[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARMEMENTAIRES. [30 août 1791.] fil que l’étranger n’a droit de faire porter la sienne chez vous : ainsi passons à l’ordre du jour. M. Lavie. J’ai des faits très graves à expliquer à l’Assemblée, et je demande â être entendu. M. d’André, rapporteur. L’Assemblée jugera sans doute qu’on ne peut induire de ce fait particulier aucune conséquence défavorable contre les intentions de l’évêque de Bâle. J’observe que, si l’on consent d’entendre les faits de part et d’autre, cela sera interminable, parce que bien d’autres lettres et celles des députés de Franche-Comté annoncent aussi des faits particuliers. Ainsi l’évêque de Bâle se plaint de 30 ou 40 faits différents. Les municipalités et les districts voisins se plaignent de ce que l’on arrête les Français à Porentruy; qu’on leur fait quitter l’habit national; qu’on les empêche de faire leurs affaires. Ce sont des plaintes qui sout inévitables quand une nation est dans un état de révolution, et que la nation voisine ne veut pas se mettre en état de révolution. 11 en résulte nécessairement que celle qui est en état de révolution voudrait étendre ses principes chez les voisins; que le prince voisin qui ne veut pas être en révolution fait tout ce qu’il peut pour l’empêcher, et qu’il y a tous les jours des rixes particulières ; cela ne peut pas inquiéter. Je demande donc que l’Assemblée passe à l’ordre du jour. (L’Assemblée, consultée, décrète qu’elle passe à l’ordre du jour.) M. Roussillon, au nom, du comité d’agriculture . et de commerce, donne connaissance à l’Assemblée de l’inquiétude que les habitants de Toulon et l’administration du Var ont conçue sur la manière dont est rédigé l’article 5 du décret du 22 juillet dernier, concernant le commerce des Echelles du Levant et de Barbarie , et sur le silence u’il garde relativement au lazaret de To don. Il emande, en conséquence, qu’il soit ajouté à cet article et s mots : « Sans entendre rien innover au sujet du lazaret de Toulon, qui continuera d’exercer le droit de donner la quarantaine, comme par le passé. » (Cette addition est décrétée.) En conséquence, l’article 5 (modifié) du décret du 22 juillet 1791 est ainsi conçu : Art. 5. « Les retours du commerce du Levant et de Barbarie pourront se faire dans tous les ports du royaume, après avoir fait quarantaine à Marseille et avoir acquitté les frais et les droits imposés pour l’administraiion du Levant, à la charge de rapporter un certificat de santé; sans entendre rien innover au sujet du lazaret de Toulon, qui continuera d’exercer le droit de donner la quarantaine comme par le passé. » L’ordre du jour est la suite de la discussion du projet de décret des comités de Constitution et de révision sur la prochaine assemblée de révision { 1). M. le Président. Plusieurs membres ont demandé la parole pour proposer de nouveaux plans; M. Camus la demande pour une motion d’ordre ; je la lui donne. M. Camus. Messieurs, j’ai demandé la parole pour une motion d’ordre. Je n’ai point de discours préparé contre le plan du comité; mais je crois que ce plan n’est nullement proposable. Avant tout, une chose à remarquer, c’est qu’il est infiniment essentiel pour l’Assemblée nationale de terminer ce qui regarde la Constitution ; qu’il s’agit ici de l’intérêi total de la patri ■. Je crois que si nous ne lerminons pus prompiement cette Constitution, que si nous ne la présentons pas très promptement au roi, il y aura les plus grands malheurs à redouter. Je crois qu’il ne faut pas s’occuper d’objets qui nous sont étrangers ; je ne prétends inculper personne; je rends, au contraire, justice au zèle et à l’activité avec lesquels le comité de Constitution s’est livré au travail; mais je juge par les faits, et je pense que le plan du comité de Constitution, avec tous les détails qu’il contient, détails qui me paraissent entièrement inutiles, pourrait nous prendre 5 jours de discussion ; que tous les plans que l’on présentera en comparaison avec celui du comité nous tiendront encore un temps infini; que la semaine entière s’écoulera avant que l’article des Conventions nationales soit ter-r miné; que la semaine prochaine se passera avant qu’on ait entamé le mode de présentation au roi. Or, j'observe que c’est là le plus grand malheur qui puisse nous arriver (Applaudissements.)-, j’ob-serverai encore que, dans notre situation actuelle, nous n’avons rien à craindre que de notre propre inertie, que du défaut d’exécution de tout ce que nous avons décrété relativement aux princes étrangers; ce n’est pas par leur propre force que nous devons les craindre, mais c’est par notre propre faiblesse ; et il faut convenir que notre faiblesse augmente tous les jours, et qu’elle s’augmentera à chaque heure où nous reculerons le terme de nos travaux, parce que, dans cette position, nous avons des factions qui s’é évent dans l’Assemblée même. Encore une fois, je suis loin d’inculper personne; mais je ne vois plus, malheureusement, dans cette Assemblée, cette belle, cette grande majorité, qui fit éclore les actes héroïques des 17 et 20 juin. (Bravo! bravo! Vifs applaudissements.) On a cherché à nous diviser ; malheureusement, on y est parvenu : on ne sait plus de quel côté se rallier. Il n’y a qu’un moyen d’espérer la réunion, c’est de ne nous occuper que des grands principes. C’est dans les détails où chacun, ayant un plan différent, qu’il croit en apparence pouvoir concilier avec le bien public, attaque ses adversaires, et alors telle chose qui arrive, il se trouve un parti mécontent. Lorsqu'on a succombé sur un point, on cherche à rétablir son opinion, à la faire revenir par quelques incidents. ( Vifs applaudissements.) Mais ce n’est pas là tout, Messieurs, et il ne suffit nas de jeter un regard douloureux sur notre faiblesse, de gémir sur nos divisions, sur notre lassitude, sur notre indifférence : il faut considérer aussi ce qui se passe au dehors. Voyez les ministres; voyez, je vous prie, ce qu’ils font, ou plutôt ce qu’ils ne font pas. Combien de décrets avons-nous rendus qui ne sont pas exécutés! Vous aviez ordonné qu’ils viendraient tous les deux jours vous rendre compte de l’exécution des lois : ils n’y viennent pas, et ils ne vous rendent aucun compte. Voyez-les quand ils arrivent ici : si vous h ur donnez quelques ordres, rien de plus soumis. Nous sommes jdloux, disent-ils, d’exécuter tous vos ordres; tout ce que la sagesse de l’Assemblée prévoira, nous sommes tous prêts à l’exécuter, nous ferons tout ce que l’Assemblée désirera. Mais est-ce (1) Voy. ci-dessus, séance du 29 août 1791.