[Assemblée nationale.} ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [7 juin 1791. J inégalité très réelle entre la charge du fonds et celle de la prestation; en effet, les 10 gerbes sur 100 que perçoit le propriétaire de la dernière sont un véritable produit net qui ne sera diminué par aucun des frais antérieurs à la récolte, tandis que les 90 gerbes qui restent au propriétaire du fonds doivent servir en partie à payer les semences et la culture, et que le produit net de ce dernier ne sera que la quantité de gerbes restées après avoir prélevé ces frais. Votre comité vous proposera donc, pour les prestations en quotité de fruits, de fixer la retenue au cinquième du montant de la prestation, comme pour celles en rentes fixes. Mais comment cette retenue se percevra-t-elle? Sera-ce en argent, sera-ce en denrées ? Votre comité pense que la retenue se faisant sur la prestation au moment où on l’acquitte, elle doit porter sur la chose même que le débiteur délivre, et qu’ainsi elle doit être en argent sur ce qui se paye en argent, et en denrées sur ce qui se paye en denrées : cette méthode est à la fois la plus simple, la plus juste et la moins sujette à contestations. Au moment où j’acquilte une rente en blé, il est possible que celui à qui je livre mon grain n’ait pas sur lui d’argent à me donner en échange, mais le blé est là, et nous pouvons toujours le partager dans la proportion prescrite; il en est de même de toutes les autres denrées, excepté de quelques-unes, comme les poules, etc. ; mais presque partout les rentes de cette espèce s’acquittent en argent, et les différentes coutumes ou l’usage en ayant fixé l’évaluation, il ne peut résulter aucune discussion. Mais il n’en serait pas de même s’il fallait, chaque fois que l’on acquitte une prestation en denrées, en déterminer le prix, pour que celui qui la reçoit remboursât en argent le cinquième de ce prix. Il est une autre objection qui a été faite, et qui le sera peut-être encore, c’est que le propriétaire de la prestation payera la contribution en nature, mode qui a été réprouvé par l’Assemblée nationale, cela est vrai; maispourquoi l’Assemblée nationale a-t-elle réprouvé ce mode de contribution? Parce que, portant sur le produit brut et non pas sur le produit net, il est nécessairement inégal, puisque les frais exigés pour telle ou telle culture, ne sont pas les mêmes, au lieu que, dans la prestation, tout est produit net; les frais de celui à qui on la paye se bornent à la recevoir, ou tout au plus à la faire transporter. Ce mode de contribution n’amène pas non plus dans son champ un étranger qui, comme le décimuteur ou le percepteur de contribution, viendrait troubler sa récolte. On lui doit une certaine quantité de denrées, et c’est en les lui livrant que la retenue s’opère; il est donc convenable que la perception de la retenue se fasse dans la même nature que le payement; ce mode n’aura dans ce cas aucun des inconvénients de la perception en nature pour la contribution générale, et c’est celui que prescrit l’article proposé. Quant aux rentes qui ne sont ni ci-devant seigneuriales, ni foncières, mais qui sont l’intérêt d’un argent emprunté, et pour lesquelles l’exemption des impositions royales n’a point été stipulée, elles étaient assujetties à une retenue proportionnelle aux vingtièmes; lors donc qu’au lieu de deux vingtièmes le gouvernement en établissait trois, les débiteurs étaient autorisés à retenir trois vingtièmes sur le montant de la rente : voilà la condition reconnue, sous laquelle. les contrats ont été passés. Nous avons examiné déjà cette question dans le rapport que le comité 45 a eu l’honneur de vous faire au mois de septembre dernier. Ces rentes seront relativement aux deux contributions directes, dans le même cas que les précédentes; votre comité vous proposera de fixer pour elles le même taux de retenue, et il n’est pas injuste; car si vous aviez établi une contribution de quotité, elles y auraient été assujetties d’après leur titre