SÉANCE DU 8 FRIMAIRE AN III (28 NOVEMBRE 1794) - Nos 39-40 293 Tellier se rendra dans les départements de Rhône-et-Loire, Saône-et-Loire, de l’Ain et de l’Isère (80). Le susdit rapporteur [CLAUZEL] dudit comité de Sûreté générale avoit proposé la nomination du représentant du peuple Thuriot, pour aller avec le représentant du peuple Tellier dans lesdits départements de Rhône-et-Loire, Saône-et-Loire, de l’Ain et de l’Isère. Une discussion s’est élevée à ce sujet; plusieurs membres ont soutenu que Thuriot étant encore membre du comité de Salut public, ne devoit ni ne pouvoit être envoyé en mission. Sur ces débats, le décret qui suit a été rendu : «La Convention nationale décrète qu’à l’avenir aucun membre des comités de Salut public et de Sûreté générale ne pourra être envoyé en mission qu’un mois après qu’il sera sorti du comité dont il étoit membre. » (81). 39 Le rapporteur [RICHARD au nom] du comité de Salut public obtient la parole ; il donne lecture d’une lettre du représentant du peuple près l’armée des Pyrénées-Orientales, qui annonce que les Espagnols sont en pleine déroute, qu’on ne leur donne guère le temps de se rallier ; que des redoutes, des batteries sans nombre garnies d’une artillerie formidable, ont été emportées à la baïonnette ; que l’ennemi a abandonné tous ses camps, son artillerie et ses équipages, et qu’il y a au moins des tentes pour cinquante mille hommes. La Convention nationale, sur le rapport de son comité de Salut public, décrète que l’armée des Pyrénées-Orientales ne cesse de bien mériter de la patrie. Les nouvelles officielles lues aujourd’hui à la Convention nationale seront insérées au bulletin et envoyées à toutes les armées de la République (82). RICHARD : Nous vous avons annoncé, il y a deux jours, que l’armée des Pyrénées-Orientales avait attaqué les Espagnols dans un poste avantageux ; ils ont opposé au courage des républicains une nombreuse artillerie ; mais ils ont fui devant nos baïonnettes, et toute l’artillerie est restée entre nos mains. ( Vifs applaudissements.) (80) Moniteur, XXII, 619-620. Rép., n° 69 et n° 70 ; Débats, n° 796, 973-975; Ann. Pair., n° 697; C. Eg., n° 831; F. de la Républ., n° 69; J. Fr., n° 794; Gazette Fr., n° 1061; M.U., n° 1356; J. Univ., n° 1829; Mess. Soir, n° 832; Ann. R.F., n° 68. (81) P.-V., L, 165. C 327 (1), pl. 1432, p. 33 indique que la formule «les membres des comités de gouvernement» a été rayée et remplacée par « de Salut public et de Sûreté générale ». (82) P.-V., L, 165-166. C 327 (1), pl. 1432, p. 34. Richard rapporteur selon C*II, 21. [Les représentants du peuple près l’armée des Pyrénées-Orientales à la Convention nationale, La Jonquière, le 30 brumaire an III\ (83) Citoyens collègues, bataille et victoire complète. Dans la journée du 27, la division de droite, commandée par le général Augereau, s’était emparée de tous les camps de gauche de l’armée espagnole, ainsi que je vous l’ai écrit le 28 ; aujourd’hui nous tenons le reste ; les Espagnols sont en pleine déroute, et nous ne leur donnerons guère le temps de se rallier. Des redoutes, des batteries sans nombre, garnies d’une artillerie formidable, ont été emportées à la baïonnette, et la plupart sans tirer un coup de fusil; l’ennemi a résisté d’abord avec opiniâtreté ; mais enfin, après quatre heures de combat, il s’est vu forcé de céder à la valeur des républicains; il nous a abandonné tous ses camps, son artillerie et ses équipages. Il y a au moins des tentes pour cinquante mille hommes ; nous ignorons le nombre des bouches à feu et autre effets qu’il nous laisse ; le combat vient de finir, et nous n’avons pas encore eu le temps de compter, mais nous avons tout. Les républicains ont fait un carnage terrible. Demain, nous vous ferons connaître les détails, et en même temps nous frapperons de nouveaux coups sur ceux de nos ennemis qui n’auraient pas eu la prudence de fuir assez loin de nous. Soldats, officiers, généraux, tous se sont battus avec une intrépidité incroyable. En vous faisant parvenir les détails, nous tâcherons de vous faire connaître les principaux traits par lesquels on se sera distingué, et ceux qui en sont les auteurs. Salut et fraternité. Signé, Vidal, Delbrel. La Convention nationale, sur le rapport de son comité de Salut public, décrète que l’armée des Pyrénées-Orientales ne cesse de bien mériter de la patrie. Les nouvelles officielle lues aujourd’hui à la Convention nationale, seront insérées au bulletin, et envoyées à toutes les armées de la République (84). 40 Un secrétaire donne lecture d’une lettre de l’accusateur public, qui annonce que le tribunal criminel du département de Paris vient déjuger le procès du ci-devant comité (83) Moniteur, XXII, 620. Bull., 8 frim. ; Débats, n° 796, 975- 976 ; Ann. Patr., n° 697 ; F. de la Républ., n° 69 ; J. Fr., n° 794 ; Gazette Fr., n° 1061 ; M.U., n° 1356, 1357 ; Mess. Soir, n° 832 ; Ann. R.F., n° 68. (84) Bull., 8 frim. Rép., n° 69 ; Moniteur, XXII, 620 ; Débats, n° 796, 975 ; Ann. Patr., n° 697 ; C. Eg., n° 832 ; F. de la Républ., n° 69 ; J. Fr., n° 794 ; Mess. Soir, n° 832 ; Ann. R.F., n° 68 ; J. Perlet, n° 795. 