SÉANCE DU 12 PRAIRIAL AN II (31 MAI 1794) - Nos 27 A 29 163 a toute notre confiance. Ne craignez plus les poignards des scélérats, vous trouverez dans chaque français autant de Geffroy (1). Mention honorable, insertion au bulletin. 27 Un membre fait lecture du bulletin des blessures du brave Geffroy (2) . [Bulletin du 12 prair. Il] (3) . « La journée d’hier a été plus calme; il a eu une heure de sommeil, les élancements et picotements dans le trajet des plaies sont diminués. Ce bénéfice est dû au suintement puriforme qui a été considérable; ce qui a bien dégorgé les environs des plaies, et ébranlé les escarts. Il a dormi deux heures la nuit dernière, ce matin le pouls n’est que fébrile. Ruffin, Legras (off. de santé de la sect. Le Pelletier ) . On reprend la lecture des adresses. 28 Les écoliers de la commune d’Attigny (4) remercient la Convention de l’envoi du recueil des actions héroïques des républicains français. Nous les lisons, disent-ils, en attendant que nous puissions les imiter. Mention honorable, .insertion au bulletin (5) . [Attigny, s.d.] (6). « Représentons montagnards, Nous vous remercions de tout notre pouvoir de l’envoi que vous avez daigné nous faire du recueil des actions civiques et héroïques des républicains français; quand nous les lisons, Représentans, nous les gravons dans nos cœurs pour nous former aux vertus républicaines et pour nous inspirer l’amour de la liberté, la haine des tyrans et des despotes coalisés. Nous vous prions de continuer à nous en envoyer. Il n’existe dans nos mains aucuns livres qui ne soient à la morale républicaine. Nous désirons partager la gloire de nos frères qui sont aux armées mais nous sommes encore trop jeunes, cependant nous nous conso-(1) C 305, pl. 1145, p. 21, signé Joncherœ (maire), Coulombier, Chaillou, Brouillot, Chambry, Ger-vais, Grognet, et 8 signatures illisibles. (2) P.V., XXXVni, 223. Bin, 12 prair.; J. S.-Culottes, n° 471; J. Paris, n° 517; J. XJniv., n° 1650; J. Matin, n° 710; Audit, nat., n° 616; J. Sablier, n° 1352; C. Eg., n° 652; Ann. R.F., n° 184; C. Univ., 13 prair.; J. Mont., n° 36; Mess, soir, n° 652; J. Perlet, n° 617; Feuille Rép., n° 333; M.U., XL, 205; Mon., XX, 616; Débats, n° 619, p. 172; Rép., n° 163; J. Lois, n° 611; J. Fr., n° 615. (3) C 304, pl. 1130, p. 17. (4) Ardennes. (5) P.V., XXXVIII, 223. Bln, 12 prair. (suppl1). (6) C 306, pl. 1158, p. 32. ions en apprenant les droits de l’homme et vos sages lois. Nous vous invitons de continuer à découvrir les conspirateurs et de leur donner la mort. Mort aux tyrans ! Vive la République. » Durueuc, Pierre Genty, Lagrappart, Prioux, George. 29 La société populaire de Toulouse (1) applaudit au décret du 18 floréal, exprime son indignation contre les conspirateurs et les traîtres, avec l’énergie d’hommes accoutumés à les déjouer et à les combattre; elle invite la Convention à demeurer à son poste. Mention honorable, insertion au bulletin (2). [Toulouse, 1er prair. II] (3). « Législateurs d’un grand peuple, Nos armes triomphent aux frontières, nos campagnes annoncént l’abondance, et la probité est à l’ordre du jour. Gloire vous soit rendue pour la loi du 18 floréal. Vous avez reconnu l’existence d’un Dieu et l’immortalité de l’âme. La déclaration des droits de l’homme et du citoyen nous l’avait fait pressentir. Des législateurs aussi philosophes connaissent trop bien le cœur humain pour tolérer l’immoralité et laisser prêcher l’athéisme. Que ne pouvez-vous être les témoins de l’assentiment auguste du peuple français à ce décret religieux; il manquait à votre gloire, vous le deviez à notre bonheur. Des esprits pervers qui conspiraient contre vous en publiant avec profusion des écrits burlesques où toute espèce de morale était pervertie, avaient voulu égarer nos campagnes, mais votre sollicitude s’est émue et votre sagesse a tout réparé. Venez entendre vos noms inscrits dans les cantiques qu’on chante à l’Eternel, vous reconnaîtrez la sublimité de votre ouvrage à la grandeur des idées qu’elle inspire et des jouissances mentales qu’il procure. Guidés par l’instinct de notre conscience et les lumières de la raison, nous allons enfin rendre à la divinité le seul hommage que lui doivent les mortels. Plus d’emblèmes mythologiques