même; d’ailleurs, la baisse qui se prépare dans le taux d’intérêt de l’argent, amènera bientôt le lemboursement, et la liberté que vous avez rendue aux conventions pécuniaires y rétablira, sous peu de temps, l’équilibre. La disposition particulière aux rentes ou pensions viagères que nous vous proposons, est conforme à celle de l’article 8 du titre II de la loi du lor décembre 1790. Le montant de ces rentes ou pensions est beaucoup plus fort que l’intérêt que produirait leur capital constitué en perpétuel, et il détruit chaque année une portion de ce capital; ce serait donc les traiter injustement que de les soumettre à une taxe égale à celle que supporterait l’intérêt ordinaire d’une somme beaucoup plus considérable : ainsi, comme vous l’avez prescrit, lorsque le capital sera connu, la retenue se fera sur le revenu que ce capital produirait au denier vingt. Il a fallu fixer le denier, et votre comité a pris le denier vingt, non pas comme taux légal , puisque vous avez renoncé à ces fixations de taux aussi impolitiques qu’injustes, mais comme celui qui est encore le plus ordinaire. Quand le capital ne sera pas connu, la retenue sera du dixième au lieu du cinquième, ce qui est le calcul moyen pour les rentes viagères. Votre comité a cru aussi devoir vous proposer de décréter que le taux de ces retenues demeurera le même pendant tout le temps durant lequel la contribution foncière restera dans les proportions fixées pour l’année 1791. Voici le projet de décret qu’il a l’honneur de vous présenter : « L’Assemblée nationale décrète ce qui suit : « Art. 1er. Les débiteurs autorisés, par les articles 6 et 7 du titre II de la loi du 1er décembre 1790, à faire une retenue sur les rentes ci-devant seigneuriales, foncières ou constituées en perpétuel, soit en argent, soit en denrées, et de prestations en quotité de fruits, à raison de la contribution foncière, la feront au cinquième du montant desdites rentes ou prestations pour l’année 1791, et pour tout le temps pendaut lequel la contribution foncière restera dans les proportions fixées pour ladite année. « Art. 2. Quant aux rentes ou pensions viagères sujettes à la retenue, les débiteurs la feront aussi au cinquième, mais seulement sur le revenu que le capital, s’il est connu, produirait au denier vingt; et dans le cas où le capital ne serait pas connu, la retenue ne se fera qu’au dixième du montant de la rente ou pension viagère, conformément à l’article 8 de la loi du 1er décembre 1790; ces proportions demeureront les mêmes pour tout le temps déterminé par l’article précédent. p Art. 3. Le débiteur fera la retenue au moment où il acquittera la rente ou prestation; elle sera faite en argent sur celles en argent, et en nature sur les renies en denrées et sur les prestations en quotité de fruits. » (La discussion est ouverte sur ce projet de décret.) M. de Bréinond d’Ars. Les propriétaires de 46 17 juin 17U1.] [Assemblée nationale. J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. champarts seraient extrêmement lésés si yous adopiiez le projet de décret... Un membre : On ne vous entend pas ! M. de Brémond d'Ars. La majeure partie des propriétaires dans les départements formés des pro vinces d’Angoumois et de Saintonge n’ont guère d’autres propriétés que des droits et des redevances en argent et en nature de fruits, tels que ceux dont il s’agit ici. L’Assemblée nationale, en annulant la faculté d’accenser son terrain, n’a point voulu aggraver encore la position des propriétaires des droi s de champarts, en les assujettissant à un mode d’imposition, différent de celui qu’elle a adopté pour tout le royaume, pour toutes les natures de possessions foncières. Cependant c’est ce qui arriverait infailliblement, si vous adoptiez le projet du comité. Un exemple fort simple va le prouver : Le propriétaire d’un champ estimé d après son revenu net sera, d’après vos décrets, imposé pour cette année à 48 sols, eu ne l’estimant qu’à 12francs de revenu. Il est bien entendu qu’on a tenu compte au p