164 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE remise, sans délai, à titre de secours, à la citoyenne Marie Clericeau, veuve Dorion, qui s’est retirée dans ladite commune de Nantes, avec ses cinq enfants, après avoir perdu généralement tout ce qu’elle possédoit. « II. — La pétition et les pièces jointes, seront envoyées au comité de liquidation pour régler les indemnités qui pourront être dues à ladite veuve Dorion. « III. — Le présent décret ne sera point imprimé; il sera seulement inséré au bulletin de correspondance » (1). 50 Isoré communique des vues qui sont le fruit de son expérience, sur l’agriculture en général, et sur les moyens d’approvisionner la ville de Paris (2). J. ISORE : C’est de l’agriculture que je vais vous parler; car il est intéressant pour le bien public de nous occuper souvent de cette matière. Je parlerai en même temps de l’approvisionnement de la commune de Paris et des établissements qu’il faut faire pour garantir cette célèbre cité des machinations que ses ennemis lui susciteront sourdement tant qu’ils se souviendront qu’elle enfanta la liberté. Je vais m’expliquer d’après ce que j’ai vu; la théorie n’y entrera pour rien; les économistes auront tout à prendre sur ce que je dirai; ma seule ambition est de donner à la Convention nationale connaissance de quelques abus, pour qu’elle se détermine à réviser les lois rurales et à porter de prompts remèdes aux maux que la cupidité engendre tous les jours. Chargé par le Comité de salut public de surveiller l’approvisionnement en blé et farine de la commune de Paris, j’ai eu occasion de voir le sol et de connaître les habitudes des districts assujettis à cet approvisionnement. Partout j’ai rencontré l’égoïsme le plus marqué, même dans les lieux les plus abondants. Le peuple est toujours prêt, mais les autorités constituées l’arrêtent par des observations qui souvent sont le fruit de l’intrigue et de l’intérêt particulier; et, si j’osais, je dirais qu’il est d’usage parmi beaucoup de municipalités de se servir des subsistances pour acquérir de la popularité. Les usages des cultivateurs, dont se plaignent les économistes, sont enracinés d’une manière à ne pas les détruire, et peut-être est-ce un bonheur; car les laboureurs modernes, tout en voulant donner des leçons, ne s’occupent qu’à de petites choses, et l’homme habitué au grand travail ne veut pas faire d’épreuves à moins qu’elles ne paient ses peines. La perfection est souvent trop difficile; les épreuves sont très onéreuses; les saisons ne sont pas toujours propices; le laboureur industrieux ri’est pas toujours celui qui a les facultés de faire des expériences, parce qu’il faut non seulement être aisé, mais il faut encore avoir les (1) P.V., XXXVI, 57. Minute de la main de Collombel (C 301, pl. 1066, p. 34). Décret n° 8895. Reproduit dans Bln, 4 flor. (2e suppl1) ; Débats n° 580, p. 26. (2) P.V., XXXVI, 58. emplacements et les terrains convenables. C’est l’usage des baux, ce sont les spéculations du moment qui nuisent à l’avenir; c’est sur ces vices qu’il faut que la Convention porte de grandes attentions. L’étude rurale ne servira jamais à rien si les plus belles terres sont asservies aux spéculations des fermiers. Ne nous écartons pas de cette vérité, et soyons pénétrés que tous ceux qui embrassent de trop grandes cultures sont les fléaux des lieux qu’ils habitent. Ce n’est pas l’homme trop occupé qui perfectionne l’art ou le métier qu’il professe; c’est celui qui n’a point l’ambition des richesses, mais seulement de gagner ou de conserver une aisance modeste. Le bon laboureur est celui qui tient lui-même la charrue; celui-là n’a pas été corrompu par l’ambition ni l’oisiveté; il est vrai qu’il tient à sa routine; mais qu’y faire ? Les économistes ont beau dire que les anciens usages du laboureur sont des absurdités à détruire; on ne peut pas démentir le laboureur ancien lorsqu’il dit : « Gardez-vous bien de croire à l’écriture en matière d’agriculture; ne vous fiez qu’à vos bras et à vos soins, car vos champs deviendraient déserts. Les laboureurs modernes sont des dupes qui finissent toujours par écrire lorsqu’ils sont ruinés ». Voilà les observations de l’homme qui ne se fie qu’à son activité; ses idées se forment à la pluie et au soleil, et je crois qu’elles valent bien celles qui se forment dans un cabinet. Notre agriculture a été corrompue pendant le règne du despotisme; la variété de la jouissance occasionnée par le renouvellement continuel des baux des biens du clergé, le gibier, la dîme et les servitudes en nature ont toujours empêché le laboureur de faire des sacrifices pour améliorer les fonds qu’il faisait valoir. Ce mal a singulièrement contredit l’établissement des prairies artificielles et les clôtures des pâturages utiles à chaque exploitation dans tous les pays de grande culture; aussi voyons -nous aujourd’hui dans tous ces pays la disette de bestiaux. Les mutations d’immeubles contribuent encore à cette disette; elle n’est pas factice, croyez-y bien, et empressez-vous d’y remédier en pressant la vente des biens nationaux, et en encourageant la formation des prairies artificielles et des pâtures clôturées au pied de chaque ferme ou habitation. Les trèfles serviront les terrains froids et humides; les luzernes, les terres fortes et glaiseuses, et le sainfoin, les terres sèches et arides. Avec cette mesure les étables et les greniers regorgeront en quatre années. La disette de bestiaux qui se fait sentir dans le Nord était inévitable à cause de la guerre; aux frontières, le mal n’est rien; mais dans les départements de l’Aisne, de la Somme, de l’Oise, de Seine-et-Oise, de Seine-et-Marne, d’Eure-et-Loir, et presque partout à trente lieues aux environs de Paris, c’est une calamité qu’il faut réprimer. Ces départements ont toujours calculé leur bénéfice sur le produit du blé; les fermes ont toujours appartenu aux privilégiés, d’où il est résulté que les cultivateurs n’ont travaillé avec aucune stabilité; ils n’ont jamais fait d’élèves; ils n’ont jamais établi une pâture; au contraire ils les défrichaient pour jouir de la dépouille, sans s’embarrasser de la ruine qui en résulterait plus tard, et par cet usage, au lieu de donner des élèves de leur 164 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE remise, sans délai, à titre de secours, à la citoyenne Marie Clericeau, veuve Dorion, qui s’est retirée dans ladite commune de Nantes, avec ses cinq enfants, après avoir perdu généralement tout ce qu’elle possédoit. « II. — La pétition et les pièces jointes, seront envoyées au comité de liquidation pour régler les indemnités qui pourront être dues à ladite veuve Dorion. « III. — Le présent décret ne sera point imprimé; il sera seulement inséré au bulletin de correspondance » (1). 