ni superstitieux, plus de convulsions sacerdotales ni de contemplations séraphiques; qu’exige le créateur de la créature ? la pratique des vertus pour tout culte et la destruction des vices pour sacrifice. Ame pure, qui que tu sois, à toi qui as proposé au comité de Salut public la nomenclature des fêtes décadaires, reçois le tribut d’admiration que te doivent tous les hommes sensibles... honorer le malheur, fêter la pudeur, inviter à la piété filiale, célébrer l’amitié, le bonheur et l’amour, sont des idées si ravissantes qu’on ne peut y penser sans attendrissement et s’en entretenir sans enthousiasme. (1) Hte-Garonne. (2) P.V., XXXVm, 223. B*", 13 prair. (1er suppl‘); M.U., XL, 247. (3) C 306, pl. 1158, p. 40, 41. SÉANCE DU 12 PRAIRIAL AN II (31 MAI 1794) - Nos 27 A 29 163 a toute notre confiance. Ne craignez plus les poignards des scélérats, vous trouverez dans chaque français autant de Geffroy (1). Mention honorable, insertion au bulletin. 27 Un membre fait lecture du bulletin des blessures du brave Geffroy (2) . [Bulletin du 12 prair. Il] (3) . « La journée d’hier a été plus calme; il a eu une heure de sommeil, les élancements et picotements dans le trajet des plaies sont diminués. Ce bénéfice est dû au suintement puriforme qui a été considérable; ce qui a bien dégorgé les environs des plaies, et ébranlé les escarts. Il a dormi deux heures la nuit dernière, ce matin le pouls n’est que fébrile. Ruffin, Legras (off. de santé de la sect. Le Pelletier ) . On reprend la lecture des adresses. 28 Les écoliers de la commune d’Attigny (4) remercient la Convention de l’envoi du recueil des actions héroïques des républicains français. Nous les lisons, disent-ils, en attendant que nous puissions les imiter. Mention honorable, .insertion au bulletin (5) . [Attigny, s.d.] (6). « Représentons montagnards, Nous vous remercions de tout notre pouvoir de l’envoi que vous avez daigné nous faire du recueil des actions civiques et héroïques des républicains français; quand nous les lisons, Représentans, nous les gravons dans nos cœurs pour nous former aux vertus républicaines et pour nous inspirer l’amour de la liberté, la haine des tyrans et des despotes coalisés. Nous vous prions de continuer à nous en envoyer. Il n’existe dans nos mains aucuns livres qui ne soient à la morale républicaine. Nous désirons partager la gloire de nos frères qui sont aux armées mais nous sommes encore trop jeunes, cependant nous nous conso-(1) C 305, pl. 1145, p. 21, signé Joncherœ (maire), Coulombier, Chaillou, Brouillot, Chambry, Ger-vais, Grognet, et 8 signatures illisibles. (2) P.V., XXXVni, 223. Bin, 12 prair.; J. S.-Culottes, n° 471; J. Paris, n° 517; J. XJniv., n° 1650; J. Matin, n° 710; Audit, nat., n° 616; J. Sablier, n° 1352; C. Eg., n° 652; Ann. R.F., n° 184; C. Univ., 13 prair.; J. Mont., n° 36; Mess, soir, n° 652; J. Perlet, n° 617; Feuille Rép., n° 333; M.U., XL, 205; Mon., XX, 616; Débats, n° 619, p. 172; Rép., n° 163; J. Lois, n° 611; J. Fr., n° 615. (3) C 304, pl. 1130, p. 17. (4) Ardennes. (5) P.V., XXXVIII, 223. Bln, 12 prair. (suppl1). (6) C 306, pl. 1158, p. 32. ions en apprenant les droits de l’homme et vos sages lois. Nous vous invitons de continuer à découvrir les conspirateurs et de leur donner la mort. Mort aux tyrans ! Vive la République. » Durueuc, Pierre Genty, Lagrappart, Prioux, George. 29 La société populaire de Toulouse (1) applaudit au décret du 18 floréal, exprime son indignation contre les conspirateurs et les traîtres, avec l’énergie d’hommes accoutumés à les déjouer et à les combattre; elle invite la Convention à demeurer à son poste. Mention honorable, insertion au bulletin (2). [Toulouse, 1er prair. II] (3). « Législateurs d’un grand peuple, Nos armes triomphent aux frontières, nos campagnes annoncént l’abondance, et la probité est à l’ordre du jour. Gloire vous soit rendue pour la loi du 18 floréal. Vous avez reconnu l’existence d’un Dieu et l’immortalité de l’âme. La déclaration des droits de l’homme et du citoyen nous l’avait fait pressentir. Des législateurs aussi philosophes connaissent trop bien le cœur humain pour tolérer l’immoralité et laisser prêcher l’athéisme. Que ne pouvez-vous être les témoins de l’assentiment auguste du peuple