[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [28 juillet 1789.1 293 M. Enmiery combat l’amendement de M. Bouche. Il dit qu’il ne faut pas laisser au comité la faculté de déterminer les cas du renvoi au ministre, des demandes et pétitions à l’Assemblée ; que ce serait accorder au comité une influence qui pourrait devenir dangereuse, dont il serait facile d’abuser ; que ses seules fonctions devaient se borner à examiner, à rendre compte, et que le droit de décider devait appartenir à l’Assemblée seule. Il a proposé ensuite quelques changements dans les termes de la motion. M. de Custine veut que l’Assemblée s’occupe directement de tous les objets de détail. En conséquence, il propose qu’il soit tenu des séances de relevée, qui seraient destinées à cet objet. M. Guillaume regarde comme très-inutile l’établissement de ce comité. Renvoyons, dit-il, un certain nombre d’adresses à chaque bureau, et chacun en fera le rapport à son tour. M. P u pan t de Nemours s’oppose à la motion par des vues et des considérations générales. Les législateurs, dit-il, ne doivent s’occuper que de faire des lois, et ils doivent s’interdire la connaissance des affaires auxquelles ils ne peuvent pas pourvoir par des lois générales. L’on rappelle aussi la motion de M. le marquis de Sillery, qui tend à une proclamation générale dans tout le royaume, proclamation dans laquelle l’Assemblée déclarerait son incompétence pour décider sur les affaires d’administration et de police ; qu’elle inviterait aussi toutes les provinces à envoyer au pouvoir exécutif tout ce qui en dépend. M. Dupont insiste pour cette motion, l’Assemblée ne devant pas, selon lui, se charger d’affaires sur lesquelles elle ne pourrait statuer par aucune loi. La discussion était déjà épuisée, toutes les idées étaient communiquées, connues, répétées. M. de Volney demande à relire sa motion, pour faire part à l’Assemblée du changement qu’il y a apporté d’après le vœu général: Etablir un comité des rapports, auquel seront renvoyés tous les mémoires, plaintes et adresses..... pour en faire le rapport à l’Assemblée, s’il y a lieu. L’on va aux voix sur la motion, sans fixer le nombre des membres du comité. Elle passe à la grande majorité. Ensuite on va aux voix sur le nombre, et sur la question de savoir si ce comité sera composé par bureaux ou généralités. Quant au nombre, tout le monde paraît d’accord pour trente personnes ; il n’y a de débats que pour savoir si on prendra les membres dans les bureaux ou dans les généralités. Ceux qui proposent l’élection par généralités disent que les malheurs arrivés dans les provinces nécessitent des détails locaux que les personnes seules de la province pourraient donner. Nonobstant ces réflexions, l'opinion par bureaux l’emporte. Enfin, l’on examine la dernière question. Dans quL'l temps le bureau fera-t-il son rapport ? le fera-t-il une fois par semaine? le fera-t-il tous les jours avant les séances? Il est décidé qu’il se fera dans des assemblées extraordinaires, tenues le soir après les bureaux. M. Duport, qui avait demandé la parole depuis plusieurs jours, l’obtient aujourd’hui. M. Duport. Messieurs, je partage avec les autres membres de l’Assemblée le désir qu’ils manifestent de s’occuper promptement de la constitution, et présenterai bientôt mes idées sur ce point. Mais les nouvelles qui nous viennent chaque jour des provinces nous pressent de délibérer. Les événements désastreux du Sois-sonnais et le complot de Brest rendraient notre silence coupable. Les destins de la France nous sont confiés : elle attend de nous son salut ; nous lui devons compte des moyens que nous emploierons ..... On trame des complots contre la chose publique, nous ne devons pas en douter. Il ne doit pas être question de renvoi devant les tribunaux : vous me dispenserez d’entrer dans aucune discussion ; il faut acquérir d’affreuses et d’indispensables connaissances. C’est là ce qui doit nous occuper. Nous apprendrons des vérités terribles, mais indispensables. Vous me dispenserez ici de toute discussion: mettons la plus grande activité; que l’œil de notre surveillance soit ouvert de tous côtés. Je me