[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [2 novembre 1790. J 241 charge, en payant à l’instant tous les frais de fabrication et d’expertises. Art. 15. Lesdits commissaires veilleront à ce que le montant de ladite délivrance soit déposé dans la chambre du Trésor. TITRE V. Police intérieure. Chapitre Rr. Des bâtiments. Art. 1er. Les hôtels des monnaies seront entretenus, aux frais de la nation, de toutes grosses réparations, ainsi que de tout ce qui est nécessaire à la fabrication, à l’exception des fourneaux, creusets, ustensiles de fonte, charbon, etc. Art. 2. L’entretien des ateliers sera également supporté par la nation. Art. 3. Les dépenses de chaque hôtel des monnaies seront réparties entre les départements, dans l’arrondissement desquels se trouveront lesdits hôtels. Art. 4. Toutes les réparations locatives seront faites par ceux qui auront le logement dans lesdits hôtels. Art. 5. Logeront dans l’hôtel des monnaies : 1- Le monétaire et un commis; 2° Le commissaire du roi; 3° Le commis au change, trésorier; 4* Le secrétaire, garde des archives; 5° Le graveur; 6° Les concierges gardes-portes; 7* Ceux des ouvriers dont le travail exige la présence habituelle. Art. 8. Le directeur général et les commissaires généraux des monnaies, ainsi que le secrétaire général et les commis, l’inspecteur général des essais, et les professeurs de docimasie, auront leur logement dans l’hôtel des monnaies de Paris. Chapitre II. De la sûreté. Art. 1er. Les portes de l’atelier du monnayage auront chacune trois serrures, dont les clefs seront confiées, l’une au président du département, la seconde au commissaire de l’hôtel, et la troisième au commis au change, trésorier. Les clefs de la chambre du trésor seront confiées au monétaire, au commissaire et au trésorier. Art. 2. Les clefs des portes de l’hôtel seront déposées tous les soirs entre les mains du monétaire. Art. 3. Il y aura une seutinelle à chaque porte extérieure de l’hôtel, dont la consigne sera de ne rien laisser sortir sans un laissez-passer par écrit du monétaire , dont la signature sera reconnue par le garde-porte, auquel sera remis ledit laissez-passer. Art. 4. Pourra le monétaire, quand bon lui semblera, réquerir du commissaire du roi la visite des ouvriers et de leurs chambres. Art. 5. Le commissaire veillera à l'entretien de l’hôtel, et prendra les précautions nécessaires pour prévenir les accidents du feu. Art. 6. II y aura dans tous les hôtels des monnaies un dépôt de pompes, de sceaux, et de tout ce qui est nécessaire pour le cas d’incendie. lr8 Série. T. XX. TITRE VI. Délits et peines. Art. 1er. L’ouvrier désobéissant sera condamné en 24 heures de prison, et remplacé pendant ce temps par un autre ouvrier à ses frais. Art. 2. L’ouvrier insolent sera condamné par le commissaire du roi, suivant l’exigence des cas, de trois à huit jours de prison, et renvoyé si le monétaire le juge à propos. Art. 3. L’ouvrier ou le préposé qui frapperait ou menacerait de frapper le monétaire ou le commissaire du roi, sera remis entre les mains de la justice ordinaire, pour être condamné au pilori, à la prison, et être déclaré incapable de travailler dans aucun hôtel des monnaies, à l’effet de quoi, son jugement ainsi que son signalement seront envoyés dans tous lesdits hôtels. Art. 4. Les vols commis dans les hôtels des monnaies seront jugés par le juge ordinaire, et ceux qui en seront convaincus, condamnés, à savoir: pour le vol de hardes et d’effets, sans effraction, aux galères pour trois années ; et s’il y a effraction, pour six années. A l’égard des vols de matières de quelque peu de conséquence qu’ils soient, ils seront punis des galères à perpétuité, ou de toute autre peine qui leur sera substituée, quelle que soit la personne qui ait commis le vol. Art. 5. Les faux-monnayeurs, leurs complices et les distributeurs de fausses monnaies seront condamnés aux galères à perpétuité. Art. 6. Tous autres crimes qui pourront être commis dans l’enceinte de l’hôtel des monnaies, seront punis selon le code pénal général. NOTES POUR L’INTELLIGENCE DU TEXTE. Note sur la refonte de 1785. (A.) « Il faut donner une fois la solution du pro-« blême de la refonte des louis ordonnée par la « déclaration du 30 octobre 1785, afin que le puce blic cesse d’être trompé par des écrits prélen-« dus savants sur une opération qui a été plus « méditée qu’on ne l’imagine. » préface. Depuis longtemps, on cherchait à prouver à l’administration des finances que le tarif monétaire évaluait trop bas le prix de l’or. Le 11 janvier 1778, on lui présenta un mémoire qui attribuait en partie l’élévation du prix de l’or dans le commerce, à la consommation abusive de ce métal en bijoux, bronzes, dorures. Ce mémoire, qui ne pouvait être attribué qu’à un maître de l’art, annonçait qu’il y avait du bénéfice à fondre des louis; et proposait une refonte très avantageuse au roi, et même aux hôtels des monnaies : mais aussi très onéreuse au public. Un second mémoire parut plusieurs années après, beaucoup moins savant que l’autre, mais plus inquiétant. On y dénonçait l’exportation de nos pièces d’or, qu’il était impossible de nier, et leur fonte, qu’on rendait sensible par des calculs assez précis qui prouvaient qu'il y avait un très grand avantage à mettre des louis au creuset, plutôt que d’acheter des matières neuves. 46 242 {Assemblée nationale.} ARCHIVES PARJ H était si vrai que l’or était prodigieusement rare et conséquemment excessivement cher, que l'administration ayant été contrainte d’en faire venir de Hollande pour subvenir au service de la cour, les louis étaient revenus à 27 livres pièce. Alors, le gouvernement se détermina à consulter les personnes qu’il croyait les plus instruites; et d’abord M. D... qui, ayant lu dans les mémoires dont nous venons de parler que la cause de cette élévation du prix de l’or provenait en partie de la guerre, ne vit d’autre remède que d’augmenter la valeur des espèces, et de les diminuer après la guerre ; conseil d’autant plus absurde que l’argent n’ayant éprouvé aucune variation, il était inutile d’y toucher : conseil d'autant plus détestable qu’il nous replongeait dans les crises désastreuses qui ont déshonoré les règnes de Philippe-le-Bel et de Valois. Il ne fallait qu’une légère connaissance de cette partie de notre histoire pour rejeter une pareille proposition : aussi le ministre des linances chercha-t-il d’autres conseillers; il s’adressa à M. de Forbonnois. Ce magistrat fit des expériences pour constater la vérité de certains faits énoncés dans ces mémoires. Ces expériences lui montrèrent qu’il y avait un bénéfice à fondre les louis. Mais: 1Q M.de Forbonnois se trompa en ne portant ce bénéfice qu’à 4 livres 1 sol 9 deniers, tandis qu’il était réellement de 15 livres 12 sols, et son erreur provint de précipitation. Il n’avait fait son expérience que sur un marc ; en conséquence, il avait soustrait du bénéfice la totalité des frais de cette expérience, sans songer que s’il eût opéré sur cent marcs et plus il n’aurait employé qu’un procédé d’essai, de même que pour un marc, et qu’il n’eût pas quadruplé les frais de fonte et de manipulation ; en sorte qu’on pouvait réellement faire, à raison de 5 sols le marc, ce que M. de Forbonnois évaluait 3 livres. Il avait donc surchargé les frais et diminué Je bénéfice de 2 livres 15 sols. 2° M. de Forbonnois commit une seconde erreur en déduisant 8 livres du bénéfice sous prétexte d’un bénéfice de marchand qui était absolument étranger au bénéfice de la fonte. M. de Forbonnois proposait en résultat de rendre l’or marchand sans aucune fixation, c’est-à-dire qu’il supprimait la monnaie d’or. Il disait aussi très affirmativement qu’il serait imprudent de changer de valeur la proportion entre l’or et l’argent : mais si l’on rendait l’or marchand sans aucune fixation, la question de la proportion entre l’or et l'argent devenait très oiseuse. Cette réponse ne satisfaisant pas encore le ministre, il s’adressa à M.Madinier comme ayant médité sur cette matière; on lui remit et les mémoires et les réponses : l’avis de M. D... lui parut si absurde qu’il ne se donna pas la peine de le réfuter. Il s’attacha plus particulièrement à celui de M. de Forbonnois, et prouva d’abord non seulement l'utilité, mais même la nécessité de la monnaie d’or dans un royaume aussi étendu que la France. Il chercha ensuite la véritable cause du haut prix de ce métal, et il conclut, après avoir comparé les époques des différentes guerres, que l’état de guerre pouvait bien causer par intervalle, une rareté de numéraire, et même celle de l’or par préférence; mais que bientôt la balance se rétablissait. Il attribua l’augmentation du prix de J’or à celle de près d’un quinzième faite au prix de ce métal par l’Espagne qui fournit d’or et d’argent nos manufactures et nos hôtels des monnaies. La France n’ayant point élevé le prix de ÎMENTA1RES. [2 novembre 1790.