t Assemblés imUemü#.] ARCHIVES ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE de m. TREILHARD. Séance du mardi 27 juillet 1790, au soir (1). M. le Président ouvre la séance à six Heures du soir. M. Coster, secrétaire , fait lecture de l’extrait de plusieurs adresses dont la teneur suit : Adresses des prêtres séculiers et réguliers de la ville d’Arles, qui, jaloux de manifester leurs sentiments patriotiques en même temps que les autres Français, ont choisi le 14 juillet pour l’époque de leur hommage et de leur adhésion solennelle à tous les décrets de l’Assemblée nationale; ils ont mis au rang de leurs premiers devoirs celui de prêcher au peuple la soumission la plus entière et l’obéissance la plus prompte aux lois qui émanent de sa sagesse. Adresse de la municipalité de Rahon, département du Jura, qui déclare ennemis de la nation et du roi et traîtres à la patrie tous ceux qui, par des protestations, écrite ou aetes quelconques, chercheraient à s’opposer aux décrets de l’Assemblée et à troubler ainsi la tranquillité publique. Adresse de la municipalité de Monthieu en Dombes ; elle fait le don patriotique de l’imposi-tiqn des ci-devant privilégiés. Adresse de la municipalité de la ville d’Auch, qui s’élève avec force contre les deux délibérations et pétition des citoyens catholiques de Nîmes ; elle annonce que les trois corporations des maîtres cordonniers, perruquiers et tailleurs de la ville d’Auch ont reçu la seconde délibération ; qu’ils l’ont dénoncée à la municipalité comme séditieuse et attentatoire à l’autorité suprême des représentants de la nation. L’Assemblée électorale du département du Gers et la garde nationale d’Auch ont adhéré à cette dénonciation. Adresse des anciens magistrats de la ville de Scbelestadt, département du Bas-Rhin, qui, rentrés dans leurs fonctions eu vertu du décret du 8 juin, qui a cassé la municipalité de cette ville, se sont empressés de prêter le serment civique. Adresse des municipalités de Sondernac et d’O-deren, département du Haut-Rhin, qui font des soumissions importantes d’acquérir, le plus tôt possible, des biens nationaux. Adresse des citoyens actifs de Villié, département de Rhône-et-Loire, qui se sont confédérés contre les ennemis de la Constitution. Adresse du régiment patriotique de la ville et juridiction de Penne, contenant son adhésion à la fédération proposée par le régiment patriotique d'Agen. Adresses des administrateurs du département de l’Ardèche et du département du Gard, qui, dès l’instant de leur réunion, s’empressent de renouveler à l’Assemblée l’expression des sentiments de respect et de reconnaissance dont les électeurs du même département lui avaient adressé l’hommage. Les administrateurs du département du Gard s’engagent de faire tous leurs efforts pour faire exécuter les lois et rétablir la paix si cruelle-(1) Cette séance est incomplète au Moniteur . PARLEMENTAIRES. \tl juillet 1790*] 383 ment altérée dans la ville de Nîmes et ses environs. Adresses des municipalités de Val d’Ajol , de Vichy, deGrèzes-le-Ghàteau, district de Marvejols, de Fleury, district d’Orléans , d’Aiguevives, département du Gard, de Juliénas, des villes d’Hyères, de Gonfolens, d’Aurillac, de Notre-Dame-de-PlaisanGe en Poitou, et d’Alais. Toutes ces municipalités envoient à l’Assemblée le procès-verbal de la fête civique que tous les citoyens armés ou non armés ont célébrée le 14 juillet, dans laquelle ils se sont livrés aux transports de la plus vive allégresse, et ont prononcé, de concert, le serment fédératif du Gbamp-de-Mars. Adresse de la société des amis de la Constitution de la ville de Dax, qui offre à l’Assemblée nationale son tribut d’hommage et d’admiration pour la plus belle Constitution qui s’élève et tend à grands pas vers sa perfection. Cette société, instruite qu’une pétition a été clandestinement remise à la municipalité de la même ville, pour la transmettre à l’Assemblée contre son intention, s’empresse de prévenir l’Assemblée qu’il n’y a qu’un