50 Isoré communique des vues qui sont le fruit de son expérience, sur l’agriculture en général, et sur les moyens d’approvisionner la ville de Paris (2). J. ISORE : C’est de l’agriculture que je vais vous parler; car il est intéressant pour le bien public de nous occuper souvent de cette matière. Je parlerai en même temps de l’approvisionnement de la commune de Paris et des établissements qu’il faut faire pour garantir cette célèbre cité des machinations que ses ennemis lui susciteront sourdement tant qu’ils se souviendront qu’elle enfanta la liberté. Je vais m’expliquer d’après ce que j’ai vu; la théorie n’y entrera pour rien; les économistes auront tout à prendre sur ce que je dirai; ma seule ambition est de donner à la Convention nationale connaissance de quelques abus, pour qu’elle se détermine à réviser les lois rurales et à porter de prompts remèdes aux maux que la cupidité engendre tous les jours. Chargé par le Comité de salut public de surveiller l’approvisionnement en blé et farine de la commune de Paris, j’ai eu occasion de voir le sol et de connaître les habitudes des districts assujettis à cet approvisionnement. Partout j’ai rencontré l’égoïsme le plus marqué, même dans les lieux les plus abondants. Le peuple est toujours prêt, mais les autorités constituées l’arrêtent par des observations qui souvent sont le fruit de l’intrigue et de l’intérêt particulier; et, si j’osais, je dirais qu’il est d’usage parmi beaucoup de municipalités de se servir des subsistances pour acquérir de la popularité. Les usages des cultivateurs, dont se plaignent les économistes, sont enracinés d’une manière à ne pas les détruire, et peut-être est-ce un bonheur; car les laboureurs modernes, tout en voulant donner des leçons, ne s’occupent qu’à de petites choses, et l’homme habitué au grand travail ne veut pas faire d’épreuves à moins qu’elles ne paient ses peines. La perfection est souvent trop difficile; les épreuves sont très onéreuses; les saisons ne sont pas toujours propices; le laboureur industrieux ri’est pas toujours celui qui a les facultés de faire des expériences, parce qu’il faut non seulement être aisé, mais il faut encore avoir les (1) P.V., XXXVI, 57. Minute de la main de Collombel (C 301, pl. 1066, p. 34). Décret n° 8895. Reproduit dans Bln, 4 flor. (2e suppl1) ; Débats n° 580, p. 26. (2) P.V., XXXVI, 58. emplacements et les terrains convenables. C’est l’usage des baux, ce sont les spéculations du moment qui nuisent à l’avenir; c’est sur ces vices qu’il faut que la Convention porte de grandes attentions. L’étude rurale ne servira jamais à rien si les plus belles terres sont asservies aux spéculations des fermiers. Ne nous écartons pas de cette vérité, et soyons pénétrés que tous ceux qui embrassent de trop grandes cultures sont les fléaux des lieux qu’ils habitent. Ce n’est pas l’homme trop occupé qui perfectionne l’art ou le métier qu’il professe; c’est celui qui n’a point l’ambition des richesses, mais seulement de gagner ou de conserver une aisance modeste. Le bon laboureur est celui qui tient lui-même la charrue; celui-là n’a pas été corrompu par l’ambition ni l’oisiveté; il est vrai qu’il tient à sa routine; mais qu’y faire ? Les économistes ont beau dire que les anciens usages du laboureur sont des absurdités à détruire; on ne peut pas démentir le laboureur ancien lorsqu’il dit : « Gardez-vous bien de croire à l’écriture en matière d’agriculture; ne vous fiez qu’à vos bras et à vos soins, car vos champs deviendraient déserts. Les laboureurs modernes sont des dupes qui finissent toujours par écrire lorsqu’ils sont ruinés ». Voilà les observations de l’homme qui ne se fie qu’à son activité; ses idées se forment à la pluie et au soleil, et je crois qu’elles valent bien celles qui se forment dans un cabinet. Notre agriculture a été corrompue pendant le règne du despotisme; la variété de la jouissance occasionnée par le renouvellement continuel des baux des biens du clergé, le gibier, la dîme et les servitudes en nature ont toujours empêché le laboureur de faire des sacrifices pour améliorer les fonds qu’il faisait valoir. Ce mal a singulièrement contredit l’établissement des prairies artificielles et les clôtures des pâturages utiles à chaque exploitation dans tous les pays de grande culture; aussi voyons -nous aujourd’hui dans tous ces pays la disette de bestiaux. Les mutations d’immeubles contribuent encore à cette disette; elle n’est pas factice, croyez-y bien, et empressez-vous d’y remédier en pressant la vente des biens nationaux, et en encourageant la formation des prairies artificielles et des pâtures clôturées au pied de chaque ferme ou habitation. Les trèfles serviront les terrains froids et humides; les luzernes, les terres fortes et glaiseuses, et le sainfoin, les terres sèches et arides. Avec cette mesure les étables et les greniers regorgeront en quatre années. La disette de bestiaux qui se fait sentir dans le Nord était inévitable à cause de la guerre; aux frontières, le mal n’est rien; mais dans les départements de l’Aisne, de la Somme, de l’Oise, de Seine-et-Oise, de Seine-et-Marne, d’Eure-et-Loir, et presque partout à trente lieues aux environs de Paris, c’est une calamité qu’il faut réprimer. Ces départements ont toujours calculé leur bénéfice sur le produit du blé; les fermes ont toujours appartenu aux privilégiés, d’où il est résulté que les cultivateurs n’ont travaillé avec aucune stabilité; ils n’ont jamais fait d’élèves; ils n’ont jamais établi une pâture; au contraire ils les défrichaient pour jouir de la dépouille, sans s’embarrasser de la ruine qui en résulterait plus tard, et par cet usage, au lieu de donner des élèves de leur SÉANCE DU 3 FLORÉAL AN II (22 AVRIL 1794) - N° 50 165 exploitation, comme cela doit se faire, ils prenaient sur leurs voisins les chevaux, les moutons et les vaches qu’il fallait pour meubler leurs fermes. Maintenant qu’il faut que ces départements contribuent pour leur part dans les levées de chevaux et les contingents de grains et fourrages qui se font pour l’armée, leur position est fâcheuse, et c’est ce qui fait naître aux environs de Paris des besoins qui ne dureront qu’autant que la culture ne tirera ses ressources que du blé. Il ne faut pas croire que si, dans tous les pays de grande culture, on mettait en herbages un sixième du terrain, on perdrait un sixième de la récolte en blé; ce serait montrer une ignorance très grossière. Il n’est pas un homme de bon sens qui ne voie que, dans tous les pays de pâturages, les habitants y sont plus à leur aise, plus forts et mieux portants que dans les pays où on dévore la terre pour faire la fortune d’un gros fermier, qui veut être riche à la fin d’un bail de neuf années. H faut de cela conclure que le bien et la prospérité des campagnes ne viennent pas seulement du blé, mais encore plus des nombreux troupeaux qu’on y élève. Ces troupeaux engraissent le sol, l’attendrissent et le font fructifier d’un quart en sus, quand on a sacrifié le sixième pour les élever. Les départements dont je viens de parler n’auraient pas pour cela besoin d’être en petite culture, quand on y prendrait le sixième du sol pour faire prospérer les élèves de bestiaux; il n’y a qu’un surcroît de population qui amènerait la culture en détail, et cela ne peut arriver qu’après des siècles. Il n’est pas extraordinaire de voir les alentours de Paris ainsi cultivés; c’est là le repaire des missionnaires qui ont su usurper des remboursements de charges, après avoir compté sur la banqueroute préparée par le tyran qu’ils servaient ils ont encore été les premiers et les mieux payés de ce qui ne leur était pas dû. Ces hommes dans ces campagnes ont tout, et le peuple n’y a rien; leurs délices découlent de la pauvreté des habitants; les bons terrains sont prodigués, et enfin je crois avoir droit de dire que ces propriétaires, comme les gros fermiers, sont trop riches pour être industrieux. Entre le cultivateur d’un arpent de terre et celui de six ou de huit cents arpents il y a un milieu, et je crois que le milieu peut s’évaluer à trois cents arpents, ou à l’exploitation de quatre charrues; c’est là le bon maximum; et de quatre à une charrue on ne peut pas encore nommer ce détail petite culture. Pour bien réussir à la perfection de l’agriculture, il faudrait faire des écoles dans plusieurs points de la République; ces écoles seraient des établissements ruraux qui s’instruiraient gratuitement sur les pays qui leur seraient désignés; elles pourraient être composées de membres choisis et renouvelés par les Comités d’agriculture des législatures, et même indemnisées en cas de besoin; leurs rapports et observations guideraient la législation rurale en raison des localités; car croyez bien que, tant que nous n’aurons pas de règlements basés sur les localités, au lieu de législation sur l’agriculture nous aurons une anarchie rurale. Ce serait sur les rapports de ces établissements que la commission des subsistances partagerait les ressources dans les cas de besoin. Maintenant qu’il existe des administrations de département, pourrions -nous compter sur leurs rapports pour vérifier l’état de