} son or, l’Espagne, qui doit à }a France, payait en argent plutôt qti’en or, parce qu’il y avait un seizième de bénéfice dans cette manière de s’acquitter, d’où il résultait invinciblement que l’argent devenant plus commun en France, et For plus rare, celui-ci devait nécessairement devenir plus cher. Et comme on ne peut pas forcer l’Espagne à baisser le prix de son or, et, d’un autre côté, le prix de l’or étant plus haut qu’en France non seulement en Portugal, {pais eu Angleterre et eu Hollande, centres principaux et les plus riches de no3 relations de commerce, M. Madinier en concluait qu’il était indispensable d’augmenter la valeur de l’or en France pour la rapprocher de celle de ces pays. Etablissant ensuite un principe d’une grande vérité, dont il n’a pas tiré une conséquence assez lumineuse, il soutint que }a monnaie d’argent était chez nous la véritable représentation de la valeur des choses, que la monnaie d’or n’était qu’un accessoire dans notre numéraire, et il en concluait qu’il était indifférent de donner un peu plus ou un peu moins de valeur à ce dernier métal. Il proposa pour résultat, relativement g nos espèces d’or, deux moyens de rétablir la balance, Le premier consistait à porter les louis d’or a 25 livres, en faisant bénéficier le roi de }Q gpls par louis, moyennant un contrôle sur chaque louis. Le second était la refonte de nqs espèces d’or, pour les fabriquer pu à up titre plus bas ou à un poids plus faible, en faisant partager entre le public et le roi le bénéfice de l'augmentation de valeur qui résulterait de cette refonte, Ainsi, en nous reportant à l’année 1785, nous trouverons que tel était l’état des choses ; que d’un côté l’or était hors de prix, que Fou fondait les louis, que les Anglais nous les achetaient à 4 et 6 sols de bénéfice. D’un autre côté, les finances étaient dans le plus grand délabrement; l’effrayante masse de l’impôt était l’espérance de pouvoir en établir de nouveaux, ou de donner de l’extension aux anciens, la voje des emprunts était impro-posable; l’agiotage absorbait toutes les ressources; il n’en restait que dans les réformes et l’extirpation des abus : mais le temps n’avait pas encore mûri les idées de ce vaste système. Dans ces circonstances, on présente au ministre aux abois un expédient duquel il pouvait espérer 35 à 36 millions. Le ministre le saisit, le présente au roi sous l’aspect séduisant d’un avantage pour les Français, d’un bénéfice pour l’Etat, d’un moyen de satisfaire aux besoins du moment, d’empêcher l'exportation ou la fonte des espèces et par suite la rareté du numéraire, Le projet est approuvé, la déclaration rédigée, elle devait paraître au mois de juillet : mais on avait proposé successivement différents mpcjes d’empreinte, le roi voulait en voir l’effet ; ces expériences absorbèrent beaucoup de temps, et la déclaration ne fut signée que le 30 octobre, Je sais qu’on a publié, et qu’il y a lieu de croire, que des personnes qui avaient le secret de cette refonte, ont profité de cette connaissance pour accaparer beaucoup de louis. Eu effet, dans le Languedoc, en Alsace, en Lorraine, dans les trois Evêchés, etc., çfes juifs et d’autres mêmes que des circoncis achetaient des louis à 2 et 4 sols d’agio ; on conçoit combien a dû être considérable le bénéfice de ces accaparements surtout avec l'attention de n’acbeter que des louis les plus pesants. On a dit aussi qu un grand bénéfice avait été facile à celui qui tenait à sa disposition les caisses publiques et surtout [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (2 novembre 1790.] �43 celles à papier ; rien n’est moins impossible ; mais ce nfest pas là la question. Ap reste, cette belle espérance de 35 à 36 mil-lions se vit réduire très sensiblement ion n’avait pas calculé sur pne soustractiqn ; on n’avait pas pensé qu’il fallait décider sur quel pied les directeurs compteraient du titre commun de ces louis ; on jgporait légalement ce titre; on n’avait pas encore fait d’essais authentiques pour le constater, et la déclaration était déjà à l’enregistrement, lorsqu’on sentit Jk nécessité de réparer cet oubli. Le ministre crut devoir charger de cette commission le premier président et le procureur général de la cour des monnaies, en leurs qualités de commissaires du conseil d’Etat en l’hôtel des monnaies de Paris ; il leur fit expédier les lettres pour y procéder : le premier président avait des engagements qui l’appelaient à sa terre de Tan-lay; il partit. Ce départ qui retardait des opéra-fious très urgentes, détermina le ministre (1) à charger le procureur général seul de cette commission ; il s’en acquitta, d’après les pièces que j’ai sous les yeux, avec tout le zèle et l’intelli-gence qu’on devait attendre de lui; et comme il a été constaté par des expériences auxquelles il a fait procéder, ape la masse commune de nos anciens louis n était qu’au titre de 21 karats 17 treute-fieuxièmes forts, le ministre en prévint aussitôt lès directeurs eq leur recommandant d’ajoRtqr 4 trente-deuxièmes d’or lin par marc aux anciens loqis, afin de les porter au titre voulu par la loi ej. leur annonça qu’incessam-ment if y aurait une loi rendue à cet égard : en çjj:ei, des lettrés patentes ont été expédiées qui ont fixé à 21 karats 17 trente-deuxièmes le titre dont feraient comptables les directeurs, et ces lettres patentes ont été adressées à la chambre des comptes, parce que c’est à ce tribunal que les directeurs font vérifier leur comptabilité. On conçoit qup si le miuistfe eût fait procéder à des expériences solennelles du titre des louis avant la déclaration, il eût donné un vaste champ Û la pins noble discussion ; qàr ce n’était pas un des motifs les moins importants de cette refonte que la dignité nationale, que la nécessité de la restitution du titre ; ce motif seul eût justifié cette opération. Telle est très littéralement l’histoire de cette fameuse refonte, l’histoire connue par M. Des Retours; refonte approuvée, surveillée par la cour des monnaies pendant dix-huit mois; refonte contre laquelle on n’a rien dit pendant cette période, et contre laquelle M. Des Rptours et la cour des monnaies ne se sont élevés avec le plus indécent acharnement qu’après ie renvoi ae M. de Galonné. ffote sur la proportion. (fi.) <- Dr, il est impossible de trouver dans l’or « et dans le cuivre les mêmes rapports que dans « l’argent. C'est cette confusion purement aptifi-« cielle qui a introduit l'étude de la proportion « entre l'or et l’argent, p Rien n’est plus simple que théorie de la proportion entre l’or et l’argent; beaucoup d’auteurs l’ont enseignée ; et parmi eux Graumann , directeur général des monnaies de Prusse, l’a (dans le quatrième lettre de son recueil) (2) trai-(1) Quand je dis le ministre, je sous-entends au nom du rQi. (2) Cette lettre a été traduite en français en 1788. tée avec beaucoup de simplicité et de clarté. C’est up pur charlatanisme que l’apparefl avec lequel nos demi-savants la présentent comme un mystère scientifique; et l’on est trop bon de les en croire, ou de présumer, sur leur parole, qu’elle exige des méditations profondes. Si l’on entendait, par la proportion entre l’or et l’argent, la différence de chacun de ces métaux résultant de la mpsure du travail de la nature pour l’élaboration de chacun d’eux, ce serait véritablement alors uqe étude profonde, et peut-être inaccessible; car il faudrait méditer sur les phénomènes de la physique souterraine; il faudrait consulter la théorie aes alchimistes, aussi bien que celle des naturalistes : mais la proportion entre l’or et l’argent dont parlent nos docteurs, n’est autre chose que le résultat de la différence qui existe entre le prix de ces