse du bailliage d’Evreux a pour le Roi, et ceux qu’il doit à la patrie, fui font un devoir de charger très-expressément les députés ui seront élus par voie du scrutin, de solliciter e la justice du Roi une charte qui, en constatant et déterminant d’une manière précise les droits respectifs du souverain et de la nation, les assurent à jamais, et dans laquelle il soit expliqué : Que la nation déclare qu’elle regarde comme un des principes delà constitution française l’ordre de succession au trône, tel qu’il a été consacré par l’usage depuis tant de siècles. Que dans les cas d’extinction totale de toutes (1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la Bibliothèque du Sénat. 29g [États gén. 1789. Cahiers. J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage d’Évreax.] les branches de la maison de Bourbon, le droit de disposer de la couronne appartient exclusivement à la nation assemblée en Etals généraux. Que c’est particulièrement à la nation seule à prononcer dans tous les cas où la succession au trône pourrait présenter quelques difficultés. Que, par une suite du même droit, la nation assemblée peut seule disposer de la régence du royaume dans le cas de minorité, ou dans tous les autres cas imprévus qui mettraient le monarque dans l’impuissance de gouverner par lui-même, auquel cas les Etats particuliers de chaque province, par le ministère de leur commissions intermédiaires, seront autorisés à provoquer sans délai la nomination dés députés aux Etats généraux, lesquels seront tenus de se rendre, aussitôt après leurs élection, dans le lieu qui sera désormais désigné pour la tenue des assemblées générales de la nation ; qu’ils se réuniront sans délai, et procéderont à la disposition de la régence. � Que les Etats généraux, de concert avec le Roi, doivent fixer l’âge de la majorité des rois. Qu’elle reconnaît le Roi comme partie essentielle de la puissance législative, en sorte qu’aucune loi ne peut exister sans qu’elle ait été proposée par Sa Majesté et consentie par la nation, ou proposée par la nation et consentie par Sa Majesté. Qu’elle reconnaît dans la personne du Roi la plénitude du pouvoir exécutif, lequel comprend le droit de faire la paix ou la guerre, et tous les traités qui y ont rapport, et la disposition de la force publique pour la défense de la nation et le maintien des lois. Etats généraux . Elle charge encore ses députés de déclarer que les convocations des Etats généraux doivent avoir lieu à des époques fixes, et que la prochaine convocation sera fixée, au plus tard, dans trois années de la présente, et qu’il ne doit point être établi de commission intermédiaire. Que les députés de la nation, partagés Irois ordres distincts, doiventopiner aux Etats généraux par ordre et sans que le vœu unanime des deux ordres puissent enchaîner le troisième. Que, conformément aux lois constitutionnelles du royaume les États généraux ont et peuvent avoir seuls.Tt l’avenir, le droit de faire des changements à la forme de leur convocation et à leur organisation. Que nul impôt, nul subside, nulle taxe, ne peut être directement ni indirectement établi, perçu ni proposé, nul emprunt ouvert, nulle anticipation faite, nulle création d’office faite sans le consentement des Etats généraux. Que la durée de tout impôt doit être déterminée par les Etats généraux , qui en fixeront le terme. Que les Etats généraux doivent vérifier, éclaircir et publier, par la voie de l’impression, l’état actuel des finances. Que le même état devra être annuellement publié, à l’avenir, dans l’intervalle d’une assemblée nationale à la suivante, par l’administrateur des finances, et que toute personne aura la liberté de le discuter par la même voie. Qu’aucune loi concernant l’état ou la fortune des citoyens ne pourra être envoyée aux cours pour y être déposée, qu’elle n’ait été proposée et .consentie par les Etats généraux, sauf les lois particulières au duché de Normandie, lesquelles il suffira que les États dudit duché aient consenties. Que la liberté personnelle, base de toute société, doit être assurée à tous les individus. La noblesse du bailliage d’Evreux charge ex-ressément ses députés aux