nos besoins et de nos ressources ? Non; car les administrations sont composées d’hommes de toutes professions; leur conduite vous a prouvé malheureusement trop souvent que l’égoïsme partageait presque toujours leurs sentiments; au surplus, la partie rurale n’est pas susceptible d’être traitée comme toute autre partie d’administration; il faut voyager pour voir, et bien découvrir le mal pour y porter remède. Si nous eussions eu l’année dernière des règlements locaux, les départements dont j’ai déjà parlé n’auraient pas perdu le sixième de leur récolte en blé et la moitié de leur récolte en avoine par le retard mal intentionné des moissonneurs, qui ont cru avoir le pouvoir de mettre les cultivateurs à contribution plutôt qu’être obligés de faire le bien de la société en moissonnant promptement sa subsistance. C’est d’un coup de vent que je parle, et par la fureur de l’ouragan et la nonchalance des moissonneurs plus de deux millions de quintaux de blé et autant d’avoine, dans la région du Nord, ont été perdus. Pareils accidents arriveront souvent si on n’y remédie, car chaque année les vents qui se font sentir à l’approche de l’équinoxe d’automne surprennent les cultivateurs dans le Nord, et même ceux des environs de Paris qui ne sont pas assez actifs pour s’en garantir. En occupant mes idées à parcourir le vaste continent sur lequel je désirais voir arriver promptement une prospérité complète, je pose en principe qu’il faut régler la détention exploi-tative et y ajouter des obligations suivant les localités. Ce n’est pas outrager l’inviolabilité des propriétés que de défendre d’abuser de leur valeur. Si un champ peut produire plus avantageusement étant dispersé par l’occasion dans plusieurs mains, il faut le faire valoir ainsi quand on a des bras à occuper. Le propriétaire qui fait valoir assez par lui-même pour occuper tous ses moments ne doit pas hésiter à louer ce qu’il a de plus, et le fermier qui embrasse tout un territoire, et le plus qu’il peut pour abréger sa fortune, doit céder à ceux qui désirent s’occuper; la raison le veut, et le bien public l’exige. Ce que je viens de dire n’est applicable qu’à une portion du territoire de la République, puisque, dans plus de la moitié des départements, les terres sont tenues à loyer, à moitié fruits ou en détail, par conséquent en petite culture; mais j’observe à la Convention nationale que la partie du territoire dont je parle est immense, et qu’elle mérite les plus grandes attentions, parce qu’on y est privé de tant de choses utiles qui se récoltent et s’élèvent dans les pays de petite culture, quoique moins bons, qu’il serait ridicule de ne pas réprimer tous les abus qui s’y font sentir. Pour prouver les abus et démontrer les avantages dont j’ai parlé jusqu’ici, je vais d’abord m’étendre sur les vices qui tiennent aux grandes exploitations, ensuite sur la nécessité de faire élever des bestiaux. Les grandes exploitations sont de quelque utilité aux environs des grandes communes, telles que Paris, parce que la grande population que suppose la petite culture absorberait les productions; mais les grandes fermes, partout SÉANCE DU 3 FLORÉAL AN II (22 AVRIL 1794) - N° 50 165 exploitation, comme cela doit se faire, ils prenaient sur leurs voisins les chevaux, les moutons et les vaches qu’il fallait pour meubler leurs fermes. Maintenant qu’il faut que ces départements contribuent pour leur part dans les levées de chevaux et les contingents de grains et fourrages qui se font pour l’armée, leur position est fâcheuse, et c’est ce qui fait naître aux environs de Paris des besoins qui ne dureront qu’autant que la culture ne tirera ses ressources que du blé. Il ne faut pas croire que si, dans tous les pays de grande culture, on mettait en herbages un sixième du terrain, on perdrait un sixième de la récolte en blé; ce serait montrer une ignorance très grossière. Il n’est pas un homme de bon sens qui ne voie que, dans tous les pays de pâturages, les habitants y sont plus à leur aise, plus forts et mieux portants que dans les pays où on dévore la terre pour faire la fortune d’un gros fermier, qui veut être riche à la fin d’un bail de neuf années. H faut de cela conclure que le bien et la prospérité des campagnes ne viennent pas seulement du blé, mais encore plus des nombreux troupeaux qu’on y élève. Ces troupeaux engraissent le sol, l’attendrissent et le font fructifier d’un quart en sus, quand on a sacrifié le sixième pour les élever. Les départements dont je viens de parler n’auraient pas pour cela besoin d’être en petite culture, quand on y prendrait le sixième du sol pour faire prospérer les élèves de bestiaux; il n’y a qu’un surcroît de population qui amènerait la culture en détail, et cela ne peut arriver qu’après des siècles. Il n’est pas extraordinaire de voir les alentours de Paris ainsi cultivés; c’est là le repaire des missionnaires qui ont su usurper des remboursements de charges, après avoir compté sur la banqueroute préparée par le tyran qu’ils servaient ils ont encore été les premiers et les mieux payés de ce qui ne leur était pas dû. Ces hommes dans ces campagnes ont tout, et le peuple n’y a rien; leurs délices découlent de la pauvreté des habitants; les bons terrains sont prodigués, et enfin je crois avoir droit de dire que ces propriétaires, comme les gros fermiers, sont trop riches pour être industrieux. Entre le cultivateur d’un arpent de terre et celui de six ou de huit cents arpents il y a un milieu, et je crois que le milieu peut s’évaluer à trois cents arpents, ou à l’exploitation de quatre charrues; c’est là le bon maximum; et de quatre à une charrue on ne peut pas encore nommer ce détail petite culture. Pour bien réussir à la perfection de l’agriculture, il faudrait faire des écoles dans plusieurs points de la République; ces écoles seraient des établissements ruraux qui s’instruiraient gratuitement sur les pays qui leur seraient désignés; elles pourraient être composées de membres choisis et renouvelés par les Comités d’agriculture des législatures, et même indemnisées en cas de besoin; leurs rapports et observations guideraient la législation rurale en raison des localités; car croyez bien que, tant que nous n’aurons pas de règlements basés sur les localités, au lieu de législation sur l’agriculture nous aurons une anarchie rurale. Ce serait sur les rapports de ces établissements que la commission des subsistances partagerait les ressources dans les cas de besoin. Maintenant qu’il existe des administrations de département, pourrions -nous compter sur leurs rapports pour vérifier l’état de nos besoins et de nos ressources ? Non; car les administrations sont composées d’hommes de toutes professions; leur conduite vous a prouvé malheureusement trop souvent que l’égoïsme partageait presque toujours leurs sentiments; au surplus, la partie rurale n’est pas susceptible d’être traitée comme toute autre partie d’administration; il faut voyager pour voir, et bien découvrir le mal pour y porter remède. Si nous eussions eu l’année dernière des règlements locaux, les départements dont j’ai déjà parlé n’auraient pas perdu le sixième de leur récolte en blé et la moitié de leur récolte en avoine par le retard mal intentionné des moissonneurs, qui ont cru avoir le pouvoir de mettre les cultivateurs à contribution plutôt qu’être obligés de faire le bien de la société en moissonnant promptement sa subsistance. C’est d’un coup de vent que je parle, et par la fureur de l’ouragan et la nonchalance des moissonneurs plus de deux millions de quintaux de blé et autant d’avoine, dans la région du Nord, ont été perdus. Pareils accidents arriveront souvent si on n’y remédie, car chaque année les vents qui se font sentir à l’approche de l’équinoxe d’automne surprennent les cultivateurs dans le Nord, et même ceux des environs de Paris qui ne sont pas assez actifs pour s’en garantir. En occupant mes idées à parcourir le vaste continent sur lequel je désirais