37 SÉANCE DU 11 FRUCTIDOR AN II (28 AOÛT 1794) - N08 19-20 19 La société populaire de Cany, département de la Seine-Inférieure, annonce à la Convention nationale que les soldats, sous-officiers et officiers du bataillon de Beauvais [Oise] cantonnés dans cette commune, viennent de donner une nouvelle preuve de la générosité française, en s’engageant, au sein de cette société, de donner chaque décade une ration de leur viande aux indigens. Mention honorable, insertion au bulletin (41). [La société populaire et républicaine de Cany à la Convention, 9 thermidor an II\ (42) Citoyens Représentants, Partout les soldats français se montrent autant généreux envers leurs concitoyens, que terribles envers les ennemis de la Liberté. Pendant que ceux-ci continuellement en proie à la faim sont forcés de piller et voler le peuple pour se procurer les premiers besoins de la vie que leurs maîtres ont l’inhumanité de leur refuser, les soldats républicains partagent généreusement avec leurs frères l’abondante nourriture que la Patrie leur distribue. Les soldats, les sous-officiers et officiers d’une partie du bataillon de Beauvais, cantonnés parmi nous, viennent de nous donner une nouvelle preuve de cette générosité française. Ils se sont engagés au sein de notre société, à donner chaque décade, une ration de leur viande aux indigents de notre commune. Nous nous empressons de publier ce trait d’humanité, ce n’est pas pour exciter l’émulation des soldats républicains: ils sont depuis longtemps familiarisés avec ce sublime dévouement. Mais que le bruit s’en répande aux oreilles des vils sattelites des tyrans : qu’ils rougissent en comparant la dignité du soldat français avec les humiliations qu’on leur fait essuyer et les vexations qu’ils sont contraints d’exercer sur leurs frères. Mais aussi qu’ils tremblent. Des soldats qui scavent ainsi d’eux-mêmes se condamner à des pareilles privations, ne se laisseront jamais amolir ni énerver par les délices et seront toujours invincibles. Ceux qui scavent faire de pareil sacrifices pour une portion de leurs frères, ne craindront pas de verser leur sang pour le salut de la république entière. Salut et fraternité. Vergnest (président), Lemarechal (secrétaire). 20 La société populaire de Lormont instruit la Convention nationale de l’action coura-(41) P.V., XLIV, 188. (42) C 320, pl. 1313, p. 15. Bull, 12 fruct. (suppl.). geuse du citoyen Pierre Eyquem, qui, pour sauver le facteur de la diligence de Paris, tombé dans la rivière à Bordeaux, se jette à l’instant à l’eau, et parvient, après de grands efforts et le plus grand danger pour lui-même, à sauver la vie à ce citoyen. Mention honorable, insertion au bulletin (43). [Le club national de Lormont, district de Bordeaux, département du Bec-d’Ambès, à la Convention nationale ] (44) Législateurs, S’il est du devoir des sociétés populaires d’exciter les belles actions, c’est aussi un devoir pour elles de vous les transmettre, et le club national de Lormont vient interrompre un moment vos travaux précieux, pour fixer vos regards sur le courage de Pierre Eyquem marin de la commune de Cenon-la-Bastide. Le 27 messidor le facteur de la diligence de Paris en traversant la rivière devant Bordeaux, tombe au millieu des flots; il allait y périr lorsque Pierre Eyquem se jette après lui. Mais lui-même court risque d’être victime de son zèle, car il est saisi par les deux bras par le malheureux qu’il veut sauver; cependant il s’en dégage, oublie le danger qu’il vient de courir, et hasardant une troisième fois sa vie, parvient à le saisir par une main, et l’entraîne avec lui vers le batteau qu’il avait quitté; mais ce batteau avait été emporté par les courants à une certaine distance, et il est obligé d’en gagner un autre à la nage. Enfin après bien des efforts, il a la satisfaction de conserver à la patrie un citoyen utile. Pierre Eyquem mérite d’autant plus la reconnaissance nationale, qu’il est père de famille, et que ce n’est pas la première fois qu’il a oublié qu’il était époux et père, pour ne se rappeler que du devoir sacré de secourir les malheureux. Tel est l’événement qui a eu lieu dans la commune voisine de celle que nous habitons, et telle est l’action généreuse que nous nous empressons de vous transmettre. Législateurs, le club national de Lormont saisit cette occasion pour vous assurer que né en 1789, il a toujours marché d’un pas égal et ferme, et qu’il ne cesse d’applaudir aux grandes mesures révolutionnaires que vous avez pris pour le maintien des droits du Peuple : continuez vos glorieux travaux, législateurs, que le succès de nos armes, et le bonheur des français, soient pour vous le gage le plus certain de leur reconnaissance; repoussez surtout les cris des factieux, qui sous l’apparence du bien public parlent de paix au millieu de nos triomphes. Point de paix avec les tyrans, guerre à jamais, guerre aux ennemis de la liberté, guerre à tous ces monstres couronnés qui sacrifient des milliers d’hommes à leurs cruelles passions, et ne déposons les armes que lorsque l’europe entière sera purgée des brigands qui l’infestent. (43) P. V., XLIV, 188. (44) C 320, pl. 1313, p. 23. Bull., 12 fruct. (suppl.); Débats n° 709; M.U., XLIII, 217.