83 [Actemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [21 septembre 1789.) mêmes épreuves, nous nous soyons entièrement corrigés en un jour de cette légèreté de caractère, de cette faiblesse de mœurs dont on nous avait soupçonnés jusqu’aujourd’hui. Enfin l’Angleterre a su échapper à cette hydre de l’aristocratie, qui se nourrit de la substancë des peuples et s’enorgueillit de leurs humiliations. Elle vit encore au milieu de nous ; déjà pleine d’une confiance nouvelle, elle relève cent mille têtes menaçantes et médite de nouvelles trames pour rétablir son pouvoir sur les ruines de la liberté et peut-être sur les vices mêmes de la Constitution naissante. Combien de germes de tyrannie peuvent se développer encore à chaque instant et avec, une fatale rapidité dans ce vaste empire ! Enfin telle est la situation et le caractère du peuple français qu’upe excellente Constitution, en développant cet esprit public et cette énergie que promettent le souvenir de ses longs outrages et les progrès de ses lumières, petit le conduire ep assez peu de temps à la liberté ; mais qu’une Constitution vicieuse, une seule porte ouvertë au despotisme et à l’aristocratie doit nécessairement le replonger dans un esclavage d’autant plus indestructible qu’il sera cimenté par là Constitution même. Aussi, Messieurs, Je premier et le plus noble de nos devoirs était d'élever les âmes de iios concitoyens, et par nos principes et par nos exemples, à la hauteur des idées et des sentiinëfits qu’exige cette grande et superbe réyolution. Nous avions commencé à le remplir et dé quel prix doux et glorieux leur généreuse sensibilité n’avait-elle pas déjà payé nos travaux et nos dangers. Puissions-nous désormais ne pas rester au-dessous de pos sublimes destinées, puissions-nous paraître toujours dignes de notre mission aux yeux de la France dont nous devions être les sauveurs, aux yeqx de l’Europe dont nous pouvions être les modèles. M. SaJIé 4e Choux (1), Opinion sur le veto royal $). Messieùrs, de toutes les questions qui peuvent s’agiter dans l’Assemblée nationale, la plus grande, la plus importante, est de savoir si le Roi est une des parties constituantes du pouvoir législatif. Les uns disent que l’Assemblée étant dépositaire de tous les droits de la nation, le Roi ne peut jamais refuser une loi qu’elle lui aurait proposée. D’au! res considérant que le Roi lui-même est le premier représentant de son peuple, lui accordent le droit de veto contre les décrets de l’Assemblée; mai 3 ils soutiennent que le peuple doit juger en ce cas, et que sa décision devient la loi du Roi lui-même. J’attaque ici ces deux opinions ; et en avouant avec tous que l’autorité suprême réside dans la nation, je soutiens que dans la pratique, l’appel au peuple est un moyen illusoire et que le veto du Roi est la seule base sur laquelle puissent reposer une bonne Constitution et la garantie de notre liberté. Il y a dans tout gouvernement politique, trois grands pouvoirs, le législatif, l’exécutif et le jii-(1) L’opinion de M. Sallé de Choux n’a pas été insérée au Moniteur. (2) Cent personnes s’étaient fait inscrire pour discuter cette question dans l’Assemblée : j’étais du nombre, mais toutes ne pouvant être écoutées, j’ai pris le parti de faire imprimer mon opinion. {Noie de l’auteur.) diciaire,ils appartiennent tous les trois à la nation; mais comme leur réunion dans les mômes mains conduirait à la tyrannie, il n’est personne qui ne sente la nécessité de les diviser, la nécessité plus grande encore de Jes limiter, de manière qu’ils rie puissent jamais s’agrandir aux dépens de la liberté publique. Si donc vous voulez une bonne Constitution, mettez à chacun de ces pouvoirs des barrières si fortes qu’on ne puisse jamais les franchir : car si leur organisation est telle que l’un d’eux puisse envahir les autres, lq Constitution est mauvaise, et la liberté publique en danger. Ainsi tout le dionde a senti la nécessité de li* miter le pouvoir exécutif parce que, dépositaire de