Etats généraux de éclarer en son nom, à la face de la nation, qu’elle entend provoquer, sur la tête de l’exécuteur de tout ordre arbitraire et contraire aux lois, l’anathème de l’opinion publique ; que s’il estgentil-homme, elle le rejette de son sein, et que son vœu le plus ardent est qu’ayant cessé d’être citoyen, il soit privé du droit d’assister aux assemblées nationales, dans quelque ordre qu’il se trouve classé. Qu’aucun citoyen ne peut être détenu, sous quelque prétexte que ce soit, sans être remis, au plus tard dans les vingt-quatre heures, à ses juges naturels, et que celui qui aurait été arrêté et jugé ensuite être innocent, puisse exercer son recours contre qui il appartiendra. Que la liberté de la presse doit être accordée indéfiniment, sauf la responsabilité personnelle devant les tribunaux ordinaires. Que les ministres doivent être responsables de leur administration aux Etals généraux. Que tout droit de propriété est inviolable, que nul ne peut en être privé que pour l’intérêt public, auquel cas il en sera préalablement et suffisamment dédommagé. Etats provinciaux. Considérant ensuite, qu’outre les droits communs à tous les Français, les Normands en ont encore de particuliers attachés à la constitution du duché de Normandie, l’assemblée de l’ordre de la noblesse du bailliage d’Evreux charge expressément ses députés d’établir les principes, et de réclamer les choses suivantes : Elle réclame, pour toutes les provinces du royaume, le régime des Etats particuliers, le seul d’où puisse à la fois résulter et le bien particulier des provinces, et le bien général durovaume. Que ces mêmes Etats, chargés seuls de l’administration de leur province, soient chargés de la répartition et perception de ces impôts, et en rendent les rôles exécutoires. Que l’ancienne organisation des Etats du duché de Normandie, mal connue, pleine de variations, et peu propre aux circonstances actuelles, exige que les trois Etats dudit duché de Normandie soient assemblés, pour déterminer l’organisation la plus convenable à son administration ; qu’en conséquence, il soit convoqué par bailliage une assemblée nombreuse , avec pouvoirs suffisants aux députés qui la composeront, pour établir la forme et le régime desdits Etats du duché, et pour répartir, cette fois seulement, les impôts qui auront été consentis par les Etats généraux, et pourvoir provisoirement à l’administration du duché. Que les Etats généraux ayant seuls le droit de consentir l’impôt, et les Etats provinciaux de le répartir, il importe que cette assemblée provisoire ait lieu le plus tôt possible. Que les Etats du duché ainsi rétablis seront chargés, outre la répartition de l’impôt, de la surveillance des intérêts de la nation, et qu’en conséquence leurs procureurs syndics seront autorisés à faire, dans quelque tribunal que ce soi!, les réclamations nécessaires, et à y stipuler ses intérêts. Que la Normandie, ayant la propriété impres: criptible de plusieurs droits constitutionnels qui lui sont particuliers, lesquels sont consignés dans sa Charte et dans les confirmations d’icelle, elle [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage d’Êvreux.] £97 réclame que cette Charte soit restituée, maintenue et exécutée dans toutes ses parties et dans toute sa force. Tribunaux. Les tribunaux doivent être sous la sauvegarde de l’assemblée générale de la nation. L’ordre de la noblesse du bailliage d’Evreux réclame, comme partie essentielle de la constitution normande, l’existence de sa cour souveraine telle qn’elle existe ou doit exister, ainsi que celle de tous les autres tribunaux établis sur la demande ou du consentement des gens du duché, et elle s’oppose à ce qu’il y soit fait aucun changement, sans que les Etats du duché les aient proposés ou examinés et consentis formellement. Elle charge les députés de rappeler, si cela est nécessaire, que la justice de l’échiquier appartenait à la province, et était administrée en son nom par ses prélats, ses barons et ses justiciers, et qu’elle en avait tellement la propriété, que Louis XII, en 1499, déclara qu’elle était la justice des sujets de son duché de Normandie. De rappeler que si cette