345 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d’Aix.] Préville-le-Roi, commissaire des classes de cette ville, qui a été demandée par acclamation dans notre assemblée du tiers-état tenue cejourd’hui. Art. 8. Ils représenteront que la ville de Martigues étant maritime, fournit au Roi un très-grand nombre de matelots, que nonobstant cela, la levée de la garde-côte qui se fait dans la même ville enlève une foule de bras à l’agriculture; que parmi ces derniers on tire un certain nombre de canonniers que l’on embarque fréquemment sur les vaisseaux de Sa Majesté, en temps de guerre, quoique leur destination soit formellement bornée à servir sur les côtes : de plus, que les commissaires de la marine forcent un grand nombre de cultivateurs qui n’ont jamais mis le pied dans aucun navire, d’aller servir sur les vaisseaux du Roi ; messieurs nos députés demanderont instamment que ces abus soient réformés. Nous, soussignés, commissaires nommés par la délibération prise dans rassemblée du tiers-état de cette ville, commencée le 27 du courant et terminée cejourd’hui 29, pour procéder à la rédaction du cahier des plaintes, doléances et remontrances, déclarons nous être occupés de ladite rédaction, avoir eu égard aux réclamations des différents corps, corporations et com-muneautés, et avoir formé du tout le présent cahier que nous avons signé conjointement avec M. Estraquier, viguier, et MM. les maire et consuls de cette ville. AMartigues, ce 29 mars 1789. Tel est le cahier des doléances, plaintes et remontrances de la ville de Martigues, arrêté dans l’assemblée générale des habitants de ladite ville, le 29 mars 1789. Signé Estraquier, viguier; Boyer, consul; Gra-nier; Tavernier de Courtines; Laurens; Audon ; L.Puech; Vidal; E. Romans; Martin; Pistoye; Genen ; Reybaud ; Gfanier ; N. Doumergue ; Villeneuve; Bonis; Pierre Brillan; Boze; Bonneton. CAHIER Des doléances de la communauté de Mayrargues { 1). Art. 1er. Que le roi de France dans le comté de Provence ne cessera de prendre la qualité de comte de Provence dans tous les actes relatifs à l’exécution des lois et à l'administration du pays. Art. 2. Que la présente assemblée ni sa forme ne pourra nuire ni préjudicier à la constitution du pays, qui ne reconnaît et ne peut reconnaître de légal que l’assemblée de la nation en forme d’Etats généraux, et en conséquence, déclare, ladite communauté, ne pouvoir avouer ni reconnaître à l’avenir que les impôts et les lois consenties par lesdits Etats légalement convoqués et librement assemblés suivant la constitution nationale dudit pays et ainsi que Sa Majesté Ta déclaré dans les lettres de convocation. Art. 3. Que les Etats généraux seront convoqués de droit tous les trois ans au plus tard, et à chaque nouveau règne, auxquelles époques le défaut de convocation fera cesser tout impôt. Art. 4. Que nul emprunt ne sera fait à l’avenir sans le consentement exprès de la nation assemblée en Etats-généraux; hors ledit cas, déchargée de tout ce qui serait fait en son nom. Art. 5. Les ministres comptables aux Etats, et responsables de leur administration en tout ce qui sera relatif aux lois du royaume et aux diverses applications des impositions. (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire, Art. 6. L’impôt ne sera consenti que pour être généralement et également réparti sur chacun des individus composant la masse entière de la nation, nonobstant tous droits et privilèges accordés. Art. 7. Sera fait un impôt unique et relatif soit à la réalité des biens, soit à l’industrie, soit au commerce, soit sur les capitalistes. Art. 8. Que les impôts seront librement perçus par les provinces, et leur produit versé immédiatement dans le trésor royal. Art. 9. Les douanes seront établies aux extrémités du royaume pour laisser la libre circulation intérieure. Art. 10. L’entrée dans le royaume de la matière première de fabrication, droit prohibitif sur celle que le royaume peut fournir , droit modéré sur la fabrication et la denrée sortant du royaume. Art. 11. Tous édits, déclarations, arrêts du conseil, lettres patentes établissant des droits ou faisant jusques à aujourd’hui loi dans le royaume, révoqués, comme contraires à la constitution. Art. 12. Tous