voir arriver promptement une prospérité complète, je pose en principe qu’il faut régler la détention exploi-tative et y ajouter des obligations suivant les localités. Ce n’est pas outrager l’inviolabilité des propriétés que de défendre d’abuser de leur valeur. Si un champ peut produire plus avantageusement étant dispersé par l’occasion dans plusieurs mains, il faut le faire valoir ainsi quand on a des bras à occuper. Le propriétaire qui fait valoir assez par lui-même pour occuper tous ses moments ne doit pas hésiter à louer ce qu’il a de plus, et le fermier qui embrasse tout un territoire, et le plus qu’il peut pour abréger sa fortune, doit céder à ceux qui désirent s’occuper; la raison le veut, et le bien public l’exige. Ce que je viens de dire n’est applicable qu’à une portion du territoire de la République, puisque, dans plus de la moitié des départements, les terres sont tenues à loyer, à moitié fruits ou en détail, par conséquent en petite culture; mais j’observe à la Convention nationale que la partie du territoire dont je parle est immense, et qu’elle mérite les plus grandes attentions, parce qu’on y est privé de tant de choses utiles qui se récoltent et s’élèvent dans les pays de petite culture, quoique moins bons, qu’il serait ridicule de ne pas réprimer tous les abus qui s’y font sentir. Pour prouver les abus et démontrer les avantages dont j’ai parlé jusqu’ici, je vais d’abord m’étendre sur les vices qui tiennent aux grandes exploitations, ensuite sur la nécessité de faire élever des bestiaux. Les grandes exploitations sont de quelque utilité aux environs des grandes communes, telles que Paris, parce que la grande population que suppose la petite culture absorberait les productions; mais les grandes fermes, partout 166 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE où elles sont, susceptibles d’être diminuées, non pas pour en faire de petits objets de détail, mais pour en tirer plus d’avantage. L’homme à cinq, six ou plus de charrues, est un dominateur dans sa commune; il tient tout au préjudice des autres laboureurs qui ont des bras qu’ils ne veulent pas louer ou qui ont des enfants à établir; souvent ceux qui ne veulent pas travailler pour le fermier sont de petits laboureurs qu’il a démontés et même ruinés. Le gros fermier calcule sur l’étendue des domaines qu’il peut réunir; il lui est aisé de louer cher parce qu’il n’a qu’un ménage et une famille à nourrir; il n’a besoin que d’une marmite, c’est là le mot; et sur tous les menus frais qu’il épargne il gagne immensément; non pas qu’il veuille servir la République en épargnant des bras, mais bien pour son intérêt particulier. Comme en agriculture les frais d’amélioration sont toujours plus que payés et qu’il en résulte une augmentation de produit, il faut s’attacher à la matière et non aux épargnes de dépenses; ainsi la République perd quand un homme fait valoir un trop grand terrain. Au contraire l’homme qui n’a pas plus de quatre charrues à surveiller élève une famille dans les bons principes; il est obligé de faire travailler ses enfants; il hait le luxe et ne pense qu’à la chose. Ses enfants ont intérêt à cette même chose, et leurs idées se développent en faisant de mieux en mieux, et en espérant succéder à leur père. La femme s’occupe des élèves; elle hait la mollesse, et sa seule ambition est de montrer une basse-cour solide, qui devient une ressource inépuisable pour la société. La nécessité de faire des élèves de bestiaux est prouvée par les circonstances; maintenant il n’y a plus à retarder, et à tel prix que ce soit il en faut; car compter sur nos voisins c’est ne pas s’ennuyer de les enrichir. Déjà j’ai dit qu’en ensemençant la sixième partie des terres en prairies artificielles ou pâtures, dans les pays secs et de grande culture, les cinq parties restantes produiraient plus en recevant les engrais que produirait cette sixième partie. Les herbages se sèment ordinairement dans les terrains les plus médiocres; pourvu qu’un verger d’une faible étendue soit dans le cas de contenir les bestiaux pour les promener, quand il n’y a pas de pâturages communs ou d’anciens enclos près des habitations, cela suffit. Par conséquent le cultivateur évite la culture de ses plus mauvaises terres; au lieu d’y porter des engrais il augmente la dose des autres terres, et par suite les mauvaises comme les bonnes produiront bien. Le renouvellement des herbages sur d’autres terres complète par suite des temps l’amélioration de toute une exploitation. Il ne faut cependant pas que ce que j’avance fasse croire que le sixième dont je parle pour faire venir l’usage des élèves soit le maximum pour tous les terrains; ce sixième n’est applicable qu’aux lieux où on ne fait ni herbages, ni élèves, et à ceux où il n’y a pas de prairies, ou qui en général n’ont pas eu cet usage. Les mauvais terrains sont couverts plus que d’un sixième d’herbages; ceux-là sont déjà dans le cas d’être utiles à la multiplication des troupeaux; mais il faut stimuler ceux qui les font valoir, et par ce moyen ils acquerront le pouvoir de mettre en valeur quelques portions de terres qu’ils auraient abandonnées, pour y récolter des seigles ou des lentilles, et même du blé après un certain temps. Je crois avoir démontré clairement que le salut de l’agriculture dépend des prairies artificielles. Pour augmenter la race des chevaux il faut prescrire aux habitants des lieux où il y a des prairies d’élever un cheval par charrue chaque année; il ne convient pas à celui qui le peut de vouloir ne pas le faire quand les besoins de la République l’exigent. Il n’est pas possible non plus d’élever partout des bœufs et des vaches. Dans les pays gras cela est aisé, et par conséquent avantageux; mais dans les pays de plaines ou de hauteurs ce n’est pas la même chose; là il faut le temps d’avoir quelques herbages; mais cependant il est possible de le tenter dès ce moment; il faut seulement recommander d’élever les veaux femelles nés en pluviôse, ventôse et germinal; cela produira dès cette année un huitième de vaches de plus; en faire de même pour l’année prochaine; ce sera le quart au bout de deux ans, et par suite les choses iront d’elles-mêmes, parce que le cultivateur sentira ses intérêts. Que ceux qui seront dans le cas de faire des élèves de cette espèce les conservent toujours dans les trois mois que je viens de désigner; avec peu de chose il les élèveront, et ces animaux seront toujours forts, parce qu’ils profiteront de deux ans de pâturages avant de multiplier. Cela est aisé à concevoir : l’hiver est la saison de rigueur, et un jeune animal qui passe d’abord deux hivers contre un été coûte beaucoup plus à nourrir, et n’est presque jamais d’une bonne complexion. Je vois beaucoup d’avantages à enjoindre aux cultivateurs d’avoir un certain nombre de vaches, en raison de leur exploitation; partout aux alentours de Paris, où les fourrages se vendent ordinairement bien, on n’y élève rien, et c’est un tort réel à souffrir, qui se fait trop apercevoir aujourd’hui. L’exploitation d’une charrue doit avoir au moins cinq vaches, et une ou deux génisses; cinquante arpents ou journaux de terre peuvent supporter le même nombre; mais au moins, jusqu’à ce que la viande soit assez commune, il faut faire élever le tiers des veaux femelles qui forment la totalité de ceux qui naissent en bonne saison. Ce n’est pas cependant l’habitant qui n’a qu’une, deux ou trois vaches, qui peut faire des élèves; celui-là est souvent dans la classe indigente et ne se nourrit que de lait au lieu de viande; celui-là a souvent aussi une nombreuse famille; ses vaches vivent de ce qui serait perdu chez les gros cultivateurs, et ses facultés le contraignent à se borner à un nombre qu’il ne peut augmenter, faute de nourriture. Observez, citoyens, que c’est cependant cet habitant infortuné qui fait le plus d’efforts pour s’entretenir de bestiaux sans en acheter; c’est encore celui-là qui, par ses épargnes, en procure