o-priétaire des frais de culture et de semmee, et que l’on n’a imposé que son revenu net, car sans cela on attenterait à sa propriété. Je propose que le champ soit soumis à la redevance du huitième des fruits : si le propriétaire de ce huitième acquitte au redevable le huitième de l’imposition que supporte tout le champ, peut-on dire que le champartier n’a pas payé le revenu proportionnel à la contribution du champ dont il a recueilli une parties des fruits? Non, Messieurs, aussi votre comité, ne pouvant méconnaître cette vérité, raisonne différemment. Il convient que la totalité de l’impôt serait acquittée; maisil croit que le champartier, n’ayant pas de frais à faire, doit y contribuer plus que le redevable. Alors on ne suit plus cette proposition rigoureuse que le comité recherche, car on ne fait pas jouir le propriétaire de la déduction proportionnelle accordée à tous les autres contribuables qui ne doivent être imposés à la contribution foncière qu’en raison du fruit qu’ils retirent de leur propriété. Un membre : On ne vous entend pas ! M. de Brémond d’Ars. Je dis, Messieurs, que, si vous autorisiez la perception en nature, le propriétaire serait étrangement lésé; rien n’est plus facile à le prouver. Je prends pour exemple un champ. . . Un membre : Monsieur, vous dites de très bonnes choses; mais aux extrémités de la salle on ne vous entend pas ..... M. de jtlcnonvàlle de Villiers. Je viens proposer un amendement pour le pays dont je suis député. Il existe dans ma ci-devant province une quantité considérable de contrats appelés contrats d’obligation qui porient intérêts. La jurisprudence constante de cette province a élé que les intérêts de ces obligations souffrissent la retenue des impositions. Je demande en conséquence que ces contrats d’obligation soient sujets comme les autres à cette retenue. M. de Lia Bocltefoneauld, rapporteur. J’adopte cet amendement. M. Pierre Dedelley (ci-devant Delley d’A-gler). Le projet de M. de Brémond n’est .guère plus admissible que celui de votre comité, en supposant que celui-ci ne soit pas juste. Le préo-pina ut a eu raison de vous dire que, dans le mode proposé par le comité, les propriétaires de champarts d’une part payeront plus qu’ils ne doivent payer, et que de l’autre ils n’auront aucun moyen de justifier ce pavement pour le faire défalquer sur le prix de leur contribution mobilière. Mais, lorsque le préopinant vous propose de déclarer que celui qui doit unchampart sera tenu de porter le montant de sa contribution sur le rôle pour que le propriétaire du champart ne paye qu’à raison de la quotité qu’il prélève, si le propriétaire du fonds paye 3 livres sur un re-venude 15 livres, et que iëpropriétai e du cbam-parl prélève seulement le d xième des fruits, alors le propriétaire du champart ne serait tenu qu’au dixième de ces 3 livres, c’est-à-dire à 6 sols. Je soutiens qu’alors le propriétaire du champart ne payerait pas assez, parce que levant sur le revenu brut il ne peut payer qu’à raison de la qualité de celui qui le releva; mais d’un autre côté, nous devons aussi bien considérer que lorsqu’on prélève Je cinquième sur le propriétaire du champart de fruits qu’il a lui-même levés, il est clair qu’il est iniiniment lésé. Je ne vois qu’un seul moyen de parer à cet inconvénient, et j’avoue que ce moyeu a des détails si minutieux que c’est probablement ce qui a effrayé votre comité, parce qu’il était bien difficile d’établir là-dessus u ee règle générale, et que dans cet amas de difficultés il a préféré vous proposer celui qu’il vous soumet dans ce moment, et qui, sans remplir strictement toutes les règles de la justice, favorise cependant le laboureur que vous avez toujours eu l’intention de favoriser. Cependant, Messieurs, il faut vous soumettre le seul moyen qui pourrait parer à cet inconvénient, ce serait toutes les fois qu’un champ de blé ou tout autre champ serait une prestation quelconque en nature : alors il est bien aisé de savoir, du moins en général, ce qu’il faut pour faire