résume, et je propose l’arrêté suivant : « L’Assemblée nationale, considérant tous les maux qui nous environnent, a arrêté et arrête qu’il sera établi une commission de quatre personnes, qui seront chargées spécialement d’entendre le rapport et les indices sur l’affaire de Brest et autres semblables. » La motion de M. Duport est très-applaudie. Plusieurs membres trouvent bon que des objets aussi intéressants ne soient confiés qu’à un petit nombre de personnes. D'autres , tout en rendant justice à tous les honorables membres, insinuent qu’il serait dangereux de confier des choses si essentielles à quatre personnes seulement, et concluent pour que cette commission soit composée de douze membres. Un autre ne veut point de commission, mais un tribunal provisoire. M. Rewbell, député de Colmar. Mes efforts pour l’éloignement des troupes, l’alarme et l’effroi qu’elles nous inspiraient, vous faisaient croire que la nation était en danger, que vous aviez tout à craindre dans le temple même de la liberté ; que des mains forcenées.... je me tais; mais hélas I croyez-vous être dans une position moins critique aujourd’hui? et moi je dis et je soutiens que nos malheurs ont augmenté. Que d’indices, que de preuves de ce que j’avance ! le port de Brest menacé, nos moissons perdues, les brigands répandus sur la surface de la France? Qui les a appelés ? Je ne veux faire aucune application ; mais il existe un principal moteur. Vous l’avez nommé alors, et votre prudence vous a fait deviner ses associés. Ces papiers saisis sur M. de Castelnau me rappellent qu’il en existait d’autres. Le 14, lafrayeur et l’horreur s’emparèrent de vos âmes, et vous fîtes alors la proclamation que l’instruction du crime de lèse-nation appartiendrait à ses représentants. Pourquoi donc aujourd’hui cette facilité à laisser échapper des papiers qui peuvent vous conduire à l’indice des trames horribles dont nous avons pensé être les victimes ? On doit déposer [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. ces papiers, pour en tirer au besoin les éclaircissements nécessaires; on doit en dresser procès-verbal, et c’est à des commissaires choisis parmi vous à qui vous devez confier ce dépôt. En agissant ainsi, vous aplanissez les difficultés, vous irez plus vite à la connaissance des faits. Nos ennemis savent que nous sommes en garde contre eux, pour faire échoir leurs ténébreuses menées. Quand le peuple saura que nous lui avons procuré toute la somme de bonheur qui était en notre pouvoir, que nous avons poursuivi ses ennemis, même quand nos travaux ne seraient pas couronnés de succès, il nous bénira. En vain prétexterait-on ici l’inviolabilité des lettres. Eh ! de qui sont-elles ces lettres ? de ces hommes dénoncés par la voix publique. Cette inviolabilité peut-elle entrer en compensation avec le salut de la patrie ? Quoi donc ! le secret des lettres de personnes suspectes est-il plus sacré que le salut commun ? le dis suspectes : tout peuple, en effet, chez qui la patrie n’est pas un mot vide, regarde comme traîtres les citoyens qui abandonnent la patrie. On nous observe que les précautions sont inutiles et que le souverain pourrait s’en alarmer ; que la paix est faite. Comme si jamais on eût été en guerre avec le souverain! Anathème éternel contre l’homme qui en aurait pu même concevoir l’idée-! La nation, le Roi ne font qu’un: c’est le Roi qui l’a dit : il l’a dit en épanchant son cœur dans votre sein, il l’a dit lorsqu’il vous demanda de l’aider à sauver l’Etat : combattons ses ennemis et les nôtres; assurons-nous, interceptons leur correspondance, et portons partout des yeux si pénétrants et si actifs, que nous réduisions les restes de la cabale à rester dans une inaction craintive. M. le marquis! de Goay d’Arcy. Il semble que tout conspire contre le bonheur de la France. Des ennemis infatigables dans leur persécution se répandent de tous côtés pour accroître nos maux; la conspiration de Brest n’est que trop véritable, ce port a été sur lepoînt d’être livré aux Anglais. Dans des temps de famine, on coupe les blés; après tous ces désastres peut-on douter que nous n’avons des ennemis externes et