l’habitant aisé. Cela suffirait pour vous convaincre, si vous ne l’étiez, de la nécessité de mettre promptement des propriétés dans les mains de tous les habitants des campagnes. Ce passage me rappelle la négligence et les retards que les administrations mettent dans la vente des biens nationaux. L’homme champêtre soupire après cela pour planter une vigne, un pommier ou un autre arbre; il calcule ce 166 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE où elles sont, susceptibles d’être diminuées, non pas pour en faire de petits objets de détail, mais pour en tirer plus d’avantage. L’homme à cinq, six ou plus de charrues, est un dominateur dans sa commune; il tient tout au préjudice des autres laboureurs qui ont des bras qu’ils ne veulent pas louer ou qui ont des enfants à établir; souvent ceux qui ne veulent pas travailler pour le fermier sont de petits laboureurs qu’il a démontés et même ruinés. Le gros fermier calcule sur l’étendue des domaines qu’il peut réunir; il lui est aisé de louer cher parce qu’il n’a qu’un ménage et une famille à nourrir; il n’a besoin que d’une marmite, c’est là le mot; et sur tous les menus frais qu’il épargne il gagne immensément; non pas qu’il veuille servir la République en épargnant des bras, mais bien pour son intérêt particulier. Comme en agriculture les frais d’amélioration sont toujours plus que payés et qu’il en résulte une augmentation de produit, il faut s’attacher à la matière et non aux épargnes de dépenses; ainsi la République perd quand un homme fait valoir un trop grand terrain. Au contraire l’homme qui n’a pas plus de quatre charrues à surveiller élève une famille dans les bons principes; il est obligé de faire travailler ses enfants; il hait le luxe et ne pense qu’à la chose. Ses enfants ont intérêt à cette même chose, et leurs idées se développent en faisant de mieux en mieux, et en espérant succéder à leur père. La femme s’occupe des élèves; elle hait la mollesse, et sa seule ambition est de montrer une basse-cour solide, qui devient une ressource inépuisable pour la société. La nécessité de faire des élèves de bestiaux est prouvée par les circonstances; maintenant il n’y a plus à retarder, et à tel prix que ce soit il en faut; car compter sur nos voisins c’est ne pas s’ennuyer de les enrichir. Déjà j’ai dit qu’en ensemençant la sixième partie des terres en prairies artificielles ou pâtures, dans les pays secs et de grande culture, les cinq parties restantes produiraient plus en recevant les engrais que produirait cette sixième partie. Les herbages se sèment ordinairement dans les terrains les plus médiocres; pourvu qu’un verger d’une faible étendue soit dans le cas de contenir les bestiaux pour les promener, quand il n’y a pas de pâturages communs ou d’anciens enclos près des habitations, cela suffit. Par conséquent le cultivateur évite la culture de ses plus mauvaises terres; au lieu d’y porter des engrais il augmente la dose des autres terres, et par suite les mauvaises comme les bonnes produiront bien. Le renouvellement des herbages sur d’autres terres complète par suite des temps l’amélioration de toute une exploitation. Il ne faut cependant pas que ce que j’avance fasse croire que le sixième dont je parle pour faire venir l’usage des élèves soit le maximum pour tous les terrains; ce sixième n’est applicable qu’aux lieux où on ne fait ni herbages, ni élèves, et à ceux où il n’y a pas de prairies, ou qui en général n’ont pas eu cet usage. Les mauvais terrains sont couverts plus que d’un sixième d’herbages; ceux-là sont déjà dans le cas d’être utiles à la multiplication des troupeaux; mais il faut stimuler ceux qui les font valoir, et par ce moyen ils acquerront le pouvoir de mettre en valeur quelques portions de terres qu’ils auraient abandonnées, pour y récolter des seigles ou des lentilles, et même du blé après un certain temps. Je crois avoir démontré clairement que le salut de l’agriculture dépend des prairies artificielles. Pour augmenter la race des chevaux il faut prescrire aux habitants des lieux où il y a des prairies d’élever un cheval par charrue chaque année; il ne convient pas à celui qui le peut de vouloir ne pas le faire quand les besoins de la République l’exigent. Il n’est pas possible non plus d’élever partout des bœufs et des vaches. Dans les pays gras cela est aisé, et par conséquent avantageux; mais dans les pays de plaines ou de hauteurs ce n’est pas la même chose; là il faut le temps d’avoir quelques herbages; mais cependant il est possible de le tenter dès ce moment; il faut seulement recommander d’élever les veaux femelles nés en pluviôse, ventôse et germinal; cela produira dès cette année un huitième de vaches de plus; en faire de même pour l’année prochaine; ce sera le quart au bout de deux ans, et par suite les choses iront d’elles-mêmes, parce que le cultivateur sentira ses intérêts. Que ceux qui seront dans le cas de faire des élèves de cette espèce les conservent toujours dans les trois mois que je viens de désigner; avec peu de chose il les élèveront, et ces animaux seront toujours forts, parce qu’ils profiteront de deux ans de pâturages avant de multiplier. Cela est aisé à concevoir : l’hiver est la saison de rigueur, et un jeune animal qui passe d’abord deux hivers contre un été coûte beaucoup plus à nourrir, et n’est presque jamais d’une bonne complexion. Je vois beaucoup d’avantages à enjoindre aux cultivateurs d’avoir un certain nombre de vaches, en raison de leur exploitation; partout aux alentours de Paris, où les fourrages se vendent ordinairement bien, on n’y élève rien, et c’est un tort réel à souffrir, qui se fait trop apercevoir aujourd’hui. L’exploitation d’une charrue doit avoir au moins cinq vaches, et une ou deux génisses; cinquante arpents ou journaux de terre peuvent supporter le même nombre; mais au moins, jusqu’à ce que la viande soit assez commune, il faut faire élever le tiers des veaux femelles qui forment la totalité de ceux qui naissent en bonne saison. Ce n’est pas cependant l’habitant qui n’a qu’une, deux ou trois vaches, qui peut faire des élèves; celui-là est souvent dans la classe indigente et ne se nourrit que de lait au lieu de viande; celui-là a souvent aussi une nombreuse famille; ses vaches vivent de ce qui serait perdu chez les gros cultivateurs, et ses facultés le contraignent à se borner à un nombre qu’il ne peut augmenter, faute de nourriture. Observez, citoyens, que c’est cependant cet habitant infortuné qui fait le plus d’efforts pour s’entretenir de bestiaux sans en acheter; c’est encore celui-là qui, par ses épargnes, en procure l’habitant aisé. Cela suffirait pour vous convaincre, si vous ne l’étiez, de la nécessité de mettre promptement des propriétés dans les mains de tous les habitants des campagnes. Ce passage me rappelle la négligence et les retards que les administrations mettent dans la vente des biens nationaux. L’homme champêtre soupire après cela pour planter une vigne, un pommier ou un autre arbre; il calcule ce SÉANCE DU 3 FLORÉAL AN II (22 AVRIL 1794) - N° 50 167 qui peut encore vivre pour en apprécier les jouissances; ses yeux modestes et sans ambition montrent à ses bras qu’il faut préparer la bêche, la pioche et la cognée pour fructifier un champ méprisé par les riches. Soutenons donc, citoyens, le courage de ces infortunés, et décrétons que le père de famille établi à la campagne, qui n’a pas de quoi récolter huit quintaux de grain maintenant sur ses propriétés, aura le droit d’acheter un fonds national de la valeur de 1,500 livres, payables en quinze années, par dixième, sans intérêt pendant les cinq premières années, et à commencer le premier dixième du payement cinq ans après l’adjudication. Par cet avantage les familles qui n’ont d’autres ressources que le travail de la terre iront cultiver les lieux trop peu peuplés. La faible valeur que les fonds ont dans ces endroits n’en ôte pas la bonté ni le produit; et dans les communes où