français à ce décret religieux; il manquait à votre gloire, vous le deviez à notre bonheur. Des esprits pervers qui conspiraient contre vous en publiant avec profusion des écrits burlesques où toute espèce de morale était pervertie, avaient voulu égarer nos campagnes, mais votre sollicitude s’est émue et votre sagesse a tout réparé. Venez entendre vos noms inscrits dans les cantiques qu’on chante à l’Eternel, vous reconnaîtrez la sublimité de votre ouvrage à la grandeur des idées qu’elle inspire et des jouissances mentales qu’il procure. Guidés par l’instinct de notre conscience et les lumières de la raison, nous allons enfin rendre à la divinité le seul hommage que lui doivent les mortels. Plus d’emblèmes mythologiques ni superstitieux, plus de convulsions sacerdotales ni de contemplations séraphiques; qu’exige le créateur de la créature ? la pratique des vertus pour tout culte et la destruction des vices pour sacrifice. Ame pure, qui que tu sois, à toi qui as proposé au comité de Salut public la nomenclature des fêtes décadaires, reçois le tribut d’admiration que te doivent tous les hommes sensibles... honorer le malheur, fêter la pudeur, inviter à la piété filiale, célébrer l’amitié, le bonheur et l’amour, sont des idées si ravissantes qu’on ne peut y penser sans attendrissement et s’en entretenir sans enthousiasme. (1) Hte-Garonne. (2) P.V., XXXVm, 223. B*", 13 prair. (1er suppl‘); M.U., XL, 247. (3) C 306, pl. 1158, p. 40, 41. 164 ARCHIVES PARLEMENTAIRES CONVENTION NATIONALE Quel beau peuple, diront les peuples lointains, que celui qui ne voit dans les poètes et les historiens de l’ancienne Grèce que des idées de fêtes imparfaites, en comparaison de celles que les législateurs français ordonnent. Les ennemis de notre égalité sainte avaient voulu nous aliéner les sentimens affectueux de toutes les nations; on ne nous peignait, au-delà des frontières, que comme des hommes immoraux et ennemis de tous les principes. Quelques conspirateurs éhontés laissaient croire et propageaient ce système coupable comme si l’on pouvait être les apôtres de la liberté et ne pas être ceux de la vertu, mais la justice nationale a frappé ces prêtres de l’athéïsme, et la loi consolante sur l’Etre suprême en anéantissant sans retour ces diatribes liberticides, nous a ramené les cœurs de tous les peuples. Créateurs de la République, soyez fiers de ce que vous avez fait, gardez encore longtemps le timon des affaires que vous dirigez si bien; la philosophie exige enfin des temples à la raison universelle, continuez à servir la cause de la morale et de l’humanité; l’univers vous admire, l’Etre suprême vous contemple, la liberté s’établira d’un pôle à l’autre et son triomphe sera votre ouvrage. » En l’absence de Dartigoeyte ( présid .) : Horbel (vice-présid.) , Desbarreaux. [La Sté popul. de Toulouse, aux habitans des campagnes ]. Utiles agriculteurs, heureux habitans des campagnes, nos amis et nos frères, lorsque tout favorise les progrès de la révolution, lorsque les armes de la République triomphent sur toutes nos frontières, lorsque la Convention nationale punit tous les conspirateurs qui voudraient ressusciter l’ancien régime ou fomenter la guerre civile, lorsque la liberté s’établit d’une manière indestructible, lorsque tout se réunit pour nous assurer le bonheur que les Représentai du peuple nous ont promis, seroit-il vrai que les ennemis de notre égalité sainte se répandent, eux ou leurs agens, jusque dans les villages, pour semer la méfiance parmi les esprits faibles, et alarmer nos pères nourriciers ? Lorsque les sans -culottes de la ville prennent à vous un intérêt si tendre, lorsque nous travaillons sans relâche à consolider un ordre de choses qui est tout à votre avantage, lorsqu’il n’est point de sacrifices que nous ne fassions de nos jouissances et de nos usages, pour nous restreindre au plus indispensable nécessaire, lorsque rien ne nous coûte pour établir l’empire de la démocratie, et travailler à la félicité générale, faut-il que des aristocrates déguisés, ou des partisans des prêtres couverts du manteau du patriotisme, puissent se flatter de nous éloigner les uns des autres, et inspirer aux bons laboureurs des doutes sur la pureté de nos principes ? — Ils