665 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [2 juillet 1791.] MM. Vauvilliers. Vergennes, commandant de bataillon. Villes (Je), ancien fermier général. M. Legrand. Je demande que le nom de M. de Bouillé soit supprimé de celte liste. ( Applaudissements à gauche et dans les tribunes.) M. Rewbell. Je demande que celui qui l’a nommé soit chassé de l’Assemblée. (L’Assemblée ordonne la radiation du nom de M. de Bouillé.) M. Bouche. La liste dont on vient de faire lecture présente quelques difficultés, en ce qu’il y a beaucoup d’individus qui portent le même nom et qui ne sont suivis d’aucune indication exacte. Je demande qu’il soit procédé à un second scrutin. Un membre répond qu’on a conféré avec exactitude le résultat des scrutins de chaque bureau. (Il n’est pas donné suite à la motion de M. Bouche.) M. Prieur demande l’ajournement à quinzaine du scrutin définitif pour la nomination du gouverneur. (L’Assemblée adopte la motion de M. Prieur et ordonne l’impression de la liste indicative ci-dessus mentionnée.) M. le Président invite les membres de l’Assemblée à se retirer dans leurs bureaux respectifs pour procéder à la nomination d'un président et de 3 secrétaires. M. le Président lève la séance à deux heures et demie. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. ALEXANDRE DE BEAUHARNAIS. Séance du samedi 2 juillet 1791, au soir (1). La séance est ouverte à six heures du soir. M. le Président. Messieurs, voici une lettre de M. Bellanger, garde national de la section du Jardin des Plantes. Cette lettre est ainsi conçue : « Monsieur le Président, « Sans être fortuné, je vous supplie de vouloir bien recevoir ma soumission pour contribuer, pendant une année, à la paye entière d’un des soldats citoyens qui seront envoyés vers les frontières; après laquelle année entière révolue, je continuerai, s’il est nécessaire, et si mes facultés me le permettent. « Je me trouverai bien dédommagé si mes vœux peuvent être agréés de l’auguste Assemblée des représentants de la nation. ( Applaudissements .) « J’ai l’honneur d’être, etc. « Signé : BELLANGER. » (L’Assemblée ordonne qu’il sera fait mention de cette lettre dans le procès-verbal.) M. le Président. M. Putod, médecin-inspecteur des épidémies dans la ci-devant province de Bretagne, capitaine des gardes nationales de Fougères, fait hommage à l’Assemblée d’une brochure intitulée : « Le vœu patriotique. » M. Mailly fait hommage à l’Assemblée d’une gravure représentant un vase de métal de cloche fondu. (L’Assemblée ordonne que ces deux hommagts seront déposés dans les archives, et qu’il en sera fait mention au procès-verbal.) M. d’Elbhecq. J’ai l’honneur de déposer sur le bureau le serment de M. Collot, colonel d'infanterie, adjudant général de l'armée du Nord, aux ordres de M. de Rochambeau. (. Applaudissements .) M. de Noailles. Je demande aussi la permission de déposer sur le bureau le serment de M. Otool, lieutenant-colonel du régiment de Dillon. ( Applaudissements . ) (L’Assemblée décrète qu’il sera fait mention de ces deux serments dans le procès-verbal.) Une députation des employés de l'administration et de la caisse de l'extraordinaire est introduite à la barre. L’orateur de la députation s’exprime ainsi : « Messieurs, « L’Etat semble être menacé, et de toutes parts les Français libres s’empressent de dévouer leur fortune et leur vie à l’achèvement de la Révolution. De tous les départements de l’Empire, les enfants de la liberté se rangent sous les drap< aux de la Constitution, qui vont devenir pour eux les drapeaux de la victoire. « Les employés de l’administration et de la caisse de l’extraordinaire ne peuvent rester insensibles à ces tou hauts exemples. « Leurs occupations, utiles à la chose publique, ne leur permettant pas de prendre part à l’honorable conscription qui vient de s’ouvrir pour marcher à la défense des frontières, les soussignés s’engagent, indépendamment du service intérieur qu’ils font dans la capitale, de défrayer, au moyen d’une retenue faite sur leurs appointements, 30 hommes armés, qui seront prêts à marcher au premier ordre, si les despotes qui nous environnent conservaient le dessein de souiller par leur présence notre terre, qui ne doit être foulée désormais que par des hommes libres. » ( Applaudissements .) M. le Président répond : « Messieurs, « Dans un moment où l’on peut croire la patrie en danger, tous les citoyens, quel que suit leur état, se distraient de leurs fonctions, oublient leurs intérêts privés, et ne s’occupent que de la défense commune. Tel est cet esprit public qui fait la force d’un Empire; tel est l’avantage d’un Etat libre, que chacun ne cherche plus son intérêt que dans la gloire de son pays, et ne place plus son bonheur que dans la félicité commune. « Vos fonctions auprès d’une administration nouvellement créée, vous lient au succès de notre Révolution; mais c’est dans votre dévouement, dans vos offres généreuses, dans l’expression de vos sentiments, que l’Assemblée nationale se plaît à chercher les nombreux motifs de sa confiance. Elle vous a écoutés avec intérêt, et elle trouve dans vos assurances une raison de plus pour se (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. 