379 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [7 octobre 1789.] r CONCLUSION. Les administrateurs trouveront, dans les chapitres précédents, le peu de règlements positifs que la compagnie a jugé à propos de leur prescrire, et desquels elle exige qu’ils ne se départent point sans y être autorisés par délibération d’une assemblée générale; mais ils remarqueront que l’esprit général de ces règlements n’est, pour ainsi dire, que préservatif ; qu’on n’a eu en vue que d’éviter les abus, diminuer les risques, et prescrire en général l’ordre, la méthode, la sûreté et la surveillance. Tous ces moyens tendent sans doute essentiellement à la solidité et à la permanence de l’établissement, et, en cela, à augmenter la confiance du public, si nécessaire au succès de la caisse d’escompte. Mais il est des vues générales, des précautions, pour ainsi dire, intellectuelles, qui tiennent au véritable esprit de la chose, que nul règlement ne peut prescrire, qu’aucun conseil ne peut suppléer. C’est là ce que les actionnaires attendent principalement du zèle, de l’expérience et de la sagacité des administrateurs de leurs affaires. Ils se contenteront de recommander ici à l’administration de regarder la prudence et la modération comme leurs premières vertus ; de se rappeler qu’il n’y a de profit désirable, que celui qui promettra permanence et solidité, et qu’on n’est jamais aussi assuré d’être efficacement utile aux autres, que lorsque c’est sans risques ni dangers pour soi, Leur premier et constant devoir sera de concilier l’utilité publique avec celle de la caisse d’escompte. Ces intérêts bien entendus sont en effet inséparables; et nous ne devons point oublier que la confiance publique, source de tous nos bénéfices, exige de notre part un retour de vigilance, d’exactitude et de sacrifices même, s'il pouvait en être besoin, afin de rendre notre établissement de plus en plus utile. fiour cela, nos administrateurs doivent tendre sans cesse vers l’augmentation progressive de la masse de nos billets en circulation, non-seulement dans Paris, mais dans toutes les provinces du royaume. Cette nouvelle voie de communication facilitera les versements, en même temps qu’elle dispensera des transports; et cette double utilité lui méritera les importantes facilités que l’administration publique peut seule lui procurer, celles de faire recevoir nos billets dans toutes les caisses royales. Il faudra aussi s’occuper continuellement des moyens de multiplier les comptes courants avec les particuliers de tous les ordres, et avec toutes les grandes caisses, sources fécondes de jouissances d’argent et de facilité pour le service intérieur ; mais, pour rendre tous ces avantages permanents et durables, il faut que rien ne puisse altérer la résolution prise par la compagnie de garder toujours, en espèces réelles en caisse, une somme amplement suffisante pour faire face à toutes les demandes. La proportion fixée à cet égard, par les statuts du 22 novembre, doit être regardée comme stricte et de rigueur ; nulle considération ne doit engager l’administration à la diminuer, fût-ce même pour un jour. Ce doit être pour elle une règle inviolable et sacrée. A quelque somme que nos enga-ment's puissent s’élever à l’avenir, sur quelque surface qu’ils puissent être répandus, quelque résultat qu’ait donné l’expérience, il ne faudra jamais baisser la proportion au-dessous de celle du tiers au quart, fixée parles statuts. Non-seulement la sûreté des actionnaires et des porteurs de nos engagements exige que cette réserve soit toujours intacte, l’utilité publique veut encore qu’on accumule la somme des espèces en caisse à mesure qu’on augmente la circulation des billets ; car il est de principe incontestable, que toute circulation de papier, faisant office d’espèces, a une tendance directe à diminuer la quantité des espèces réelles en circulation. C’est pour tempérer cet effet du papier circulant, que la réserve ordonnée doit être inviolablement maintenue comme principe de l’administration publique. Cette proportion, au reste, n’est établie que pour les temps ordinaires et tranquilles. Il en survient quelquefois d’autres ; nos administrateurs seront plus que nous à portée de les prévenir ou de s’en garantir. Ils sont communément annoncés par des opérations forcées, des mouvements inusités, des transports d’argent et des soubresauts dans Ja circulation. Au moindre avertissement de cette espèce, à chaque crue ou diminution subite de nos billets, nos administrateurs redoubleront de surveillance, et tâcheront de remonter aux causes; mais une diminution sensible de l’escompte, tant en masses qu’en échéances, afin de remonter la proportion dés espèces au-dessus de la fixation ordinaire, sera le premier effet de la plus légère inquiétude; le reste dépendra d’eux. En acceptant d’entrer dans l’administration de la caisse d'escompte, iis doivent à la compagnie leurs soins, leur vigilance, l’emploi de tous leurs talents pour l’utilité commune ; et les actionnaires leur devront, en retour, confiance, reconnaissance, soutien; ce sera de cette réunion heureuse que résultera l’oübli des malheurs passés, et le raisonnable espoir d’une prospérité solide dans l’avenir. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DÉ M. MOUNIER. Séance du mercredi 7 octobre 1789, au matin. La séance est ouverte par la lecture des procès-verbaux des séances de la veille. M. Démeunier , secrétaire, annonce que MM. Robert et Hercule Grémont, Anglais, adressent à l’Assemblée nationale une lettre, écrite dans leur langue, par laquelle ils manifestent le zèle le plus ardent pour la liberté de la France. M. Bouche demande que T Assemblée reprenne le travail de la Constitution et que la séance ouvre, chaque jour, à 9 heures du matin. Cette motion est adoptée. M. le Président donne lecture de l’article 5 du projet du nouveau comité de Constitution, sur l’organisation du Corps législatif. 11 est ainsi conçu : « Art. 5. Toute contribution sera supportée également par tous les citoyens et par tous les biens, sans distinction, » M. deBoisgelin, archevêque d'Aix, propose de dire sur les biens et les revenus.