sont bien coupables ceux qui cherchent à vous donner des craintes, et à vous persuader de ne plus nous envoyer les productions de la terre que vous cultivez. N’oubliez jamais, vertueux agricoles, que nous ne faisons qu’une même famille. Vous nous apportez à la ville les fruits de vos travaux champêtres, nous vous donnons à la place ceux de notre industrie; vous coupez les toisons de vos brebis, nous les filons et les préparons pour faire des draps qui vous couvrent; vous dirigez vous -mêmes la charrue, nous forgeons et trempons le fer du soc qui ouvre la terre, et de la faux qui coupe les moissons. Votre existence et la nôtre sont un échange mutuel de service et de réciprocité fraternelle, qui ne peut être interrompue sans crime. — La révolution n’a fait qu’étendre les liens de l’union qui existe entre les villes et les campagnes, c’est-à-dire, que ce ne sont plus quelques individus qui accaparent tout, lorsque le plus grand nombre étoit obligé de vivre des miettes que les riches laissoient tomber de dessus leur table; tout le monde au contraire possède un peu, a le droit et cherche à acheter de vos denrées. Comme il y a un plus grand nombre de vos frères qui ont des besoins, gardez vous d’enfouir les fruits de vos vergers et de vos jardins, parce que vous ne trouvez plus dans les villes des riches bénéficiers et d’opulens aristocrates qui payoient le prix que vous demandiez, et accaparoient tout lorsque le pauvre n’avoit que du pain. Si quelques gros fermiers et les riches propriétaires des campagnes venoient, par un intérêt sordide, une cupidité coupable, ou une aristocratie nouvelle, interrompre l’échange qui doit continuellement avoir lieu, et empêcher l’approvisionnement de nos marchés, vrais sans -culottes de la campagne, donnez-les à vos amis de la ville, car ce sont là les antagonistes de la liberté; n’oubliez jamais que les patriotes sont frères, et que l’Etre suprême, qui voit l’intérieur de nos consciences, est l’ennemi des égoïstes et des accapareurs, et qu’il favorise la cause de ceux qui défendent les droits du peuple, et établissent l’égalité. — On cherche aussi, dit-on, à vous alarmer sur la récolte prochaine, et à vous faire pressentir que l’on doit s’en emparer, et vous priver même du nécessaire. — Avez-vous pu croire un bruit aussi dénué de vraisemblance, lorsque tout nous présage une récolte si abondante, qu’elle suffiroit seule à alimenter pour plus de trois ans toute la République ? avez-vous pu penser que la Convention nationale, qui ne travaille qu’à votre bonheur, voyant toutes nos armées pénétrer dans le territoire ennemi qui les nourrira, veuille employer d’autres mesures que celles que sa sollicitude paternelle lui force de prendre pour empêcher les accaparemens, et assurer la subsistance du pauvre ? — Vos biens, vos propriétés, vos maisons seront toujours à vous; mais malgré tout ce que vous diront les gens suspects et de mauvaise foi, n’allez pas négliger et perdre des denrées dont vos frères ont besoin; sarclez vos blés avec tranquillité; arrachez de vos champs les plantes parasites, qui font autant de mal à vos récoltes, que les aristocrates voudraient en faire aux patriotes; travaillez sans crainte, moissonnez sans alarme, dépiquez avec confiance, et faites part de vos richesses aux habitants des grandes cités qui vous aiment. Ne prenez de momens de repos que ceux que la loi vous donne : tous les autres jours que vous restez oisifs, sont des vols que vous faites à la patrie. — Quelques malveillans cherchent encore à vous égarer, et à vous rappeler des idées superstitieuses que la sagesse de nos Législateurs déracine tous les jours; mais, nos bons amis et nos frères, le Dieu qui règle l’univers n’est pas comme ces prêtres vous l’annonçoient; 164 ARCHIVES PARLEMENTAIRES CONVENTION NATIONALE Quel beau peuple, diront les peuples lointains, que celui qui ne voit dans les poètes et les historiens de l’ancienne Grèce que des idées de fêtes imparfaites, en comparaison de celles que les législateurs français ordonnent. Les ennemis de notre égalité sainte avaient voulu nous aliéner les sentimens affectueux de toutes les nations; on ne nous peignait, au-delà des frontières, que comme des hommes immoraux et ennemis de tous les