internes? Pour arrêter ces conjurations l’on doit prendre toutes les mesures nécessaires. Et la première de toutes est le dépôt des lettres, et j’appuie de toute ma force la motion de M. Rewbell. J’appuie encore la motion de M. Duport; surtout le nombre de quatre me paraît suffisant. Il faudrait même qu’ils fussent inconnus; le secret est important, nécessaire. L’orateur est interrompu par des murmures. M. de Gouy d’-ircy, le silence étant rappelé, a repris en ces termes : Je ne me fusse pas risqué d’indiquer à une si auguste Assemblée une chose impossible comme un moyen raisonnable. J’ai proposé le secret sur les commissaires, parce que j’ai le moyen de le procurer. Je propose que ce soir, dans les bureaux, on nomme au scrutin , dans l’Assemblée, trente personnes, lesquelles se réduiront entre elles à quinze. Ces quinze membres choisiront, non pas parmi eux, mais dans toute l’Assemblée, hors d’eux, les quatre qui doivent composer la commission. Je préférerais cependant que le nombre fût [28 juillet 1189.] porté à six, car il faudra qu’ils se transportent de ville en ville pourrecevoir les plaintes contre les persécuteurs et les perturbateurs de la nation. Lorsqu’ils auront découvert les coupables et auront recueilli les preuves de leur crime, ils en feront le rapport à l’Assemblée. Il faudrait encore que les six personnes formassent entre elles un comité auquel on remettrait les lettres interceptées. (Cette dernière phrase a encore excité quelques rires, car il est impossible de remettre des lettres à une personne que l’on ne connaît pas.) Voici l’arrêté que je propose : « L’Assemblée nationale, présumant que les malheurs qui affligent le royaume ne proviennent que des complots externes et internes ; qu’il est de la sûreté de l’Etat, qui est la loi suprême, de chercher les moyens qui peuvent procurer la connaissance des auteurs dont les complots ne sont que trop certains: arrête que tous ceux qui saisiront des lettres adressées à des personnes en fuite ou sous la garde de la justice, seront autorisés à les déposer à l’ELôtel-de-Ville de Paris, dans les mains deM. le maire ou du commandant de la milice de Paris, auxquels seuls se feront connaître les membres du comité. » M. le chevalier de Kouffflers. Ce n’est pas sans une espèce d’étonnement que j’ai entendu jusqu’ici qu’on vous a proposé de sang-froid la violation des lettres; et qu’en voudriez-vous faire, Messieurs? Nul tribunal ne pourrait les recevoir, et vous pourriez vous déterminer à les recevoir, à les lire? et vous pourriez vous déterminer à trahir le vœu général de vos commettants et cette foi publique dont vous êtes les apôtres, dont vous êtes les garants? De telles mesures sont faites pour les tyrans, et nous appartient-il d’avoir leur frayeur, leur crainte et leur lâcheté? L’on nous dit que ces lettres ont été saisies par le droit de la guerre; mais où est la guerre? contre qui la faisons-nous? où sont nos ennemis? L’on nous cite des traits d’histoire. En voici un qui est celui de la générosité, et qui doit être le nôtre. Philippe est en guerre avec Athènes; le courrier qui portait des dépêches au roi de Macédoine est arrêté, mais bientôt après relâché; les dépêches ne sont pas décachetées, et Philippe les reçoit telles qu’on les lui avait envoyées. Dans quel temps la noblesse d’un si bel exemple nous touchera-t-elle? dans quel temps céderons-nous à la force d’un si beau trait, si ce n’est dans un temps où vingt-cinq millions d’hommes se réunissentsous les drapeaux de la liberté, plantés sur les ruines des remparts des prisons? Qu bien ne faudra-t-il plus rappeler parmi nous que des temps de désolation et de proscription, ne plus s’occuper que de délation et d’accusation? Nous n’avons d’autre danger à craindre que celui de la discorde. Il existe quand les citoyens sont divisés et se rendent les ennemis les"uns des autres. L’Etat n’a de sûreté que dans les principes de l’honneur et de la probité. Les Parisiens, enivrés de leur liberté, se reposent sur les vertus de leur maire et de leur colonel ; imitons leur exemple, livrons-nous à la confiance, à la générosité, et ne descendons pas de la hauteur de nos fonctions pour suivre sur les routes du royaume des fuyards qui dérobent leur tête au glaive de la justice, mais qui ne peuvent éviter le supplice des remords. Ne substituons pas à l’inquisition ministérielle une inquisition d’Etat. Le public deviendra avide de nouvelles, et le peuple deviendra avide de sang. |28 juillet 1789.] 