SÉANCE DU 22 FLORÉAL AN II (11 MAI 1794) - N° 8 45 A 48 245 COUTHON : J’atteste à la Convention qu’il ne s’agit ici que de pauvres cultivateurs : mais il ne convient peut-être pas que, de confiance, vous rendiez la liberté à des détenus. Je demande la suspension des poursuites jusqu’au rapport, et la liberté provisoire. Décrété. Applaudi. BREARD : D’après l’exposé que vient de faire Couthon, il vous est bien démontré que les cultivateurs arrêtés avoient été égarés par des mal-veillans et qu’ils ont résisté à la loi sans le savoir. Le Comité de législation ne nous apprendrait rien de plus que nous n’en savons dans ce moment : faisons sur le champ un acte à la fois de justice et d’humanité. Les laboureurs dont on vous entretient sont pauvres, précieux à leurs familles et à l’agriculture, je demande le rapport du décret que vous venez de rendre, et la mise des dix détenus en liberté sans autre forme (1) . [COUTHON] fait adopter le décret qui suit : « La Convention nationale, après avoir entendu la lecture de la pétition de Gabriel Girar-dias, Jean Rattal, Jean Legay, Louis Audanson, Pierre Audan, Gilbert Gouy, Antoine Valeix, Antoine Giraud, Louis Legay et Gilbert Feydit, cultivateurs des communes du canton de Ro-chefort et autres cantons du département du Puy-du-Dôme, décrète que les poursuites commencées contre ces citoyens, à l’occasion du rassemblement qui a eu lieu il y a plusieurs mois dans le canton de Rochefort et autres, sont annullées; qu’en conséquence, ces citoyens seront mis sur-le-champ en liberté» (2). 45 Un membre [BRIVAL] dit que les troubles excités par le fanatisme dans le département de la Corrèze, avoient obligé les commissaires de la Convention à faire mettre en arrestation un grand nombre de coupables, et à les livrer aux tribunaux; que les chefs et instigateurs de ces troubles ont déjà péri sous le glaive des lois; que le calme est rétabli, mais que plus de 80 malheureux cultivateurs sont encore détenus dans les prisons; qu’il est temps de rendre à l’agriculture ces hommes utiles, qui n’avoient été qu’égarés. Il demande en conséquence qu’ils soient tous rendus à la liberté. « La Convention nationale décrète que ces cultivateurs seront sur-le-champ mis en liberté» (3), au milieu des plus vifs applaudissements. COUTHON : La Convention vient de bien mériter de l’humanité en rendant la liberté à ces (1) Débats, n° 599, p. 299. (2) P.V., XXXVII, 145. Minute de la main de Couthon, (C 301, pl. 1072, p. 16). Décret n° 9107. Reproduit dans Mon., XX, 442; mention dans Mess. soir, n° 632; Audit, nat., n° 596. (3) P.V., XXXVII, 145. Minute de la main de Brival, (C 301, pl. 1072, p. 17). Décret n° 9106. Reproduit dans Débats, n° 599, p. 300; J. Paris, n° 499; J. Mont., n° 16; J. Sablier, n° 1313; Feuille Rép., n° 313; J. Fr., n° 595; J. Univ., n° 1630; C. Eg., n° 634; Mon., XX, 442. malheureux cultivateurs que des aristocrates avaient égarés (1) . 46 Au nom du Comité de salut public, un membre [COUTHON] annonce que la marine de la République ne cesse de bien mériter de la patrie, et que quatre nouvelles prises sont entrées dans nos ports. SAVOIR : Courier du 18 Floréal. Prise entrée à Morlaix. Un navire anglais de 100 tonneaux, chargé de fers, thé et autres marchandises, pris par la frégate YInsurgente. Courier du 19 Floréal. Prises entrées à l’Orient. Un brick hollandais de 150 tonneaux, chargé de fromage, beurre et riz. Un brick de 120 tonneaux, chargé de toile, bijouterie et quincaillerie : tous deux pris par la corvette le Maire Guiton. Une goélette de 70 tonneaux, allant à Bilbao, avec un chargement de morue, pris par la frégate la Fidèle. Ces trois dernières prises sont entrées à l’Orient (2). ( Applaudissements ) . 