justice a éprouvé des changements notables, les Etats du duché les ont toujours provoqués ou consentis. Elle charge ses députés de déclarer positivement que toute loi doit être nécessairement enregistrée dans ses cours souveraines , qui , suivant notre Constitution, n’en font qu’une; mais que cet enregistrement ne sera fait à l’avenir qu’après que la sanction nationale lui aura été donnée, soit par les Etats généraux, si la loi est générale pour tout le royaume, soit par les Etats du duché, si elle lui est particulière. De demander qu’aucun tribunal ne puisse modifier, interpréter ou changer aucune loi ainsi établie, sous quelque prétexte que ce soit, mais que toutes interprétations , changements ou règlements quelconques émanent au prince , et soient revêtus de la sanction nationale. Qu’aucune évocation ni attribution au conseil ne puissent avoir lieu dorénavant , sinon dans les cas de pourvoi contre des arrêts de cour souveraine ; qu’au terme de la Charte normande on ne puisse obliger les habitants de la Normandie d’aller chercher la justice hors du duché, soit à cause des committimus au grand conseil, aux re-uêtes de l’hôtel et du palais, attribution du scei u Châtelet, privilèges des apanages et de la pairie. Que même les committimus dans l’intérieur du duché soient supprimés ou accordés seulement en matière personnelle. Qu’en résultat du droit qu’ont tous les habitants du duché de Normandie , de n’être pas obli-és de plaider ailleurs que devant les tribunaux e leur duché, on ne puisse, en aucun cas, enlever les archives de sa Chambre des comptes, ni réunir cette cour à aucune autre hors des limites • dudit duché. Qu’on puisse poursuivre devant la nation assemblée en Etats généraux tout tribunal pour I forfaiture, s’il refuse d’enregistrer et faire exécuter tous les actes revêtus des autorités com-i binées du Roi et de la nation, ou s’il se prête à ; l’exécution de ceux qui ne seraient revêtus que , d’une de ces autorités. î Que toutes lois contraires aux précédentes ré-clamations soient annulées. Les articles concernant la Constitution et les droits de la nation assemblée en Etats généraux, étant reconnus, les députés s’occuperont de l’état des finances. . Us s’occuperont de l’examen de l’administration de ce département dans toutes ses partie», pour y porter toutes les réformes dont elles seront susceptibles ; ils constateront la dette nationale avant de procéder ni consentir aucun impôt. Ils demanderont que tous impôts actuellement existants ne puissent être continués, et qu’ils soient révoqués de droit, si leur continuation n’a pas obtenu le consentement des Etats généraux, et nous autorisons en conséquence nos députés auxdits Etats à consentir la continuation des impôts, actuellement existants, pour un -temps limité, dont le terme ne pourra excéder l’expiration de l’année 1790, parce que préalablement cette continuation, consentie par les Etats généraux, sera adressée aux cours souveraines pour y être enregistrée, les Etats tenant ; qu’il ne soit délibéré sur la quotité des subsides à accorder, qu’après que la dépense de chaque département aura été irrévocablement déterminée. Que la dépense de chaque département étant réglée et fixée habituellement, s’il arrive des cas extraordinaires qui nécessitent une augmentation de dépense, les ministres seront tenus de rendre compte aux Etats généraux des motifs qui l’ont déterminée, des moyens qu’ils ont pris pour y pourvoir, et de l’emploi qu’ils en ont fait. Que les dettes du clergé soient constatées ; que s’il y en a une partie qui ait été réellement contractée pour le service de l’Etat, elle soit jointe aux dettes de la nation, mais que le clergé reste chargé des autres, et soit obligé d’en acquitter les capitaux dans un temps limité par les Etats généraux. La dette nationale étant constatée, la dépense déterminée, et les droits de la nation reconnus préalablement à tous, les députés seront alors autorisés à accorder les subsides nécessaires pour fournir aux payements des dépenses qu’exigera le service, jusqu’à six mois après le terme qui sera fixé par les Etats généraux pour la convocation de ceux qui devront les suivre, et