295 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. Ne cherchons pas les coupables; félicitons-nous de les avoir éloignés, d’avoir purgé la France de leur présence. Laissons-les s’ agiter au loin et lancer des traits qui ne peuvent parvenir jusqu’à nous ; ne songeons qu’à la félicité publique ; abandonnons le salut de la France au patriotisme ; assu-rons-le par de saintes lois, et ne les violons pas au moment même de les publier, M. de Castellane. Vous avez promis vengeance aux malheurs du peuple : nous ne connaissons pas les auteurs des crimes; mais nous sommes bien assurés des forfaits. La conspiration qui devait livrer Brest, les désordres déplorables de Soissons ne nous les manifestent que trop. Les brigands qui infestent les environs de Soissons sont sans doute soudoyés par ceux qui redoutent la constitution. Nous ne connaissons pas les coupables; mais la France a les yeux ouverts sur ceux qui ont été associés aux plus coupables ministres. Cela seul, sans doute. ne les rend pas coupables, mais au moins il faut remplir l’attente du ppuple, et préserver la France des malheurs dont elle est menacée. Je ne pense pas qu’il faille des inquisiteurs; ce serait un remède qui tournerait en mal, mais un comité qui informera publiquement; la publicité convient à nos démarches et à notre caractère. Quatre personnes sont suffisantes, le nombre en doit être petit. Rien n’empêche donc de nommer les commissaires, et surtout de les nommer promptement. M. le comte de Virleu. Il existe trois pouvoirs qui concourent à l’établissement de la société : le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire. Dès que ces trois pouvoirs sont réunis dans la main d’un seul, le despotisme existe; s’il est dans la main d’un tyran, ta patrie peut le combattre; mais s’il est dans la main même de la patrie, alors elle se déchire elle-même, aucune force ne peut la rappeler à l’ordre. On nous propose d’ériger un tribunal qui prononcera sur le sort des coupables; on nous propose d’établir une espèce d’inquisition secrète pour dévoiler les crimes. Une république fameuse a eu des inquisiteurs pareils; leur jugement frappait comme l’éclair. Le sang a coulé avec profusion, et les vengeances étaient plutôt le signal qui dirigeait le glaive du bourreau que l’ordre de la justice. Je demande si la France doit avoir un pareil régime? si, parmi ses habitants, dont la douceur et l’aménité forment le principal caractère, on doit élever un pareil monument? Si la liberté était bannie de la terre, elle trouverait un asile dans notre patrie. Comment peut-on demander un établissement aussi révoltant, immoler des hommes qui ne pourront se faire entendre, qui ne pourront se défendre? Voilà de ces principes qui répugnent à l’honneur, à la délicatesse, à l’humanité; nous venons les détruire et non pas les consacrer. Le premier devoir que m’ont imposé mes commettants, c’est de rétablir la liberté publique, et je ne suis pas venu pour l’attaquer. Si vous jugez à propos d’établir une commission, elle doit être publique comme les fonctions des commissaires. D’après mes prémisses, il est facile de voir que je rejette toute commission secrète. Quant au tribunal, si nous pouvions en créer un, il ne serait que provisoire, il ne serait qu’une véritable commission; qu’on ne dise pas qu’elle serait différente de celles que les ministres nomment à leur gré pour perdre leurs ennemis. Elle serait arbitraire comme elles, révoltante comme elles, et établie d’après les mêmes principes. Dira-t-on qu’elle ne sera pas dangereuse, parce qu’elle sera nommée par la nation ; mais je dis qu’elle en deviendra plus dangereuse. Le despotisme de la multitude e�t le plus funeste de tous. Je vous demande quelles seront les bornes du pouvoir que nous allons exercer? Qui pourra nous juger? Qui pourra nous