162 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [21 avril 1790.} peutobserver en passant qu’une partie de ceux qui font signé sont colonels de nos régiments allemands ; les principales piècesqui viennent à l’appui de ce conclusum sont les lettres-patentes accordées par Louis XV au duc de Wirtemberg, au mois de juin 1768; d’autres accordées par Louis XVI, au corps de la noblesse immédiate de la Basse-Alsace, au mois de mai 1779, et par le même au duc des Deux-Ponts, au mois de juin 1780. L’immédiateté n’est reconnue, ni articulée dans aucune de ces lettres-patentes qui ne font que confirmer, ou concéder des droits réguliers, domaniaux et féodaux, communs àun grand nombre de gentilshommes, hauts-justiciers ; et à chaque article deces lettres-patentes sont toujours ajoutées les paroles sacramentelles : En tant que ces dispositions ne serontpas incompatibles avec la souveraineté duroi, ou l’équivalent de ces paroles. En dernière analyse, il est donc évident que les droits émanés des souverainetés partielles abolies, les droits d’impôts, de collectes, etc., ont dû s’éclipser et disparaître avec ces mêmes souverainetés qui leur avaient donné naissance; il n’a dû rester ue les droits réguliers, les droits domaniaux, les roits féodaux, les servitudes personnelles, les redevances pécuniaires dont quelques-unes sont le produit du rachat des premières. Nos rois ont confirmé tous ces droits tant qu’ils ont été dépositaires de la souveraineté que la nation leur a confiée. Le roi ne pouvait pas même confirmer, ni concéder le droit d’imposer, qui n’appartient qu’à la nation; et il donnait aux possessionnaires d’Alsace un pouvoir qu’il n’avait pas lui-même. Aujourd’hui que la nation a repris cette souveraineté qui lui appartenait; aujourd’hui qu’elle a aboli tous les droits féodaux, toutes les servitudes Îiersonnelles, toutes les redevances et les privi-èges pécuniaires, et que les possédant-fiefs n’ont plus que la propriété uue de leurs terres, peut-elle sans injustice traiter les immédiats de l’Empire avecplus de faveur que ses propres citoyens? peut-elle, en abolissant tous les droits des nationaux, conserver ceux des étrangers, maintenir des traités, des pactes, des conventions évidemment infirmés et rendus invalides par un nouvel ordre de choses? C’est à la haute sagesse de l’Assemblée nationale et du monarque à juger si les considérations politiques du moment sont assez puissantes, assez impérieuses pour exiger une pareille exception, ou des indemnités quelconques. Mais, quant à la question de droit, je conclus qu’il n’y a pas lieu à délibérer. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. tE MARQUIS DE BONNAY. Séance du mercredi 21 avril 1790 (!)• M. le prince de Broglle, secrétaire , donne lecture du procès-verbal de la séance d’hier matin. M. Bouche, M. le président a-t-il reçu une lettre des volontaires de Dunkerque? (1) Cette séance est incomplète au Moniteur . M. le Président. Je ne puis répondre précisément à la question de M. Bouche. Je reçois chaque jour un très grand nombre de lettres, et je les renvoie à l’instant aux comités qu’elles concernent. Si j’ai reçu celle des volontaires de Dunkerque, j’en aurai fait certainement le même usage. M. Bouche. Je trouve copie de cette lettre, datée du 9 avril, dans les feuilles de Flandre; elle contient la dénonciation d’un mandement adressé par l’évêque d'Ypres au curé de Dunkerque. Voici d’ailleurs dans quels termes elle est conçue : « Monseigneur, un évêque étranger, celui d’Y-pres, dont le diocèse s’étend sur une partie de la Flandre française, s’est permis d’adresser au curé de notre ville une sorte de mandement propre à détruire tout l’effet du sage décret que l’Assemblée nationale a porté sur les vœux monastiques; ily menace d’excomunication ; « il déclareapostats ces personnes perfides qui pourraient se laisser entraîner par les insinuations criminelles, dont les hommes pervers de ce siècle tâchent de les endoctriner. » «- Ce mandement dont nous avons l’honneur de vous remettre l’original, etque nousavons déDoncé à la municipalité, a été envoyé dans les différents couvents de notre ville; il y excite de la. fermentation. Ceux qui ont fait des vœux qui répugnent à la nature, se ressentent plus que jamais de la faiblesse qui les leur fit prononcer, La tête de nos prêtres s’exalte ; ils se souviennent de l’impunité de l’évêque deTréguier. Quelques-uns parlent de la palme du martyre et regardent la désobéissance à vos décrets comme un acte méritoire aux yeux de l’Eternel; la chaire destinée à l’instruction du peuple pourrait bien ne plus servir aujourd’hui qu’à le soulever. Déjà, nous dit-on, dans l’Artois, les partisans des moines se déclarent hautement pour les soutenir. Armés pour défendre la constitution que nous attendons de l’Assemblée nationale, nous nous empressons de vous dénoncer ses ennemis. C’est àel1e,Monsieurleprésident,à trouver un moyen d’arrêter l’effet du fanatisme de nos prêtres. Le peuple de nos provinces, ennemi de toute aristocratie, ne connaît pas la leur et c’est en quoi elle est plus dangereuse. Nous saisissons toujours avec empressement les occasions de prouver aux représentants de la nation notre respect, notre obéissance et notre dévouement à tous ses décrets. » M. Bouche ajoute : Tels sont les faits dénoncés par cette lettre, dont je demande qu’il soit incessamment rendu compte à l’Assemblée. Je demande également que le comité ecclésiastique présente uueloi contre l’oppression aristocratico-épiscopale, et qui ait l’effet d’assurer l’état et la tranquillité des religieux et religieuses qui sortiront du cloître. M. Lavie. Pour éviter les effets des dispositions où se trouvent les évêques envers les moines, je propose de suspendre pendant plusieurs années l’ordination des prêtres. (Cette motion est généralement désapprouvée, et ne reparaît plus dans le cours de la délibération.) M. Merlin. Les évêques d’Ypres et de Tourna qui répandent le trouble dans les provinces bel-giques, ne sont pas Français, ne sont pas citoyens, Tous les évêques étrangers doivent, d’après notre droit public, avoir un vicaire général français et