toutes les forces, il pourrait en abuser enfin pour s’élever au-dessus des lois. Mais il est bien plus nécessaire encpre de limiter le pouvoir législatif ; car tandis que le pouvoir exécutif ne reoverse les lois que pas à pas, le pouvoir législatif peut les anéantir d’un souffle, puisque c’est sa volonté qui les crée, Toute puissance tenu perpétuellement h s’agrandir : simples citoyens, corps, nattons, peu importe; l’impulsion est commune à tous, Si donc vous ne limitez pas là puissance législative confiée à cette Assemblée, vous la verrez bientôt embrasser les différents pouvoirs qui constituent le gouyernement politique ; pomme tous émanent d’elle, aucun ne peut l’arrêter dans sa course : alors elle pourra tout ee qu’elle voudra; ce qui est 1§ yrai despotisme. Mais comment borner le pouvoir législatif? C’est lui qui fait la loi, lui qui trace aux autres la marphe qu’ils dfiûvpnt suivre : quelques décrets qu’il prononce ppur se liqpter luRmême, je n’y yois que de simples résolutions qu’il pourra changer à son gré. , Le seul moyen de limiter le pouvoir législatif c’est de le diviser : car alors 'chaque partie pouvant être arrêtée par l’autre, limite réellement sa puissance, et l’arrête qgàpd elle veut �agrandir, Ainsi en Angleterre, lé rpi et le parlement sont parties constituantes de la législature ; ainsi dans les États-Unis fie l’Amérique, le Congrès ou Corps législatif est formé de deux, Chambres, lé SéDat et les représentants; et il faut le concours des deux pour rétablissement d’une loi. Ils ont senti, ces peuples sages, qüe sans cette diyision, une Chambre unique de législature courrait à grands pas vers le despotisme, et si par un miracle cela u’arrivait pas, toujours est-il vrai que les peuples n’auraient d’autré moyen que la révolte pour empêcher les mauvaises lois que l’erreur ou Finîéjret aurait dictées (1). Ainsi donc i’intér,êt commun, le cri de la raison de stabilité du gouvernement se réunissent pour établir la nécessité du veto contre lés décrets de i’ Assemblée et ce droit né peut appartenir qu’au Chef suprême, au premier représentant dë la nation* Mais ce veto sera-t-il absolu? ou bien le peuple deviendra-t-il juge entre le Roi et l’Assemblée ? Toutei’autoritë, a-t-on dit, réside dans la nation seule ? C’est d*ëilë que le souverain a reçu ses pouvoirs et sa dignité, c’est d’elle que l’Assemblée tient tous ses droits ; mais quelle qüe soit leur puissance respective, il y en a une au-dëssus d’eux téus, celle du peuple qui leè a choisis. Si donc ils (4) Si les jm�yyaises soat à cramdre, c’est surtout chez uüjè nation img�tueüse gui dans lés affaires les plus graves se décidé pjutôj pàr une sorte d’élan qu’à l’àjde d’alaèdongué rénèxion'. 84 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [21 septembre 1789.] diffèrent entre eux dans l’exercice de leurs pouvoirs, c’est au peuple seul à juger et à dicter les lois qu’ils doivent suivre. Voilà une théorie sublime; joignez-y l’appât décevant de cette liberté qu’elle présente, l’appât plus grand encore de cette augmentation de pouvoir qu’elle nous promet et ne nous étonnons plus de l’impression qu’elle a faite sur tant de membres de cette Assemblée. Mais avant d’adopter ces idées, il convient de les examiner dans la pratique. Or, il me semble d’un côté, que la nation ne pourrait jamais juger un tel appel, de l’autre que quand ellele pourrait, elle ne doit pas le faire. En effet, cet appel sera porté aux assemblées élémentaires. Or comment concevoir qu’elles pourraient juger sainement un point délicat de législation ou un plan d’administration ? Sans doute, il s’y trouve quelques hommes doués d’un grand talent ; mais outre que ce talent a plus souvent pour objet les sciences d’agrément ou d’utilité particulière qu’une étude profonde du gouvernement; c’est que le plus grand nombre des citoyens qui paraissent à ces assemblées, vit plus occupé de ses affaires personnelles que de la chose publique. Or, pourront-ils parcourir tous les points de la question, en