47 Sur la motion du même membre [COUTHON] la Convention nationale rend le décret suivant : « Sur la proposition d’un membre, la Convention nationale décrète que la loi du 19 Floréal, relative à la compétence du tribunal révolutionnaire et des tribunaux criminels, sera réimprimée en entier au bulletin, avec les additions et changemens décrétés tant dans la présente séance que dans celle d’hier, et charge l’un de ses membres, Merlin (de Douai), d’en surveiller l’impression » (3) . 48 Au nom du Comité des finances, un autre membre [CAMBON] fait ouvrir la discussion (1) Mon., XX, 443. (2) P.V., XXXVII, 146. Bin, 22 flor.; Débats, n° 599, p. 301; J. Mont., n° 16; J. Fr., n° 595; M.U., XXXIX, 363; J. Perlet, n° 597; J. Sablier, n° 1312; C. Eg., n° 632; J. Matin, n° 690; J. Sans-Culottes, n° 451; Ann. patr., n° 496; Rép., n° 143; J. Paris, n° 497; J. Lois, n° 591; Feuille Rép., n° 313; J. Univ., n° 1630; Arm. R.F., n° 164; Mon., XX, 443; Mess, soir, n° 632; Audit, nat., n° 596; J. Univ., n° 1631; L’Orient : Lorient. (3) P.V., XXXVII, 146. Minute de la main de Dornier, (C 301, pl. 1072, p. 19). Décret n° 9099. Reproduit dans Bin, 25 flor. (suppl1) ; Débats, n° 599, p. 299; J. Paris, n° 497 et 498. SÉANCE DU 22 FLORÉAL AN II (11 MAI 1794) - N° 8 45 A 48 245 COUTHON : J’atteste à la Convention qu’il ne s’agit ici que de pauvres cultivateurs : mais il ne convient peut-être pas que, de confiance, vous rendiez la liberté à des détenus. Je demande la suspension des poursuites jusqu’au rapport, et la liberté provisoire. Décrété. Applaudi. BREARD : D’après l’exposé que vient de faire Couthon, il vous est bien démontré que les cultivateurs arrêtés avoient été égarés par des mal-veillans et qu’ils ont résisté à la loi sans le savoir. Le Comité de législation ne nous apprendrait rien de plus que nous n’en savons dans ce moment : faisons sur le champ un acte à la fois de justice et d’humanité. Les laboureurs dont on vous entretient sont pauvres, précieux à leurs familles et à l’agriculture, je demande le rapport du décret que vous venez de rendre, et la mise des dix détenus en liberté sans autre forme (1) . [COUTHON] fait adopter le décret qui suit : « La Convention nationale, après avoir entendu la lecture de la pétition de Gabriel Girar-dias, Jean Rattal, Jean Legay, Louis Audanson, Pierre Audan, Gilbert Gouy, Antoine Valeix, Antoine Giraud, Louis Legay et Gilbert Feydit, cultivateurs des communes du canton de Ro-chefort et autres cantons du département du Puy-du-Dôme, décrète que les poursuites commencées contre ces citoyens, à l’occasion du rassemblement qui a eu lieu il y a plusieurs mois dans le canton de Rochefort et autres, sont annullées; qu’en conséquence, ces citoyens seront mis sur-le-champ en liberté» (2). 45 Un membre [BRIVAL] dit que les troubles excités par le fanatisme dans le département de la Corrèze, avoient obligé les commissaires de la Convention à faire mettre en arrestation un grand nombre de coupables, et à les livrer aux tribunaux; que les chefs et instigateurs de ces troubles ont déjà péri sous le glaive des lois; que le calme est rétabli, mais que plus de 80 malheureux cultivateurs sont encore détenus dans les prisons; qu’il est temps de rendre à l’agriculture ces hommes utiles, qui n’avoient été qu’égarés. Il demande en conséquence qu’ils soient tous rendus à la liberté. « La Convention nationale décrète que ces cultivateurs seront sur-le-champ mis en liberté» (3), au milieu des plus