[Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [21 janvier 1791.) un livre de poste sous les yeux et en sachant quel est le lieu de la résidence. M. Le Couteulx de Cantelen, rapporteur. Vous voyez, Messieurs, les principes qui nous déterminent à vous faire celte demande : c’est que l’ordonnateur du Trésor public ne croje point devoir faire aucune dépense extraordinaire sans en prévenir l’Assemblée et sans y être autorisé. (Le projet de décret est adopté.) L’ordre du jour est la discussion d'un projet de décret du comité de liquidation sur la direction générale de la liquidation. Un membre fait observer que ce projet, n’ayant été distribué que dans la matinée, n’a pu être suffisamment médité et approfondi. (L’ajournement de la discussion est décrété.) L’ordre du jour est la suite de la discussion du projet de décret sur les jurés (1). M. Duport, rapporteur , fait lecture de l’a?’- ticle 1er du titre III, relatifs aux fonctions particulières du président. Cet article est décrété comme suit : Art. 1er. « Le président, outre les fonctions de juge qui lui sont communes avec les autres membres du tribunal criminel, est de plus personnellement chargé d’entendre l’accusé au moment de son arrivée, de faire tirer au sort les jrnés, de les convoquer, de les diriger dans l’exercice des fouctims qui leur sont assignées par la loi, de leur exposer l’affaire, même de leur rappeler leur devoir : il présidera à toute l’instruction. » M. Duport, rapporteur , donne ensuite lecture de l’article 2, qui est ainsi conçu : Art. 2. « Le président du tribunal criminel peut prendre sur lui de faire ce qu’il croira utile pour découvrir la vérité; et la loi charge son honneur et sa conscience d’employer tous ses efforts pour en favoriser la manifestation. » M. de Robespierre. Cet article me paraît conçu en des termes trop vagues et donner un pouvoir trop il limi é aux juges. L’intérêt de découvrir la vérité est un motif très légitime; c’est le but de toute procédure et le vœu de tout juge ; mais il ne s’ensuit pas que la loi doive donner au juge le pouvoir indéfini de prendre sur lui de faire tout ce qu’il jugera à propos pour atteindre ce but. La loi, au contraire, doit limiter autant qu’il est possible l’autorité du juge et ne doit jamais substituer ni la volonté ni l’intention du juge aux règles qu’elle peut établir. Le comité m’opposera peut-être qu’en Angleterre le directeur du juré a un pouvoir semblable; il n’est pas vrai cependant qu’en Angleterre la loi, encoie moins l’usage, dorment au directeur du juré le pouvoir illimité qui résulterait di s termes vagues de cet article. En Angleterre, ce pouvoir n’appartient an président que pour l’iniérêt seul de l’accusé; il ne lui est point accordé indéfiniment pour le résultat de toute la procédure et, en général, pour (1) Cette discussion n’est que mentionnée au Moniteur. 361 la manifestation de ce qu’on appelle la vérité judiciaire. Je proposerai donc, suivant l’esprit de la jurisprudence, de rédiger l’article de la maniéré suivante : « Le président du tribunal criminel pourra, sur la demande et pour l’intérêt de l’accusé, permettre ou ordonner ce qui sera nécessaire pour la manifestation de son innocence, encore que cela soit hors des formes ordinaires et décrétées par la loi. » M. Regnand (de Saint-Jean-d’ Angely). J’insiste pour que l’article soit conservé et je crois fermement que, -ans cet article, l’institution du juré aurait absolument manqué son objet dans une de ses parties les plus es-entie les. Il ne faut pas, Messieurs, comparer notre ancienne forme de la justice criminelle avec la nouvelle. Dans l’ancien système, tout se passait dans le mystère et l’obscurité. La destinée des accusés était remise absolument entre les mains du juge et de son greffier. Il était nécessaire conséquemment que le magistrat fût entouré de formes, qo’il en fût enveloppé, si je puis m’expri ner ainm, afin qu’il ne pût jamais rien faire de contraire à l’intérêt de l’accusé. Dans votre nouvelle procédure, au contraire, le directeur du juré procède sous les yeux du public, devant un juré nombreux, devant les conseils de l’accusé, qui tous peuvent réclamer a l’instant contre l’injustice ou même contre l’inutilité d’une de ses mesures. Car je suppose que le directeur du juré fasse une interpellation à un individu, qu’il prenne une mesure quelconque qu’il croit propre à développer la vérité à l’instant, l’accusé, même ses conseils, même les témoins, ont le droit de lui faire des observations sur ce qu’il propose, de le rappeler à des mesures plus opportunes à découvrir la vérité. Si vous lui ôtez cetie faculté, sans cesse un homme d'j mauvaise foi, un accusé, un accusé vraiment coupable, un témoin qui aura menti à sa conscience et à la justice, arrêtera le directeur et lui dira : Ce que vous proposez n’est pas déni ndé par la loi; l’interpellation que vous me faites, vous n’êtes pas autorisé à me la faire et je peux me dispenser d’y répondre. — Il peut aussi survenir des circonstances que l’imagiua-tion ne présente pas en ce moment. Plusieurs membres : Aux voixl (L’article du comité est mis aux voix et décrété.) M. Regnaud (de Saint-Jean-d' Angelg). Vous avez décrété hier qu’il y aurait des juges nommés qui formeront un tribunal particulier dans le département; vous avez vu que le decret qui exclut les membr' s des corps administratifs de la faculté d’illégibilité aux places de judicature a souffert beaucoup de difficultés. Les motifs qui vous ont forcés à le rendre n’existent plus en ce moment et je crois que lorsqu’il s’agira de choisir un accusateur public, de choisir un directeur du juré, c’est-à-dire d’instituer les plus sûrs gardiens de la liberté, d’attribuer les fonctions les plus importantes de l’ordre social, je crois qu’il n’est pas possible de laisser une trop grande latitude au choix du peuple. Je demande donc que le décri t que vous avez rendu, qui déclare les membres des directoires des départements inéligibles a ix places de judicature, ne soit pas applicable à l’élection qui