294 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE révolutionnaire de la section du Bonnet-Rouge [Paris], et qui fait part du jugement qui condamne dix membres de ce ci-devant comité à vingt années de fer et à une exposition préalable de six heures, et qui en acquitte deux seulement, qui les sont les nommés Laloue et Piccini. La Convention passe à l’ordre du jour (85). [Leblois, accusateur public près le tribunal criminel de Paris au président de la Convention nationale, Paris, le 8 brumaire an III] (86) Citoyen président, Attendu que le procès du ci-devant comité révolutionnaire de la section du Bonnet-Rouge, était de nature à intéresser le Salut public, je préviens la Convention nationale qu’il a été jugé cette nuit. Dix des membres de ce ci-devant Comité ont été convaincus de faux, de soustractions de pièces, de vols de deniers dont ils étaient comptables, de prévarications et d’abus d’autorité, le tout dans l’exercice de leurs fonctions publiques et salariées. En conséquence, ils ont été condamnés à vingt années de fer, et à l’exposition préalable de six heures, sur la place de la Maison commune, conformément aux loix pénales. L’exposition aura lieu aujourd’hui. Deux accusés seulement, les nommés Laloue et Piccini, ont été acquittés et mis en liberté sur le champ. Salut et fraternité. Leblois, accusateur public. 41 Le même secrétaire lit ensuite les pièces dont l’extrait suit (87) : a Adresse des administrateurs, du tribunal, du comité de surveillance et de la commission municipale de Valenciennes [Nord], contenant félicitation sur l’Adresse au peuple français, et l’assurance de leur attachement à la Convention nationale, qui sera toujours leur seul et unique point de ralliement. Mention honorable et insertion au bulletin (88). (85) P.-V., L, 166. Moniteur, XXII, 619. (86) C 328 (1), pl. 1447, p. 35. Débats, n° 796, 972; Ann. Patr., n° 697 ; C. Eg., n° 828 (qui donne le nom des condamnés) et 832; Gazette Fr., n° 1061; J. Univ., n° 1829; Mess. Soir, n° 832. (87) P.-V., L, 166. (88) P.-V, L, 166. [Les administrateurs, le tribunal, le comité de surveillance du district et la commission municipale de Valenciennes à la Convention Nationale, s.l.n.d .] (89) Législateurs, Depuis l’époque mémorable où, jaloux de fixer irrévocablement les bases de la souveraineté, le peuple vous a confié le soin de ses destinées, le caractère auguste de son indépendance s’est embelli sous la main de la vertu. Cher au sentiment, ce dépôt précieux a trouvé dans votre énergie un abri contre les orages ; et son éclat immortel, en offrant au despote éperdu la honte et le désespoir, imprime dans le cœur sensible du patriote, l’admiration, la reconnaissance et l’attendrissement. Sur quelque point de votre carrière que le Français arrête ses regards, partout, il trouve des représentants dignes de lui, partout, il voit la vertu luttant contre le crime, l’humanité séchant les larmes de l’infortune; et le cours des événemens, dirigé par votre prudence ne présente à sa surprise qu’une suite de bienfaits dont le souvenir repose sur son cœur. Convaincus de cette importante vérité, que le bonheur consiste dans l’accord parfait de la conduite avec les principes, vous venez de lui donner, dans une adresse dictée par le sentiment, de nouvelles preuves de votre sollicitude et intéressante par les objets qu’elle renferme, elle offre partout l’empreinte qui caractérise votre sagesse, votre active surveillance ; toujours grands, toujours dignes de l’amour d’un peuple libre, vous développez dans sa marche rapide et majestueuse, le caractère imposant qui le distingue ; et votre courage, s’élevant en raison de l’essor que vous lui avez fait prendre, vous puisez dans vos travaux, dans vos veilles, de nouveaux succès, de nouvelles forces. C’est dans ce moment précieux, c’est dans ce nouvel acte de bienfaisance, que le Français, revêtu par vos soins d’un titre glorieux, va puiser tout ce qu’il a de grand, de sublime ; c’est là qu’il mettra ses devoirs en balance avec vos bienfaits ; que vous-mêmes trouverez dans le profession générale des principes qu’il renferme, dans l’attachement le plus sincère à la représentation nationale, dans le dévouement le plus absolu du citoyen reconnoissant pour les sauveurs de la patrie, l’expression touchante d’un retour fondé sur la félicité publique. Si le plus saint de vos devoirs est de nous éclairer sur les périls qui nous environnent, notre premier mouvement est de recevoir et de recourir à vos lumières pour en prévenir les effets. Législateurs, tant que le vaisseau de la République flottera sous la main des sages pilotes qui le dirigent, il n’aura rien à redouter des écueils, il n’aura rien à craindre des tempêtes. Terrassé par le dernier coup que vous venez de lui porter, le vil suppôt des tyrans va trouver dans ce serment si longtemps attendu, dans ce gage assuré du bonheur des Français, la fin de ses criminelles espérances ; sensibles au vœu du (89) C 328 (1), pl. 1447, p. 36. Bull., 8 frim.