les impôts qui seront mis en conséquence ne seront accordés ue pour ce temps , après lequel ils cesseront e droit, si lesdits Etats ne les renouvellent pas. Arrête aussi le corps de la noblesse du bailliage d’Evreux, que dans le cas où la tenue des Etats généraux serait reculée au delà du 1er janvier 1790, elle cessera de ce moment de payer aucune espèce d’impôt quelconque, sous quelque forme et dénomination qu’il puisse exister : déclarant qu’alors, en vertu de ses anciens droits, dont elle réclame l’exercice, qui n’a pu être que suspendu, elle consentira seulement l’imposition des sommes nécessaires à l’administration de son duché, pour être cette somme répartie dans une juste proportion sur les trois ordres dudit duché. L’ordre de la noblesse du bailliage d’Evreux charge ses députés de demander que tous les privilèges pécuniaires attachés aux différentes charges, offices ou commissions, soient abolis, ainsi que ceux attachés à différentes villes, bourgs ou corporations du royaume, de manière que chaque individu paye les impôts en raison de ses fonds, et les autres impôts en raison de sa profession, de son commerce ou de son industrie. Que le régime des impôts qui portent sur les consommations soit examiné, à l’effet de supprimer ceux qui seront reconnus trop généralement onéreux, de modifier et simplifier les autres, et de convertir en abonnement, autant qu’il sera possible, tous ceux qui en seront susceptibles. Que tous les privilèges des maîtres de poste 298 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage d’Évreux.[ soient anéantis, et que la permission d’exercer cet emploi soit mise à l’enchère dans les lieux fréquentés, et au rabais dans ceux qui le seront le moins, et qu’ils soient payés convenablement et comptant lorsqu’ils seront envoyés en tournée. Qu’on cherche tous les moyens possibles d’anéantir la gabelle et la ferme des aides. Qu’on examine scrupuleusement l’origine de chacun des droits de contrôle, que le régime et le tarif de ces droits soient expliqués de manière à éviter toutes contestations, et faire connaître à chacun ce qu’il doit, et que toutes les questions qui pourraient s’élever au sujet desdits droits soient décidées par les cours souveraines auxquelles elles sont attribuées. Que les loteries soient supprimées aussitôt que l’état des finances le permettra. Que l’on cherche le moyen de faire supporter aux capitalistes une imposition proportionnée à leur fortune, soit par une imposition particulière ou par une diminution graduelle de 1 p. 0/0 sur les effets royaux à chaque mutation. Administration. L’ordre de la noblesse du bailliage d’Evreux charge ses députés de demander la réforme des abus dans l’administration de la justice. La suppression des procureurs, la diminution des frais, la liberté aux plaideurs de se défendre par eux-mêmes quand ils le jugeront à propos. Qu’il n’y ait à l’avenir que deux degrés de juridiction. Que les arrondissements des bailliages et élections soient corrigés et réformés, pour les rendre plus commodes aux justiciables et obvier aux mélanges de compétence. Demander l’abolition des lettres de surséance, de sauf-conduit, et toutes autres tendantes à arrêter le cours de la justice. Demander une compétence souveraine pour les bailliages secondaires en manière de fait. Que les jugements et arrêts soient motivés. Que tous procès, excepté les affaires très-compliquées, soient jugés à l’audience ou au délibéré. Que dans le cas où il y aura lieu à juger des procès sur appointé en droit ou à mettre, le rapport soit fait publiquement. , Qu’il soit travaillé à la réformation du Gode civil, des règlements qui en sont émanés, du Gode criminel, pénal et d’instruction, par des commissaires instruits par une expérience habituelle, et choisis dans diverses classes de citoyens, notamment dans les bailliages. La suppression des intendants et de leurs subdélégués, surtout celle de leurs juridictions contentieuses. La suppression des offices des commissaires aux saisies réelles, de receveur des consignations et de tous autres offices y réunis, ou au moins la réduction de leurs droits et de leurs actions. La suppression des offices