saisir toutes les conséquences, calculer enfin tous les avantages où les inconvénients qu’elle présente? Que sera-ce surtout si la loi proposée paraît blesser quelque intérêt particulier ? Chacun verra la question sous lepoint de vue qui lui convient, et l’amour-propre, l’intérêt ou une apparence de rai son guidant le plus grand nombre, vous n’aurez qu’une décision erronée. Ce n’est pas tout : les membres de l’Assemblée nationale épars dans les provinces, y répandront leurs principes. Il ne faut pas juger l’homme tel qu’il devrait être, mais tel qu’il est en effet. Et il est hors de doute que, par une suite nécessaire de l’attachement, àson opinion ils chercheront à la faire adopter. Si donc vous considérez, d’une part la confiance que la nation doit naturellement avoir dans ses représentants, de l’autre, l’avantage qu’a nécessairement sur tous les citoyens des différentes classes, unhommeun peu versé dans la science du gouvernement et les détails de l’administration, il est impossible de douter que la décision du peuple ne soit probablement toujours favorable aux décrets de l'Assemblée. Ainsi l’erreur, l’intérêt, le tempérament et bien souvent la séduction, voilà les bases des résolutions qui seront prises, voilà où se réduit dans la pratique cette théorie sublime qui rendrait le peuple juge entre le Roi et l’Assemblée. Je vais plus loin : quand même la nation pourrait juger un tel appel, il est de son intérêt de s’en interdire le droit. Remarquez en effet que le peuple exerçant la plénitude des pouvoirs deviendra plus jaloux d’assurer les lois qu’il aura dictées ; et comme dans l’examen des divers jugements sur l’appel, il faudra nécessairement en rejeter plusieurs pour s’en tenir à un seul, le feu de la discorde s’allumera dans les provinces, une guerre civile en sera la suite. Le moins qu’il pût arriver, c’est que les provinces ne voulant pas céder l’une à l’autre, et la même décision pouvant être avantageuse à celle-ci, nuisible à celle-là, chacune adoptât le régime qui lui conviendrait. Mais alors la France se divisera insensiblement en une multitude de petits Etats : le gouvernement fédératif sera substitué à cette unité de forces et de volontés qui convient à un grand royaume. Et qu’on ne dise pas que le peuple alors serait d’autant plus libre que toute autorité résiderait dans ses mains : outre que cette liberté aurait ses dangers, une telle idée est même fausse. Nulle part le peuple ne gouverne : partout au contraire il est gouverné, ici par un roi, là par un despote, ailleurs par l’aristocratie, et quant à la démocratie pure, c’est une chimère, car cette autorité de tous dont on amuse le peuple, n’est au fond que l’autorité de quelques citoyens puissants qui se partagent l’Etat. Ce ne serait donc plus le peuple qui exercerait le pouvoir absolu, mais bien l’Assemblée nationale. Or, comment arrêter ce Corps dont la volonté seule crée les lois ou les anéantit ? Quelle digue opposer à ce torrent ? Bientôt vous la verriez déclarer ses membres inamovibles, s’attribuer le pouvoir exécutif, nommer des magistrats, changer la forme du gouvernement, etc, . etc. ; et si, pour ne point trop alarmer le peuple, on conservait le vain titre de royauté, la réunion de tous les pouvoirs dans une seule Chambre, constituerait dans le fait une véritable Assemblée. Au lieu d’un maître nous en aurions douze cents. Tel fut le Sénat de Suède, avant la dernière révolution. Telle serait la France avant vingt ans. J’ai entendu quelques personnes dire, que la Constitution prévenait ces dangers, etque l’Assemblée ne pourrait y rien changer. Mais qui. donc la défendra, cette Constitution, des atteintes qu’on voudrait y porter? Dira-t-on qu’elle est sous la sauvegarde delà nation entière ? Mais une nation éparse, divisée, sans aucun point de ralliement et dont les membres sont perpétuellement distraits par le soin de leurs affaires personnelles, n’opposera jamais une résistance égale à la force d’un corps toujours uni, toujours actif. Il