métaux. Or, lorsque ces prix sont connus, une règle de trois, cette réglé qu’un écolier de huit ans fait en ne jouant, vous donne ce fameux résultat. Le prix de l’or et de l’argent dépend de leur valeur, et cette valeur de leur rareté et de leur besoin. Quand Montesquieu a dit que l’or était commun lorsque l’argent était rare, et qu’il était rare lorsque l’argent était commun (1), il a avancé une proposition entièrement fausse ; et Graumann a eu tort de citer cet adage comme une règle générale. Les circonstances dans lesquelles nous nous trouvons prouvent assez que l’argent peut être rare sans que l’or' soit commun. On pourrait relever beaucoup d’autres erreurs de cette nature dans les auteurs qui ont traité cette matière ; mais je ne dois donner ici que des éléments qu’expliquera facilement le professeur lp plus ordinaire et que comprendront non moins facile— ment les disciples les plus médiocrement attentifs. Le prix de l’or et de l’argent dépend de causes très simples, les unes naturelles, les autres spéculatives. Lorsque les mines d’or et d’argent ne sont pas abondantes, il y a moins d’or et d’argent; alors aussi l’or et l’argent deviennent plus chers par la même raison que, dans une année stérile, le blé, le vin augmentent de prix. Lorsque les mines d’or et d’argent sont profondes, que les frais d’extraction et de purification sont ajoutés au prix de la valeur ordinaire, alors encore l’or et l’argent deviennent plus chers. Voilà des causes naturelles de l’élévation du prix de ces métaux. D’autres causes, en sens contraire, seront les causes naturelles du bassement de ces prix. Lorsque l’or et l’argent se trouvent dans les mains de peu de personnes et que ces personnes s’entendent pour profiter de cette circonstance, le prix du métal dont on ne sait pas se passer pour faire de la monnaie, s’élève au gré de leur avidité; alors les ruses des spéculateurs déjouent la simplicité des causes naturelles, et l’or et l’argent n’ont plus de prix fixe et déterminé. Ainsi, les possesseurs des mines sont, en premier ordre, maîtres du prix des métaux ; ainsi les nations riches en or et en argent sont, en second ordre, les maîtres de ce prix. Qu’en résulte-t-il ? C’est que le possesseur des mines fixera à son gré ie prix de ses métaux; c’est que le riche propriétaire commencera par baisser le prix du métal qu’il voudra accaparer ; et spécialement de l’argent, comme le métal qui est ie plus abondant, etqu’ensuite, par des opérait) Esprit des lois, liv. II, ehap. IX. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 12 novembre 1790.1 244 (Assemblée nationale.] tions commerciales, il s’emparera de votre or, et deviendra aiDsi, non seulement maître du prix des métaux, mais encore à un certain point de votre industrie, de votre commerce, de votre agriculture. Et si à ces causes d’une spéculation commerciale, nous ajoutons celles des spéculations politiques, alors une nation privée des métaux auxquels on attribue le privilège exclusif de devenir numéraire, appauvrie dans sa richesse représentative, en même temps qu’elle le sera dans sa richesse réelle, qui est la production territoriale, cette nation tombant dans le découragement, puis dans l’engourdissement qui en est l’effet, se livrant ensuite à l’impatience qui succédera à ces deux crises, regrettera le joug du despotisme; elle l’appellera, elle le portera en triomphe sur le pavois national; et comme tout changement de cette nature ne s’opère que par de violentes secousses, la masse ébranlée trop de fois dans toutes ses parties, s’écroulera. On ne trouve plus ni Athènes, ni Carthage, ni Rome. Puisque le prix de l’or et de l’argent dépend de causes naturelles et spéculatives, il s’agit d’examiner si les causes spéculatives sont de nature à diminuer l’effet des causes naturelles. Et sur cela il n’y a pas de doute ; car celui qui a autant d’or et d’argent qu’un propriétaire en peut extraire de ses mines, est nécessairement plus riche que lui ; car ce qu’il possède doit lui rapporter un intérêt, tandis qu’il en coûte au propriétaire pour extraire. C’est ainsi que l’accapareur d’or fera la loi, même au propriétaire des mines, comme l’accapareur des blés fait la loi au cultivateur. Mais pour pouvoir fixer le prix de l’or et de l’argent suivant son caprice, il faut avoir plus de ces métaux que toutes les autres nations ; et lorsqu’on n’est pas plus riche, ou même lorsqu’on est moins riche en métaux, lorsqu’on est obligé d’en acheter, il faut subir la loi ; et c’est alors qu’il faut céder à ce qu’on appelle le prix du commerce. Alors encore, on est obligé de prendre ce prix pour guide des mesures de titre, de poids et de valeur des espèces monétaires. Ces vérités sont sensibles, et nous en devons recevoir cette leçon : — Nous aurons toujours le temps de faire notre règle de trois pour savoir quelle est la proportion entre le prix de l'or et celui de l'argent , nous aurons même le temps de calculer les effets du change et de l'agio. Commençons , puisque nous n'avons pas la prépondérance de la richesse métallique, commençons par payer ces métaux au prix du commerce ; réglons par lui nos signes monétaires ; donnons ensuite à notre agriculture et à notre industrie toute l'activité dont elles sont susceptibles , afin de devenir riches en or et en argent ; et lorsque nous serons dans cet état de prospérité, lorsque nous pourrons combattre avec des milliards d’ or et d'argent contre les mines du Potosi, nous dirons , à plus juste titre , que ce mauvais calculateur dont on nous a distribué et vanté la pitoyable production : l'or se vend dans LE COMMERCe’828 LIV. 12 S. QUE L’OR NE SOIT PLUS VENDU QUE 780 LIV. 17 S. 4 D. (1); l’argent SE VEND 57 LIVRES ; QU’lL NE SOIT VENDU QUE 53 LIV. 16 S. 11 D. Mais, en attendant, gardons-nous de croire qu'avec un décret , nous forcerons l'Espagne à nous donner ses piastres à 48 liv. 1 s. 6 d. (2), (1) Essai sur la proportion de l'or et de l'argent, pa* go 17. (2) C’est le résultat de la Doctrine présentée en hommage à l’Assemblée nationale. au lieu de 53 liv. 5 s., que nous sommes obligés de les payer. Cette note est bien longue, je dirai cependant encore en me résumant, qu’un régime monétaire et de bonnes monnaies doivent être l’objet essentiel de notre travail actuel ; que la doctrine de la proportion n’est qu’une portion de la doctrine monélaire; et comme les procédés pratiques des données théoriques dépendent des circonstances, et non du caprice, marchons à pas lents sur ces rochers escarpés, échappons aux précipices, lorsque nous serons en plaine, et qu’il n’y aura plus de danger, nous ferons des pas de géant. Autorités relatives au commerce exclusif des métaux précieux. N. B. — La note C comprenant deux tableaux se trouve à la fin, p. 247 et 248. (D.) A supposer qu’une administration de ce genre (vente exclusive de l’or et de l’argent) attribuée à la nation, déjà adoptée par plusieurs gouvernements. Je vais citer quelques passages qui appuient celte vérité, et d’abord Bouteroue dit : « Et même autrefois en beaucoup d’endroits, pour empêcher ces abus, il n’y avait que le prince qui pût les acheter en masse et en lingots, et les revendre. Gela se pratiquait chez les Romains ; on les a quelquefois imités en France, et quelques princes d’Allemagne, qui ont des mines, l’observent encore avec beaucoup d’utilité. » (Bouteroue, Recherches, etc. Introduction, p. 5.) Cernemus ne quis absque prœcepto viri illustris comitis sacrarum largitionum coquendum aurum sumat. (L. uni. Cod. de auri pub. profet.) Quo facit constituatur ut metalla potiùs fisco , quam privatis vendantur. (L. 1 , Cod. de métal.) Wolfgand, qui est de cet avis, dit : Sicut hodiè principes Germaniæ in ditionibus suis , quœ metalla proferum, emptiones metallorum sibi reser-varunt. (Wolfgand. n. 152.) Bornitius est aussi expressif : Tutissima sanè via IN REPUBLICA ESSE SOLET, cùm princeps jure regali emptionem auri aut argenti sibi vindicat , et cum privatis œquo pretio metalla commutât. (Cap. 6, fol. 87.) Si je consulte nos ordonnances, j’y lis : « Ordonnons que nul n’achète dorénavant, or, argent, ni billon, fors de ceux qui seront établis de par nous. » Ordonnances de 1294, de 1332 et 1346. Dans les anciens règlements d’orfèvrerie, on trouve ce passage : Prosci facto sui ministerii si opus fueri (liest materiœ argenti) eisdem auri fabris per ordinationem generalium monetarum noslrarum prout decebit, providebit. (Règlement pour les orfèvres du 10 janvier 1421). Enfin, Leblanc (sur la tin du règne de Philippe le Hardi), parlant d’un avis qui fut donné à ce prince, dit : « Ceux qui connaissent l’importance de cette matière dans le gouvernement de l’Etat, demeurent d’accord qu’il n’y a guères de règlement plus important, et qui mérite plus d’être observé que celui-là. » Voici ce règlement : Et serait grand profit au Peuple, it grand honneur au Roi, que nul N’OZAgT OUVRER FORS ARGENT, SIGNÉ DU SAIN LE Roy. Note relative aux lettres patentes qui fixent les anciens louis d 21 karats 17/32 1/2. « Arrêt que les Directeurs sont obligés d’éluder d’une manière préjudiciable à la chose publique 245 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [2 novembre 1 790. J s’ils veulent se mettre à couvert des pertes auxquelles ils sont inévitablement exposés par le gouvernement. » Au mois de juillet de l’année 1788 (tandis que l'on procédait à la vérification des anciennes espèces d’or, pour découvrir s’il était vrai que les anciens louis n’étaient qu’à 21 karats 17/32 forts, comme l’avaient annoncé les expériences faites sur la fin de l’année 1785), on voulait trouver ces expériences de 1785 fautives; en conséquence on engagea MM. les commissaires à exiger des essayeurs une précision extrême, en les forçant d’étendre leurs calculs jusqu’à un 1/2 trente-deuxième près : c’est-à-dire à la 128e partie de pesanteur d’un grain d’orge. Exiger un poids de la 128* partie d’un grain d’orge, pour une expérience qui ne donne que des résultats d’une approximation plus que douteuse, c’est exiger une impossibilité, une absurdité : l’exiger pour une opération où 12 grains doivent donner le juste résultat pour 100,000 marcs, c’est y ajouter l’oubli de tout principe de justice et de raison ; c’est affi - cher l’ignorance ou la mauvaise foi. Eh bien ! cette absurdité a été exigée par M. Thevenin, premier président de la cour des monnaies, consentie par son confrère, le président Bouffret, et appuyée par MM. Boutin, Fargès et Delessart'(l), cinq des neuf commissaires nommés pour assister à ces expériences; et ces cinq commissaires ont fait pencher la balance en faveur de la proposition. Toutefois, en dépit de l’astuce et de la perversité, la vérité a triomphé ; et il a été démontré que la masse des anciens louis, combinée d’après la possibilité des fabrications de toutes les monnaies, ne contenait que 21 karats 17/32 forts \ j’ai la preuve qu’ils n’étaient pas à 17/32 1/2 (2). Au reste, il était imposible que des masses de louis portées aux hôtels des monnaies eussent cette proportion vétilleuse ; de plus, il pouvait arriver que la très grande masse de louis étant fondue, ceux qui resteraient se trouvassent rigoureusement au titre de 21 karats 17/32. Cette réflexion aurait dû frapper les faiseurs de lois. Cependant, M.Des Rotours, pour critiquer de nouveau les expériences de 1785, a fabriqué les lettres patentes qui ordonnent que les directeurs recevront les louis à 1/2 trente-deuxième de fin au-dessus du titre prescrit par la loi de 1785. Or, qu’est-il arrivé? Que le directeur de la monnaie de Paris a perpétuellement trouvé ses fontes au-dessous du titre, quoiqu’il eût constamment ajouté quatre trente-deuxièmes de fin de marc à ses fontes. Qu’est-il encore arrivé ? Que ce directeur en a porté ses réclamations au comité des monnaies, et a dit que le demi-trente-deuxième valant 11 sols 6 deniers par marc, et la loi ne lui accordant que 9 sols pour ses frais et peines, il lui en coûtait 1 sol 6 deniers par marc, c’est-à-dire 15 à 18 livres par fonte et beaucoup de soins. Qu’est-il encore arrivé ? Que le savant comité lui a répondu que, s’il ajoutait plus de fin dans ses fontes, elles seraient au titre. Sans doute; mais c’est ce plus ajouté, dont on ne lui tiendra pas compte qui fait sa perte. L’honnête procédé du comité des monnaies ressemble exactement à celui-ci : — J’achète un pain de beurre d’une livre pour vingt sols ; je le fais peser, il ne contient que trois quarterons : je l’observe au marchand (1) MM. Boutin, Fargès et Delessart, sont les commis" saires du comité des monnaies actuel. (2) Car la comparaison ne donne que 21 carats 17 trente-deuxièmes 3/7. qui, au lieu de me rendre un quarteron de beurre, me répond; —Achetez encore une demi-livre, et vous aurez, même au delà de ce qui vous faudra. — Fort bien, mais en aurai-je moins payé mes trois quarterons 20 sols au lieu de 15 sols? Que doit-il enfin arriver à tous les directeurs des monnaies? C’est qu’attrapés une ou deux fois dans leurs fontes, ils ne s’exposent plus à perdre ni leur temps ni leur argent, et qu’ils envoient les marchands de vieux louis chez les orfèvres ou chez l’étranger . Et voilà comment une mauvaise disposition faite par un méchant manipulateur de lois s’oppose à la fabrication , dans un temps où le numéraire est si rare. Il est digne de remarque que îees lettres patentes sont encore du ministère de 'M. Necker et mises au monde par ses protégés. Note F, sur le vice de rapport entre le titre et le poids. (F.) L’or et l’argent sont des métaux sur lesquels le feu ne peut exercer son action destructive ; il consume ou chasse toute matière hétérogène. Ces métauxainsi dégagés de tout ce qu’ils contenaient d’étranger ontle dernier degré de pureté; c’est ce qu’on appelle de l’or ou de l’argent fin. On s’éloigne de cette pureté par autant de gradation qu’on peut ajouter de portioncules de métal étranger. Cependant, comme des données incertaines ne satisfont pas l’esprit calculateur, et qu’il veut de la méthode et des bases déterminées, il a divisé l’or et l’argent en un certain nombre de parties, d’après lesquelles on pût trouver la quantité de métal étranger que contient une masse quelconque d’or ou d’argent. Il semble donc que cette division devraitêtre au moins uniforme pour les nations qui ont entre elles de grands rapports de commerce, et cela n’est pas; on pourrait presque affirmer qu’on n’a admis tant de variations que pour obscurcir une science très simple, afin de pouvoir tromper cette classe nombreuse d’hommes qui n’entendent rien à un calcul un peu compliqué. Les banquiers, les marchands d’or et d’argent et les princes faux-monnayeurs retirent un très grand avantage de la diversité qu’on a mise dans les différentes divisions dont on se sert pour connaître le degré de fin du métal. On trouve ce vice dans les divisions et pesanteur du poids. Assez généralement, cependant, on a divisé l’or en vingt-quatre parties, appelées karats; mais c’est la division du karat qui varie à l’infini. Ces variations sont telles, qu’il n’y a que nous et les Géoevois qui ayions divisé le karat en 32 trente-deuxièmes. L’Allemagne, l’Autriche, la Pologne, la Suède, le Danemarck, les Pays-Bas, la Hollande, la Prusse ont divisé le karat en douze grains. Gênes et Rome l’ont divisé en huit octaves ; l’Espagne, l’Angleterre, la Turquie nel’ontdivisé qu’en quatre grains. Le Portugal, peut-être plus sage, n’a pas fixé cette division, et il a laissé au calcul toute la possibilité des fractions. La diversité des divisions pour l’argent est plus étonnante ; et j’observe: 1° que l’argent ayant, comme l’or, la propriété de ne rien perdre de sa quantiié par l’action du feu, il est étonnant qu’on ait pris une autre mesure pour connaître la quantité de fin que contient un lingot quelconque, et cette bizarrerie est encore plus choquante en Hollande, puisqu’on y a cherché et adopté un résultat uniforme. On y divise l’or d’abord en vingt-quatre karats, et ensuite le karat en douze grains, ce qui donne deux cent quatre-vingt-huit grains. L’argent est aussi divisé en deux cent quatre-vingt-huit grains, mais $46 [Assemblée nationale.] ARCHIVÉS PARLEMENTAIRES. [2 novembre t"b6.j bn prend une division inverse, et en .changeant le nom de karat en denier, on divise l'argent en douze deniers, et le denier en vingt-quatre grains. Si l’on réfléchit que le mot karat tire son étymologie de ia graine kération qui servait de poids ; qu’en Turquie, à Malte, à Venise, l’argënt, comme l’or, se divise en karats; si l’on observe de piiis que le mot denier que nous employons n’est pas général, puisqu’en Angleterre, à