rappeler à nos principes? Non, il est dangereux de réunir dans nos mains tous les pouvoirs, toute l’autorité. Je ne pense pas enfin qu’on puisse former une commission, un comité de recherches. M. Chapelier. Il me semble que jusqu’ici l’on n’a pas saisi le véritable point de la motion: l’on s’écarte, l’on parle de tribunal, de la violation du secret. Ce ne sont pas les objets qui vous sont proposés. De quoi s’agit-il donc? de former un comité pour recevoir les informations sur des personnes suspectes, de tous les citoyens qui, répandus dans toutes les provinces, voudront donner des détails. Ces preuves seront remises ensuite à un tribunal compétent. Quant à l’ouverture des paquets, je m’attache aux principes de la morale et du droit public. La violation d’un secret est un crime, et la sûreté publique ne peut exiger un sacrifice de la vertu; cessons donc de témoigner nos craintes pour une motion qui ne peut alarmer notre conscience, qui s’accorde avec nos scrupules et l’intérêt de la patrie. Point de tribunal, point d’interception de lettres; nos registres ne doivent pas être souillés par de pareilles décisions. Les idées de M. Chapelier, exposées avec simplicité, ramènent toutes les opinions. MM. de Crillon et Rewbell retirent leur motion, comme rentrant dans celle de M. Duport. Dès ce moment, la discussion s’est bornée à cette dernière. M. le duc de Kjarocliefoucauld. L’espèce de dénonciation qui vous a été faite hier doit vous prouver la nécessité d’établir un comité de recherches. Quant au nombre des commissaires, il doit être borné à quatre. Ce choix demandera une attention scrupuleuse, intégrité, fermeté et beaucoup de lumières. Il serait imprudent de confier une charge aussi importante à un plus grand nombre de commissaires. M. d’André. Quatre commissaires ne suffiraient pas; j’en demande douze, par la raison que ce nombre doit inspirer plus de confiance. Plusieurs membres parlent encore en faveur et contre l’établissement de ce comité. Les débats sont très-longs et très-vifs. Après beaucoup d’agitation, on demande à aller aux voix sur la motion de M. Duport. Une très-grande majorité l’adopte, sauf quelques changements. En conséquence, il est arrêté que le comité d’informations sera composé de douze membres pris indifféremment sûr toute l’Assemblée sans distinction d’ordres; que le choix en sera fait dans la forme observée pour les secrétaires, et que les membres seront renouvelés ou réélus tous les mois. On élève la question de savoir si ce comité sera permanent. 296 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [29 juillet 1789.] Ici on a beaucoup divagué. On a parlé de prendre un bureau pour ce comité; on a parlé de secourir tous les prisonniers d’Etat. Enfin, en se rapprochant de la question, l’on a dit qu’il fallait qu’il fût permaneut, pour que les quatre commissaires fussent plus à même de connaître les preuves des délits. L’on a dit qu’il devait changer tous les mois à cause de l’importance de ses fonctions. Enfin il est décidé que le comité changera tous les mois. M. Dupont de Nemours, au nom du comité des subsistances, rend comple d’une requête des habitants de la ville d’Houdan, qui demandent une diminution sur le prix du sel. Cette demande est renvoyée au moment où l’Assemblée s’occupera de l’impôt du sel. M. de Puisieux demande à lire un projet d’arrêté; il le présente comme le seul qu’on puisse prendre dans la circonstance actuelle. 11 est ainsi conçu: « L’Assemblée nationale, considérant que le payement des impôts ne peut être refusé sans les plus graves inconvénients, jusqu’au moment où, par une répartition plus juste, par une perception douce des impôts moins onéreux, l’Assemblée pourra procurer le soulagement des peuples; que le refus des impôts paraît être la cause des malheurs publics, l’Assemblée invite la nation à payer comme par le passé tous les impôts qu’elle a continués par son arrêté du 17. » Ce projet d’arrêté est vivement combattu. D’un côté on dit: l’Assemblée doit ordonner; de l’autre, elle ne doit pas annoncer le soulagement du peuple, puisque l’Etat est tellement obéré, que le produit des impôts actuels sera à peine