n’y a qu’une insurrection générale qui pût l’opérer, c’est-à-dire le plus grand des malheurs. Le pouvoir législatif absolu d’une seule Chambre est trop dangereux pour la liberté publique, il lui faut un contre-poids ; et l’intérêt même du peuple est d’accorder à son chef le droit d’admettre ou rejeter les lois qu’on lui proposera. Quel danger y a-t-il? 11 faut d’abord bien prendre garde que, dans l’exercice de la législature, l’initiative appartient à la nation seule. Le droit du Roi ne peut donc jamais être de faire des lois, mais seulement de les empêcher, s’il le juge convenable, Si donc la loi proposée est mauvaise, le veto sera utile. Si elle est bonne, pourquoi supposer que le Roi la rejettera? Les droits du Roi une fois déterminés par la Constitution, le souverain n’a plus rien à discuter avec la nation. Son intérêt dans l’exercice de la puissance législative ne peut donc plus être qu’un avec celui de son peuple. D’ailleurs la liberté de la presse éclaire l’opinion publique et la dirige , cette opinion asservit jusqu’aux Rois; et son empire se réunissant à cette masse immense de forces qui réside dans la nation, le souverain sentira qu’une résistance injuste serait vaine, et dès lors ne rejettera pas une bonne loi. D’un autre côté n’est-ce pas de la libéralité seule du peuple que le Roi peut obtenir des subsides? La force d’un tel moyen est incalculable : car comme l’argent est le grand ressort des affaires, celui qui dépend sur cet article est dans une 85 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [21 septembre 1789.] véritable dépendance sur tout le reste quel que soit d’ailleurs son pouvoir nominal (1). Mais enfin, supposons qu’égaré par l’ambition ou trompé par ses ministres, le souverain refusât une bonne loi, ce moment de crise passera, à la session suivante, ou si vous voulez, à la troisième, la loi sera reproposée et probablement admise. Mais ce retard, la perte même d’une bonne loi, sont bien au-dessous des malheurs qui naîtraient d'une Chambre unique de législation : et comme aucune institution humaine ne peut être parfaite, la véritable sagesse consiste à choisir celle qui offre moins de dangers. Le veto du Roi n’emporte donc point de grands inconvénients : au contraire, il est nécessaire pour assurer la Constitution contre les entreprises du pouvoir législatif trop indéfini. Les lois aussi en seront meilleures, car l’Assemblée nationale, sentant qu’elle peut être arrêtée par le souverain, soignera plus son travail que si rien ne devait s’opposer à ses résolutions. L’exemple de l’Angleterre justifie ces grandes vérités : le veto le plus absolu y appartient au roi. Combien de fois en a-t-il usé dans le cours de plus d’un siècle? une seule. Et ses lois valent bien les nôtres. Je remarque ici une progression effrayante dans les idées. Il y a un an, on ne parlait que d’exposer au Roi des abus et le supplier de les réformer. Bientôt on a dit que la nation seule pouvait consentir les impôts. Ensuite qu’elle seule devait proposer les lois pour être, dit le cahier de la banlieue de Paris, agréées ou refusées par le souverain. Aujourd’hui, on veut ôter au Roi le droit de sanction ou le réduire à rien, ce qui est la même chose. Demain, on voudra plus encore. Tel est l’effet du sentiment et de l’abus de ses forces, mais malheur à qui ne sait pas s’arrêter au point que la raison lui marque ! Eh I qui sommes-nous ici ? Les représentants du peuple. Mais g que pense donc le peuple sur cette sanction ? Lisez tous vos cahiers : partout on verra que nos commettants dans la simplicité de leurs cœurs, dans la droiture de leur conscience confèrent ce droit au Roi. Des cahiers, dit-on, ne sont pas des lois, mais seulement des instructions ! Peut-être ; mais enfin ils annoncent que le vœu de toute la France est en faveür de ce veto et nous, les représentants du peuple, nous devons d’autant plus respecter ce cri universel que c’est le seul moyen d’assurer la Constitution et le salut de l’Etat. Craignons que ce