vifs applaudissements. COUTHON : La Convention vient de bien mériter de l’humanité en rendant la liberté à ces (1) Débats, n° 599, p. 299. (2) P.V., XXXVII, 145. Minute de la main de Couthon, (C 301, pl. 1072, p. 16). Décret n° 9107. Reproduit dans Mon., XX, 442; mention dans Mess. soir, n° 632; Audit, nat., n° 596. (3) P.V., XXXVII, 145. Minute de la main de Brival, (C 301, pl. 1072, p. 17). Décret n° 9106. Reproduit dans Débats, n° 599, p. 300; J. Paris, n° 499; J. Mont., n° 16; J. Sablier, n° 1313; Feuille Rép., n° 313; J. Fr., n° 595; J. Univ., n° 1630; C. Eg., n° 634; Mon., XX, 442. malheureux cultivateurs que des aristocrates avaient égarés (1) . 46 Au nom du Comité de salut public, un membre [COUTHON] annonce que la marine de la République ne cesse de bien mériter de la patrie, et que quatre nouvelles prises sont entrées dans nos ports. SAVOIR : Courier du 18 Floréal. Prise entrée à Morlaix. Un navire anglais de 100 tonneaux, chargé de fers, thé et autres marchandises, pris par la frégate YInsurgente. Courier du 19 Floréal. Prises entrées à l’Orient. Un brick hollandais de 150 tonneaux, chargé de fromage, beurre et riz. Un brick de 120 tonneaux, chargé de toile, bijouterie et quincaillerie : tous deux pris par la corvette le Maire Guiton. Une goélette de 70 tonneaux, allant à Bilbao, avec un chargement de morue, pris par la frégate la Fidèle. Ces trois dernières prises sont entrées à l’Orient (2). ( Applaudissements ) . 47 Sur la motion du même membre [COUTHON] la Convention nationale rend le décret suivant : « Sur la proposition d’un membre, la Convention nationale décrète que la loi du 19 Floréal, relative à la compétence du tribunal révolutionnaire et des tribunaux criminels, sera réimprimée en entier au bulletin, avec les additions et changemens décrétés tant dans la présente séance que dans celle d’hier, et charge l’un de ses membres, Merlin (de Douai), d’en surveiller l’impression » (3) . 48 Au nom du Comité des finances, un autre membre [CAMBON] fait ouvrir la discussion (1) Mon., XX, 443. (2) P.V., XXXVII, 146. Bin, 22 flor.; Débats, n° 599, p. 301; J. Mont., n° 16; J. Fr., n° 595; M.U., XXXIX, 363; J. Perlet, n° 597; J. Sablier, n° 1312; C. Eg., n° 632; J. Matin, n° 690; J. Sans-Culottes, n° 451; Ann. patr., n° 496; Rép., n° 143; J. Paris, n° 497; J. Lois, n° 591; Feuille Rép., n° 313; J. Univ., n° 1630; Arm. R.F., n° 164; Mon., XX, 443; Mess, soir, n° 632; Audit, nat., n° 596; J. Univ., n° 1631; L’Orient : Lorient. (3) P.V., XXXVII, 146. Minute de la main de Dornier, (C 301, pl. 1072, p. 19). Décret n° 9099. Reproduit dans Bin, 25 flor. (suppl1) ; Débats, n° 599, p. 299; J. Paris, n° 497 et 498. 246 ARCHIVES PARLEMENTAIRES CONVENTION NATIONALE sur un projet de décret relatif aux rentes viagères, et la Convention nationale en décrète quelques articles, et ajourne le surplus à demain (1). CAMBON : Citoyens, Je viens soumettre à la discussion la loi sur la liquidation des rentes viagères. Depuis le 2 germinal, époque de la première lecture de ce projet, nous avons recueilli toutes les observations auxquelles il a donné lieu. Personne n’a pu en attaquer les principes ni les conséquences. Notre but a été de réduire le taux usuraire des rentes viagères que le despotisme avait singulièrement accru, en les soumettant à une opération semblable à celle que vous avez décrétée pour les rentes perpétuelles. Nous vous proposons de les réduire à 5 % d’intérêt. Une seule observation majeure a été faite : la répartition du capital sur plusieurs têtes n’a pas paru claire; pour faire concevoir cette opération, nous