rapporter les fonds labourables dans les pays de fertile culture : c’est ordinairement la moitié du revenu brut qui doit être imputée aux frais de culture, de manière que le produit net dans ces endroits-là, pour les terres à blé, est à peu près de la moitié du revenu brut. Donc si le propriétaire d’un champ estimé 15 livres paye 3 livres de contribution foncière, et que d’autre part on prélève sur son champ ia dixième gerbe comme champart, la moitié de ce revenu brut doit être appliquée peur les frais de culture, et le propriétaire du champart ne doit donc réellement recevoir pour son produit net que la moilié. La proportion serait exactement parfaite si nous pouvions établir cette règle en général, ou du moins prévoir à ces écarts particuliers pour que cela n’entraîne pas de procès. C’est à vous à voir si vous voulez approcher de l’exacte justice pour adopter cette règle, mais alors il serait absolument nécessaire de renvoyer l’article au comité, car il vous est impossible de prévoir tous ces cas-là. M. Andrieu. Le propriétaire n’était autorisé à retenir sur les recettes qu’une imposition qui élait le vingtième ; il ne déduisait puint la taille ni la capitation, en sorte que, lorsque cela n’était point expliqué dans le contrat, comme ordinairement cela ne l’était pas, le droit commun fai- [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [7 juin 1791. | sait la convention. C’était conformément à ces droits que les parties contractaient. Le comité reconnaît la loi de la convention, puisque Je comité vous déchire que s’il est dit dans le contrat que le département ne pourra faire aucune déduction, par parité le débiteur ne pourra déduire que le vingtième, ou si cela est censé dit par le droit commun... (Murmures.) On me répond : mais si nous avions mis quatre vingtièmes, il les aurait payés : vous avez établi des impositions directes qui doivent tenir lieu de toutes les impositions précédentes; on ne dira as qu’il faut déduire une quotité proportionnée ces deux objets, puisque les comités n’en ont proposé qu’un et la conséquence du raisonnement ue l’on me fait, serait qu’il serait autorisé à dé-uire une quotité équivalente aux deux impositions : ainsi l’objection ne vaut rien. Or, il faut donc en revenir à la loi de convention ; et que dit cette loi ? Que le débiteur sera tenu de déduire une quotité proportionnée à la masse que vous avez établie pour tenir lieu de toutes celles qui avaient été faites précédemment, une quotité proportionnée à la déduction qui se faisait ci-devant par la loi de la convention. Je conclus à ce qu’au lieu du cinquième il soit dit le dixième; et c’est bien assez. M. Rœdercr. L’article soumis à votre délibération a donné lieu à deux réclamations très distinctes ; l’une concerne le taux ne la retenue qui devra avoir lieu pour les rentes foncières, telles que champarts et agriers; l’autre est rdative au taux de la retenue qui sera faite pour les impôts payés à raison de rentes constituées. J’examine d’abord cette réclamation. M. Andrieu trouve qu’il est injuste d’autoriser les débiteurs de rentes constituées à faire une retenue du cinquième aux capitalistes envers qui ils sont obligés. Messieurs, le principe qui nous a déterminé est extrêmement simple. En général, on peut nous dire presque universellement : « Il n’y a de rentes constituées qu’avec hypothèque sur un fonds. » (Rires ironiques.) J’observe à l’Assemblée que les interruptions ne prouvent rien. Une phrase dite à la tribune, et que l’on combattrait, répandrait beaucoup plus de lumière que les clameurs. Je continue et je dis que celui-là est un insensé qui place son capital sans hypothèque; car quelle que soit la confiance que l’on a dans les propriétés et dans la solvabilité actuelle d’un homme qui n’a que des richess s mobilières, du fait seul que cet homme peut mourir, que sa fortune peut changer et que l’on n’a nul moyen de se faire rembourser, il n’y a évidemment qu’un insensé qui place à rente constituée sans hypothèque. (Murmures.) Le