souverain qu’on cherche à rendre nul, ne s’arme enfin lui-même de son désespoir; et qu’abusant alors à son tour de la force des circonstances, il ne s’élève plus haut même qu’il ne veut être aujourd’hui. Le despotisme actuel delaSuèden’estdû qu’à l’abaissement où le Sénat voulut plonger son Roi. La monarchie est le seul état qui convienne à un grand peuple ; mais en créant un chef suprême, il faut l’investir d’une autorité proportionnée à (1) Ce moyen est trop dangereux pour que jamais l’Assemblée dût en faire usage, et si je le rappelle ici, c’est uniquement pour faire sentir ce que le souverain pourrait craindre d’un instant de désespoir et combien il a de raisons de ne jamais cesser d’être juste. l’éclat de son rang, à l'étendue des devoirs qu’il lui impose, sans cela la majesté du Trône est flétrie; le respect du peuple tombe ; la force exécutrice s’affaiblit; les lois sont violées; l’administration languit ; une anarchie funeste en est la suite ; car tout se tient dans ce grand ensemble. Loin d’ici de pareils malheurs. Nous sommes Français, c’est-à-dire un peuple fidèle et bon, dont le caractère distinctif est l’amour de son Roi, non pas d’un roi imaginaire, d’un simple exécuteur de volonté, d’une machine (passez-moi le terme) qui ne tournerait qu'au gré de l’Assemblée ; mais d’un magistrat suprême, le chef, l’ami, le père de ses sujets, dont la volonté concourt avec la leur pour assurer le bonheur public, dont la puissance égale l’étendue des devoirs qu’il doit remplir et dont la majesté représente noblement le peuple qu’il a l’honneur de commander. Aimons notre liberté; sans elle, il n’est point de dignité, ni de bonheur; mais songeons qu’elle ne peut exister que dans l’équilibre des pouvoirs publics. Ainsi gardons-nous de cet élan impétueux qui nous jetterait hors des bornes que la raison nous marque. Le veto du souverain peut seul empêcher l’abus qu’une Chambre unique de législature pourrait faire de sa puissance. Rallions-nous donc auprès du Trône pour le défendre contre nous-mêmes, et donnons à i’univers étonné un spectacle bien rare, celui d’une grande force réunie à une sagesse plus grande encore. M. Desèase, député de Bordeaux (1 ).Opinion sur la sanction royale (2). Messieurs, jamais plus importante question ne fut soumise à votre examen. Ce n’est plus le moment de ces discussions rapides qui donnent tant de poids à l’éloquence et tant d’avantages à l’erreur. Une loi constitutionnelle aussi intéressante aura nécessairement une influence marquée sur la destinée de ce beau royaume et lui présage une longue suite de prospérité ou de nouvelles et peut-être d’interminables convulsions : elle exige donc de sérieuses méditations et des débats approfondis. On a attaqué la sanction royale, je ne dirai pas avec courage, ce serait un abus du mot, car il est trop évident que le courage n’est maintenant que dans la modération, mais on l’a attaqué avec force ; et en effet je conçois que, quand on n’est frappé que des fautes des erreurs et des attentats d’un gouvernement sans règle, on l’a bientôt jugée quoique cependant ces attentats n’aient eu pour cause que l’exercice du droit de faire des lois et non de les sanctionner. Mais les longs ressentiments d’un peuple qui a brisé ses fers, doivent être oubliés au moment où il se crée une Constitution: cen’estplusde ses passions qu’il doit emprunter ses lumières, et sa haine du despotisme ne doit pas nuire à son amour de la liberté. Or, c’est cet amourmême de la liberté qui nous presse aujourd’hui d’affermir la puissance royale sur le fondement inébranlable de la loi. Cette puissance n’était depuis longtemps si hardie, que parce qu’elle était faible, le despotisme l’affaiblissait lui-même : il la dévorait par ses excès, et l’esclavage du monarque avait précédé celui des sujets. Rendons-lui sa force, en lui rendant ses limites, (1) L’opinion de M. Desèze n’a pas été insérée au Moniteur. (2) Cette opinion devait être lue dans la séance du 4 septembre. ( Note de Vauteur.)