suffisant pour payer les dettes du Roi. Au milieu de tous ces débals, on demande que l’examen de l’arrêté soit renvoyé à tour dans les bureaux. Cette proposition est adoptée, d’après les réflexions de M. Fréteau, qui a observé que l’arrêté que l’on proposait de prendre était trop important pour le rejeter ou l’admettre en ce moment, et surtout à la fin d’une séance. Le premier président du bureau des finances de Paris est introduit. Il parle en ces termes : cc M. le président et messeigneurs, le bureau des finances m’a député vers cette auguste Assemblée pour avoir l’honneur de lui présenter son respect et sa reconnaissance de l’intérêt qu’elle a pris aux alarmes de la capitale, et de ses soins pour les dissiper. Comment la nation pourrait-elle désormais borner ses vœux de félicité et de prospérité, puisque ses représentants, messeigneurs, réunissent pour les fixer sur le royaume un zèle sans bornes et les plus grandes lumières? « J’ai l’honneur de demander à messeigneurs la permission de remettre sur le bureau l’arrêté de ma compagnie. « Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal, qui est conçu en ces termes : « Du samedi 25 juillet 1789. « Ce jour, le bureau des finances, assemblé en la manière accoutumée, un des membres a dit que le Roi ayant adopté les moyens d’assurer la tranquillité publique, qui ont été présentés à Sa Majesté par l’Assemblée nationale, il estimait devoir proposer à la compagnie de présenter audit seigneur Roi et à l’Assemblée nationale son respect et sa reconnaissance. « Sur quoi, le bureau, délibérant, a arrêté que M. le premier président se retirera incessamment par devers le Roi, pour offrir audit seigneur Roi le respect et la reconnaissance de la compagnie, d’avoir dissipé, par son auguste présence dans la capitale, l’effroi qui y était répandu, et de s’en être rapporté aux représentants de la nalion sur les moyens d’assurer la paix et la félicité de ses sujets. « A arrêté, en outre, que ledit sieur premier président se retirera aussi par devers l’Assemblée nationale, pour lui présenter le respect et la reconnaissance de la compagnie d’avoir rappelé et rétabli le calme dans Paris, par son intervention auprès du Roi, et de s’occuper avec un zèle infatigable du bonheur de la nation. « (On applaudit.) M. Président, à la députation . Monsieur, les hommages que reçoit de toutes parts l’Assemblée nationale lui sont d’autant plus agréables, que, portant tous l’assurance d’une adhésion entière à ses principes et à ses démarches, ils portent nécessairement les vrais caractères du patriotisme, du dévouement à la chose publique. L’Assemblée nationale est assurée de trouver en vous, monsieur, ces généreux sentiments, et reçoit avec plaisir l’hommage respectueux que le bureau des finances de la ville de Paris lui présente. M. Dupuisel, député du Perche, a entretenu l’Assemblée des troubles qui agitent cette province ; et il fait une motion relative à la perception des impôts actuels. Cette motion a été appuyée ; mais, d’après l’observation de quelques membres, elle aété ajournée. La séance est levée. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. LE DUC DE LIANCOURT. Séance du mercredi 29 juillet 1789 (1). M. le Président a annoncé à l’Assemblée le retour de M. Necker. L’Assemblée a témoigné, par des applaudissements, sa satisfaction de voir enfin totalement rendu aux vœux de la nation et du Roi, le ministre vertueux dont elle a demandé le rappel. M. le Président a annoncé que les nouvelles désastreuses arrivées du Soissonnais étaient dénuées de fondement. 11 a été rendu compte des adresses des villes de Brioude, Larnballe, Gap, Cosne-sur-Loire, Dunkerque, Roque-Brou, Maurs, Quimperlé, Apt, Yalogne,Saint-Brieux,Fontenay-le-Comte,Ghauny, Charost, Saint-Sauveur-le-Yicomte, Tarascon, Monlélimart, Briançon, Montcontour, Annonay, et sénéchaussée, Saint-Marcellin, et de l’ordre des avocats de Morlaix. M. de Grosbois, premier président du parlement de Besançon et député de la noblesse , prend la parole, et dit qu’il est chargé par sa compagnie de remettre à l’Assemblée nationale un arrêté (1) Celte séance est incomplète au Moniteur.