[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (31 août 1790.] M. Chabroud. L’Assemblée ne fait pas sans doute attention qu’en adoptant la motion de M. d’André elle va concentrer l’administration dans les mains des seuls habitants des villes : il est évident que les citoyens de la campagne ne consentiront jamais à se déplacer avec leur famille pour uu traitement aussi modique. M. de Folleville. Comme on l’a demandé, il faut s’occuper de la loi de résidence : vraisemblablement l’Assemblée ne peut pas faire des places d’administrateurs de bénéfices simples. M. Lanjuinais. Si ces membres à qui l’on vous propose de donner 600 liv. vous abandonnent, comment lever les impositions? La4Gonsli-tution est perdue... M. de Menou. Je viens de recevoir plusieurs lettres qui m’annoncent que quantité d’administrateurs vont quitter leurs places s’ils ne sont salariés d’une manière convenable. M. Thouret. La motion deM. d’André n’offre, sur les 1,969,200 livres, qui forme le total du traitement proposé par le comité, qu’une réduction de 600,000 livres; l’intérêt de la Constitution peut-il être balancé par une modique économie ae 600., 000 livres? M. d’André retire sa motion. L’article du comité est décrété à une très grande majorité pour ce qui concerne les membres des directoires. La suite de l’article est ajournée. M. le Président. Je viens de recevoir sur l'insurrection militaire de Nancy une lettre du ministre de la guerre, à laquelle est jointe copie d’une lettre de M. de Bouillé, commandant à Metz. Je vais en donner lecture (1). « Paris, le 30 août 1790. « Monsieur le Président, « Je ne perds pas un instant pour avoir l’honneur de vous adresser la copie de la lettre que je reçois par un courrier extraordinaire que m’a dépêché M. de Bouillé; je crois ne pas avoir rien à ajouter aux détails alarmants que contient cette lettre; je fais des vœux pour que l’Assemblée nationale veuille bien adopter la mesure que M. de Bouillé propose; elle peut seconder efficacement ses efforts, en prouvant au peuple égaré, qu’il n’agit que pour l’exécution des décrets de l’Assemblée nationale, sanetionnés par le roi. « Je suis avec respect, Monsieur le Président, votre très-humble, etc. * Signé ; La Tour-dü-Pin. » Copie de la lettre écrite par M. de Bouillé à M. de La Tour-du-Pin. « Metz, le 29 août 1790. « Monsieur, depuis ma dernière lettre, il s’est passé des événements bien affligeants à Nancy, événements dont j’ai eu l’honneur de vous rendre compte. « Le régiment Suisse a persisté dans son insurrection. Ceux du Roi et de Mestre-de-Camp se (1) Nous empruntons ces deux lettres au journal Le Point du Jour , tome Xlll, page 398. Le Moniteur *e borne à en citer des extrait». 429 sont réunis à lui. Une partie des gardes nationales du petit peuple de Nancy, a pris parti aussi pour les rebelles. Les gardes nationales du département, qui sont arrivées trop tôt à Nancy, se trouvent dans une position très embarrassante. Le peuple de cette ville est dans une situation très inquiétante; la classe inférieure étant pour les troupes révoltées, l’autre classe craignant d’être pillée ou massacrée. La municipalité, ainsi que le directoire, remplis des meilleures intentions, sont dans le plus grand embarras; beaucoup de gens courent dans les campagnes, pour annoncer au peuple que les généraux qui font marcher les troupes, cherchent à occasionner une contre-révolution et que c'est contre le vœu de l’Assemblée nationale; de quelque manière que l’on agisse, il est à craindre que ces bruits s’accréditent. « Hier, la garnison de Nancy a pri3 les armes, le peuple s’est joint à elle; on a voulu arrêter M. de Malseigne qui en a été instruit à temps et qui s’est sauvé à Lunéville ; il a été poursuivi par 50 cavaliers de Mestre-de-Camp, jusqu’aux portes de Lunéville; les carabiniers, instruits de l’arrivée de ce détachement et de son objet, ont monté à cheval, les oit chargés, en ont tué quelque--uns, faille reste prisonnier qui est dans les cachots de Lunéville. « Dans le moment où M. de Malseigne se sauvait, on a arrêté M. de Noue, commandant à Nancy; plusieurs officiers du régiment du Roi et des autres régiments ont fait cercle autour de lui pour le défendre; quelques-uns d’entre eux ont été tués ou massacrés par les soldats et par le peuple, et M. de Noue a été traîné dans un cachot où il est. « Voilà les nouvelles que m’ont rapportées plusieurs personnes très dignes de foi, arrivant de Nancy et tous ces rapports sont conformes. « Une partie de la garnison de Nancy est sortie pour aller attaquer les carabiniers. M. de Malseigne me mandait qu’il était à cheval à leur tête, à combattre ces rebelles et qu’il était sûr de sa troupe; demain les troupes se réunissent aux environs de Nancy, quatre bataillons, vingt-un escadrons et quelques pièces de canon ; je rassemblerai le plus de gardes nationales que je pourrai. Je n’ai pas voulu faire marcher des régiments d’infanterie de cette garnison qui se trouve déjà extrêmement réduite; mais j’ai fait commander des compagnies de grenadiers et de chasseurs prêtes à marcher en cas de besoin. « J'emploierai tous les moyens possibles pour réduire les soldats rebelles ; je crains que la municipalité de Nancy prisonnière ne me requière de ne pas marcher; ma position e-t très embarrassante. Je ferai cependant ce que je croirai cour le mieux. Je pense que ce qu’il y aurait de plus avantageux, serait de me faireadjoindre deux députés de l’Assemblée nationale, qui accréditeraient par leur présence la conduite des généraux et le mouvement et l’action des troupes. Je pars dans quelques heures pour Toul où je me réunirai à elles. « Je suis, etc. « Pour copie, signé : La Tour-du-pin. » M. Alexandre de Aameth. Comme l’importance de cette affaire exige les plus grandes précautions, je demande le renvoi de cette lettre aux trois comités réunis. M. Prugnon, député de Nancy. Nous venons