Gênes, à îtpme, on se sert du mot once; qu’en Allemagne, en Danemàrck, en Pologne, en Suède, eh Prusse, en Autriche, on se sert du mot loth, qui équivaut à la demi-once (1); enfin, si l’on fait attention que ce mot denier étant déjà destiné à désigner une valeur monétaire, étant de plus une division de poids, il en résulte une confusion d’idées encore plus grande de 1’employer de nouveau comme division de titre, on sera étonné qu’on n’ait pas adopté, pour l’argent, la division en karats , au lieu de celle en deniers; et qu’en Ëoi lande on L’ait pas divisé l’argent, comme l’or, d’abord en vingt-quatre karats , puis le karat en douze grains, puisque le résultat de leur double division donne jiour l’or, comtne pour l’argent, deux cënt qüatre-. jngt-huit grains. J’avoue que ia division de l’argent en douze parties est générale, qu’elle l’est plus que celle en seize. La sous-division en vingt-quatre parties est celle qu’ont faite tous ceux qui ont adopté la division en douze; mais je crois que nousne tarderions pas à être d’accord, si nous adoptions premièrement la division commune en karats, le (1) Il ri’est pas étdfthaïit qu’on ait pris ce mot et cette division, car le mot loth signifiant demi-orice, la demi-once pesant 288 grains, les 16 demi-onces'multipliées par 18 grains donnent ie même nombre. karat en grains ; si, nous divisons l’or fin de même que notre argent fin en deux cent quatre-vingt-huit grains, il n’y aurait aucune raison de ne pas établir utie plus grande coiiformité, eh adoptant la même division, e’ést-â-dihê vingt-quatre karats de douze grains, ou plutôt il faüdràit diviser l’un et l’autre eri douië karats, ét le karat. en vingt-quatrê grains, ce qui donnerait filuS de précision pour l’opération des essais. Attendra-t-on dû temps ce changement qu’il serait à désir.er due toutes les nations adoptassent d’accord? .Je ne Vois pas .qU’oü puisse s’y opposfer'.' Cependant, ie préférerais une autre méthode qui serait plus intelligible pour le commun des hommes. Jë suivrais Un rapport de proportion du titre aü poidS, et le déduirais l’üiï et l’àd-tre àüx mèmès déhorpinàiibus. Par exemple : j’ai un lingot d’argent d’un marc, .C est-à-dire de 8 onces, dans lequel il ÿ à tiii huitième dé cuiVHr, il ne restera donc plus que sept huitièmes ou sept onces d’or bu d’argent : Ôri se t'appelle qu’oni né paye rien pour le çüivrë qui se trbuvè mélange avec l’or ou l’âfgeht : donc, puisque je pë paverais que sept onces d’or ou d’argent, je dirais : j’ai lin màrc d’or à sept onces, car il .ne và,ui réellement qüe sept Onces, quoiqu’il en pesé huit. Qu’on ne croie pas que je fasse hnë proposition extraordinaire : c*est là sage méthode des Anglais. Ghezéux, la livre iqu’ils appellent de throy, qui est aussi la livre monétaire, est divisée en douze onces. S’ils ont ün lingot d’argent dans lequel il y ait deux doqzièmës de cuivre et conséquemment dix douzièmes d’argent, ils disent : c’est un lingot à dii onces; parce que la livré (ie ce lingot ne Vaut que poub dix onces. Ge langage est intelligiblë pour tout lé monde : composons aussi, dans ce cas, üôtré livre de doUzé onces. Tableaux. 248 [Assemblée nalionale.J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [2 novembre 179ü.] SECOND TABLEAU. Essais faits en vertu de la délibération de MM. les Commissaires. Résultat. — Donc les louis frappés à la monnaie de Paris, en l’année 1726, n’étaient qu’au titre de 21 karats 14/32. Ceux de 1726 à 1757 n’étaient qu’à 21 karats 16/3*2. Ceux de 1757 à 1785 étaient de 21 karats 20/32. Donc aussi la masse de ces louis donnait en détail et en gros un titre commun de 21 karats 17/32. Donc enfin la masse des anciens louis de la monnaie de Paris était de 32/32 au-dessous du titre. Donc les louis des autres monnaies avaient rigoureusement le même vice que ceux de la monnaie de Paris, c’est-à-dire que véritablement les anciens louis n’étaient pas au titre, et qu’ils n’étaient qu’à 21 karats 17/32. N. B. 1° Je n'ai point eu égard, dans les résultats aux demi trente-deuxièmes, non seulement parce que cela a été inusité jusqu’à ces derniers temps que l’ignorance la plus crasse, cachée sous le masque de la morgue, s’est parée de quelques plumes de la science; mais singulièrement parce que rien n’a été plus absurde que l’ordre donné aux essayeurs d'opérer à un demi-trente-deuxième près. On peut concevoir la division incalculable du point mathématique, mais la division physique du poids de la pesanteur d’un grain d’orge en 128 parties est impossible, improposable ; 2° Quand même on aurait eu égard à ces demi-trente-deuxièmes, ou n’aurait pas eu sur la masse totale ce demi-trente-deuxième de plus; 3° Ceux qui voudront connaître plus particulièrement ces expériences, et la manière dont il y a été procédé, peuvent recourir à YEssai préliminaire ou Observations historiques, politiques , théoriques et critiques sur les monnaies , qui se trouvent chez N von le jeune, libraire, place des Quatre-Nations." Post-scriptum ou observations sur une brochure apologétique de M. Solignac. C’est au moment que la question sur les monnaies est ajournée, que je reçois la réponse de M. Solignac aux observations que fai faites il y a un mois, relativement à sa brochure sur l'essai de la proportion de l'or à l'argent , que l’on nous vantait comme un chef-d'œuvre monétaire. Notons encore une fois, et pour la dernière, les infidélités et les erreurs de l’irascible M. Soii-gnac. Il a divisé son nouvel œuvre en cinq chapitres : chapitre des assertions , chapitre des contradictions , chapitre des fausses conséquences , chapitre des suppositions fausses, chapitre des atrocités. Heureusement tous ces chapitres-là composent quatorze pages; et comme rien n’est prouvé dans ces quatorze pages, on aurait pu les réduire à quatorze lignes, c’est-à-dire à ce qu’exigeait l’erreur (1) de calcul qu’il ajus-(1) Je pourrais dire comment cette erreur a été faite sur les épreuves mêmes de mon pamphlet : mais qu’importe au public ? [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [2 novembre 1790.] 249 teraent relevée ; erreur d’un petit écu qui ne change rien à la conséquence théorique de ma déduction; mais erreur d’autant plus inexcusable, que je pouvais me dispenser d’un calcul qui n’avait pas un rapport direct à la question; de même que je me suis abstenu de suivre M. Soli-gnac dans ses doctes raisonnements sur le change, parce qu’il ne s’agit pas de change dans un débat sur le régime monétaire. En général, la réponse dont il s’agit roule sur la proportion entre l’or et l’argent, tandis que c’est une question au moins oiseuse quant à présent; aussi n’en parlerai-je pas plus que dans mes premières observations, quoique M. Solignac soutienne que c’est le point en discussion entre nous. Mais parcourons sa foudroyante brochure. Chapitre assertions fausses. — M. Solignac soutient d’abord qu’il est faux que la refonte de 1726 ait été purement fiscale, et il ne donne aucune preuve de son assertion. Rien de plus commode; mais je réclame pour preuve du contraire tout ce qui a accompagné et suivi l’édit de janvier 1726, et dont M. Solignac n’a pas même parlé. Voilà comment il démontre la fausseté de son assertion. Seconde Assertion prétendue fausse. J’ai relevé l’erreur de M. Solignac, qui avait dit que la Déclaration du 30 octobre 1785 avait ordonné de fabriquer de nouveaux louis au titre de 21 karats 22/32, et j’ai dit que cette ordonnance portait que les nouveaux louis seraient fabriqués au même titre que les anciens. M. Solignac est forcé d’avouer mon exactitude littérale; mais il se replie d’une manière bien étrange, et il dit : Le titre des anciens louis est fixé par l’édit de 1726 à 22 karats au remède de 10/32, et la déclaration ne parle pas de l’arrêt du conseil du 12 février 1726; d’où il suit que les louis doivent être à 21 karats 22/32. Je demande à M. Solignac si la déclaration de 1785, en disant, comme il l’avoue, que les nouveaux louis seront fabriqués au même titre que les anciens , n’a pas nécessairement entendu comprendre dans son système toutes les lois qui ont déterminé le titre des anciens louis? Pour se soustraire à la force de cette objection, M. Solignac dit que l’arrêt du conseil du 12 février 1726 était sans doute une loi secréte de la comptabilité, puisqu’elle n’a