principes. Quelques conspirateurs éhontés laissaient croire et propageaient ce système coupable comme si l’on pouvait être les apôtres de la liberté et ne pas être ceux de la vertu, mais la justice nationale a frappé ces prêtres de l’athéïsme, et la loi consolante sur l’Etre suprême en anéantissant sans retour ces diatribes liberticides, nous a ramené les cœurs de tous les peuples. Créateurs de la République, soyez fiers de ce que vous avez fait, gardez encore longtemps le timon des affaires que vous dirigez si bien; la philosophie exige enfin des temples à la raison universelle, continuez à servir la cause de la morale et de l’humanité; l’univers vous admire, l’Etre suprême vous contemple, la liberté s’établira d’un pôle à l’autre et son triomphe sera votre ouvrage. » En l’absence de Dartigoeyte ( présid .) : Horbel (vice-présid.) , Desbarreaux. [La Sté popul. de Toulouse, aux habitans des campagnes ]. Utiles agriculteurs, heureux habitans des campagnes, nos amis et nos frères, lorsque tout favorise les progrès de la révolution, lorsque les armes de la République triomphent sur toutes nos frontières, lorsque la Convention nationale punit tous les conspirateurs qui voudraient ressusciter l’ancien régime ou fomenter la guerre civile, lorsque la liberté s’établit d’une manière indestructible, lorsque tout se réunit pour nous assurer le bonheur que les Représentai du peuple nous ont promis, seroit-il vrai que les ennemis de notre égalité sainte se répandent, eux ou leurs agens, jusque dans les villages, pour semer la méfiance parmi les esprits faibles, et alarmer nos pères nourriciers ? Lorsque les sans -culottes de la ville prennent à vous un intérêt si tendre, lorsque nous travaillons sans relâche à consolider un ordre de choses qui est tout à votre avantage, lorsqu’il n’est point de sacrifices que nous ne fassions de nos jouissances et de nos usages, pour nous restreindre au plus indispensable nécessaire, lorsque rien ne nous coûte pour établir l’empire de la démocratie, et travailler à la félicité générale, faut-il que des aristocrates déguisés, ou des partisans des prêtres couverts du manteau du patriotisme, puissent se flatter de nous éloigner les uns des autres, et inspirer aux bons laboureurs des doutes sur la pureté de nos principes ? — Ils sont bien coupables ceux qui cherchent à vous donner des craintes, et à vous persuader de ne plus nous envoyer les productions de la terre que vous cultivez. N’oubliez jamais, vertueux agricoles, que nous ne faisons qu’une même famille. Vous nous apportez à la ville les fruits de vos travaux champêtres, nous vous donnons à la place ceux de notre industrie; vous coupez les toisons de vos brebis, nous les filons et les préparons pour faire des draps qui vous couvrent; vous dirigez vous -mêmes la charrue, nous forgeons et trempons le fer du soc qui ouvre la terre, et de la faux qui coupe les moissons. Votre existence et la nôtre sont un échange mutuel de service et de réciprocité fraternelle, qui ne peut être interrompue sans crime. — La révolution n’a fait qu’étendre les liens de l’union qui existe entre les villes et les campagnes, c’est-à-dire, que ce ne sont plus quelques individus qui accaparent tout, lorsque le plus grand nombre étoit obligé de vivre des miettes que les riches laissoient tomber de dessus leur table; tout le monde au contraire possède un peu, a le droit et cherche à acheter de vos denrées. Comme il y a un plus grand nombre de vos frères qui ont des besoins, gardez vous d’enfouir les fruits de vos vergers et de vos jardins, parce que vous ne trouvez plus dans les villes des riches bénéficiers et d’opulens aristocrates qui payoient le prix que vous demandiez, et accaparoient tout lorsque le pauvre n’avoit que du pain. Si quelques gros fermiers et les riches propriétaires des campagnes venoient, par un intérêt sordide, une cupidité coupable, ou une aristocratie nouvelle, interrompre l’échange qui doit continuellement avoir lieu, et empêcher l’approvisionnement de nos marchés, vrais sans -culottes de la campagne, donnez-les à vos amis de la ville, car ce sont là les antagonistes de la liberté; n’oubliez jamais que les patriotes sont frères, et que l’Etre suprême, qui voit l’intérieur de