666 [Assemblée nationale.] livrer à l’espoir que ses travaux résisteront à tous les efforts des ennemis de la patrie. (Applaudissements.) (L’Assemblée décrète l’impression du discours de la députation et la réponse du président et leur insertion dans le procès-verbal.) Une députation des gardes nationaux du canton de Châtillon, département de Paris, est admise à la barre. L'orateur de la députation s’exprime ainsi : « Messieurs, « Lorsque la patrie est en danger, tout citoyen doit voler à sa défense : c’est pourquoi nous "venons au milieu des anges tutélaires de la France, renouveler, augmenter même, et étendre, s’il est nécessaire, le serment que nous avons plus d’une fois prononcé à la face du ciel et de la terre, de vivre et mourir pour le maintien de la Constitution, le plus beau chef-d’œuvre qui soit sorti de la main des hommes, puisque l’évangile n’en est pas. ( Applaudissements .) Qu’elles soient confondues les puissances qui, jalouses de notre gloire et de notre bonheur, voudraient allumer dans cet Empire le flambeau de la discorde, et y introdure les horreurs de la guerre; que, semblables à la poussière emportée par le vent, leurs vains projets, leurs noirs complots s’évanouissent. Pour nous, et en ce moment nous nous félicitons d’être les échos de 25 millions d’habitants répandus dans les 83 départements du royaume, pour nous, qui commen ¬ çons à jouir de nos droits, animés de toute la force de la loi, animés du plus bouillant patriotisme, nous jurons de verser jusqu’à la dernière goutte de notre sang pour conserver dans son intégrité la conquête dont nous sommes redevables aux sages et immenses travaux de nos augustes représentants ; et quand notre mère commune ne nous offrirait que des ruines, quand des milliers de bouches d’airain vomiraient la mort de toutes parts, notre dernier soupir sera pour la liberté, le plus bel apanage de l’homme, le plus pressant besoin du Français. » ( Applaudi - sements.) M. le Président répond : « Messieurs, « L’Assemblée nationale, constamment occupée des moyens d’affermir la Constitution et d’assurer la tranquillité publique, voit chaque jour avec satisfaction, dans cetle grande époque, des ciloyens s’empresser de la seconder, soit en concourant à former une opinion publique qui soutient son courage et multiplie ses forces, soit en lui présentant des tableaux variés de celle imposante fermeté, de cette active vigilance qui donne à la Constitution autant d’amis que la liberté a armé de bras pour l’obtenir. « L’Assemblée, qui ne croit aucune entreprise impossible de la part des ennemis de la patrie, ne peut éprouver aucune crainte de leurs erreurs ni de leurs passions ; il lui suffit d’apprécier vos vertus civiques, de trouver dans vos serments l’expression des sentiments de la nation, et d’être assurée que notre courageuse Révolution trouvera autant d’imitateurs que la France compte, avec orgueil, de citoyens libres. « L’Assemblée vous invite à assister à sa séance. » ( Applaudissements .) Plusieurs membres. Le serment! le serment 1 [2 juillet 1791.] M. le Président fait lecture de la formule du serment. Tous les membres de la députation : Nous le jurons ! Un membre de la députation. Si l’on a besoin de nous, on n’aura qu’à nous faire un signe. (L’Assemblée décrète l’impression du discours de la députation et de la réponse do président, et leur insertion dans le procès-verbal.) Une députation des invalides de l'Hôtel est admise à la barre. M. Chevalier, capitaine d'invalides , s’exprime ainsi : « Dignes représentants d’un peuple qui veut vivœ libre ou mourir, nous venons, au nom de tous nos camarades, jurer devant vous que nous sommes dans les mêmes sentiments, quoique vieillis sous les étendards du despotisme. « Oui, Messieurs, et c’est de bon cœur, nous jurons tous d’être fidèles à la nation, à la loi, et de mourir plutôt que de souffrir qu’on en arrache un feuillet illégalement: (Applaudissements.) Et si vous permettez à de vieux guerriers d’émettre devant vous un vœu, c’est, cl’après vos décrets, celui d’un prompt retour dans leurs familles pour y vanter vos bienfaits, offrir aux jeunes militaires les lumières de l’expérience, et à la patrie le reste de leur sang, s’il le faut, pour la défense de la liberté. » (Applaudissements.) M. le Président répond : « Vous avez déjà, par de longs services, mérité et obtenu la reconnaissance publique; votre sang a déjà été versé [jour l’Etat; mais si la patrie était en danger, il vous en reste encore à répandre pour elle. Vos forces épuisées par l’âge, renaîtront par le souvenir de votre gloire, et la France vous comptera encore, avec confiance, au nombre de ses défenseurs. Qu’ils osent donc se montrer, ces ennemis de notre repos, ces hommes soudoyés par des tyrans; et vous, oui, vous-mêmes, estimables vétérans, vous saurez leur prouver que les infirmités d’un homme libre peuvent résister aux forces d’un esclave armé, et qu’animé par l’amour de la patrie, un soldat français n’a point d’âge. (Applaudissements.) » L’Assemblée, toujours attendrie par votre présence, reçoit vos hommages et vos serments, et vous invite à assister à sa séance . » Je vais vous lire la formule du serment : « Vous jurez d’employer les armes remises entre vos mains à la défense delà patrie... » Les membres de la députation (interrompant) : Oui! oui! nous le jurons ! (Vifs applaudissements.) M. le Président. Le bon usage que vous avez fait pourrait vous dispenser d’entendre la formule; mais permettez-moi d’achever. (IL termine la lecture de la formule du serment.) Les membres de la députation : Nous le jurons 1 Un officier , membre de la députation. Messieurs vous voyez ce brave homme (il montre un officier invalide qui a les cheveux blancs) : il avait son fils au service de la nation ; il vient de ARCHIVES PARLEMENTAIRES.