pas été imprimée. Quoi ! M. Solignac veut parler monnaie, et il ne connaît pas une de nos lois familières à tous les monétairesl une loi citée nombre de fois par M. Des Rotours, son fidèle inspirateur! une loi citée par un auteur très estimé, M. Dupré de Saint-Maur ! une loi enregistrée, d’après laquelle on a fabriqué pendant soixante ans! Quoi ! c’est M. Macé de Richebourg qui servira d’autorité à M. Solignac préférablement à une loi existante? Mais M. Macé pouvait-il lui-même ignorer l’existence de cette loi? Indépendamment de ce qu’il devait connaître l’ouvrage de M. Dupré de Saint-Maur qui l’a cité, en 1763, époque où M. Macé a fait ses calculs, il y avait trente-sept ans que cette loi était en vigueur. Voilà un autre échantillon de la science et des démonstrations de M. Solignac! Troisième assertion prétendue fausse. Ici le faux appartient tout entier à M. Solignac. Il fait un calcul pour prouver que nos louis actuels doivent être à 21 karats 21/32, et il dit : par conséquent nos louis actuels sont ou doivent être , comme je l’ai dit à 21 karats 21/32. J’observe, en passant, qu’il y a ici uue inexactitude; car M. Solignac n’a pas dit que les louis actuels devaient être , m&isqu’ils étaient à 21 karats 21/32. Ceci n’est peut-être qu’une incorrection de style; mais ce qui suit n’en est pas une; or, c’est en altérant mon texte que M. Solignac conclut qu’il est faux que la masse des louis, frappés en vertu de la déclaration de 1785, soit, comme je l’ai avancé, à 21 karats 20/32. Voici littéralement ce que j’ai dit : « puisqu'il » est vrai , et j’en ai la preuve sous les yeux , que « la masse des louis frappés en 1785 est à 21 ka-» rats 20/32. » Pourquoi omettre ces mots, et j'en ai la preuve sous les yeuxl Cette preuve existe dans le procès-verbal le plus authentique de deux cent trente-six expériences faites très récemment, en vertu d’un arrêt du conseil, par les plus habiles manipulateurs d’essai, même de l’Académie des sciences, en présence de neuf commissaires, magistrats de trois compagnies souveraines ; par ce procès-verbal, il est constaté que la masse des nouveaux louis est à 21 karats 20/32, et voilà la base que j’ai dû respecter : donc mes raisonnements fondés sur cette base ne sont pas faux; donc ils sont faux les raisonnements et les calculs de M. Solignac, qu’il a fondés sur une base qui n’est pas la véritable. Quatrième assertion prétendue fausse. C’est encore en citant la méthode erronée de M. Macé, que M. Solignac prétend avoir eu raison de dire que le commerce et l'étranger calculent le remède de poids pour l'or, à raison de neuf grains, et pour l’argent à raison de seize. J’ai soutenu qu’il était faux que l’étranger fît usage de ces deux bases, et j’ai cité le tarif de Leipzick, imprimé très nouvellement en 1786. Or, l’erreur commise par M. Macé, Français, en 1764, peut-elle prouver contre les procédés réguliers des étrangers, relatés dans un tarif imprimé vingt-deux années après? Et remarquez que je parlais des étrangers, et que je citais un ouvrage des étrangers. Cinquième assertion prétendue fausse. La piastre à l’effigie est au titre de 10 deniers 19 grains, quoique le tarif de 1773 ne l’évalue qu’à 10 deniers 17 grains : personne ne peut le nier. Or, j’ai dit qu’il ne me paraissait pas naturel que les marchands de piastres les vendissent à raison de 10 deniers 18 grains au commerce, tandis qu’on les leur paierait à raison de 10 deniers 19 grains à l’hôtel de la monnaie. Comment M. Solignac détruit-il cette proposition si évidente? 11 ne nie pas que la piastre soit payée à l’hôtel de la monnaie, à raison de 10 deniers 19 grains; mais il dit qu’il était bien loisible au commerce de n’évaluer cette piastre qu’au titre de 10 deniers 18 grains. Est-ce là répondre? Quoil la piastre étant véritablement au titre de 10 deniers 19 grains, le commerce peut faire que le marchand d’argent la vende moins qu’on ne lui en offre! Car voilà la conséquence de la réponse de M. Solignac. Il me reproche ensuite d’avoir retranché du texte le prix que la monnaie paye de la piastre, et celui qu’en paye le commerce; et il en conclut que c'est pour lui faire une mauvaise querelle et induire plus facilement mes lecteurs en erreur. Mais si, à la Monnaie, on paye la piastre à raison de 10 deniers 19 grains, ne l’y vendra-t-on pas plus cher qu’en la livrant à un orfèvre sur le pied de 10 deniers 18 grains? Qu’importe la quotité du prix? Il ne s’agit que de savoir si un marchand préférera la perte au gain. Voilà un chapitre pressuré : passons à celui de mes prétendues contradictions. 350 [Assemblée nâtiohale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [2 novembre 1790.1 J’ai dit cjùe LA MASSÉ des anciens louis riétait pas au titre - puisqu'ils n'étaient qu'à 21 carats 17/32. Remarquez que j’ai bien spécifié la masse des anciens louis, el non Les louis pris isolément : M. Solignac trouve plus commode de falsifier ma phrase, et de me faire dire que les anciens louis étaient à 21 karats 17/32, afin de pouvoir me donner un honnête démenti, sous prétexte que plusieurs particuliers aVaieDt porté des louis à l’aftinage, où ils avaient été reçus à 21 karats 19/32. Mais pourquoi parler de louis isolés, tandis que j’ai parlé de louis pris en masse? Pourquoi ùe pas dire que les louis de l’an née 1726, de toutes les monnaies, n’étaient qu’à 21 karats 14/32, et que c’est à cause de cela, quoiqu’il y eût des louis même à 22/32, que la massé des louis fi’ëtait qu’à 21 karats 17/32? Vbiei une seconde contradiction de la même force que la précédente; aussi sont-elles toutes deux de la création de M. Solignac. Oh me fait dire, et je ne l’ai point dit, cju’en cohsêquence d’une lettre du ministre, on a ajouté auk anciens louis quatre trente-deuxièmes d’ùr fin, ce qui a porté conséquemment le titre des nouveaux louis à vingt-ùn karats vingt-un trente-deuxièmes. Ce qüe j’ai dit, et ce qui est très vrai, c’est que la masse des louis frappés en vertu de la déclaration de 1785, est à vingt-ün karats vingt trente-deuXièrfies ; mais si l’ün eût été fidèle, je n’étais plus en contradiction avec moi-même. M. Solignac avance encore ce que je n'ai pas dit : « Que je lui fais un crime d’avoir supposé, « comme Macé de Richebourg, que l’on employait « neuf grains de remède de poids dans la fabri-« cation des louis. » Il prétend qu’il y a en cela contradiction, parce que je lui ai conseillé, dans un autre cas, de consulter M. Macé de Riche-bourg : la conséquence est d’un genre nouveau. Quoi qu’il en soit, je défie M. Solignac de trouver, dans la septième page, ainsi que dans tout l’écrit auquel il répond, excepté â la page vingtième, je ne dis pas seulement le nom, mais même Pindication de ce M. de Richebourg. Pourquoi donc M. Solignac se permet-il de multiplier à ce point ces sortes de faux? J’entends bien que les inexplicables observations des pages 12, 13, 14 et 15 ae mon écrit ont pu lui inspirer quelque humeur, mais est-ce ma faute si l’on a tant vanté son pamphlet qui tendait à diminuer d’un seizième le numéraire d’or, et à faire voler trente sols par louis dans nos poches? Que M, Solignac prenne communication de l’arrêté dü comité du commerce, relatif au rapport du comité dés monnaies, il verra qüë je he suis pas le seul qui rejette la dangereuse proposition de réduire les louis à 22 livres 10 sols. Je viens au prix de l’or, et je ne fais que deux réponses à tout ce qu’ a dit M. Solignac, contre l’élévation de ce prix. C’est : 1° qu’en 1785, l’cr était si cher à Amsterdam, qu’il serait revenu, rendu à Paris, à 832 livres 10 sols payés en écus , et non par la voie du change. La preuve en existe dans les lettres d’Amsterdam, dit 22 janvier 1786, en réponse à celle des banquiers, du mois de novembre 1785, et je conseillais à tous les gouvernements de la terre de la consulter. 