de secrétaire du Roi, des trésoriers de France, des maîtrises des eaux et forêts, des offices municipaux dans les villes ou ils ne sont pas électifs, la réduction des huissiers et sergents, celle des offices dps cours des comptes, aides et finances, l’abolition du privilège qu’elles ont de transmettre la noblesse, et ae Dusage pratiqué dans le dernier siècle et les précédents de l’accorder pour de l’argent; la restitution aux bailliages de la compétence des affaires domaniales et de celles des eaux et forêts. De prendre en considération l’abolition de la vénalité des offices, leur prix, le choix des sujets pour les exercer, l’incompatibilité de plusieurs offices unis ou désunis sur la même tête, la désunion de ces derniers, l’imcompatibilité de plusieurs parents dans les sièges inférieurs, une meilleure discipline dans les maréchaussées, leur dépendance des Etats et des bailliages, un accroissement de brigades, une police plus active et plus vigilante dans les villes et dans les campagnes. Une police et une administration plus exacte au civil et au criminel dans les hautes justices, la résidence des juges ou la suppression de cell es qui n’en seraient pas susceptibles. Que les notariats soient exercés par des sujets capables et instruits; qu’il soit pourvu à la garde de leurs minutes et à celle des greffes, et qu’il soit pris des précautions plus certaines pour faciliter aux familles la recherche de leurs titres généalogiques. Que, pour être admis aux fonctions déjugé, il faille être préparé à des exercices graduels ; qu’on n’y reçoive que des sujets qui aient une naissance et une fortune honnêtes, et qui, s’ils ne sont pas originaires Normands, aient du moins été élevés dans les tribunaux de la province. La réformation de l’édit des hypothèques de 1771, la simplification du centième denier et des autres impôts. Qu’il soit porté une nouvelle loi sur le fait des chasses, qui rende plus sacrée la propriété des riverains des forêts, et qu’elle soit exécutée sévèrement. Demander les établissements pour des écoles nationales, et des réformes dans les écoles de droit pour en rendre l’étude plus utile. Demander une loi contre l’agiotage. La réforme de celle sur l’usure, et qu’il soit licite de prêter à intérêt sans aliénation du capital, et surtout des limitations aux intérêts à fonds perdus. Demander que les Etats généraux s’occupent de l’uniformité des poids et mesures dans tout le royaume. Demander la suppression des déports, comme n’étant pas une propriété, et la sanction par la nation à la loi donnée en 1787, en faveur des non catholiques. Demander la recherche des abus et des déprédations qui se sont introduits dans les travaux publics du duché. De remédier aux abus du tirage de la milice et aux inconvénients qui résultent de rassembler toutes les paroisses dans le chef-lieu de l’élection. Qu’on emploie, autant que cela sera possible, les troupes à la confection des grandes routes. Que la direction des haras du duché soit confiée exclusivement à ses Etats, et que tous lesbiens dépendant de cette régie, ou qui en ont été distraits, leur soient rendus. Demander une loi sévère, dont l’exécution soit confiée aux juges ordinaires, qui protège efficacement le secret du service de la poste aux lettres ; qu’il soit défendu à toute personne de l’enfreindre en tout temps et en toutes circonstances. Réclamer contre l’augmentation nouvellement introduite dans la ferme de la poste aux lettres, dont le tarif n'est plus connu. Les députés seront autorisés à faire prendre aux Etats généraux en considération s’il est avantageux d’aliéner tout ou partie des domaines, non compris les forêts et les droits honorifiques, et à consentir l’aliénation de ceux qui seront < trouvés être susceptibles de cette aliénation, sous iü la réserve de faire les recherches, vérifications et examens nécessaires, relativement à ceux qui ont 299 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage d’Evreux.] été aliénés depuis moins de quarante ans ; et dans le cas où cette aliénation ne serait pas trouvée possible, MM. les députés sont chargés de demander que l’administration, ainsi que celle des forêts dans tous