526 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. la carrière des honneurs militaires, et à leur assurer, après de longs services, une retraite honorable. Enfin, Messieurs, dans tout ce qui peut intéresser l’organisation de l’armée, vous ne perdrez jamais de vue tout ce que doit une grande nation à cette classe généreuse de citoyens, qui dévoue pour elle sa vie et une partie de son indépendance. Mais combien ce sentiment naturel ne sera-t-il pas fortifié par le souvenir de tout Ce qu’ont fait dans ces derniers temps ces militaires citoyens ,dont nous allons régler la destinée ! Combien n’avons-nous pas dû à leur patriotisme, et combien tout ce que nous aurons fait pour eux, ne nous sera-t-il pas rendu en actions de grâces, par cette nation qu’ils ont si bien servie! Ah ! sans doute, elle s’est montrée digne de sa destinée, quand on a vu les peuples s’armer de toutes parts pour la défense de ses représentants, et pour ainsi dire des bataillons sortir de la terre, aux premières alarmes de la liberté. Mais il est aussi digne d’elle de reconnaître les services de ceux qui l’ont si bien secondée, et de leur accorder cet espoir, ce bien-être et cette dignité qui doivent distinguer les guerriers d’une nation libre des satellites des despotes. Voici, Messieurs, la suite du décret, que j’ai l’honneur de vous présenter : « L’Assemblée nationale charge son comité de constitution de conférer avec le comité militaire pour lui présenter ses vues: c 1° Sur les règles qui doivent être établies relativement à l’emploi des forces militaires daus l’in-térieUr du royaume, et les rapports de l’armée, soit avec le pouvoir civil, soit avec les gardes nationales ; « 2° Sur l’organisation des tribunaux et les formes des jugements mililaires ; « 3° Sur les moyens de recruter et d’augmenter l’armée en temps de guerre, en supprimant le tirage de la milice : « Décrète dès à présent, comme articles constitutionnels : « 1° Que le Roi des Français est le chef suprême î de l’armée; « 2° Qu’aucun militaire ne pourra être cassé ni destitué de son emploi sans un jugement préalable; « 3° Qu’il ne pourra être établi, sous quelque prétexte que ce soit, aucune loi, règlements ni ordonnance tendant à exclure aucun citoyen d’un grade militaire quelconque; « 4° Que tout militaire retiré après seize années de services, jouira des droits de citoyen actif. « Décrète également, comme points constitutionnels, qu’il appartient au pouvoir législatif de statuer : 1° sur la somme à affecter annuellement aux dépenses militaires ; 2° sur le nombre d’hommes destiné à composer l’armée ; 3° sur la solde de chaque grade ; 4° sur les règles d’admission au service et d’avancement pour tous les grades; 5» sur les formes des enrôlements ; 6° sur l’admission des troupes étrangères au service de l’Etat ; 7° sur les lois relatives aux délits et peines mili-taires* « Décrète, en outre, que le Roi sera supplié de faire incessamment présenter à l’Assemblée nationale ses vues sur l’organisation de l’armée, pour être ensuite délibéré par elle sur les divers objets qui concernent le pouvoir législatif. » Plusieurs membres demandent l’impression du discours de M. Alexandre de Lameth. 19 février 1790.] M. le Président prend le vœu de l’Assemblée qui prononce l’impression. M. le duc de Liancourt, dëpute’de Clermont en Beauvoisis (1). Messieurs, votre comité militaire a successivement soumis à votre délibération deux rapports différents, Par le premier, il vous a présenté des vues sur quatre des plus importantes questions de la constitution de l’armée, la combinaison des différentes armes, le nombre d’officiers, et les dépenses de l’administration générale du département de la guerre, dans lesquelles sont comprises les sommes affectées à chaque /détail, et particulièrement la solde et le traitement des soldats et officiers. Par le second rapport, votre comité embrasse les rapports des milices nationales et des troupes réglées, et vous présente des vues sur l’avancement des officiers et soldats, en conservant le titre de citoyen actif à tout militaire au service qui peut en remplir les conditions, et en le donnant, par l’effet seul de ses anciens services, à celui qui se retirerait sans les pouvoir remplir. Il est impossible de ne pas applaudir aux principes sages et patriotiques, aux vues saines et éclairées dont sont remplis ces différents rapports; de ne pas approuver le travail immense dont ils sont le résultat ; mais il me semble que, par l’immensité et la nature des détails qu’ils renferment, ils ne peuvent pas être délibérés par l’Assemblée nationale, dans la forme dans laquelle ils vous sont présentés. L’Assemblée nationale, revêtue du pouvoir constituant, a, sans doute, le droit d’entrer dans les détails de toutes les différentes parties de l’administration de l’empire ; mais si elle en a le droit, il ne lui est pas moins nécessaire d’examiner quels moyens elle peut employer pour l’exercer. Il est, relativement à la constitution militaire, des parties sur lesquelles il faut absolument qu’elle prononce; des parties qui ne peuvent recevoir un ordre certain et fixe que par elle ; des parties auxquelles il convient qu’elle appose le sceau de sa puissance; mais il en e3t sur lesquelles elle ne peut pas être assez profondément instruite pour prononcer sans inconvénients; il en est qu’elle ne peut pas prétendre fixer par des lois ou des règlements positifs, parce que leur perfection est encore un problème; il en est sur lesquelles, par prudence, elle ne devra pas prononcer, pour ne pas préparer ; par des décisions précises, des embarras ultérieurs au pouvoir exécutif. D’ailleurs comme Assemblée nationale considérée en elle-même, ne se pourrait-il pas qu’elle ne comptât parmi ses membres aucun militaire? Dans les motifs divers qui ont déterminé le choix de nos commettants, les connaissances réfléchies sur l’armée et sur l’art de la guerre ontdûtêtre comptées pour rien : cependant pour prétendre statuer en détail sur les combinaisons les plus parfaites de la formation de l’armée, il faut connaître les différentes parties de cette science; etcette science tient nécessairement à la connaissance des plus grands principes militaires, à la connaissance de tout ce qu’il y a de plus parfait en ce genre chez nos voisins, à leur comparaison avec nos mœurs, nos besoins, notre population Les armées de Prusse et de l’empereur, généralement reconnues supérieures à la nôtre par leur Le Moniteur se borne à mentionner le discours de Mi le doc de Liancourt.