avons joint au rapport 10 à 12 exemples qui la rendront sensible. Deux seuls amendements ont paru justes; nous les avons mis dans le décret. Plusieurs personnes ont fait entendre des plaintes; on a dit que nous réduisions leurs rentes : il ne nous a pas été difficile de faire voir combien ces clameurs étaient mal fondées. En effet, nous ne retranchons rien de la totalité du revenu de l’homme au-dessus de cinquante ans; sa rente viagère peut être considérée comme le fruit de son travail et de ses économies. Nous retranchons peu à celui qui a atteint l’âge de quarante ans; quant à ceux qui ont placé sur de jeunes têtes, ils n’ont point lieu de se plaindre; ils peuvent opter, ou de souffrir la réduction de leur rente viagère ou de la conserver entière en profitant de la faveur accordée à leur âge (2) . CAMBON annonce une bonification de 245 millions pour le trésor public, de grands avantages pour les rentiers, et une heureuse simplification dans la comptabilité. Le projet porte 2 bases principales : 1°) la conversion des rentes viagères en un capital qui sera inscrit sur le grand livre à 5 % d’intérêt; 2°) la faculté de conserver une certaine quantité de revenu viager conformément aux besoins de l’âge. Pour convertir le viager en capital, le Comité a fait établir des tables d’après un ordre moyen de mortalité, conformément à l’âge que chaque rentier doit vivre, en suivant l’ordre de la nature. Le rapporteur fait d’abord adopter plusieurs modifications au décret du 1er germinal sur le paiement des arrérages. Un article porte que les naturels Suisses produiront des certificats de vie délivrés par les magistrats de leur résidence. H présente ensuite les articles de la liquidation (1) P.V., XXXVII, 147. Décret n° 9113. Mention dans J. Sablier, n° 1313; Débats, n° 599, p. 301; Mess, soir, n° 531; J. Mont., n° 16; J. Matin, n° 690; J. Paris, n° 497; Rép., n° 143; Feuille Rép., n° 313; J. Sans-Culottes, n° 451; C. Eg., n° 632; Audit, nat., n° 596; J. TJniv., n° 1631. Voir ci-après, séance du 23, n° 59; voir Archives pari., T. LXXXVTI, séances : du 1er germ., n° 78; du 2, n° 40; du 6, n° 58; du 9, n° 55; du 13, n° 16; du 16, n° 30; du 21, Annexe II; du 23, nos 24 et 69; du 27, n° 69. (2) Mon., XX, 442-443. des rentes viagères et de leur conversion en un capital; les articles suivants sont décrétés : Art. I. Il sera formé un capital du produit de toutes les rentes viagères de la République d’après les propositions et bases établies aux tables jointes au présent décret. Les tables sont annexées au décret. Art. II. Dans aucun cas le capital ne pourra excéder la somme qui aura été fournie dans l’emprunt. Art. III. Les propriétaires de rentes et intérêts viagers seront crédités sur le grand livre à 5 % d’intérêt, sauf les exceptions ci-après : Art. IV. Les propriétaires des rentes viagères pourront convertir ce capital en une rente viagère qui ne pourra pourtant pas excéder 1 000 livres s’ils sont âgés de 30 ans et au-dessous, 1 500 liv. de 30 à 40 ans, 2 000 liv. de 40 à 50 ans, 3 000 liv. de 50 à 60 ans, 4 000 liv. de 60 à 70 ans, 5 000 liv. de 70 à 80 ans, 7 500 liv. de 80 à 90 ans, 10 000 liv. de 90 ans et au-dessus (1). 