lait constant est que presque toutes les rentes constituées sont assises sur des hypothèques. Comme tout finalement et originairement vient de la terre et retourne à la terre, il est évident que toutes les richesses, que les rentes constituées ont originairement leur principe dans les revenus de la terre. Gela posé, toutes les fois qu’un propriétaire de terre est chargé de payer une portion aliquote de son revenu au Trésor public, les fonds qui sont placés entre ses mains, qui sont engagés ou dans ses entreprises agricoles, ou dans sa propriété même, ceux-là doivent supporter la même déduction que le propriétaire d’un capital placé sur un fonds, ou qu’un copartageant du revenu des fonds. Si donc le propriétaire est tenu au cinquième 47 par l'impôt du revenu do son fonds, le capitaliste, qui est le véritable propriétaire au moyen de son hypothèque ou de son fonds, s’il s’agit d’une maison, doit supporter la même réduction. C’est la loi de la justice. Ici seulement se présente une objection tirée de l’ordre ancien des choses. On invoque la foi ues contrats, et l’on dit : Dans l’ancien étit des choses (c’est là l’objection de M. Andrieu), les propriétaires de fonds ne payaient que d mx vingtiè mes; donc on ne doit pas aujourd’hui charger d’urie retenue plus forte tes propriétaires de capitaux qui leur ont prêté leurs fonds. Je dis qu’il y a une grande erreur de fait et de principe dans la proposition de M. Andrieu. La condition ancienne des propriétaires de capitaux, placés sur des propriétaires de fonds, n’était pas de subir la retenue de deux vingtièmes; elle était de subir la retenue d’u e imposition royale ; car telle était la loi. (Murmures.) Cela est si vrai, Messieurs, qu’il n’y a pas trois ans encore que la condition du propriétaire de fonds était de payer, non pas deux vingtièmes, mais trois vingtièmes et quatre sols pour livre du premier vingtième. Eh bienl trois vingtièmes et quatre sols pour livre du premier vingtième approchent de très près du cinquième que nous demandons aujourd’hui. (Murmures.) Je demande à toute l’Assemblée si, à l’époque où les propriétaire-! de fonds payaient trois vingtièmes et quatre sols pour livre du premier vingtième, ce n’était pas une. charge de propriétaire de rentes de subir une pareille réduction : et si l’on me contredisait, je produirais la loi qui exemptait... (Murmures.) Il est si vrai que telle était la condition de tous les rentiers que, lorsqu’on a établi le troisième vingtième, la déclaration donnée à cet effet exemptait de la retenue de ce troisième vingtième les rentes payées aux hôpitaux et aux séminaires : donc tous les autres, en vertu de. la loi, la supportaient; donc tous les autres la payaient. Quand je n aurais pas à présenter des raisons aussi victorieuses, aussi évidentes, je répondrais à M. Andrieu : On ne faisait pas au propriétaire de rentes la retenue de la taille, mais on l’imposait dans tous les pays où la taille était personnelle et c’était les trois quarts du royaume; on les imposait à raison de leurs rentes mêmes, de sorte que j’emploie encore celte observation en supplément de raison pour justifier l’article qui vous est proposé pas votre comité. Il n’y a donc rien d’injuste dans le taux qui vous est proposé par le comité. Je passe à la deuxième réclamation qui concerne la retenue des rentes seigneuriales ou agriers qui seront payés en nature. Ici, Messieurs, je dois avouer que sans admettre les conséquences et le projet de décret qui vous a été soumis à cet égard par le premier opinant, cependant les principes d’après lesquels il a raisonné m’ont paru avoir assez de justesse pour vous demander que la retenue sur les prestaiions qui seront payées en nature seront du sixième, tandis que les autres seront du cinquième. Le propriétaire d’un droit de chainpart le touche en nature. Messieurs, tout revenu que l’on touche en nature n’est pas par lui-même entièrement un produit net, car il y a les frais de garde. Eh bien 1 c’est à raison de cela que je