il n’y a pas ou plus de biens nationaux à vendre, les familles infortunées iront faire valoir leur industrie dans celle où il y a encore de ces biens à placer. C’est en établissant de pareilles habitations que la France aura la forme républicaine. Je reviens à mes moutons : l’exemple que je vais citer va vous faire voir que, si nous n’avons pas de nombreux troupeaux blancs, c’est encore le vice de la trop grande culture qui en est cause. Le gros fermier spécule ce qu’il peut bénéficier sur la toison d’un mouton; il ne veut que de gros et bons moutons, et sa seule occupation pour les avoir c’est d’aller fouiller dans les bergeries de l’habitant qui les élève. Ce n’est pas chez les hommes de sa sorte qu’il va; car aucun n’a le courage de faire le sacrifice d’élever un agneau; c’est chez celui qui occupe ses enfants à tout ce qui multiplie. Cette multiplication est tout à fait négligée; il est temps d’y penser, non-seulement pour la viande, mais encore pour la laine. Le gros cultivateur payant le mouton aussi cher que les moments le permettent, il est toujours assuré d’en avoir le prix : il ne l’a que pour en avoir la dépouille et consommer ses fourrages. Pourquoi donc encore ce privilège de richesse ? parce que le gros fermier a des enfants à élever mollement. Il ne fera donc jamais d’élèves de bestiaux, parce qu’il est du grand ton; il ne prendra donc pas l’embarras d’avoir autre chose que des poulets gras. Citoyens, bannissons les mauvais usages, et décrétons que tout cultivateur qui fera valoir plus d’une charrue sera tenu d’élever au moins, par chaque charrue qu’il fera valoir, cinq agneaux, trois cochons, cinquante volailles et un veau. Voilà la proportion commune des pays de grande culture. Outre cela, les pays gras, tels que les départements où les herbages sont d’usage, fourniront comme à l’ordinaire; alors le suif, la laine et le cuir reparaîtront, et nos manufactures marcheront mieux que jamais. Je ne vous ai pas tout dit, citoyens, des gros cultivateurs; non-seulement ils privent la société de viande, de suif, de laine et de cuir, mais encore de toile; aucun ne sème du chanvre et du lin. C’est encore là une branche d’occupation qui contrarie leur ambitions; leurs filles n’ont pas l’usage d’aller au soleil; les exposer à cueillir ou faire sécher le chanvre et le lin, ce serait contredire leur éducation aristocratique. Orgueil, luxe, intempérance et paresse, vous êtes les ennemis mortels de la République ! elle ne peut exister qu’avec des vertus. Ne verrons-nous pas de nos jours la charrue aussi honorée que l’était la voiture du tyran ? Paris n’a pas encore eu le temps de jouir des bienfaits de la Révolution, les fripons qui s’étaient mis d’accord avec le tyran l’ont toujours occupé. Paris a toujours eu malheureusement un nombre infini de coquins à nourrir, qui l’ont dévoré pour avoir le plaisir de faire le mal. Les subsistances de première nécessité, excepté le pain, ont été consommées d’une manière surprenante. Maintenant nous pouvons juger de toutes les causes qui ont occasionné ce défaut d’abondance. Il est inutile de le dissimuler, puisqu’il est question d’y porter de grandes attentions. Si je ne parlais que de la viande, je me bornerais à dire que, tant que la guerre durera, il faudra savoir se priver d’un grand ordinaire; cela est aisé : des républicains ont de la frugalité; il n’est plus d’usage à présent, si ce n’est chez ces vampires de l’ancien régime, de consommer par gourmandise ce qui pourrait alimenter l’homme qui travaille. L’habitant de la campagne sent son aisance et il en profite; avant la révolution il apportait dans les villes ce que sa misère le contraignait de vendre pour payer ses charges seigneuriales ou ses impôts : le seigneur fixait les journées assez modiquement pour le conserver comme esclave; mais aujourd’hui c’est le contraire : l’habitant de la campagne vit en bon artisan, et il ne porte dans les marchés que son superflu. Quel avantage de la Révolution ! Réjouissons-nous-en, l’esclavage est détruit. Parlons aux habitants de la campagne avec le langage de la fraternité sur ce qui nuit à leurs frères des communes non agricoles; bientôt ils partageront leur aisance et s’empresseront d’augmenter leurs troupeaux; ils soustrairont à la voracité les agneaux qu’on leur achète six fois plus cher qu’ils ne valaient il y a un an. Je vais finir en vous entretenant de l’approvisionnement de Paris en blés et farines, non-seulement pour cette année, mais encore pour l’avenir. Paris est placé où il doit être. La nature le favorise dans ses environs; jamais il n’aura à craindre de manquer de pain. Vingt-cinq districts, qui ne sont au plus qu’à dix-huit ou vingt lieues d’éloignement, sont plus que suffisants pour cela, en ne donnant même que leur superflu. Si la malveillance a formé cette année le criminel projet de faire manquer de pain à Paris, c’est qu’elle comptait sur la perfidie de nos faux amis. Paris a dans ce moment l’assurance d’avoir de quoi suffire à ses besoins en pain jusqu’à la récolte. L’œil du Comité du salut public et les précautions de la commission des subsistances ont su garantir les mesures vigoureuses qui ont été prises à cet effet. Il n’y a plus dans ce moment que quatre de ces districts qui sont restés en réquisition pour suffire aux besoins qui pourraient se présenter si la récolte était retardée par un revers inattendu. La commission des subsistances connaît exactement l’état des magasins de Paris; elle connaît aussi la consommation journalière : ainsi, dans tous les cas, elle saura prévenir à temps les inconvénients, s’il s’en présentait à l’instant SÉANCE DU 3 FLORÉAL AN II (22 AVRIL 1794) - N° 50 167 qui peut encore vivre pour en apprécier les jouissances; ses yeux modestes et sans ambition montrent à ses bras qu’il faut préparer la bêche, la pioche et la cognée pour fructifier un champ méprisé par les riches. Soutenons donc, citoyens, le courage de ces infortunés, et décrétons que le père de famille établi à la campagne, qui n’a pas de quoi récolter huit quintaux de grain maintenant sur ses propriétés, aura le droit d’acheter un fonds national de la valeur de 1,500 livres, payables en quinze années, par dixième, sans intérêt pendant les cinq premières années, et à commencer le premier dixième du payement cinq ans après l’adjudication. Par cet avantage les familles qui n’ont d’autres ressources que le travail de la terre iront cultiver les lieux trop peu peuplés. La faible valeur que les fonds ont dans ces endroits n’en ôte pas la bonté ni le produit; et dans les communes où il n’y a pas ou plus de biens nationaux à vendre, les familles infortunées iront faire valoir leur industrie dans celle où il y a encore de ces biens à placer. C’est en établissant de pareilles habitations que la France aura la forme républicaine. Je reviens à mes moutons : l’exemple que je vais citer va vous faire voir que, si nous n’avons pas de nombreux troupeaux blancs, c’est encore le vice de la trop grande culture qui en est cause. Le gros fermier spécule ce qu’il peut bénéficier sur la toison d’un mouton; il ne veut que de gros et bons moutons, et sa seule occupation pour les avoir c’est d’aller fouiller dans les bergeries de l’habitant qui les élève. Ce n’est pas chez les hommes de sa sorte qu’il va; car aucun n’a le courage de faire le sacrifice d’élever un agneau; c’est chez celui qui occupe ses enfants à tout ce qui multiplie. Cette multiplication est tout à fait négligée; il est temps d’y penser, non-seulement pour la viande, mais encore pour la laine. Le gros cultivateur payant le mouton aussi cher que les moments le permettent, il est toujours assuré d’en avoir le prix : il ne l’a que pour en avoir la dépouille et consommer ses fourrages. Pourquoi donc encore ce privilège de richesse ? parce que le gros fermier a des enfants à élever mollement. Il ne fera donc jamais d’élèves de bestiaux, parce qu’il est du grand ton; il ne prendra donc pas l’embarras