nos consciences, est l’ennemi des égoïstes et des accapareurs, et qu’il favorise la cause de ceux qui défendent les droits du peuple, et établissent l’égalité. — On cherche aussi, dit-on, à vous alarmer sur la récolte prochaine, et à vous faire pressentir que l’on doit s’en emparer, et vous priver même du nécessaire. — Avez-vous pu croire un bruit aussi dénué de vraisemblance, lorsque tout nous présage une récolte si abondante, qu’elle suffiroit seule à alimenter pour plus de trois ans toute la République ? avez-vous pu penser que la Convention nationale, qui ne travaille qu’à votre bonheur, voyant toutes nos armées pénétrer dans le territoire ennemi qui les nourrira, veuille employer d’autres mesures que celles que sa sollicitude paternelle lui force de prendre pour empêcher les accaparemens, et assurer la subsistance du pauvre ? — Vos biens, vos propriétés, vos maisons seront toujours à vous; mais malgré tout ce que vous diront les gens suspects et de mauvaise foi, n’allez pas négliger et perdre des denrées dont vos frères ont besoin; sarclez vos blés avec tranquillité; arrachez de vos champs les plantes parasites, qui font autant de mal à vos récoltes, que les aristocrates voudraient en faire aux patriotes; travaillez sans crainte, moissonnez sans alarme, dépiquez avec confiance, et faites part de vos richesses aux habitants des grandes cités qui vous aiment. Ne prenez de momens de repos que ceux que la loi vous donne : tous les autres jours que vous restez oisifs, sont des vols que vous faites à la patrie. — Quelques malveillans cherchent encore à vous égarer, et à vous rappeler des idées superstitieuses que la sagesse de nos Législateurs déracine tous les jours; mais, nos bons amis et nos frères, le Dieu qui règle l’univers n’est pas comme ces prêtres vous l’annonçoient; SÉANCE DU 12 PRAIRIAL AN II (31 MAI 1794) - Nos 30 ET 31 165 ils le faisoient méchant, haineux, vindicatif : il n’est que grand, bienfaisant et juste. Les hommes naissent égaux et libres; ils sont pétris du même limon et de la même poussière, et ne doivent à la Divinité d’autre culte que le culte de la patrie : l’égalité naturelle fut son ouvrage, l’égalité politique sera la nôtre. Obéir religieusement aux lois, n’aimer ni les rois ni les prêtres, faire le bien, haïr le mal, soulager l’humanité malheureuse, aller au-devant des besoins de nos égaux, idolâtrer la liberté, et pratiquer toutes les vertus : voilà ce que la Convention nous prescrit, et ce que notre raison nous permet de croire, que l’Eternel exige. Barousse ( présid .), Rome, Hugueny ( secret .). 30 Les mêmes sentimens sont consignés dans l’adresse de la société populaire et révolutionnaire de la Montagne de l’arrondissement des Aydes-Saran (1) près d’Orléans. Mention honorable, insertion au bulletin (2). [ Les Aydes-Saran, 1er p rair. II] (3). «Citoyens représentons, Des factieux aussi perfides que corrompus voulaient nous conduire à l’anarchie par l’athéisme, décourager la vertu en lui ôtant l’espoir d’une autre vie, et propager le crime en étouffant le remords. Ils ignoraient ou plutôt ils feignaient d’ignorer, les scélérats, qu’il n’est point de vertu sans mœurs, ni de bonheur sans vertu. Ils se flattaient d’allumer la guerre civile en corrompant la morale publique, et de s’ouvrir, à la faveur du trouble et des désordres un chemin aux honneurs qu’ils ne pouvaient obtenir sous le règne des lois. La hache nationale a frappé de mort ces Tartuffes politiques et le calme a succédé à la terreur. Votre décret du 18 floréal, en payant à la divinité le tribut d’hommage que lui doivent les amis de la raison, a vivifié la nation entière. Depuis cette séance à jamais mémorable et digne de faire époque dans les fastes de notre révolution, le malheureux sent ses peines adoucies, la mère de famille est plus soigneuse à préserver du souffle impur du vice l’enfant qu’elle élève pour la patrie, les héros de l’humanité meurent sans regrets comme sans crainte, l’ami dit avec moins de tristesse à son ami le dernier adieu, le vieillard enfin descend dans la tombe avec sérénité. Grâces vous soient rendues, immortels défenseurs des droits de l’homme et de la divinité; puisse la reconnaissance du peuple que vous avez régénéré vous faire