les cas, en soit confiée aux Etats généraux du duché. Demander un meilleur aménagement pour les forêts et les bois, tant ecclésiastiques que domaniaux. L’assemblée delà noblesse du bailliage d’Evreux, pénétrée des principes d’honneur qui dirigent toujours ses démarches et son zèle, n’a pas balancé, dans la douloureuse position des finances de l’Etat, à sacrifier des privilèges pécuniaires que des droits consacrés et la possession de plusieurs siècles pouvaient les porter à conserver; mais elle prononce avec la même franchise la résolution absolue de maintenir les droit honorifiques attachés à ses fiefs, les distinctions qui en dépendent, et autres essentielles et inhérentes à son ordre, renouvelant la demande qu’elle a faite aux précédents Etats généraux : « qu’elle soit con-(( servée et maintenue en ses honneurs, droits, « privilèges et prérogatives, tant personnels que « réels. » Que le droit de posséder les fiefs lui est essentiellement réservé; pour quoi la taxe de franc-fief, à laquelle est assujetti le non noble qui en possède, sera conservée pour marquer la différence des deux ordres. Elle recommande surtout à ses députés de s’employer avec zèle, afin d’obtenir une école à la fois nationale et militaire, dont le but soit d’inspirer à la jeune noblesse la religion, l’honneur et le respect pour la subordination, et que cette école soit soumise à la surveillance des Etats provinciaux. De demander l’amélioration des prisons et hôpitaux. Que les religieux ne puissent, à l’avenir, prononcer leurs vœux avant trente ans, et les religieuses à vingt-cinq. Que Sa Majesté soit suppliée d’ordonner la réforme d’un article du dernier règlement militaire, concernant la hiérarchie, par lequel elle se réserve la nomination de quelques emplois, qu’elle destine à une classe de gentilshommes, qui y sont désignés sous le titre de première noblesse; cette expression tend à diviser un ordre dont le titre générique de tous les individus qui le composent, est celui de gentilhomme, titre consacré par Henri IV, adopté par les princes, frères du Roi, et qui est tellement commun à tous, qu’en y admettant des distinctions, ce serait le diviser en deux classes. Elle demande aussi, et par la même raison, que le règlement du feu roi, qui fixe à l’époque de 1400 l’admission à la présentation, soit réformé, et que Sa Majesté détermine un nombre de siècles ou de générations dont on fera preuve de noblesse pour y parvenir, sauf les cas où des actions éclatantes porteraient Sa Majesté à y déroger ; elle demande aussi qu’il soit ordonné à tous les généalogistes d’admettre comme prouvés les degrés de filiation et de noblesse établis par des arrêts de maintenue et autres titres semblables. Elle demande enfin que, pour secourir la pauvre noblesse, plusieurs chapitres d’hommes et de femmes soient érigés en chapitres nobles. Que les emplois militaires continuent à être destinés aux gentilshommes, sauf le droit qu’a tout brave militaire qui se sera distingué dans les emplois subalternes, d’espérer d’être élevé au grade d’officier. I Lanoblessedu bailliage d’Evreux charge expressément ses députés aux Etats généraux d’exprimer le vœu de remplir le devoir honorable et cher à son cœur, de marcher au ban et arrière-ban, toutes les fois que la défense de la patrie l’exigera. Que le tribunal de MM. les maréchaux de France soit sanctionné aux Etats généraux, afin que rien ne puisse porter atteinte aux privilèges que le corps de la noblesse a d’être jugé par eux, comme ses juges naturels sur le point d’honneur. Que les places de MM. les lieutenants des maréchaux de France soient désormais sans finances, et qu’elles soient accordées à des gentilshommes d’un âge et d’un mérite fait pour exciter la confiance. Que la noblesse seule ait le droit exclusif de porter l’épée, droit qui lui a toujours appartenu. | Que les cahiers des Etats généraux et les ré-| ponses qui y seront faites seront imprimés, et vidimus d’icëux déposés dans les greffes des villes | et des parlements du royaume, et que copie du | présent sera déposée au greffe du bailliage prin-I cipal d’Evreux. Déclare, au surplus, la noblesse du bailliage d’Evreux, par le