2° Si réellement l’or ne Valait en ce moment que 780 livres 17 sols 4 deniers en Hollande, à Gêfies et à Genève, le bénéfice de ce commerce serait si considérable, qu’on n’hésiterait pas à le faire. A qüel enfant pense-t-db persuader que l’or étant à Genève et à Gênes, qui nous sont si Voisins, de 47 livres 4 sols 8 deniers au-dessous de notre tarif en France, il ne baisserait pas? M. Solignac commence son chapitre des suppositions fausses, par me faire dire une absurdité très réelle, pour avoir le plaisir de crier à l’absurdité. Je n’ai pas dit que la proposition qü’il avait faite au ministre des finances en 1786, et relative à l’opération de 1785, avait eu pour objet de comparer cette opération avec celle des assignats, qui s'est faite en 1790. Si, sous le miriis-tère de M. de Galonné, en 1786, un homme avait deviné qu’en 1790 il y aurait une Assemblée nationale qui décréterait dès assignats, cet homme ne serait pas M. Solignac; j’ai observé Seulement qu’il n’avait mis en parallèle l’opératioh de la refonte de 1785 avec Celle des assignats, qu’fifin d’accuser l’une de l'augmentation du prix des matières, l’autre de l’élévation du prix des espèces ; et voici mon raisonnement 1° M, Solignac, en proposant, en 1786, de maintenir le prix de l’or à 828 livres 12 sols, et d’élever le prix de l’argent à 55 livres 10 sols au lieu de 53 livres 9 sols où il était, n’imputait-il pas indirectement à la déclaration de 1785 l’élévation du prix de l’or et subséquemment de l’argent, püisqu’après qu’elle avait élevé l’orà 828 livres 12 sols, il soutenait qu’il fallait porter lé prix de l'argent à une élévation proportionnelle? Il n’y a rien de clair sous le ciel, ou cela est évident, 2° M. Solignac n’abcu3e-t-il pas leB assignats de l’élévation du prix des espèées lorsqu’il ajoute : « Une pareille opération nous aurait parfaitement convenu tant que nous n’aurions pas eu d’assigüàts, ou même absolument tant que nous n’aurions eu que 400 millions d’assignats ; mais Vous avé2 décrété que 800 millions d’assignats au delà des 400 millions, etc. » Au surplus, lorsque M. Solignac s’échauffe contre les assignats* p. 19, ligues 23 et 29; page 20, ligne 4; lorsqu’il s’écrie, page 21, ligne 1 : étonnante masse de 1*200 millions d’assignats, et toujours à propos des espèces* comment interpréter ces exclamations? Je ne parierai des autres prétendues suppdsi-tions qu’a relevées M. Solignac, que pour prouver enedre qu’il me fait dire ce que je ne dis pas. 1° il est faux que j’aie supposé quë nous ne pourrions pas vendre notre or à l’étranger plus haut que 780 livres 17 sois 4 deniers, j’ai atl contraire critiqué ce prix. 2° Il est faux que j’aie dit qu’il n’y avait que le propriétaire des mines qui fît la loi à l’acheteur des métaux ; au contraire, j’ai dit littéralement que le prix de l’or dépendait, comme matière première, de celui qui eu était propriétaire, et j’ai ajouté : « Or, quels sont les propriétaires « de l’or? 1° l’Espagne et le Portugal, qui en « possèdent les mines; 2° les nations chez les - « quelles le commerce a transporté ces matières « au delà de leurs besoins et qui , en conséquence, « en font des spéculations contre les nations qui » en manquent. » Pourquoi la soustraction de ces quatre lignes? Pourquoi cette falsification? Pour avoir l’air de nous apprendre que « le commerce ne se fait pas « par l’échange d’un métal contre un autre, mais « par uü échange de denrées contre un métal. » Et remarquez qu’encore cela li’est pas exactement vrai, car si effectivement on échange des denrées contre dés métaux, on échange aussi l’or contre l’argent et l’argent, contre l’or, lorsqu’un a besoin a’un de ces métaux, et qüe leurs propriétaires h’dnt pas besoin de dehréës. M. So- [Asselhblée nationale.) ARCHIVÉS ÜÀïtLËMENTÂÎRES. [2 novembre 1790.] 284 lignac ajoute : — C’est la rareté ou V abondance des denrées qui déterminent la valeur des métaux. C’est là une lourde erreur. L’abondance ou la rareté des denrées ne déterminent que la valeur des denrées; qiiànt à la valeur dëé métaux, c’est l’abondance ou la rareté, de ces mêmes mé-taü it qui déterminent lëiir valeur. Poursuivons. — M, Solignaç dit (jüe je suis inintelligible, et, il prétend éclaircir mon obscurité : comment s'y prend-il ? D’gbord.,. il convient avec moi que l’or fin se vend 828 livres Ï2 sols lë marc, et même plus, quand même maintenant on devrait le payer en écus. Ceci n’ëiait donc pas inintelligible. Ü ajoute : mais il est faux qué ce même marc d'or se vende à ce prix chez tous nos voisins. Il tne semble qu’il y a bien là du dissentiment, mais non de i’inintelligibilité. Or, qüi a raison, de M. Solignaç ou de moi? Encore une fois, si l’or, cbëz tous nos voisins , était au-dessous de 828 livres 12 sols, ne baisserait-il donc pas aussitôt en France? À la vérité, de ces voisins, M. So-lignac veut bien excepter seulement l'Espagne et le Portugal , qui sont les vrais Vendeurs de ce métal. Cé sont les propres ternies dé sa brochure. Ainsi il convient non seulement ici, mais encore dans deux autres endroits, tantôt tille la proportion monétaire est plus élevée en Espagne et en Portugal (1) que la notre, et tantôt que le prix de l’or est aussi haut en Espagne et en Portugal qu'en France (2). Il convient aussi que l’Espagne et le Portugal sont les vrais vendeurs de l'or, et il veut nous persuader que les vrais vendêurï be doivent pas influer sur le prix de leur marchandise ; qu’ils peuvent Vendre l’or 828 livrés 12 sous, mais que ceux qui l’achètent doivent le donner à 4V liVres au-dessoüs, à 780 livres 17 sous 4 deniers ; et voilà ce qu’on appelle rendre intelligible. M, Solignaç» ën continuant à vouloir me rendre intelligible, me fait dire à son ordinaire, ce que je Dédis pas; savoir: que l’once d’or à vingt-deux karats se vent 105 livres à Paris (3); or, j’ai parlé de l’or à vingt-quatre karâts, et non de celui à vingt-deüx ; mais, cela convenait à son système ; il voulait parler de l’or payable en papier, tandis que je n'ai parlé et dû parler qué de for payable en argent. Or, s’il est vrai qüe l’or à vingt-quatre karats du prix de 105 livres l’once payable en argent. Vaut 840 livres le marc, comme l’avoue M. Solignaç, qu’il nous fasse la grâce de bous apprendre comment il est possible que l’or se vende à Paris 840 livres le marc, ët qu’il ne se vende à Gênes, à Genève, à Amsterdam, que 780 livres 17 sous 4 deniers (4), c’est-à-dire 60 livres au-dessoüs : e’est là un problème auquel je ne puis rien comprendre, malgré tous les efforts de M. Solignaç. Nous voici arrivés à la prètendüe inintelligibilité que M. Soligttac a la bonhomie d’appeler un entortillage à double sens. Serâit-il vraiment assez ignorant, pour ne s’être pas aperçu d’une faute typographique évidente ? au lieu de n’éva - (1) Page 8, à l’exception seulement de l’Espagne et du Portugal, qui en ont adopté une dans leurs monnaies, plus haute que la nôtre. (2) Page 7, (à l’exception de l’Espagne et du Portugal) . . . excepté toujours dans ces deux derniers Etats, parce qu’ils en sont les vendeurs. (3) Il est vrai aussi que l’once d’or à 22 karats se vend maintenant à Paris 105 livres. (4) Je présume que c’est d’après les prétendus prix de ces endroits, que M. Solignaç veut que nous baissions l’or à 780 livres 7 soüs 4 deniers. luant le prix, il faut lire : n’évaluons ce prix ; et Mi Solignaç devait le sentir, car l’alinéà qüi suit commence par i’expression syllogistique : or. Donc c’est une suite de ce qui précède. D’ailleufë il est clair que le calcul qui se trouve dans cet alinéa est le résultat très déterminé de ja valeur du louis de 32 au marc, d’après le prix du tarif. M. Solignaç n’a voulu persuader qu’il me trouve inintelligible, que parce qu’il aperçoit trop clairement combien ce que j’ai dit à de force contl e lui. M. Solignaç veut réduire nos louis à 22 livres 10 sous ; moi jn veux prouver que cette opération est absurde, et qu’il y aura de l’or pour plus que cette somme ; et comment est-ce que je le prouve? Je dis : l’or g deux prix, celui du tarif qui est à 828 livres 12 sous, celui du commerce ui est a 840. C’est faire grâce à M. Solignaç, e prendre pour base l’or au prix le plus bas ; (M. Solignaç en convient); c’est celui du -tarif) (M. Solignaç en convient encore), et je dis : n'évaluons ce prix que sur celui du tarif. Je dis ensuite: nos louis sont à vingt-un karats 20/32: donc le marc vaut 746 livres 12 sous. Divisons 746 livres 12 sous en trente-deux louis, et nous trouverons (M. Solignaç ne peut pas le nier) que chaque louis contient pour 23 livres 6 sous 7 deniers d’or : je suppose encore qu’on aura employé tout le remède de poids, et je trouve que les louis vaudraient encore au moins 23 livres 5 sous 1 denier. Voilà ce que M; Solignaç n’ose pas nier, et it voudrait