d’avoir autre chose que des poulets gras. Citoyens, bannissons les mauvais usages, et décrétons que tout cultivateur qui fera valoir plus d’une charrue sera tenu d’élever au moins, par chaque charrue qu’il fera valoir, cinq agneaux, trois cochons, cinquante volailles et un veau. Voilà la proportion commune des pays de grande culture. Outre cela, les pays gras, tels que les départements où les herbages sont d’usage, fourniront comme à l’ordinaire; alors le suif, la laine et le cuir reparaîtront, et nos manufactures marcheront mieux que jamais. Je ne vous ai pas tout dit, citoyens, des gros cultivateurs; non-seulement ils privent la société de viande, de suif, de laine et de cuir, mais encore de toile; aucun ne sème du chanvre et du lin. C’est encore là une branche d’occupation qui contrarie leur ambitions; leurs filles n’ont pas l’usage d’aller au soleil; les exposer à cueillir ou faire sécher le chanvre et le lin, ce serait contredire leur éducation aristocratique. Orgueil, luxe, intempérance et paresse, vous êtes les ennemis mortels de la République ! elle ne peut exister qu’avec des vertus. Ne verrons-nous pas de nos jours la charrue aussi honorée que l’était la voiture du tyran ? Paris n’a pas encore eu le temps de jouir des bienfaits de la Révolution, les fripons qui s’étaient mis d’accord avec le tyran l’ont toujours occupé. Paris a toujours eu malheureusement un nombre infini de coquins à nourrir, qui l’ont dévoré pour avoir le plaisir de faire le mal. Les subsistances de première nécessité, excepté le pain, ont été consommées d’une manière surprenante. Maintenant nous pouvons juger de toutes les causes qui ont occasionné ce défaut d’abondance. Il est inutile de le dissimuler, puisqu’il est question d’y porter de grandes attentions. Si je ne parlais que de la viande, je me bornerais à dire que, tant que la guerre durera, il faudra savoir se priver d’un grand ordinaire; cela est aisé : des républicains ont de la frugalité; il n’est plus d’usage à présent, si ce n’est chez ces vampires de l’ancien régime, de consommer par gourmandise ce qui pourrait alimenter l’homme qui travaille. L’habitant de la campagne sent son aisance et il en profite; avant la révolution il apportait dans les villes ce que sa misère le contraignait de vendre pour payer ses charges seigneuriales ou ses impôts : le seigneur fixait les journées assez modiquement pour le conserver comme esclave; mais aujourd’hui c’est le contraire : l’habitant de la campagne vit en bon artisan, et il ne porte dans les marchés que son superflu. Quel avantage de la Révolution ! Réjouissons-nous-en, l’esclavage est détruit. Parlons aux habitants de la campagne avec le langage de la fraternité sur ce qui nuit à leurs frères des communes non agricoles; bientôt ils partageront leur aisance et s’empresseront d’augmenter leurs troupeaux; ils soustrairont à la voracité les agneaux qu’on leur achète six fois plus cher qu’ils ne valaient il y a un an. Je vais finir en vous entretenant de l’approvisionnement de Paris en blés et farines, non-seulement pour cette année, mais encore pour l’avenir. Paris est placé où il doit être. La nature le favorise dans ses environs; jamais il n’aura à craindre de manquer de pain. Vingt-cinq districts, qui ne sont au plus qu’à dix-huit ou vingt lieues d’éloignement, sont plus que suffisants pour cela, en ne donnant même que leur superflu. Si la malveillance a formé cette année le criminel projet de faire manquer de pain à Paris, c’est qu’elle comptait sur la perfidie de nos faux amis. Paris a dans ce moment l’assurance d’avoir de quoi suffire à ses besoins en pain jusqu’à la récolte. L’œil du Comité du salut public et les précautions de la commission des subsistances ont su garantir les mesures vigoureuses qui ont été prises à cet effet. Il n’y a plus dans ce moment que quatre de ces districts qui sont restés en réquisition pour suffire aux besoins qui pourraient se présenter si la récolte était retardée par un revers inattendu. La commission des subsistances connaît exactement l’état des magasins de Paris; elle connaît aussi la consommation journalière : ainsi, dans tous les cas, elle saura prévenir à temps les inconvénients, s’il s’en présentait à l’instant 168 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE de la récolte. Voilà ce que je sais, et je veillerai moi -même, avec le même zèle que j’ai fait voir depuis trois mois, afin qu’elle ne laisse échapper aucune occasion pour maintenir l’abondance dans cette cité fameuse. Vous voyez, citoyens, combien il était aisé de faire cesser les craintes qu’on avait suscitées sur l’approvissionnement de Paris, avec des mesures douces et prudentes. Les campagnes répondront à tout ce que la Convention leur demandera pour cette célèbre commune. Qu’on ne vienne plus dire que, pour mettre Paris en bon état, j’ai mis les districts qui l’avoisinent dans la disette; car c’est là le langage de tous les intrigants, qui s’emparent de l’objet des subsistances pour se populariser. J’ai fait le contraire, car j’ai excepté des réquisitions tous les districts qui m’ont dit ne rien avoir de disponible en réservant leur consommation. Si la Convention nationale connaissait l’énormité des dépenses qui se font pour entretenir les magasins de Paris, elle décréterait la formation de trois magasins principaux; elle les placerait à Creil-sur-Oise, à Corbeil et à Meaux - sur-Marne. Les frais de transport, de manutention et manipulation que ces établissements épargneraient en trois ans seulement paieraient les dépenses de construction; mais, à cause de la position importante de Paris, il serait peut-être sage de placer ses magasins et ses moulins dans ses murs; l’œil de la surveillance serait toujours ouvert et fixé sur ces précieux dépôts, sur les agents et sur les meuniers. Les frais occasionnés par le défaut d’ordre et par maintes occasions imprévues coûtent 6 millions par an à la commune de Paris. Si la commune de Paris, à l’avenir, est dans le cas de s’approvisionner en blé par le commerce, ces établissements ne sont pas nécessaires; mais je dis d’avance que ce ne serait pas là mon avis. Je présenterai, s’il le faut, l’avantage des greniers d’abondance, et je crois déjà que l’esprit de notre gouvernement appuie mes desseins. Je demande à la Convention nationale qu’elle renvoie toutes mes propositions à son Comité de salut public, et je lui propose de décréter à l’instant un Comité d’agriculture de trente membres, à prendre dans son sein de tous les points de la République, pour que ce Comité connaisse généralement par lui-même toutes les localités sur lesquelles il aura à travailler pour faire un code rural utile et praticable. Le rapporteur termine par un projet conforme aux bases qu’il vient d’établir (1) . La Convention ordonne l’impression de son discours, et le renvoi de ses propositions au comité de salut public. Un membre du comité d’agriculture [POCHOLLE] annonce que ce comité a préparé un travail complet sur le même objet; il demande que lecture en soit faite septidi prochain; cette proposition est décrétée (2). (1) Mon., XX, 286. (2) P.V., XXXVI, 58. Minute de la main de Pocholle (C 301, pl. 1066, p. 39). Décret n° 8894. Mention dans J. Sablier, n° 1275; J. Paris, n° 478; C. Univ., 4 flor.; Débats, n° 580, p. 28; Ann. va tr., n° 477; M.XJ., XXXIX, 53; J. Perlet, n» 578; Ann. Rép. jr., n° 145; C. Eg., n° 613, p. 179; J. Matin, n° 613; J. Mont., n° 161; Feuille Rép., n° 294. 