les domaines attachés à la couronne seront de plus fort déclarés inaliénables, et au moyen de ce, toutes aliénations précédemment faites, déclarées milles comme contraires aux droits et à la constitution du pays, et tous détenteurs tenus d’en vider leurs mains , à la poursuite du préposé de la nation qui sera à cet effet commis. Art. 13. Qu’il n’y aura plus entre le souverain et la nation aucun corps qui puisse se dire ni être réputé intermédiaire, et au moyen de ce que le clergé, la noblesse et la magistrature ne seront plus que des membres formant partie de cette même nation. Art. 14. La vérification des lois portant impôts, sera entièrement délaissée aux Etals de chaque province, et l’enregistrement confié aux dépositaires des titres nationaux. Art. 15. Que la justice sera universellement rendue au nom doi monarque comme le seul protecteur de la loi, qu’elle sera gratuite étant à la charge du souverain, comme représentant quant à ce la nation. Toutes les charges de magistrature et autres, quelles qu’elles soient, soient déclarées non vénales et amovibles, et au moyen de ce remboursables et éteintes. Art. 16. La nomination des nouvelles charges sera faite par le Roi sur la présentation de trois sujets pour chaque, lesquels seront choisis par les Etats provinciaux. Art. 17. L’administration de la justice réformée tant au civil qu’au criminel. De manière que les parties n’ayant qu’un seul degré de juridiction, un seul défenseur, qui, nonobstant l’extinction des charges, sera continué en la personne des pourvus, jusqu’à leur décès, démissions , cas de forfaiture’ interdiction. Les procès au civil jugés à l’audience ou sur le concours des requêtes des parties, dans une année, à peine de péremption, perte des frais faits parles défenseurs comme frustrés à la charge de la partie qui aura donné lieu au retard par fuite, morosité, qu’autrement. Au criminel, procédure entièrement publique avec le droit à l’accusé de se défendre par lui-même ou par la voie d’un défenseur, auquel sera communiqué, s’il le requiert, la grosse à ses frais, si mieux il n’aime prendre des notes relatives à sa défense, enla présence du dépositaire d’icelle, qui sera tenu de la lui représenter à peine de destitution. 346 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d’Aix. Art. 18. La peine de mort limitée au cas d’assassinat ou seulement déport. Art. 19. Sera nommé un patriarche en France. Art. 20. Les dîmes ecclésiastiques annulées, à la charge par le peuple de nourrir les prêtres des paroisses-, tout casuel supprimé, et dans le cas où la dîme ne serait pas supprimée, en diminuer la taxe comme en la capitale avec la même manière de percevoir. Art. 21. La noblesse sera personnelle. Art. 22. Les faveurs, soit. en pensions que places attachées à ladite noblesse, déclarées communes-avec tous les citoyens non nobles. Art. 23. Que les fiefs soient domaniaux ou qu’ils existent comme faisant partie delà propriété; les régales tant majeures que mineures seront déclarées faire partie du domaine. Art. 24. La chasse sera déclarée n’avoir jamais en Provence fait partie des régales ni droits domaniaux, faisant principalement dans cette province partie de la liberté individuelle de se garantir des animaux offensables par leur population. Art. 25. La liberté individuelle de se transporter au dedans et au dehors du royaume. Art. 26. Charger le député aux Etats généraux, qu’il fut permis à chaque propriétaire de fonds assujettis à cens ou autres redevances envers les seigneurs que autres, et de quelle nature qu’elles soient, de pouvoir se libérer sur le taux qui sera déterminé aux Etats généraux. Art. 27. Le rachat de toutes les banalités, qu’elles dérivent de fief ou qu’elles aient été acquises à prix d’argent. Art. 28. Toutes les terres gastes seront déclarées appartenir aux communautés. Art. 29. Que tous les biens aliénés par la com-v munauté seront rachetables. Art. 30. Que toutes les censes seront réduites à la fixation du titre primordial. Art. 31. Sera déclaré ne pouvoir construire des pigeonniers ni tenir des pigeons. Fait et arrêté en ce lieu de Mayrargues le 29 mars 1789. Signé Catton; Ripert; Darbaut; Salliez ; J. -S. Ricarde, consul; J. Monnier; Roux; N. Manueil; J.