bien que cela fût inintelligible. Son chapitre de l’atrocité comprend la fameuse erreur arithmétique : erreur dont la conséquence que j’ai tirée de mon calcul est entièrement indépendante (1) de sorte que ma véritable atrocité est d’avoir raison. Voici une seconde prétendue .atrocité, et certes elle est d’un genre nouveau, j’ai calculé la valeur 'intrinsèque des louis à vingt-un karats 22/32, non sur le pied inconcevable de 780 livres 17 sous 4 deniers, proposé par M. Solignaç, mais sur le pied du tarif, c’est-à-dire sur un pied bien inférieur à celui du commerce; et j’ai trouvé que ces louis de 24 livres auraient pour (1) Je le prouve en rectifiant tout le calcul, M. So-ligUac dit: 1* que la piastre n’est prise dans le commerce que sur le pied ue 1Ü deniers 18 grains: donc elle a 3 grains de moins que nos. écus; 2* il convient qu’elle se vend à raison de 53 liv. 5 s. le marc; donc le grain vaut 4 s. 2 d. 23/43; dotic aussi 3 grains valent 12 s. 4 d. 26/43: donc enfin le marc de nos écus devrait se vendre 53 liv. 5 s., plus 12 s. 4 d. 26/43 ou 53 liv. 17 s. 4 d. 26/43. Voyons combien il se vend, et rectifions toutes les erreurs. Les assignats so vendaient lorsque j’ai écrit, à 5 1/2 0/0 de perte, coupons déduits c’est ce qui a été vérifié : donc, sur 200 livres on perdait 11 livres, et on ne donnait que 189 livres. D’après cela, le marc d’écus valait 52 liv. 13 s. 11 d. 3/4. D’après les données de M. Solignaç, il devait se vendre 53 liv. 17s. 4 d. 26/43. Donc on le vendait trop peu 1 liv. 3 s.4d. 3/4. Ainsi, pour rectifier toute erreur, il faut lire : Cependant comme l’assignat de 200 livres ne perd que 11 livres, le marc de nos écus ne se vend que 52 liv. 13 s. Il d. 34; d’où il suit qu’en disant de l’ouvrage dont il s'agit : méditez-le : il contient les vrais principes, c'est comme si l’on adressait aux marchands d’argent ces paroles: vous ne vendez vos écus que sur le pied de 52 liv. 13 s. 11 d. 3/4 le marc; vous êtes des imbéciles: vendez~le 53 liv. 17 d. 26/43. Méditez : voilà les Vrâls principes. Il est donc clair que l’erreur de calcul n’a pas produit l'erreur dé raisonnéinônt. 2S2 jAssemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 13 novembre 1790. 24 livres 19 sous 2 deniers de valeur intrinsèque, à Paris, où l’or fin se vend au moins, et de l’aveu de M. Solignac, 828 livres 12 sous le marc. Et ne voilà-t-il pas que M. Solignac prétend que, pour le calomnier, j'ai supposé qu'il proposait de fabriquer des louis de trente au marc , sans diminuer le prix de l'ort Je demande si ce n’est pas là dénaturer le sens de ma proposition ? Certes, il m’importait très peu que M. Solignac eût rêvé qu’il pouvait persuader à l’Assemblée nationale qu’avec cinq à six lignes de décret, point d’or ni d’argent, et quatre à cinq milliards de dettes, elle pouvait faire la loi aux possesseurs des richesses métalliques, et les forcer à nous délivrer leur or à 780 livres 17 sous 4 deniers. Je n'ai dû prétendre autre chose que de prouver que, si l’on fabriquait des louis de 24 livres à 30 au marc, ces louis auraient pour 24 livres 19 sous 2 deniers de valeur intrinsèque, puisque l’or se vendait au moins 828 livres 12 sous le marc ; et voilà ce qu’on appelle une atrocité. Et, de ce que j’ai conclu que par cette opération, l’étranger notre créancier gagnerait lus de deux millions, et que je l’ai prouvé, . Solignac prétend que je dénonce lui et ses protecteurs comme des ignorants et des monopoleurs, et il s'écrie, quelle fausseté ! quelle noirceur! quelle atrocité 1 Et moi, je déclare que je ne connais ni M. Solignac, ni ses protecteurs ; que je fais par ma nature, fort peu de cas et de ui protège, et de qui se laisse protéger ; que je éfie enfin la malveillance la plus déhontée de me trouver ici un autre intérêt que celui de relever des erreurs qui pourraient devenir trop préjudiciables. Me voici à la dernière atrocité que l’on me prête, et véritablement elle est très comique. M. Solignac, après avoir conseillé de réduire les louis à 23 livres 10 sols (ce que j’appelle voler dans nos poches trente sols), de les réduire ensuite à 22 livres 5 sols, lorsqu’on ferait une refonte générale , quoiqu’il eût dit qu'il n’avait pas l'idée d'une refonte générale, ajoute que cette re ¬ fonte se ferait sans bruit et sans commotion; je l’ai prié de nous expliquer comment s’effectuera, sans bruit et sans commotion , une opération par laquelle on vole au possesseur de louis et déçus, 3u à 35 sols par louis, et 16 sols 7 deniers un cinquième par marc déçus ; et j'ai ajouté que je craignais, au contraire, qu'on ne criât très haut aux voleurs , et qu'on ne fit peut-être plus que de crier. C'est cette crainte que M. Solignac métamorphose en conseil ; et, pour finir comme il a commencé, c’est-à-dire en falsifiant tout ce qu’il touche, il prétend que je l’ai dénoncé au peuple comme un voleur, et que je lui conseille de ne pas se contenter de crier. De quel côté est l’atrocité ? ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE de m. barnave. Séance du mercredi 3 novembre 1790 (1). La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin. (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. M. Charles Régnault, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séahce d’hier au matin ; ce procès-verbal est adopté. M. Gaultier de Biauzat obtient la parole pour présenter à l’Assemblée, au nom des directoires des départements du Puy-de-Dôme, du Cantal et de la Haute-Loire, une pétition relative aux sommes que la ci-devant généralité d’Auvergne, divisée aujourd’hui entre les trois départements, a supportées jusqu’à présent, pour fournir aux dépenses des ponts et chaussées, et qui montent à 180,371 livres, pour la contribution dans les dépenses des travaux d’utilité générale, et 188,866 livres 18 sols 9 deniers, pour les travaux à faire dans l’intérieur de cette ci-devant généralité. Il propose un projet de décret en ces termes : « L’Assemblée nationale décrète que dans les « créances arriérées dont le payement est sus-« pendu par son décret des 22 et 25 janvier 1790, « ne sont pas compris les fonds de province, « imposés pour une destination locale et expri-« mée notamment les 188,866 livres 18 sols 9 de-« niers que la ci-devant généralité d’Auvergne « paye chaque année pour les ouvrages d’art à « exécuter dans sou sein ; « En conséquence que le eaissier dépositaire des-« dits fonds sur les exercices 1787 et 1788, sera « contraint de faire voiturer à Clermont, ainsi e qu’il en sera requis parles trois départements, « chacun en ce qui le concernera, la somme de « 188,866 livres 18 sols 9 deniers sur l’exercice « 1789, à la charge par lesdites assemblées du u département ou leurs directoires, de proposer « aussi chacun en ce qui le concernera, un état « des travaux d'art à exécuter jusqu’à concur-<• rence de ladite somme : lequel état sera dressé, « vérifié, approuvé eu la manière ordinaire ; » Enfin que lesdites assemblées de départe-« ment ou leurs directoires, sauf l'arrangement « entre eux, demeureront autorisés à retenir suc-« cessivement, mois par mois, sur les imposi-« tions de 1790, jusqu’à concurrence de ladite « somme de 188,866 livres 18 sols 9 deniers pour « l’état des ouvrages d’art à exécuter sur l’exer-« cice de 1791 : à la charge pareillement de faire « dresser, vérifier et approuver ledit état suivant * l’usage. » (Ce projet de décret est renvoyé à l’examen du comité des finances.) M. Auvynet, député des Marches communes de Poitou et de Bretagne , déclare à l’Assemblée que son départ est fixé à demain 4 novembre, en vertu du congé qu’il a demandé et obtenu le 14 octobre dernier. M. de Raze, député de la Haute-Saône , déclare son retour après la quinzaine de congé qui lui a été accordé par l’Assemblée. M. Bouche. Plusieurs municipalités refusent d’exécuter les ordres que vous avez chargé voire président de leur transmettre : témoin celle d’Au-benton à laquelle il a été écrit pour lui ordonner de rendre des grains qu’elle relient à quelques particuliers. Elle s’obstine à n’en rien faire, sous prétexte que la lettre n’a pas été sanctionnée parle roi. Je demande que yous déclariez que de pareilles lettres n’ont pas besoin de sanction. M. d’André. C’est au pouvoir exécutif à faire exécuter les lois et à faire poursuivre les muni-