esprit de jalousie et de discorde qui seul peut avoir soufflé un projet aussi inconstitutionnel ; « Nous n’ignorons pas * ces perfides motifs, ajoutent-ils ; la mal-« veillance ne manque pas de ressources pour « pallier, donner même un air de vérité à l’impos-« ture la plus hardie, mais elle né saurait nous dé-« courager ; elle pourra faire de nous des martyrs « de la Constitution, mais jamais des parjures : « notre vie est à la patrie et à ses lois. ? Adresse des électeurs dé Ponteroix, qui annoncent que, pour témoigner leur respect pour l’Assemblée nationale et leur adhésion à ces mêmes décrets, ils se sont empressés de terminer la formation de leur district. Mandement de M. l’Evêque de Tarbes, qui ordonne que le Te Deum sera chanté dans toutes les paroisses de son diocèse, le 14 de ce mqis, à l’occasion du pacte fédératif. M. Regnaud (de Saint-Jean-d’ Angely) fait lecture d’une adresse des habitants du lieu de Vieu-zos, district d’Argelès, département des Hautes-Pyrénées , contenant qu’après avoir prêté le serment ordonné pour la fédération du 14 du courant, ils ont, avec leur pasteur, chanté le Te Deum en action de grâces de la liberté conquise, et VÈxau-diat, pour demander au Saint-Esprit les lumières nécessaires pour les représentants de la nation et leur bon roi ; et qu’ils ont arrêté unanimement que leur maire serait chargé d’adresser le procès-verbal des cérémonies qui ont eu lieu à i’occa-siun de la fédération, à M. Barrère, leqr ci-devant seigneur et leur très grand bienfaiteur, en le priant de vouloir bien leur servir d’organe auprès de l’Assemblée nationale. M. Prieur» fait part’ à l’Assemblée du serment fédératif prêté le 14 du courant par les habitants de Vertus, département de la Marne. M. le Président fait part de l’hommage fait à l’Assemblée d’un ouvrage anglais sur l’organisation du pouvoir judiciaire ; d un autre hommage fait à l’Assemblée d’un ouvrage français sur les dispositions politiques et morales qu’il faut se presser d’avoir à l’usage des assemblées électorales en France. M. Graffan, député du Roussillon, demande [27 juillet 1790.] 384 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. un congé de six semaines pour cause de santé. M. de Sainte-AIdegonde, député d'Avesnes, demande un congé pareil pour raisons de santé et d’affaires. Ces congés sont accordés. M. Dupont (de Nemours ) prie l’Assemblée d’accepter sa démission de membre de cinq comités : comme l’intérêt d’un travail plus prompt lui semble, en demeurant attaché à celui des finances, exiger qu’il ne se sépare pas de ceux qui dépendent de ce comité, il demande à y continuer ses travaux. (Cette déclaration reçoit de nombreux applaudissements.) M. Rewbell fait lecture de la copie d’une lettre écrite par M. de Bouillé à M. de Grangeville. — Cette lettre est parfaitement semblable à celle écrite parle même à M. de Bonneson.— Les officiers municipaux de Thionville, pleins de confiance en la sagesse de l’Assemblée, qui saura les prémunir contre tous les dangers et contre toutes les entreprises du dehors, l’ont envoyée à MM. les députés du département de la Moselle. (On ordonne le renvoi de cette lettre aux six commissaires.) M. Treilhard quitte la séance et cède la présidence à M. l’abbé Gouttes, ex-président. L'ordre du jour est un rapport du comité de vérification concernant la députation de la Guadeloupe et de Marie-Galande. M. Thibault, curé de Souppes , rapporteur. Par un décret du 22 septembre 1789, MM. de Gurt et Guai-bert... (M. le rapporteur est interrompu par des cris tumultueux qui partent des Tuileries. On entend ces mots plusieurs fois répétés : Le renvoi des ministres ! — L’Assemblée paraît se troubler. — Plusieurs membres se lèvent.) M. le Président. N’oublions pas que nous sommes les représentants de la nation française. Je réclame l’ordre et le silence. M. de La Rochefaucault-1 Jancourt. Trente ou quarante personnes occasionnent ce bruit :je demande que le président donne des ordres à l’officier de