présent acte, mettre ses députés sous la sauvegarde de la nation, et leur donner pouvoir de proposer, remontrer, aviser, con-! sentir tout ce qui leur paraîtra le plus propre à la ! réforme des abus, à l’établissement d’un ordre fixe et durable dans toutes les parties de l’administration, et à la prospérité du royaume. Déclare, en outre, s’en rapporter à ce que ses députés estimeront à leur âme et conscience devoir être statué et décidé pour le bien commun sur tous les articles du présent cahier, à l’exception de ceux qui concernent la constitution géné-! raie, la constitution particulière du duché, la liberté des personnes et des biens, l’examen et discussion du besoin de l’impôt et de son emploi, avant de les consentir et les régler. Sur lesquels articles son intention est de limiter tellement le pouvoir de ses députés, qu’ils ne puissent nullement s’en écarter ; leur prescrivant de ne passer à aucune délibération postériéure quelconque, sans avoir obtenu sur tous un consentement plein, authentique, sanctionné par Sa Majesté, et enregistré dans les cours souveraines. En présence de la noblesse assemblée, présidée par M. le grand bailli, qui a signé avec MM. les commissaires, le 25 mars 1789. Signé de MM. les commissaires, de M. le président, et de MM. les secrétaires. La présente copie collationnée sur l’original déposé au greffe du bailliage d’Evreux. Signé le comte de Gourcy, le marquis de la Pallu, secrétaires de l’assemblée. Discours de M. le grand bailli d’Evreux , lors de la prestation de serment de MM. les députés des trois ordres. Messieurs, j’ai eu l’honneur d’exprimer à l’assemblée générale les sentiments dont je suis pénétré ; c’est à vous, citoyens chargés de la confiance générale, à qui j’adresse la parole. Voici le plus beau moment de votre vie, mais c’est aussi le plus beau de la nôtre, par la tranquillité où nous sommes sur nos intérêts. Ils vous sont confiés, ainsi que les droits de la nation. Faites-les valoir ces droits, Messieurs, raffermissez dans sa constitution cette nation si florissante. Je vous le recommande au nom de toute l’as- 300 [Etats gên. 1789. Cahiors.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage d’Êvreux. semblée, dont le vœu est exprimé formellement dans les cahiers qui vous seront remis. Soyez inébranlables, Messieurs, sur les formes constitutionnelles ; ce sont elles seules qui en assureront solidement les bases. Vous ramènerez à la conviction de ce grand principe, par votre courage, par votre fermeté, par la solidité et la clarté de vos raisons, ceux de nos députés qui s’en seraient écartés. Je dis nos députés, Messieurs, parce que tous les députés aux Etats généraux sont les nôtres. Je le répète, vous êtes tous collectivement les députés delà nation entière. Les trois ordres distinctifs, quoique séparés pour avoir plus de force, ne feront plus qu’un même esprit, qu’une seule voix pour le bien général. Chaque ordre sentira combien il serait dangereux d’attaquer les propriétés; que nécessairement il en résulterait un désordre universel, mais nous sommes tous tranquilles; elles sont de droit sous la sauvegarde de la nation, et par conséquent inattaquables. Je n’entrerai point dans le détail de ces propriétés; il en est d’inhérentes aux rangs, d’inhérentes à la personne, et vous les couvrirez toutes, Messieurs, de votre égide nationale. Je le répète, le serment que vous allez prononcer n’est que pour la forme ; chacun de nous retourne tranquille dans ses foyers, pénétré des mêmes sentiments que l’ordre de la noblesse a déjà exprimés dans ses délibérations. Tousles vœux dictés par le même esprit d’union, de concorde, et fondés sur la loi inviolable de la justice, se confondront et concourront ensemble au bonheur commun et général, qui peut seul faire celui de notre auguste monarque, que nous proclamons tous avec transport le véritable ami de ses sujets. CAHIER Les délibérations de l'ordre du tiers-état, arrêtées à l'assemblée générale du bailliage d'Evreux , le 23 mars 1789, remis à MM. Buschey de Noes, conseiller au bailliage de Bernay , Le Maréchal , négociant à Rugles, bailliage de Breteüil ; Beaupérey, propriétaire à la Chapelle , près Gacé , bailliage d'urbec ; Buzot, avocat à Evreux , bailliage d'Evreux; élus députés, pour être portés aux Etats généraux prochains (1). VOEU DU TIERS-ETAT. Art. 1er Que le tiers-état soit représenté aux Etats généraux par des députés pris dans son ordre. Art. 2. Que le nombre de ses députés soit égal au nombre réuni des deux autres ordres. Art. 3. Que les ordres conservent la liberté de s’assembler et de délibérer séparément ou en commun. Art. 4. Que préalablement à toute délibération, il soit accordé une charte fondamentale qui assure à la France une bonne et solide constitution, et par laquelle il sera reconnu et statué que la Îiuissance législative réside essentiellement dans e concours du consentement de la nation assemblée et de l’autorité du Roi. Art. 5. Que les Etats généraux tiennent, sui-(1) Nous publions ce cahier d’après un imprimé de la Bibliothèque du Sénat. vant une forme invariablement arrêtée, à des époques fixes et périodiques. Art. 6. Qu’il soit proposé d’établir des Etats S provinciaux dans tout le royaume ; que ceux de : la Normandie, seulement suspendus, reprennent leur activité; que leur organisation soit sanctionnée par les Etats généraux. Art. 7. Qu’il soit établi des commissions intermédiaires pour chacun des Etats provinciaux; que ces commissions soient assemblées pendant toute l’année dans l’intervalle d’une tenue des Etats provinciaux à l’autre ; que l’organisation de ces Etats provinciaux et commissions intermédiaires soient les mêmes que celles des Etats généraux. Art. 8. Qu’il ne soit porté aucune atteinte, sous quelque prétexte que ce soit, à la liberté individuelle des citoyens, soit par lettres de cachet, ordres de gouverneurs et commandants de provinces, soit par tous autres actes du pouvoir arbitraire. Art. 9. Que la liberté de la presse soit accordée, tout manuscrit devant être signé de l’auteur, et l’imprimeur garant de sa signature. Art. 10. Que les ministres et autres dépositaires du pouvoir exécutif soient responsables à jamais de toute malversation et abus d’autorité; qu’ils soient poursuivis à la requête des procureurs généraux des cours souveraines, ou sur la dénonciation des procureurs-syndics des Etats provinciaux, et même sur celle des parties ou à leur requête. Art. 11. Que les non catholiques jouissent indistinctement de tous les droits de citoyen, et que leur Etat civil soit assuré, garanti et sanctionné par les Etats généraux. Art. 12. Qu’il soit reconnu et statué, comme principe constitutionnel, que tous impôts doivent être et seront supportés par les trois ordres indistinctement ; qu’en conséquence tous les impôts auxquels les trois ordres ne contribuent pas également, tels que vingtièmes, taille, accessoires et autres, soient supprimés, et tous privilèges pécuniaires et inutiles éteints et anéantis. Art. 13. Qu’il soit aussi reconnu et statué comme principe constitutionnel et fondamental, qu’il ne peut être et sera établi aucun impôt, ni fait aucun emprunt, ni anticipation, sans le consentement libre et unanime des trois ordres. Art. 14. Qu’avant l’octroi d’aucun impôt, les députés constatent la dette du gouvernement qui sera déclarée nationale ; qu’ils vérifient aussi les dépenses ordinaires et extraordinaires de chaque département, dans lequel ils établiront l’ordre et l’économie la plus exacte. Art. 15. Que les dons, brevets et pensions soient soumis à l’examen le plus rigoureux pour réduire ceux qui, étant excessifs, ont néanmoins une cause légitime, et supprimer ceux qui n’en ont pas. Art. 16. Que tous les droits et impôts qui se perçoivent actuellement soient supprimés , et qu’il en soit octroyé de nouveaux, suivant les besoins connus de l’Etat. Art. 17. Que les gabelles, droits d’aides, d’inspecteurs aux boucheries, dons gratuits, droits < réservés et autres y réunis, ainsi que les droits ' de marque sur les cuirs, demeurent irrévocable-j ment éteints et anéantis, sans que, sous aucun { prétexte que ce soit, ils puissent être jamais rétablis suivant le régime actuel. Art. 18. Et comme il est nécessaire de remplacer ces impôts par d’autres d’une perception plus facile et moins onéreuse, il soit proposé pour les