trouve juste d’accorder une déduction sur cet objet, et de la porter à une fraction d’un sixième. M. de Folle ville. Je demande par amendement que les rentiers soient autorisés à em- AS [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [7 juin 1791.] ployer en défalcation sur leur contribution mobilière les sommes qu’ils prouveront leur avoir été retenues sur les rentes qui leur sont dues par les propriétaires; et remarquez, Messieurs, que cela ue peut avoir aucun inconvénient. Au demeurant, je supplie l’Assemblée de prendre en grande considération cette opération, parce que sa justice y est intéressée. Si l’on trouvait que mon amendement eût besoin de rédaction, je demanderais le renvoi. M. de La Rochefoucauld, rapporteur. Il a été présenté plusieurs amendements, dont quelques-uns ont déjà reçu leur réponse. Il en reste quelques autres sur ‘lesquels je demanderai la permission de faire des observations. Lors du rapport de notre contribution mobilière, il y avait un article formel pour autoriser les propriétaires de rentes, champarts, prestations, rentes constituées à être admis en déduction sur la cote mobilière. Il s’élèva alors une discussion, et sur cette discussion Ja question préalable, invoquée par le comité, fut adoptée par l’ Assemblée. Je ne présente pas cet historique pour engager l’Assemblée à ne pas traiter plus favorablement ces propriétaires. Je ne verrais pas une grande difficulté à accorder aux propriétaires de rentes foncières la faculté qu’on vous propose. A l’égard des rentes constituées, j’avoue que je ne vois aucune forme qui prémunisse contre cela, et cependant il ne paraît pas naturel de faire pour les uns une loi qui ne serait pas pour les autres. Je ne parlerai pas du mode d’exécution que le premier des opinants a proposé, qui était de faire partager, par le champariier, l’impôt ou le champart se trouve. Quant à l’amendement proposé par M. Andrieu, j’avoue qu’il ne m’a pas convaincu, du moins dans son entier. Il est bien certain que, de tout temps, L s rentes constituées ont été soumises au payement des vingtièmes, et lorsque la quantité de vingtièmes a varié, les débiteurs des rentes ont toujours été autorisés à retenir la quantité de vingtièmes actuellement en usage. Aujourd’hui l’Assemblée change le mode de contribution. Je ne vois aucune raison pour ne pas assujettir les impositions directes à une retenue proportionnelle. Aussi je m’en tiendrai à l’amendement de M. Rœderer. Un membre : Il ne vaut rien. M. de I�a Rochefoucauld, rapporteur. Je l’adopterais, non pas au nom du comité, mais au mien. M. Rœderer. Voici mon amendement : « Les débiteurs des rentes ci-devant seigneuriales foncières ou denrées et de portation en qualité de fruits seront dans les mêmes taux retenues au sixième. » M. Ramel-Hogaret. J’ai un sous-amende-ment à proposer à l’amendement de M. Rœderer. Vous voulez rendre justice aux contribuables : voici de quelle manière je crois qu’il faut envisager la question. Le comité commence par distinguer deux sortes de rentes. La rente foncière proprement dite, et la rente constituée. Nous pouvons regarder la rente foncière comme étant celle qui a été constituée lors de la tradition des fonds : telles sont les rentes ci-devant seigneuriales. À l’égard de la rente constituée, c’est un retrait avec stipulation d’intérêt. A l’égard de la rente foncière, proprement dite, voyons quels sont les motifs qui nous ont engagé dans le temps à dire que la déduction sera faite par le redevable. Les voici : C’est que vous avez décidé, par votre décret sur la contribution foncière, que le revenu net du fonds de terre serait évalué sans prendre en considération les charges dont les biens pourraient être grevés. Or, ceci étant ainsi décidé, il en résulterait une justice vis-à-vis du redevable propriétaire, s’il n’était pas en droit de faire une réduction sur les renies qu’il paye à son ancien bailleur ou à son ci-devant seigneur. Il est donc nécessaire d’autoriser le redevable de la rente foncière à faire une retenue par ses mains , et je crois que la proportion que le comité nous indique est encore dans la proportion la plus exacte, et parfaitement juste. Le propriétaire d’une rente foncière, quoi qu’on en dise, peut et doit être autorisé à se retenir le cinquième du revenu. 