[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [17 novembre 1790. j 48® Je n’entends pas bien non plus comment on peut proposer de leur faire nommer d’abord chacun un sujet, puis de choisir ensuite ceux qui devraient composer le tribunal ; c’est comme si l’on faisait entrer un aveugle dans le salon, et qu’on lui dit de choisir le meilleur tableau. Le nombre quatre-vingt-trois ne me paraît pas plus redoutable que le nombre quarante, surtout lorsqu’il leur faudra venir tous les six mois rendre compte à la barre de tous les jugements. M. Chabroud. Dans le plan que je vous ai soumis j’ai eu principalement en vue d’éviter au peuple les assemblées fréquentes ; elles le fatiguent et le dégoûtent. Je crains que le tribunal proposé par le comité ne rivalise avec la législature. Le membre de chaque département que la nomination du peuple aurait investi de tout ce qui a rapport au pouvoir judiciaire pourrait avoir la tentation de croire qu’il représente son département. Je demanderais donc que l’on divisât le royaume en trois parties. M. d’André. La discussion va se prolonger, et l’Assemblée ne statuera sur rien. Je demande que l’on mette aux voix la question de priorité sur les trois plans qui vous sont présentés, et que celui de M. Chabroud soit sur-le-champ écarté par la question préalable. Il donne à des délégués le pouvoir de déléguer. Il prétend que les juges de districts sont investis de tout ce qui a rapport au pouvoir judiciaire; d’après ce principe, les administrateurs de districts seraient investis de tout ce qui a rapport aux administrations. (Le plan présenté par M. Chabroud est rejeté par la question préalable.) M. Prieur. Je demande que l’on réduise la question à ces termes simples : Chaque département fournira-t-il un membre pour la cour de cassation, oui ou non ? M. Legrand. Je demande quatre-vingt-six juges, dont quarante-trois seront en exercice. M. Rewbell. Je pense que les juges doivent être élus tous les huit ans, et que le tribunal doit être renouvelé par moitié tous les quatre ans. (La discussion est fermée.) Sur la proposition faite par M. Duport, l’Assemblée nationale décrète que le nombre des membres du tribunal de cassation sera égal à la moitié des départements. M. Le Chapelier. Votre comité vous propose actuellement de décider si les quatre-vingt-trois départements concourront à la fois à la nomination des membres de la cour de cassation, ou s’ils y procéderont successivement de six en six ans, par moitié ou par tiers. M. de llontlosier. J’applaudis au décret de l’Assemblée ; il y aurait eu du danger à admettre autant de membres pour la cour de cassation qu’il y a de départements ; mais comme chacun d’eux a un droit égal à la formation de ce tribunal, si vous ne les faites tous concourir à la formation, vous ferez une injustice. 11 y a d’ailleurs une multiplicité de lois locales ; il est nécessaire qu’il y ait dans le tribunal de cassation des membres qui puissent résoudre les difficultés qui naîtront des localités. M. Prieur. Je demande que la section du comité de Constitution, ch irgée de la division du royaume, nous présente incessamment deux plans, dont chacun réunisse l’avantage de contenir un nombre proportionnel de départements, tant de ceux régis par le droit coutumier que de ceux régis par le droit civil, afin qu’autant que faire se pourra tous les points concourent à la formation de ce tribunal. M. Le Chapelier. La proposition de M. Prieur porte sur une erreur que nous devons bannir de nos délibérations; elle conduit à faire peiser que chaque sujet d’un département est particuliérement nommé pour le représenter. Quant à la diversité des lois, c’est une objection de nulle valeur. De quoi s’agit-il, en effet? de comparer l’arrêt rendu avec la loi; et si cette considération pouvait influer sur nos délibérations, il faudrait admettre dans le tribunal de cassation autant de membres qu’il y a de coutumes différentes. (L’Assemblée décrète que la moitié des départements qui élira en premier lieu les membres du tribunal de cassation sera déterminée, par le sort, dans une séance de l’Assemblée nationale.) M. de Menou, au nom du comité d'aliénation , propose à l’Assemblée, qui l’adopte, le décret suivant portant ventes de domaines nationaux à la municipalité d'Angers : « L’Assemblée nationale, sur le rapport qui lui a été fait par son comité de l’aliénation des domaines nationaux, de la soumission de la municipalité de la ville d’Angers, faite le 27 mars 1790, en exécution de la délibération de la commune de cette ville, du même jour, pour, et en conséquence du décret des 17 mars et 14 mai derniers, acquérir entre autres domaines nationaux, ceux dont l’état est ci-annexé, ensemble des estimations faites desdits biens le 30 septembre dernier et jours suivants, en conformité de l’instruction décrétée le 31 mai dernier, déclare vendre à la municipalité d’Angers, sise district du même lieu, département de Maine-et-Loire, les biens compris dans l'étal ci-annexé, aux charges, clauses et conditions portées par le décret du 14 mai dernier, et pour le prix de 601,201 livrets, ainsi qu’il est porté par les procès-verbaux d’estimation et payables de la manière déterminée par le même décret. » M. le Président donne lecture d’une lettre de M. Duportail, ministre delà guerre. L’Assemblée ordonne qu’elle sera imprimée dans son procès-verbal ainsi qu’il suit : « Monsieur le Président, « Le roi ayant daigné me confier le département de la guerre, mon premier soin est de porter mes hommages aux représentants de la nation, eu vous priant, Monsieur, de vouloir bien être mon interprète auprès de ce corps auguste. La crainte que l’emploi auquel j’étais appelé ne fût au-dessus de mes forces, m’a fait, je l’avoue, balancer à l’accepter; mais comment résister au désir de prendre une part active à une Révolution qui sera l’époque la plus mémorable de l’histoire, je ne dis pas seulement de la France, mais du monde entier? J’ai, d’ailleurs, considéré que les grandes difficultés étaient pour les législateurs qui ont à combiner, dans leur sagesse, l’ensemble des lois qu’ils donnent à l’Empire; que ma lâche se bornait à assurer par tous les efforts de mou zèle leur exécution, et à réduire ainsi eu pratique leur sublime théorie. Voilà la