(Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j tjimùre an il 9 11 (20 décembre I7U3 Suit le document des Archives nationales (1). Tableau moral et 'politique du département de l’Inare. « Citoyens représentants, « Nous vous l’avons demandé pour le salut de tous, ô vous qui siégez sur cette Montagne à jamais sacrée, où les diverses factions, sem¬ blables aux flots impuissants d’une mer agitée, viennent se briser et s’anéantir; n’en descendez, nous vous en conjurons de nouveau, qu’après avoir tout régénéré : la patrie a mis en vous sa plus chère espérance, la consolidation de sa liberté pour laquelle la volonté suprême de la nation s’est dès longtemps prononcée; elle l’at¬ tend de votre génie et de votre courage et certes la patrie sera satisfaite. « Déjà vous avez chargé votre comité d’ins¬ truction publique de répandre des feuilles de morale et la liste de ceux qui ont bien mérité de la patrie, convaincus que l’on ne peut assurer le triomphe de la liberté qu’en propageant les principes d’une saine morale et en inspirant l’amour de la vertu : que ce décret ne reste pas sans effet, citoyens législateurs, il préparera les esprits à profiter de l’instruction publique que la France attend impatiemment et que redou¬ tent les ennemis de notre sainte Révolution.- « Pour nous, citoyens représentants, nos soins de tous les instants sont de faire aimer les lois et chérir la Révolution; jusqu’ici nous nous sommes appliqués à élever nos administrés à la hauteur des circonstances en les éclairant sur leurs vrais intérêts. « Aussi à peine la loi qui voulait qu’il ne restât qu’une cloche par paroisse fut-elle connue, la descente s’en fit aussitôt; le rassemblement sur deux points de notre département suivit de près, et nous n’attendons que des ordres pour les expédier, ou un artiste pour les convertir en canons. « Mais rien ne nous a mieux prouvé que nos administrés étaient dignes d’être républicains, que le succès de notre arrêté du 29 brumaire qui enjoignait aux municipalités de retirer des églises l’argenterie et autres métaux utiles. « A peine avons-nous eu déclaré que le moment était venu où, pour la première fois, la patrie allait tirer avantage de ces simulacres de la superstition qui, jusqu’alors, gardés précieu¬ sement dans les temples, n’étaient montrés aux regards avec mystère que pour tromper plus sûrement la crédulité, que ces divers objets n’avaient été imaginés qu’afin d’établir plus solidement la domination de la secte sacerdo¬ tale; que ces monuments enfin de l’orgueil des prêtres nous offraient de grandes ressources pour achever de disperser les satellites de monstres servilement appelés rois. Les com¬ munes aussitôt se sont empressées de s’en saisir et de les déposer dans les chefs-lieux de district. « Nous avons fait plus, nous avons fait envi¬ sager à nos concitoyens l’inutilité et le danger de cette secte d’hommes dont l’égoïsme et les pas¬ sions avaient tant de fois fait parler la divinité pour armer et ensanglanter les nations. Saisis¬ sant une si heureuse occurrence, et dociles à la voix de la nature et de la raison, ils se sont (1) Archives nationales, carton G 285, dossier 826. rassemblés dans ces temples naguère consacrés à l’erreur, et par des chants patriotiques, ils y ont célébré le triomphe de la philosophie. « Le temps n’est pas loin, citoyens représen¬ tants, où la force de la raison consacrera la suppression de tous les cultes religieux. Déjà ce flambeau lumineux éclaire leurs ministres, et reconnaissant qu’ils ne professaient que le men¬ songe, ils renoncent au vil métier de tromper les humains, et tous à l’envi déposent leurs pou¬ voirs. « Ici, citoyens législateurs, nous nous ferons un devoir de payer un tribut à l’estime etr aux vertus républicaines. Si dans notre département les lumières ont fait un progrès rapide, le séjour de votre collègue Ingrand nous a utilement servi. Soigneux de voir tout par lui-même, il s’est porté dans les grandes communes de nos districts, et là, soit par des conférences frater¬ nelles, soit par des discours énergiques, ne par¬ lant partout et en toute occasion que le langage de la vérité, il a ranimé les esprits, réchauffé tous les cœurs et les a attachés par des liens indisso¬ lubles à la Révolution et à la sainte Montagne. Dès lors plusieurs patriotes se sont voués à l’apostolat de la liberté, et se répandant dans les campagnes, visitant les sociétés populaires, ils y propagent les maximes d’une saine morale et du plus pur républicanisme. « Pour imprimer plus de mouvement à l’admi¬ nistration et faire promptement jouir les admi¬ nistrés de vos lois bienfaisantes, des commis¬ saires choisis parmi nous ont parcouru les dis¬ tricts et ont pris des mesures vigoureuses pour que tout eût une marche plus célère. Dans tous, les biens des émigrés se vendent, la dissé¬ mination s’en fait avec avantage pour la Répu¬ blique; tout citoyen français goûtera à l’avenir la douceur de la propriété, son heureuse exis¬ tence fera dans peu l’objet des regrets de se3 voisins, qui rougiront alors d’avoir prêté leurs bras pour anéantir la plus juste des causes; ils verront qu’en vain ils s’étaient acharnés à com¬ battre un peuple généreux et magnanime qui, à votre voix, sîest levé et restera debout jusqu’à ce que les despotes coalisés soient rentrés dans le néant. « Dignes mandataires, vos noms ne périront jamais, les générations futures se rappelleront que par votre courage vous avez soutenu, exalté même le génie national; nos concitoyens sont à la hauteur où vous les désirez, leur dévouement est sans bornes. Le jeune cultiva¬ teur abandonne sans peine sa charrue, l’artiste son atelier, tous ayant appris que, pour affran¬ chir leur champ, leur propriété, il fallait que l’homme fût et restât libre; aussi accourent-ils avec ardeur se ranger sous la bannière de la liberté; « Le ministre nous a demandé trois bataillons. Un part, les deux autres vont le suivre, partie de notre jeunesse brûlant, ainsi que ses frères d’armes, d’aller se mesurer avec nos ennemis, volent sur les rives de la Loire, résolue d’y défendre tous les postes qui lui seront confiés et de concourir à exterminer les brigands; le reste des citoyens gémit de se voir enchaîné dans ses foyers faute d’armes. « Notre contingent de 30,000 hommes de cavalerie est à son poste, notre gendarmerie, même celle de remplacement, est aux armées du Rhin et de l’Ouest, et les citoyens pères de famille l’ont suppléée en faisant ce service im¬ portant avec le zèle de vrais républicains. 10 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j |û d