jouir d’avance des douceurs que vous prépare l’être suprême dont vous êtes les images vivantes. Chacun de nous, pauvres mais vertueux cultivateurs, vous aime et chérit comme son père, son ami. Vous vivrez éternellement dans nos cœurs; ceux des français sont assurés aux bien-(1) Loiret. (2) P.V., XXXVIII, 224. B*'1, 13 prair. (2e suppl1) ; 16 prair. (suppl1) et 19 prair. (3) C 306, pl. 1158, p. 43. faiteurs de l’humanité, et qui jamais plus que vous mérite d’y avoir des droits ! S. et F. ». Partin fils (présid.), Leroi ( secrét .). Les montagnards de la société ont frémi d’horreur en apprenant qu’il existait encore sur le sol de la liberté deux monstres capables de le disputer à Paris et à Charlotte Corday; cet attentat nous prouve que nos ennemis n’ont plus d’autres ressources que dans le meurtre, et annonce à la République entière que la lâcheté de ces suppôts de la tyrannie ne peut plus tenir longtemps contre la valeur et l’énergie des représentans d’un peuple libre. [Mêmes signatures] 31 La société populaire et la commune d’Yve-tot (1), admises à la barre, rendent grâces à la montagne dont la foudre a écrasé le monstre de l’athéisme, et à l’Etre Suprême qui a sauvé les jours de deux fidèles représentans du peuple; elle dépose sur le bureau 96 chemises, 307 liv. 5 s. en assignats et autres objets. Mention honorable, insertion au bulletin (2). L’ORATEUR de la députation : Citoyens représentans, Les ennemis de notre sainte révolution, furieux de leur impuissance avaient imaginé pour nouvelle ressource d’acréditer les principes monstrueux de l’athéisme, et de fouler aux pieds le dogme sacré de l’immortalité de l’âme. Ils comptaient, les traîtres faire résulter l’anéantissement de la liberté de celui de la vertu. Et déjà le monstre du royalisme commençait à relever sa tête hideuse et à se ranimer à la torche des factions. Tant d’audace ne pouvait rester impunie, un aussi criminel espoir ne pouvait germer dans le cœur des français régénérés; aussi le génie bienfaisant de la République a-t-il su, du haut de la montagne où il siège, déjouer les infâmes complots de ces hommes scélérats qui avaient résolu de replonger le peuple dans l’avilissement. L’infortune de l’esclavage d’où vous l’avez tiré; l’active vigilance de votre comité de salut public a démasqué ces dangereux caméléons, et le tribunal incorruptible, en leur faisant payer le prix de leurs forfaits, a manifesté la justice de l’être suprême dont ils cherchaient à nier l’existence. Eh ! comment la méconnaître après le nouveau prodige qui vient de sauver une fois de plus la République ! Quelle autre main que celle de l’Eternel aurait pu détourner la main sacrilège et parricide qui a failli nous jeter dans le deuil et la désolation. Où réside l’impie qui osera dire que le courage de l’immortel Geffroy n’a rien de divin, et que l’arrestation de la scélérate Régnault (1) Seine-Inférieure. (2) P.V., XXXVIII, 224. Bin, 13 prair. (2* suppl1) et 19 prair. (suppl1); Mon., XX, 619; Mess, soir, n° 652; J. Paris, n° 517. SÉANCE DU 12 PRAIRIAL AN II (31 MAI 1794) - Nos 30 ET 31 165 ils le faisoient méchant, haineux, vindicatif : il n’est que grand, bienfaisant et juste. Les hommes naissent égaux et libres; ils sont pétris du même limon et de la même poussière, et ne doivent à la Divinité d’autre culte que le culte de la patrie : l’égalité naturelle fut son ouvrage, l’égalité politique sera la nôtre. Obéir religieusement aux lois, n’aimer ni les rois ni les prêtres, faire le bien, haïr le mal, soulager l’humanité malheureuse, aller au-devant des besoins de nos égaux, idolâtrer la liberté, et pratiquer toutes les vertus : voilà ce que la Convention nous prescrit, et ce que notre raison nous permet de croire, que l’Eternel exige. Barousse ( présid .), Rome, Hugueny ( secret .). 