[Assemblée nationale.] moyens d’exécution du présent décret. (Applaudissements.) Voix diverses : Aux voix! aux voix! — L’ajournement! (L’Assemblée, consultée, décrète l'ajournement, ordonne l’impression de l'opinion et du projet de décfetde M. Millet de Mureau et renvoie les différentes propositions au comité des monnaies pour eh rendre compte dans 3 jours.) M. le Président. Voie i. nie lettre de M. le curé et des marguilliers de la pMûisse Saint-Ger-main-V Auxerrois : ' — - -j» £ « Monsieur le Président, « L’Assemblée nationale ayant assisté l’année dernière à la procession de la Fête-Dieu , nous croyons qu’il est de notre devoir de venir prendre ses ordres pour savoir si ses occupations lui permettront d’y assister cette année. (Applaudissements à gauche. — Oui! oui!) « Le roi, qui a accompagné l’année dernière la procession, a promis d’y assister cette année. (Applaudissements à gauche.) « Nous sommes, etc... » M. Rewbell. Aux voix1, Monsieur le Président ! (L’Assemblée, consultée, décide à l’unanimité de la partie gauche, prenant seule part à la délibération, qu’elle assistera jeudi à la procession de la Fête-Dieu à la paroisse Saint-Dermain-r Auxerrois). M. le Président. La parole est à M. de Tal-leyrand-Périgord pour présenter des vues sur l'état des changes de la France avec l'étranger. M. de Talleyrand-Pérlgord (ancien évêque d'Autun) (1). Messieurs, dans le moment où vous venez de compléter, par une nouvelle émission d’assignats, la proportion que vous avez décrétée au mois de septembre dernier, j’ai pensé qu’il était important de mettre sous vos yeux rétat actuel des rapports commerciaux de la France avec les autres nations de l’Europe, et que l’influence de notre système monétaire, présente à votre observation, pourrait vous engager à prendre quelques mesures d’administration utile aux circonstances dans lesquelles nous nous trouvons. Je vous prie de remarquer que je ne considère, dans toute cette discussion, les assignats que dans leurs rapports politiques, etnon dans leur valeur réelle, qui, d’après les précautions déjà prises, et dont sûrement vous ne vous écarterez jamais, ne peut être raisonnablement contestée. Le numéraire devient plus rare de jour en jour, et l’inquiétude en augmente le besoin. Vous avez été, vous êtes encore, à plusieurs égards, sous le joug de la nécessité; mais il vous reste du choix dans vos ressources, et vous serez à portée d’appliquer avec succès les remèdes qui conviennent à nos maux, lorsque vous en connaîtrez bien les causes. Je vais essayer de vous les détailler. L’analyse du change vous a été exposée plusieurs fois dans cette tribune; ses rapports vous sont connus. Vous savez qu’une nation qui doit à une autre, après que tous leurs échanges respectifs sont accomplis, est forcée de s’acquitter avec des métaux. Le transport des métaux est (1) Ce document est incomplet au Moniteur. 331 doue à la charge de la nation qui les doit, et les porte chez l’autre. Toutes les opérations qui tendraient à prévenir, à différer ou i suppléer ce transport réel, sont encore aux frais du peuple débiteur; et vous concevez sans peine que plus le transport effectif serait difficile et dangereux, plus ces opérations supplémentaires deviendraient onéreuses. Ces vérités une fois reconnues, il nous est facile de suivre et. (d’expliquer notre situation monétaire. En 1788 et 1789, le gouvernement a été obligé de tirer une très grande quantité de grains du dehors, etc’est à cetteépoqueque remontent les désavantages du change entre Paris et l’étranger. Cette nouvelle dépense, ajoutée à tous les embarras de nos finances, a déterminé l’emprunt auquel on a contraint la caisse d’escompte, par l’émission de tant de millions qui n’avaient pour hypothèque que des espérances alors bien incertaines ; mais le papier, associé aux fonctions de nos monnaies, si l’on pouvait se persuader qu’il lésait remplies à l’égard de nos opérations intérieures, n’a certainement pu les suppléer à l’égard du commerce étranger. Le numéraire effectif a donc dû s’écouler; et plus le papier s’est montré, plus l’argent a disparu; car la défiance intérieure, aussitôt qu’elle se réunit à l’exportation étrangère, agit en raison composée et dans un rapport double et peut-être décuple de la proportion naturelle. Si l’on voulait comparer le nombre d’habitants à la quantité du numéraire existant, établir da proportion des facultés et classer les précautions et les alarmes, on verrait avec étonnement combien il est facile d’expliquer la stagnation de la plus grande partie de nos monnaies: ici les preuves u’ont que trop justifié les principes. Je ne parle que du change : je reprendrai les observations qui s’appliqueraient à nos besoins actuels et à nos opérations ultérieures. Vous deviez à l’étranger pour achat de grains; il a fallu le payer en numéraire, puisque la compensation n’avait pas lieu par vos échanges : les sommes exportées par les émigrants, les capitaux qu’ils ont réalisés et réalisent encore tous les jours, les placements que plusieurs Français ont faits et font habituellement, en se tenant munis de valeurs sur les étrangers, ces déplorables opérations d’une avarice pusillanime ont donné lieu à des mouvements de banque dont l’étranger a profité;et voyez combien cette terreur est funeste à ceux qui s’y livrent, et combien ils en sont punis! Un Français émigrant veut convertir ses capitaux en papier sur l’étranger; il échange 100,000 livres à Paris contre 75,000 payables chez l’étranger; il perd en capital et revenus sans aucune espérance de pouvoir jamais se récupérer par une opération inverse. Revenons à la perte nationale : tout y a concouru. Notre commerce a langui près de 2 années, nos relations étaient moins fréquentes, nos. fournitures moins abondantes, et par conséquent nos échanges étaient moins balancés. Les opérations les plus sages du Corps législatif influaient même sur le change; vous aviez trouvé tous les payements arriérés; les cris du besoin et le sentiment de la justice vous prescrivaient de mettre en action cette loyauté française, que vous présentiez pour caution aux créanciers de l’Etat, et de saisir les premières valeurs que vous pourriez leur offrir. Eh bien, Messieurs, ces rembourse-- ments multipliés et rapides, ces payements de rente retardés de 2 ans, et consommés en si peu de temps, ont dû faire émigrer le numéraire. Lorsque l’étranger a voulu retirer ses capitaux, il n’a ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [20 juin LT9l]