11 s’agit actuellement de savoir si le propriétaire, c’est-à-dire le ci-devant seigneur, sera autorisé à présenter en déduction sur la contribution mobilière la retenue que lui aura faite son débiteur. Encore je crois, Messieurs, que c’est parfaitement juste. Je vous prie d’observer, Messieurs, que le ci-devant seigneur ou le propriétaire de la rente constituée peut être regardé comme le propriétaire du fonds, et le redevable comme arrêtant le dernier la rente foncière proprement dite. Je crois que le propriétaire d’une rente foncière proprement dite peut être autorisé à présenter en déduction dans la contribution mobilière les retenues qui lui sont faites par le débiteur. Cela me paraît très juste; mais à l’égard de la rente constituée, il y a beaucoup de difficultés ; et voici comment vous admettrez la déduction du propriétaire de la rente foncière, parce qu’il est en quelque matière le propriétaire du fonds du sol qui a déjà payé à la contribution foncière. Mais à l’égard de la rente constituée, je suppose que j’aie 10,000 livres à placer, je les porte à un négociant qui n’a pas la plus petite propriété ; cependant il invite la confiance publique. Je lui porterai 10,000 livres; s’il me fait une retenue au cinquième, et que je sois admis moi-même à la faire, il s’ensuivra que l’Etat n’aura rien gagné à cette contribution. Ce sera lui qui en profitera, puisqu’il ne payera rien à la contribution foncière; il ne payera rien en contribution mobilière. 11 reste à examiner quel est le taux de la retenue que l’Assemblée nationale voudra autoriser. M. Rœderer. Je propose le cinquième pour les rentes constituées et le sixième pour les rentes qui n’étaient pas perçues en argent, mais en nature, et ne sont pas présumées au produit net. M. Ramel-HTogaret. Je réponds à M. Rœderer que je ne suis nullement de son avis. J’estime que le propriétaire de la rente foncière a le droit de se retenir le cinquième dans le sens que présente le comité. Ainsi je suis redevable vis-à-vis mon ci-devant seigneur d’un champart, d’une censive. J’ai le droit de me retenir le cinquième de cette rente, parce que je paye le cinquième de mon revenu net en contribution foncière. Mais à l’égard de la rente constituée, je ne crois pas qu’il faille admettre la cote 5 ou 6, et je crois qu’il faut descendre à la cote 8. Plusieurs membres demandent que la discussion soit fermée. 49 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. |7 juin 1791.] (L’Assemblée ferme la discussion.) Plusieurs membres demandent laquestion préalable sur tous les amendements. M. Tuant de Ta Bonverle. Messieurs, vous ne pouvez pas demander la question préalable sur l’amendement de M. Nogaret, parce qu’il est une conséquence de vos décrets. M. Pierre Dedelay ( ci-devant Delley d’A-gier). Je demande que l’amendement de M. Rœde-rer, uni à celui de M. Nogaret, soit mis aux voix comme étant appuyés tous deux sur des principes incontestables. M. Garat aîné. Je demande la division de la question préalable. M. Barnave. Je demande la question préalable sur la division. (L’Assemblée, consultée, décrète qu’il y a lieu à délibérer par division sur les amendements.) Plusieurs membres : La question préalable sur l’amendement de M. Nogaret ! M. Bamel-Aogaret. Je prie l’Assemblée de ne pas appliquer la question préalable à mon amendement et de prendre garde au décret qu’elle va rendre. Voici mon système... {Murmures.) (L’Assemblée, consultée successivement sur la question préalable opposée aux divers amendements, décrète qu’il n'y a lieu à délibérer sur aucun d’eux.) Plusieurs membres : Aux voix, l’article du comité ! M. de La Bocliefoucauld, rapporteur. Voici, avec quelques modifications, le texte de notre projet : « L’Assemblée