49 PREMIER RAPPORT FAIT AU NOM DU COMITÉ DE SALUT PUBLIC Sur le moyen d’extirper la mendicité dans les campagnes, et sur les secours que doit accorder la République aux citoyens indigens BARERE : Citoyens, Je viens exciter de nouveau votre patriotisme et vous rappeler le plus saint de vos devoirs. Je dois vous parler des indigens dont le spectacle afflige encore la République. Il y a peu de jours vous applaudissiez à ces paroles : « Les malheureux sont les puissances de la terre; ils ont le droit de parler en maîtres aux gouvememens qui les négligent. Ces principes sont éversifs des gouvememens corrompus; ils détruiroient le votre, si vous le laissiez corrompre ». Les Comités de salut public et de sûreté générale qui ont publié cet axiome terrible devant les représentans du peuple, ne doivent pas attendre que le peuple leur en reproche la stérile publication, ou l’inexécution des devoirs qu’il leur impose. Aussi le Comité vient vous parler aujourd’hui des indigens : à ce nom sacré, mais qui sera bientôt inconnu à la République, il compte sur vos efforts à le faire oublier. Tandis que le canon gronde sur toutes nos frontières, un fléau redoutable, la lèpre des monarchies, la mendicité, fait des progrès effrayans dans l’intérieur de la République. La propagation de cette maladie politique et morale n’a pas de principe plus actif que la guerre, d’agens plus dangereux que les factions, de moyens plus puis-sans que le désordre des affaires publiques, et de perpétuité plus assurée que l’indifférence du législateur. Eh bien ! ce sera une belle époque pour la Convention d’avoir aboli la mendicité au milieu des fureurs de la guerre. La mendicité est une dénonciation vivante con-(1) Ann. R.F., n° 163; J. Fr., n° 595. 246 ARCHIVES PARLEMENTAIRES CONVENTION NATIONALE sur un projet de décret relatif aux rentes viagères, et la Convention nationale en décrète quelques articles, et ajourne le surplus à demain (1). CAMBON : Citoyens, Je viens soumettre à la discussion la loi sur la liquidation des rentes viagères. Depuis le 2 germinal, époque de la première lecture de ce projet, nous avons recueilli toutes les observations auxquelles il a donné lieu. Personne n’a pu en attaquer les principes ni les conséquences. Notre but a été de réduire le taux usuraire des rentes viagères que le despotisme avait singulièrement accru, en les soumettant à une opération semblable à celle que vous avez décrétée pour les rentes perpétuelles. Nous vous proposons de les réduire à 5 % d’intérêt. Une seule observation majeure a été faite : la répartition du capital sur plusieurs têtes n’a pas paru claire; pour faire concevoir cette opération, nous avons joint au rapport 10 à 12 exemples qui la rendront sensible. Deux seuls amendements ont paru justes; nous les avons mis dans le décret. Plusieurs personnes ont fait entendre des plaintes; on a dit que nous réduisions leurs rentes : il ne nous a pas été difficile de faire voir combien ces clameurs étaient mal fondées. En effet, nous ne retranchons rien de la totalité du revenu de l’homme au-dessus de cinquante ans; sa rente viagère peut être considérée comme le fruit de son travail et de ses économies. Nous retranchons peu à celui qui a atteint l’âge de quarante ans; quant à ceux qui ont placé sur de jeunes têtes, ils n’ont point lieu de se plaindre; ils peuvent opter, ou de souffrir la réduction de leur rente viagère ou de la conserver entière en profitant de la faveur accordée à leur âge (2) . CAMBON annonce une bonification de 245 millions pour le trésor public, de grands avantages pour les rentiers, et une heureuse simplification dans la comptabilité. Le projet porte 2 bases principales : 1°) la conversion des rentes viagères en un capital qui sera inscrit sur le grand livre à 5 % d’intérêt; 2°) la faculté de conserver une certaine quantité de revenu viager conformément aux besoins de l’âge. Pour convertir le viager en capital, le Comité a fait établir des tables d’après un ordre moyen de