30 Les mêmes sentimens sont consignés dans l’adresse de la société populaire et révolutionnaire de la Montagne de l’arrondissement des Aydes-Saran (1) près d’Orléans. Mention honorable, insertion au bulletin (2). [ Les Aydes-Saran, 1er p rair. II] (3). «Citoyens représentons, Des factieux aussi perfides que corrompus voulaient nous conduire à l’anarchie par l’athéisme, décourager la vertu en lui ôtant l’espoir d’une autre vie, et propager le crime en étouffant le remords. Ils ignoraient ou plutôt ils feignaient d’ignorer, les scélérats, qu’il n’est point de vertu sans mœurs, ni de bonheur sans vertu. Ils se flattaient d’allumer la guerre civile en corrompant la morale publique, et de s’ouvrir, à la faveur du trouble et des désordres un chemin aux honneurs qu’ils ne pouvaient obtenir sous le règne des lois. La hache nationale a frappé de mort ces Tartuffes politiques et le calme a succédé à la terreur. Votre décret du 18 floréal, en payant à la divinité le tribut d’hommage que lui doivent les amis de la raison, a vivifié la nation entière. Depuis cette séance à jamais mémorable et digne de faire époque dans les fastes de notre révolution, le malheureux sent ses peines adoucies, la mère de famille est plus soigneuse à préserver du souffle impur du vice l’enfant qu’elle élève pour la patrie, les héros de l’humanité meurent sans regrets comme sans crainte, l’ami dit avec moins de tristesse à son ami le dernier adieu, le vieillard enfin descend dans la tombe avec sérénité. Grâces vous soient rendues, immortels défenseurs des droits de l’homme et de la divinité; puisse la reconnaissance du peuple que vous avez régénéré vous faire jouir d’avance des douceurs que vous prépare l’être suprême dont vous êtes les images vivantes. Chacun de nous, pauvres mais vertueux cultivateurs, vous aime et chérit comme son père, son ami. Vous vivrez éternellement dans nos cœurs; ceux des français sont assurés aux bien-(1) Loiret. (2) P.V., XXXVIII, 224. B*'1, 13 prair. (2e suppl1) ; 16 prair. (suppl1) et 19 prair. (3) C 306, pl. 1158, p. 43. faiteurs de l’humanité, et qui jamais plus que vous mérite d’y avoir des droits ! S. et F. ». Partin fils (présid.), Leroi ( secrét .). Les montagnards de la société ont frémi d’horreur en apprenant qu’il existait encore sur le sol de la liberté deux monstres capables de le disputer à Paris et à Charlotte Corday; cet attentat nous prouve que nos ennemis n’ont plus d’autres ressources que dans le meurtre, et annonce à la République entière que la lâcheté de ces suppôts de la tyrannie ne peut plus tenir longtemps contre la valeur et l’énergie des représentans d’un peuple libre. [Mêmes signatures] 31 La société populaire et la commune d’Yve-tot (1), admises à la barre, rendent grâces à la montagne dont la foudre a écrasé le monstre de l’athéisme, et à l’Etre Suprême qui a sauvé les jours de deux fidèles représentans du peuple; elle dépose sur le bureau 96 chemises, 307 liv. 5 s. en assignats et autres objets. Mention honorable, insertion au bulletin (2). L’ORATEUR de la députation : Citoyens représentans, Les ennemis de notre sainte révolution, furieux de leur impuissance avaient imaginé pour nouvelle ressource d’acréditer les principes monstrueux de l’athéisme, et de fouler aux pieds le dogme sacré de l’immortalité de l’âme. Ils comptaient, les traîtres faire résulter l’anéantissement de la liberté de celui de la vertu. Et déjà le monstre du royalisme commençait à relever sa tête hideuse et à se ranimer à la torche des factions. Tant d’audace ne pouvait rester impunie, un aussi criminel espoir ne pouvait germer dans le cœur des français régénérés; aussi le génie bienfaisant de la République a-t-il su, du haut de la montagne où il siège, déjouer les infâmes complots de ces hommes scélérats qui avaient résolu de replonger le peuple dans l’avilissement. L’infortune de l’esclavage d’où vous l’avez tiré; l’active vigilance de votre comité de salut public a démasqué ces dangereux caméléons, et le tribunal incorruptible, en leur faisant payer le prix de leurs forfaits, a manifesté la justice de l’être suprême dont ils cherchaient à nier l’existence. Eh ! comment la méconnaître après le nouveau prodige qui vient de sauver une fois de plus la République ! Quelle autre main que celle de l’Eternel aurait pu détourner la main sacrilège et parricide qui a failli nous jeter dans le deuil et la désolation. Où réside l’impie qui osera dire que le courage de l’immortel Geffroy n’a rien de divin, et que l’arrestation de la scélérate Régnault (1) Seine-Inférieure. (2) P.V., XXXVIII, 224. Bin, 13 prair. (2* suppl1) et 19 prair. (suppl1); Mon., XX, 619; Mess, soir, n° 652; J. Paris, n° 517.