103 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [22 septembre 1789.] 1759 par les Anglais, restituée à la France en 1773, veut se rattacher à la mère-patrie, par un nouveau lien, en prenant sa place au sein de l’Assemblée nationale. La colonie s’étant assemblée le 26 février dernier, en apprenant la convocation des états généraux, autorisa son comité, séant à Paris, à solliciter la représentation qui lui était due. Le ministre du département des colonies ayant répondu que le Roi agréerait les demandes que MM. du comité feraient auprès de l’Assemblée nationale, pour obtenir cette représentation, MM. Chabert de La Gharrière, Gurt, marquis de Dam pierre et Boivin ont été députés par la voie du scrutin. Leurs pouvoirs auraient pu être plus directs et leur élection plus universelle, mais les circonstances, une distance de quinze cents lieues et le vœu de la colonie exprimé le 26 février, ont fait adopter cette élection du comité colonial, sauf confirmation. Quant au nombre de députés, le comité de vérification, prenant pour règle la proportion établie pour Saint-Domingue, propose de n’admettre que les deux premiers. La population actuelle de 16,000 colons, de 4,000 affranchis, de 120,000 noirs; la contribution de 2 millions à tous les impôts ; les 30 millions de denrées jetées dans la balance du commerce sont de nature à justifier la représentation de la Guadeloupe dans la mesure indiquée. M. le Président consulte l’Assemblée sur les propositions ducomité de vérification. MM. Chabert île La Gharrière et Gurt sont admis comme membres de l’Assemblée nationale, et MM.de Dampierre et Boivin comme suppléants, sur l’engagement pris par eux de rapporter la confirmation de leur nomination régulièrement faite par la colonie. Le comité de vérification fait un autre rapport. Le Gom brailles, territoire qui a été,pourladéputa-lion, affilié à l’Auvergne, demande une représentation particulière ; il prouve qu’il est une province séparée ; qu’autrefois il avait ses comtes particuliers. Le comité pense que Le Combrailles ayant concouru aux élections, sa requête ne peut être admise; mais que les pièces qui contiennent ses réclamations et l’énoncé de ses droits doivent être remises aux archives, pour y avoir tel égard que de raison, lorsqu’on réglera les intérêts particuliers des provinces. L’Assemblée adopte l’opinion de son comité. M. Mercier, membre du comité des rapports, rend compte à l’Assemblée des demandes du conseil de la ville d’Âuriilac, et du sieur Largueze, médecin, qui se plaint de vexations ; le peuple a voulu le pendre et le comité permanent a voulu le juger. L’opinion du comité a été que l’Assemblée nationale autorisât son président à envoyer au conseil d’Aurillac les décrets relatifs à la tranquillité publique, et à lui écrire que l’intention de l’Assemblée est que le sieur Largueze demeure, comme tout autre citoyen, sous la sauvegarde de la loi, et qu’il ne soit porté aucune atteinte à sa personne ni à ses propriétés que par des voies légales. Et quant à l’indication d’un tribunal pour faire, s’il y avait lieu, le procès du sieur Largueze, que l’Assemblée renvoyât cette affaire au pouvoir exécutif. Après une courte discussion, le président a posé ainsi la question : renverra-t-on simplement au pouvoir exécutif, ou ajoutera-t-on quelques détails à ce renvoi? L’Assemblée a adopté le renvoi simple; mais le Président a ensuite été autorisé à écrire dans les termes du comité ci-dessus énoncés, Le comité des rapports ayant demandé encore audience ou ajournement très-prochain, on l’a ajourné à la séance de demain au soir. M. le Président du comité des finances ayant ensuite demandé que. dans le cas où l’Assemblée désirerait qu’en rendant compte des pensions, le comité indiquât les réductions et suppressions qu’il croyait possibles et utiles, elle voulût bien l’y autoriser par un décret, le vœu de l’Assemblée a été interrogé, et elle a adopté l’opinion du comité des finances à la manière accoutumée. Un membre a réclamé ensuite que l’on imprimât la liste des pensions, le nom des pensionnés et les motifs des grâces. M. Duval d’Eprémesnil a demandé qu’on y ajoutât un état détaillé des traitements sur les régies, les fermes, les fourrages, les postes, les pays d’états, etc. M. lo Président a proposé â l’Assemblée de décréter l’impression de l’état nominatif des pensions, traitements, dons, etc,, avec la date et les motifs desdits pensions , traitements , dons, etc. L’Assemblée a adopté ce décret à la manière accoutumée. L’ordre du jour rappelait aux impositions. M. Ansop, au nom du comité des finances, a présenté un projet de décret tendant à faire confectionner des rôles pour imposer les privilégiés, de façon à augmenter les recettes du Trésor royal. M. de Rochebruné, M. Dubois de Crancé et M.de Villas combattent le projet du comité, et demandent que les non-privilégiés soient déchargés au prorata de ce que payeront à l’avenir les privilégiés. M. Bouche (1). Messieurs, les citoyens ne sauraient refuser le payement raisonnable des impôts sans nuire à leurs propres intérêts, sans faire un vol manifeste à la nation, et jeter le désordre dans l’administration de la chose publique. On a fort judicieusement comparé les impôts aux voiles d’un vaisseau. Les uns sont nécessaires à l’entretien du gouvernement et du monarque ; les autres servent à conduire, à assurer, à amener le vaisseau au port. Voilà, Messieurs, ce qu’il faut apprehdre au peuple, en même temps que vous vous occupez du soin tendre et constant de le soulager. En même temps qu’on le plaint, qu’on verse sur lui les larmes d’une juste pitié, il faut aussi savoir lui remontrer ses devoirs. Dans la matière des impôts, le bonheur public ne réside que dans l’exactitude a ies payer et dans l’équitable proportion à les établir. Lorsque dans un Etat tous les particuliers sont citoyens, que chacun y possède en paix par son domaine, ou que le prince y possède par son em-(1) L’opinion de M. Bouche n’a pas été insérée *u Moniteur.