-J. Chabaud; Desgavaux; Cassolle; Lais; Jean-Baptiste Padigon; Joseph Pelletier; Roux; Joseph Paaigon; J.-L. Giraud; J. Gros, J. Crey; Premia; Gautier; J.-A. Ricard; Joseph Martin; Berlingues; M. Dailheux; J.-P. Franc; Salliez, procureur fondé de M. le baron de Vallette. CAHIER D'instructions, remontrances et doléances , dressé par la communauté de Merindol , pour être présenté par ses députés à rassemblée de la sénéchaussée d'Aix , convoquée par M , le lieutenant général pour le 2 avril prochain (1), Réflexions préliminaires. S’il y avait eu du courage, un an avant la révolution qui se prépare, d’oser élever la voix contre les abus nés de notre mauvaise constitution ; s’il y avait eu des dangers à courir un an avant cette révolution d’oser montrer seulement le voile sous lequel étaient cachés les vices de notre administration, il y aurait aujourd’hui de la lâcheté de ne pas réclamer contre ces abus, et des (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. dangers plus imminents encore de ne pas faire connaître ces vices. Il fallait autrefois les lumières et les talents de l’esprit pour épuiser cette source d’où sont sortis tous les maux du peuple français, pour sonder cet abîme qui a englouti sa fortune et les fruits de ses sueurs, et maintenant, avec cette masse de lumières dont nous ont éclairés les génies patriotes, les écrivains citoyens, il ne faut que de la volonté. Il aurait fallu autrefois, par respect pour le monarque qui nous gouverne, croire que nous ne pouvions pas être plus heureux sous son empire, et maintenant, avec la précision qu’il exige de nous pour lui faire connaître notre situation, notre sort, la sincérité avec laquelle il veut que nous éclairions ses sollicitudes, son amour pour nous, il ne faut que de l’obéissance et de la sensibilité. Autrefois les premiers administrateurs n’inspiraient que de la crainte, et nous condamnaient au silence, et maintenant, avec ce zèle, cette droiture qui les animent pour le bien et le salut de l’Etat, il ne faut que de la confiance. Par toutes ces considérations, la communauté de Merindol, voulant se rendre digne de l’amour, de la protection du souverain par son obéissance à ses volontés et sentant qu’il est honorable de coopérer avec les autres communes du ressort à la restauration de la monarchie, ose présenter à l’assemblée de la sénéchaussée ses instructions, remontrances et doléances pour servir à la composition du cahier qui peindra notre détresse aux yeux de Sa Majesté et qui frappera son cœur paternel du cri plaintif que le sentiment d’une plaie profonde, invétérée arrache à une partie de la nation provençale. Instructions générales. Art. 1er. La communauté charge les députés qui seront élus dans l’assemblée de la sénéchaussée pour assister aux Etats généraux de supplier Sa Majesté et lesdits Etats que la liberté de l’homme soit garantie par des lois inviolables et qu’elle ne dépende plus des caprices des ministres, des administrateurs des provinces, ou des gens en place, et que dans le cas où il aurait mérité d’en être privé on lui fasse son procès et qu’on ait pour lui les égards que l’humanité inspire pour un infortuné. Art. 2. Que sa procédure soit instruite par ses pairs, son jugement rendu par eux dans le moindre délai possible pour être mis à exécution par le juge local. Art. 3. Qu’on suive toujours le même esprit et la même voie pour sa propriété que pour sa personne. Art. 4. Qu’il ne servirait de rien que l’homme fût libre physiquement et civilement si les opérations de son âme étaientgénées, puisque bientôt, par l’effet de ce despotisme qu’on exercerait sur sa pensée, on ne manquerait pas de l’asservir et d’en faire un automate, mais que la liberté de la presse lui donnera lés moyens de démasquer les oppresseurs et les oppressions dont il serait la victime et l’objet. Art. 5. Qu’un des plus sûrs moy'ens d’assurer la liberté de l’homme dans les campagnes est de le soustraire pour toujours aux tribunaux des seigneurs, qui lui font rendre la justice par des hommes qui ne sont le plus souvent que les instruments de leur vengeance et les objets de la haine et du mépris public ; et d’ériger ces tribunaux suspects à tant d’égards en tribunaux royaux.