nationale décrète ce qui suit : Art. 1er. « Les débiteurs autorisés par les articles 6 et 7 du titre II de la loi du 1er décembre 1790 à faire une retenue sur les rentes, à raison de la contribution foncière, la feront au cinquième du montant desdites rentes pour l’année 1791, et pour tout le temps pendant lequel la contribution foncière restera dans les proportions fixées pour ladite année, sans préjudice de l’exécution des baux, à rentes ou autres contrats faits sous la condition de la non-retenue des impositions royales. » {Adopté.) Art. 2. « Quant aux rentes ou pensions viagères non stipulées exemptes de la retenue, les débiteurs la feront aussi au cinquième, mais seulement sur le revenu que le capital, s’il est connu, produirait au denier vingt; et dans le cas où le capital ne serait pas connu, la retenue ne se fera qu’au dixième du montant de la rente ou pension viagère conformément à l’article 8 de la loi du 1er décembre 1790. Ces proportions demeureront les mêmes pour tout le temps déterminé par l'article précédent. » {Adopté.) M. de Ta Bocliefoucauld, rapporteur. On m’observe qu’il y a des rentes ou pensions viagères qui, par le titre de leur établissement, sont sujettes à une retenue aussi forte que celle qui lre Série. T. XXVII. s’opérait sur les rentes perpétuelles; en conséquence, je demande qu’il soit mis à la fin de l’article que vous venez de décréter : « sans préjudice des conventions qui ont été faites, soit par la non-retenue, soit par une retenue plus considérable ». M. de Folleviüe. Je rappelle à l’Assemblée que M. Troncbet avait fait un amendement à l’article 8 du décret du 1er décembre 1790 qui, je crois, était contraire à i*addition que M. le rapporteur vous propose. M. Tronehet. Par l’espèce d’addition que vous proposez? vous supposez qu’il y a des rentes viagères qui, par convention, étaient sujettes à une retenue plus forte que la retenue ordinaire sur les rentes viagères : or, cela n’a jamais existé. L-s rentes viagères payaient précédemment, comme les rentes perpétuelles, la relenue de 11 0/0 et les 4 sols pour livre du premier vingtième. Ainsi, par l’événement, elles se payaient dans une proportion plus forte que vous ne le mettez aujourd’hui. Mais la retenue est décrétée, et je ne sache pas qu’il ait jamais été dit, par aucune convention, qu’une rente viagère payerait plus que les rentes ne payeraient ordinairement. Je donne donc l’ordre du jour sur l’addition proposée par M. le rapporteur à l’article 2. (L’Assemblé \ consultée, décrète qu’elle passe à l’ordre du jour.) M. de Ta Bocliefoucauld, rapporteur. Voh i enfin l’article 3 : Art. 3. « Le débiteur fera la relenue au moment où il acquittera la rente ou prestation; elle sera faite en argent sur celles en argent et en nature sur les rentes en denrées et sur les prestations en quotité de fruits. » {Adopté.) M. Bainel-Aogaret. Je demande qu’il soit fait mention dans le procès-verbal que sur l’observation d’un membre portant sur ce qu’un débiteur calculant l’impôt de retenue mis sur les rentes comme une réduction de ces mêmes rentes, pourrait se croire autorisé à n’olfrir le remboursement du capital qu’au taux de la rente réduite, l’Assemblée a reconnu que le rachat ou le remboursement serait fait sur l’évaluation du capital. M. Delavlgne. Je demanderais au préopinant s’il a connaissance que, depuis que l’on retient les vingtièmes, l’on ait jamais proposé en remboursement un taux. M. Boissy-d’Anglas. Oui ; moi, j’en ai connaissance. M. Delavlgne. Cette proposition, si elle a élé faite, est sans contredit au nombre des propositions absurdes. Mais si, pour éviter des procès sur le fondement de propositions absurdes, nous voulons consigner dans notre procès-verbal toutes les sottises et absurdités qui peuvent être dites... {Murmures.) Nui impôt n’étant perpétuel de sa nature, le capital d’un impôt ne peut pas être pris en considération pour déduire un capital perpétuel. Je demande l’ordre du jour. M. Garat aîné. M. Delavigne fait trop d’hon-4