SÉANCE DU 12 FRIMAIRE AN III (2 DÉCEMBRE 1794) - N° 36 403 d’organiser l’enseignement de l’art de guérir dans les communes de la République où étaient établies des Écoles de Médecine et de Chirurgie, sur l’étude de la pharmacie, et sur les moyens de récompenser les services de ceux des professeurs de ces Écoles que l’âge et les infirmités rendent incapables de continuer leurs fonctions (106). 36 Un rapporteur [MATHIEU] du comité de Sûreté générale paroît à la tribune pour démentir formellement les bruits répandus dans quelques journaux relativement à des instituteurs et gardiens donnés au fils de Capet par ce comité; la Convention et ses comités, dit-il, savent bien comment on fait tomber la tête des rois, mais ils ignorent comment on élève leurs enfans. Il dément ensuite ceux répandus sur un prétendu crédit que les comités s’occupent de rendre aux assignats démonétisés. On demande de toutes parts l’insertion de ce rapport au bulletin; elle est décrétée (107). MATHIEU : Citoyens, je viens, au nom du comité de Sûreté générale, donner le démenti le plus formel au récit calomnieux et royaliste inséré depuis plusieurs jours dans des feuilles publiques, et répété avec une sorte d’affectation au moins très répréhensible. Le comité y est présenté comme ayant donné des instituteurs aux enfants de Capet, enfermés au Temple, et porté des soins presque paternels pour assurer leur existence et leur éducation. Voici le journal et l’article dont les autres périodistes n’ont été que les trop dociles échos ; c’est le Courrier universel du 6 frimaire, rédigé par Nicolle et Poujade. «Le fils de Louis XVI profitera aussi de la révolution du 9 thermidor. On sait que cet enfant avait été abandonné aux soins du cordonnier Simon, digne acolyte de Robespierre, dont il a partagé le supplice. Le comité de Sûreté générale, persuadé que, pour être fils d’un roi, on ne doit pas être dégradé au-dessous de l’humanité, vient de nommer trois commissaires, hommes probes et éclairés, pour remplacer le défunt Simon; deux sont chargés de l’éducation de cet orphelin; le troisième doit veiller à ce qu’il ne manque pas du nécessaire, comme par le passé. » Le premier devoir du comité, pour écarter cette fable du royalisme, est de présenter à la Convention un récit simple des mesures par lui prises pour assurer le service du Temple et la garde des enfants du tyran. À l’époque du 9 thermidor, un nouveau gardien avait été placé au Temple par le comité de (106) Moniteur, XXII, 666. P.-V., L, 383-387. Rép., n° 80 et 81; Débats, n° 800, 1032-1033; Ann. Patr., n° 701; C. Eg., n° 836 ; F. delà Républ., n° 73 ; J. Fr., n° 798 ; M. U., n° 1360 ; Mess. Soir, n° 836. Voir Archives Parlementaires, ci-dessus, 7 frim., 41. (107) P.-V., L, 273. Mathieu rapporteur selon C*II, 21. Salut public. Un seul gardien a depuis paru insuffisant au comité de Sûreté générale. Un citoyen d’un républicanisme éprouvé fut demandé à la commission de police administrative de Paris ; indiqué par elle, il fut adjoint au premier pour remplir cette fonction ; et comme, aux yeux des hommes prévenus ou ombrageux, la permanence de deux individus au même poste éveille l’idée d’une séduction possible avec le temps, pour compléter et assurer d’autant mieux la détention des enfants du tyran, le comité arrêta que, chaque jour et successivement, l’un des comités civils des quarante-huit sections de Paris fournirait un membre pour remplir, pendant vingt-quatre heures, les fonctions de gardien, concurremment avec les deux hommes nommés à poste fixe. Le comité a regardé cet ensemble de mesures comme nécessaire pour ôter au récit fabuleux tout air de vraisemblance, et à la malveillance soit active, soit calomniatrice, tout prétexte de plaintes ou d’agitations. Pour la partie militaire du service de ce poste, le comité de Sûreté générale s’est concerté avec le comité Militaire; plusieurs représentants l’ont visité, et les deux comités se sont assurés que le service s’y faisait avec exactitude et ponctualité. Par cet exposé l’on voit que le comité de Sûreté générale n’a eu en vue que le matériel d’un service confié à sa surveillance, qu’il a été étranger à toute idée d’améliorer la captivité des enfants de Capet, ou de leur donner des instituteurs. Le comité et la Convention savent comment on fait tomber la tête des rois, mais ils ignorent comment on élève leurs enfants. Si le royalisme voulait élever la voix, il serait à l’instant anéanti; pour en ôter la pensée aux ennemis de la chose publique et prévenir les conspirations qui trop souvent sont le produit de la faiblesse du gouvernement, le comité doit annoncer qu’il a pris, dans cette circonstance, des mesures contres les coupables, et qu’il saura, fidèle aux principes, faire respecter les lois et le gouvernement, et empêcher que l’on ne provoque une perfide pitié sur les restes de la race de nos tyrans, sur un enfant orphelin auquel il semble que l’on voudrait créer des destinées. Depuis plusieurs jours le bruit se répandait que les assignats démonétisés reprenaient quelque crédit; on s’efforçait de leur donner une sorte de valeur dans l’opinion. Nul doute que tous ces bruits, les uns relatifs au rejeton d’une race abhorrée, les autres à des signes retirés de la circulation, ne dussent concourir au même but et s’étayer mutuellement. Ainsi l’esprit public s’affaiblissait, des fluctuations étaient imprimées à l’opinion publique ; mais, en dépit de toutes les manœuvres et de toutes les trames, le crédit national s’affermira sur les plus solides bases, la tranquillité publique sera maintenue, et le fils de Capet, ainsi que les assignats à effigie, restera démonétisé (108). (108) Moniteur, XXII, 651-652. Bull., 13 frim. ; Rép., n° 73 ; Débats, n° 800, 1033, n° 801, 1036-1039 ; Ann. Patr., n° 701; C. Eg., n° 836 ; F. de la Républ., n° 73 ; J. Perlet, n° 800 ; J. Fr., n° 798 ; Gazette Fr., n° 1065 ; M. U., n° 1360 ; Mess. Soir, n° 836 ; Ann. R.F., n° 72.