garde pour le faire cesser. M. Dupont (de Nemours). Si on les laisse continuer, nous n’en serons plus les maîtres. M. le Président. Les ordres sont donnés et déjà tout est tranquille. M. Thibault, rapporteur. Par un décret du 22 septembre 1789, MM. de Curt et Gualberl furent reçus à l’Assemblée nationale, comme représentants de l’île delà Guadeloupe, sous la condition qu’ils rapporteraient la confirmation de leurs commettants ; ils avaient été nommés à Pari s par ceux des habitants des colonies qui s’y trouvaient alors, et depuis ils ont été confirmés par les électeurs. Aujourd’hui trois autres députés se présentent; ils ont été élus dans les colonies, à la pluralité; ce sont MM. Chabert de la Char-rière et Nadal de Sintrac, pour la Guadeloupe, et Robert-Coquille pour l’île de Marie-Galande. Ils sont porteurs de nouveaux pouvoirs et demandent à être admis dans l’Assemblée. — MM. de Curt et Gualbert, sont depuis dix mois dans P Assemblée, ils ont toujours partagé nos travaux. Ils sont liés par le serment de ne se séparer qu’a près l’achèvement de la Constitution ; je crois que lorsqu’un membreaété présenté à lanation comme son représentant, rien ne peut altérer son caractère; voici, en conséquence, le projet de décret que je vous présente au nom du comité de vérification. « L’Assemblée nationale décrète qu’elle conserve comme représentants de la Guadeloupe, MM. de Curt et Gualbert, admis par son décret du 22 septembre 1789, et cependant admet MM. Chabert de la Charrière et Nadal de Sintère, au même titre de représentants delà colonie, et M. Robert Coquille, pour l’ile de Marie-Galande, sans que cette mesure de représentation puisse tirer à conséquence pour les prochaines législatures. » M. Barnave. L’Assemblée exercerait un droit qu’elle n’a pas, en admettant une double représentation de quelque partie du royaume que ce fût; elle ne peut que vérifier les pouvoirs des députés, et non les nommer. Je demande que le comité énonce laquelle des deux nominations est légitime, et qu’elle soit seule admise. M. Defermon. Je m’étonne qu’on vienne après dix mois réclamer contre une nomination confirmée. M. Alougins (de Roquefort). Le projet de décret, proposé par le comité de vérification, respecte les droits acquis aux deux premiers députés et consacre, en même temps, le droit des électeurs. Je pense qu’il doit être adopté. M. Regnaud (de Saint-Jean-d’Angely.) Je propose de conserver les deux premiers à l’exclusion des autres, parce qu’aucune des deux nominations n’est légale eu soi et que, puisque nous devons choisir en tr e les prétendants, il est juste de donner la préférence à ceux qui ont partagé nos travaux. (On demande à aller aux voix.) (Le projet de décret du comité est adopté.) M. Tréteau. Les six commissaires, que vous avez chargés de l’exécution de votre décret de ce matin, ne peuvent point encore rendre un compte complet de leur mission, n’ayant point entre les mains toutes les pièces nécessaires. Ils demandent à faire leur rapport demain matin, après la lecture du procès verbal. M. de Toulouse-Lautrec . M. d’Ambly et moi avons demandé au ministre de la guerre si effectivement les villes frontières étaient dégarnies; il nous a répondu qu’elles étaient comme elles avaient toujours été. Une voix : Cela n’est pas vrai! M. Tréteau. Puisqu’on dit aussi légèrement que cela n’est pas vrai, j’atteste que nous tenons de la bouche même du ministre dejla guerre que, dans un certain espace, sur les frontières, il y a 48 ou 50 bataillons d’infanterie, et 40 escadrons de cavalerie ; il ne manque pas 150 chevaux dans les endroits où il doit y en avoir le plus; mais n’ayant ni les états pour la répartition des troupes sur les frontières, ni le traité où l’on prétend qu’est renfermée la permission du passage des troupes étrangères, nous ne pouvons encore vous faire un rapport certain; on a promis de nous remettre les pièces demain avant huit heures, et nous ferons notre rapport aussitôt après la lecture du procès-verbal.