mortalité, conformément à l’âge que chaque rentier doit vivre, en suivant l’ordre de la nature. Le rapporteur fait d’abord adopter plusieurs modifications au décret du 1er germinal sur le paiement des arrérages. Un article porte que les naturels Suisses produiront des certificats de vie délivrés par les magistrats de leur résidence. H présente ensuite les articles de la liquidation (1) P.V., XXXVII, 147. Décret n° 9113. Mention dans J. Sablier, n° 1313; Débats, n° 599, p. 301; Mess, soir, n° 531; J. Mont., n° 16; J. Matin, n° 690; J. Paris, n° 497; Rép., n° 143; Feuille Rép., n° 313; J. Sans-Culottes, n° 451; C. Eg., n° 632; Audit, nat., n° 596; J. TJniv., n° 1631. Voir ci-après, séance du 23, n° 59; voir Archives pari., T. LXXXVTI, séances : du 1er germ., n° 78; du 2, n° 40; du 6, n° 58; du 9, n° 55; du 13, n° 16; du 16, n° 30; du 21, Annexe II; du 23, nos 24 et 69; du 27, n° 69. (2) Mon., XX, 442-443. des rentes viagères et de leur conversion en un capital; les articles suivants sont décrétés : Art. I. Il sera formé un capital du produit de toutes les rentes viagères de la République d’après les propositions et bases établies aux tables jointes au présent décret. Les tables sont annexées au décret. Art. II. Dans aucun cas le capital ne pourra excéder la somme qui aura été fournie dans l’emprunt. Art. III. Les propriétaires de rentes et intérêts viagers seront crédités sur le grand livre à 5 % d’intérêt, sauf les exceptions ci-après : Art. IV. Les propriétaires des rentes viagères pourront convertir ce capital en une rente viagère qui ne pourra pourtant pas excéder 1 000 livres s’ils sont âgés de 30 ans et au-dessous, 1 500 liv. de 30 à 40 ans, 2 000 liv. de 40 à 50 ans, 3 000 liv. de 50 à 60 ans, 4 000 liv. de 60 à 70 ans, 5 000 liv. de 70 à 80 ans, 7 500 liv. de 80 à 90 ans, 10 000 liv. de 90 ans et au-dessus (1). 49 PREMIER RAPPORT FAIT AU NOM DU COMITÉ DE SALUT PUBLIC Sur le moyen d’extirper la mendicité dans les campagnes, et sur les secours que doit accorder la République aux citoyens indigens BARERE : Citoyens, Je viens exciter de nouveau votre patriotisme et vous rappeler le plus saint de vos devoirs. Je dois vous parler des indigens dont le spectacle afflige encore la République. Il y a peu de jours vous applaudissiez à ces paroles : « Les malheureux sont les puissances de la terre; ils ont le droit de parler en maîtres aux gouvememens qui les négligent. Ces principes sont éversifs des gouvememens corrompus; ils détruiroient le votre, si vous le laissiez corrompre ». Les Comités de salut public et de sûreté générale qui ont publié cet axiome terrible devant les représentans du peuple, ne doivent pas attendre que le peuple leur en reproche la stérile publication, ou l’inexécution des devoirs qu’il leur impose. Aussi le Comité vient vous parler aujourd’hui des indigens : à ce nom sacré, mais qui sera bientôt inconnu à la République, il compte sur vos efforts à le faire oublier. Tandis que le canon gronde sur toutes nos frontières, un fléau redoutable, la lèpre des monarchies, la mendicité, fait des progrès effrayans dans l’intérieur de la République. La propagation de cette maladie politique et morale n’a pas de principe plus actif que la guerre, d’agens plus dangereux que les factions, de moyens plus puis-sans que le désordre des affaires publiques, et de perpétuité plus assurée que l’indifférence du législateur. Eh bien ! ce sera une belle époque pour la Convention d’avoir aboli la mendicité au milieu des fureurs de la guerre. La mendicité est une dénonciation vivante con-(1) Ann. R.F., n° 163; J. Fr., n° 595.