51 COUTHON : Des déclarations sans nombre sont portées au Comité sur la loi du 27 germinal; elles naissent de ce que des citoyens qui n’ont jamais pris la qualité de noble ont dans leurs extraits de baptême des titres proscrits, comme celui d’écuyer ou autres. Je n’entends pas, citoyens, vous proposer d’exception; elles affaiblissent les lois. D’ailleurs, vous avez donné à votre Comité la latitude nécessaire pour mettre en réquisition les citoyens qu’il juge utiles à la république; la loi est faite, il faut qu’elle s’exécute. Mais beaucoup de citoyens se trouvent dans l’embarras au sujet des qualités qu’ils ont dans leurs extraits de baptême. Voici en conséquence la question que je vous propose de renvoyer à l’examen des comités de salut public et de législation (1) : «La Convention nationale, renvoie à l’examen de ses comités de salut public et de législation réunis, la proposition faite par un de ses membres, de faire disparoitre des dépôts publics les actes de naissances, mariages et sépultures, attributifs de titres de nobles et autres prohibés par la loi, en prenant toutes les mesures nécessaires pour assurer l’exécution de cette disposition sans nuire à l’état civil des citoyens. » (2). 52 Le même membre [COUTHON] donne la liste de quelques prises entrées dans les ports de la République. Courrier du 17 germinal. Un bâtiment anglais de 200 tonneaux chargé de vins et autres marchandises, entré à l’Orient, pris par la frégate La Proserpine. Courrier du 19 germinal. 3 bâtiments anglais, pris par l’Aviso de la République, le Furet, et entrés à Brest. Le rapporteur ajoute que Jean-Bon-Saint-André, par une lettre du 25 germinal, annonce que les cutters le Courier et la Surprise, 2 jours après leur sortie, ont pris un bâtiment chargé, en Italie, d’huile pour Pétersbourg (3). (Applaudissements.) (1) Mon., XX, 285. (2) P.V., XXXVI, 58. Minute de la main de Couthon (C 301, pl. 1066, p. 36). Décret n° 8889). Reproduit dans Bin, 3 flor.; mention dans Audit. nat., n° 577; J. Sablier, n° 1275; Débats, n° 580, p. 29; M.U., XXXIX, 63; Rép., n° 124; Ann. Rép. jr., n° 145; Ann. patr., n° 477; J. Perlet, n° 578; J. Mont., n° 161; Bataue, n° 432; J. Paris, n° 478; C. Eg., n° 518, p. 179; J. Matin, n° 613; Feuille Rép., n° 294; Mess, soir, n° 513. (3) P.V., XXXVI, 58. Bln, 3 flor.; Mon. XX, 283; Audit, nat., n° 577; C. Univ., 4 flor.;M.U., XXXIX, 63; J. Perlet, n° 578; Ann. patr., n° 477; Débats, n° 580, p. 28; J. Mont, n° 161; J. Matin, n° 613; J. Paris, n° 478; C. Eg., n° 613, p. 179; Rép., n° 124; Ann. Rép. jr., n° 144; Feuille Rép., n° 294; Batave, n° 432; Mess, soir, n° 613. 168 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE de la récolte. Voilà ce que je sais, et je veillerai moi -même, avec le même zèle que j’ai fait voir depuis trois mois, afin qu’elle ne laisse échapper aucune occasion pour maintenir l’abondance dans cette cité fameuse. Vous voyez, citoyens, combien il était aisé de faire cesser les craintes qu’on avait suscitées sur l’approvissionnement de Paris, avec des mesures douces et prudentes. Les campagnes répondront à tout ce que la Convention leur demandera pour cette célèbre commune. Qu’on ne vienne plus dire que, pour mettre Paris en bon état, j’ai mis les districts qui l’avoisinent dans la disette; car c’est là le langage de tous les intrigants, qui s’emparent de l’objet des subsistances pour se populariser. J’ai fait le contraire, car j’ai excepté des réquisitions tous les districts qui m’ont dit ne rien avoir de disponible en réservant leur consommation. Si la Convention nationale connaissait l’énormité des dépenses qui se font pour entretenir les magasins de Paris, elle décréterait la formation de trois magasins principaux; elle les placerait à Creil-sur-Oise, à Corbeil et à Meaux - sur-Marne. Les frais de transport, de manutention et manipulation que ces établissements épargneraient en trois ans seulement paieraient les dépenses de construction; mais, à cause de la position importante de Paris, il serait peut-être sage de placer ses magasins et ses moulins dans ses murs; l’œil de la surveillance serait toujours ouvert et fixé sur ces précieux dépôts, sur les agents et sur les meuniers. Les frais occasionnés par le défaut d’ordre et par maintes occasions imprévues coûtent 6 millions par an à la commune de Paris. Si la commune de Paris, à l’avenir, est dans le cas de s’approvisionner en blé par le commerce, ces établissements ne sont pas nécessaires; mais je dis d’avance que ce ne serait pas là mon avis. Je présenterai, s’il le faut, l’avantage des greniers d’abondance, et je crois déjà que l’esprit de notre gouvernement appuie mes desseins. Je demande à la Convention nationale qu’elle renvoie toutes mes propositions à son Comité de salut public, et je lui propose de décréter à l’instant un Comité d’agriculture de trente membres, à prendre dans son sein de tous les points de la République, pour que ce Comité connaisse généralement par lui-même toutes les localités sur lesquelles il aura à travailler pour faire un code rural utile et praticable. Le rapporteur termine par un projet conforme aux bases qu’il vient d’établir (1) . La Convention ordonne l’impression de son discours, et le renvoi de ses propositions au comité de salut public. Un membre du comité d’agriculture [POCHOLLE] annonce que ce comité a préparé un travail complet sur le même objet; il demande que lecture en soit faite septidi prochain; cette proposition est décrétée (2). (1) Mon., XX, 286. (2) P.V., XXXVI, 58. Minute de la main de Pocholle (C 301, pl. 1066, p. 39). Décret n° 8894. Mention dans J. Sablier, n° 1275; J. Paris, n° 478; C. Univ., 4 flor.; Débats, n° 580, p. 28; Ann. va tr., n° 477; M.XJ., XXXIX, 53; J. Perlet, n» 578; Ann. Rép. jr., n° 145; C. Eg., n° 613, p. 179; J. Matin, n° 613; J. Mont., n° 161; Feuille Rép., n° 294. 51 COUTHON : Des déclarations sans nombre sont portées au Comité sur la loi du 27 germinal; elles naissent de ce que des citoyens qui n’ont jamais pris la qualité de noble ont dans leurs extraits de baptême des titres proscrits, comme celui d’écuyer ou autres. Je n’entends pas, citoyens, vous proposer d’exception; elles affaiblissent les lois. D’ailleurs, vous avez donné à votre Comité la latitude nécessaire pour mettre en réquisition les citoyens qu’il juge utiles à la république; la loi est faite, il faut qu’elle s’exécute. Mais beaucoup de citoyens se trouvent dans l’embarras au sujet des qualités qu’ils ont dans leurs extraits de baptême. Voici en conséquence la question que je vous propose de renvoyer à l’examen des comités de salut public et de législation (1) : «La Convention nationale, renvoie à l’examen de ses comités de salut public et de législation réunis, la proposition faite par un de ses membres, de faire disparoitre des dépôts publics les actes de naissances, mariages et sépultures, attributifs de titres de nobles et autres prohibés par la loi, en prenant toutes les mesures nécessaires pour assurer l’exécution de cette disposition sans nuire à l’état civil des citoyens. » (2). 52 Le même membre [COUTHON] donne la liste de quelques prises entrées dans les ports de la République. Courrier du 17 germinal. Un bâtiment anglais de 200 tonneaux chargé de vins et autres marchandises, entré à l’Orient, pris par la frégate La Proserpine. Courrier du 19 germinal. 3 bâtiments anglais, pris par l’Aviso de la République, le Furet, et entrés à Brest. Le rapporteur ajoute que Jean-Bon-Saint-André, par une lettre du 25 germinal, annonce que les cutters le Courier et la Surprise, 2 jours après leur sortie, ont pris un bâtiment chargé, en Italie, d’huile pour Pétersbourg (3). (Applaudissements.) (1) Mon., XX, 285. (2) P.V., XXXVI, 58. Minute de la main de Couthon (C 301, pl. 1066, p. 36). Décret n° 8889). Reproduit dans Bin, 3 flor.; mention dans Audit. nat., n° 577; J. Sablier, n° 1275; Débats, n° 580, p. 29; M.U., XXXIX, 63; Rép., n° 124; Ann. Rép. jr., n° 145; Ann. patr., n° 477; J. Perlet, n° 578; J. Mont., n° 161; Bataue, n° 432; J. Paris, n° 478; C. Eg., n° 518, p. 179; J. Matin, n° 613; Feuille Rép., n° 294; Mess, soir, n° 513. (3) P.V., XXXVI, 58. Bln, 3 flor.; Mon. XX, 283; Audit, nat., n° 577; C. Univ., 4 flor.;M.U., XXXIX, 63; J. Perlet, n° 578; Ann. patr., n° 477; Débats, n° 580, p. 28; J. Mont, n° 161; J. Matin, n° 613; J. Paris, n° 478; C. Eg., n° 613, p. 179; Rép., n° 124; Ann. Rép. jr., n° 144; Feuille Rép., n° 294; Batave, n° 432; Mess, soir, n° 613.