54 I Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. S lw nivôse an II (21 décembre 1 193 expédition de notre proclamation à nos frères du district, pour ranimer l’esprit public en terrassant le fanatisme. « La Convention nationale peut compter qu’avant deux décades toutes les argenteries, enivres, fer, plomb, etc., qui servent au fana¬ tisme, prendront le chemin de Paris, car nous espérons que le culte de la raison sera celui de toutes les communes de notre district. « Le Beau; Bünnin; Caera; L’Hermitte, secrétaire . » Proclamation des administrateurs du district de Montfort-le-Brutus, à leurs frères de ce district (1). Un voile épais avait caché la lumière qui devait éclairer une grande nation, mais enfin, le moment est arrivé oii ce voile déchiré laisse voir la véritable grandeur de l’homme libre, et les moyens qu’employaient les oppresseurs en faisant de lui l’objet de leur mépris comme le jouet de leur tyrannie. C’est à notre sublime révolution que nous devons ce contraste éton¬ nant qui fait le bonheur des Français, comme nous ne devrons sa conservation qu’à l’unité, à la fraternité et à l’entier dévouement que nous devons à la patrie. Sachez, frères et amis, que nos ennemis n’ont pas abandonné le projet de nous perdre, et que plus nos frères seront grands vers la rai¬ son, plus ils chercheront à nous corrompre. Que disons-nous, ces monstres oseraient-ils enoore paraître parmi nous pour y renouveler les horribles excès dont ils ne cessèrent d’être capables! non, frères et amis, le courage et la terreur (sic) d’un peuple séduit et trompé seront toujours des barrières insurmontables que les ennemis respecteront. Nous avons vu depuis notre révolution des hommes abandonner leur patrie pour aller se ranger sous les drapeaux des tyrans, qui veulent nous asservir et faire du sol sacré de la liberté un théâtre d’horreur, d’autres sont restés au milieu de nous pour favoriser les projets des premiers; mais tant de crimes ont été épargnés par le triomphe de la vérité et de l’innocence. Enfin, d’autres d nt la conduite hypocrite avait dirigé les volontés de l’homme crédule n’ont pas rougi de refuser de prêter le serment d’être fidèles à leur patrie dans l’espoir que cette crédulité viendrait à leur secours pour rentrer dans le superflu des biens usurpés dont ils jouissaient, et destinés à un usage plus louable. Ces monstres politiques trouveraient-ils encore des hommes assez criminels pour les plaindre et devenir leurs partisans et leurs destructeurs ! Non, il ne s’agit, pour ajouter à tant de forfaits, que de rappeler les horreurs que l’histoire nous a conservées sur la religion dont on nous endoc¬ trinait. C’est pour cette religion qu’en 1099, lors du siège de Jérusalem, dans la première croisade, 20,000 per onnes furent égorgées et que les vainqueurs, fatigués du carnage, en avaient horreur eux-mêmes. On n’a pas rougi d’avoir fait bâtir une église destinée au service divin au lieu où les victimes avaient été immolées. C’est pour cette religion qu’il périt dans la deuxième croisade, en 1145, 200,000 hommes. C’est pour cette religion que le tyran des Français, connu sous le nom\ de saint Louis, alla, en 1248 et 1269, jusqu’à Chypre et Tunis pour universaliser ses crimes en voulant sou¬ mettre ces villes à une domination inquisito¬ riale. C’est pour ce.tte religion qu’en 1572, le 24 août, le scélérat Charles IX ordonna un massacre horrible dans Paris, connu sous le nom de la Saint-Barthélemy, et qui dura sept jours. Ce tyran porta encore le crime jusqu’à faire passer cet ordre barbare dans différentes provinces et qui eut son exécution dans plu¬ sieurs villes; et pour couronner ces abomina¬ tions, le pape fit faire une procession pour remer¬ cier l’Etre suprême de ces crimes. C’est pour cette religion que la France, dans tous les temps, a été en proie aux guerres civiles les plus sanglantes. C’est pour cette religion que les tyrans ont banni d’honnêtes citoyens du territoire fran¬ çais. C’est pour cette religion enfin que la Vendée et les départements qui l’environnent sont rava¬ gés et en proie à toutes les horreurs. Ah ! frères et amis, vous en faut-il davantage, la nature n’est-elle pas outragée à un pareil récit. Pourriez-vous croire que l’Etre suprême, juste et bon, ait pris part à tant de crimes. Non, ces actions sanguinaires n’ont pu être exer¬ cées que par des hommes ambitieux qui vou¬ laient établir des ordres dans lesquels ils pussent se rendre maîtres des humains en leur interdi¬ sant jusqu’à la pensée. Les tortures que nous avons endurées jus¬ qu’au moment d’une révolution qui étonne l’univers, n’étaient que les effets des guerres faites au nom de la religion pour favoriser les tyrans. Les ministres de cette religion ne craignaient pas de s’arroger le droit exclusif d’avoir tous les vices, en vous disant : « Faites ce que nous vous disons, et non pas ce que nous faisons. » N’en doutez pas, frères et amis, c’est cette absurdité qui vous éloignait tant du bonheur. Ils nous prêchaient l’abstinence, la sobriété et ils vivaient dans l’intempérance. Ils nous prêchaient l'humilité et ne rougis¬ saient pas d’être orgueilleux, jusqu’à mécon¬ naître et même mépriser l’homme vertueux que la naissance avait condamné à la pau¬ vreté. Ils nous prêchaient la pauvreté et ils étaient dans l’abondance et dans une somptuosité qu’ils n’avaient acquises qu’en trahissant la crédulité et la bonté du peuple. Ils ont même porté l’impudence jusqu’à nous dire que leurs biens n’étaient pas de ce monde et personne plus qu’eux n’en avait en ce monde. Frères et amis, vous apercevrez dans ce con¬ traste qu’on nous trompait et que c’était moins un Dieu qui n’admet aucune différence dans les hommes qu’ils prêchaient, que la conservation de l’empire qu’ils avaient sur nous depuis tant de siècles et qui nous rendait esclaves. Arrivés à la raison, nous ne devons plus voir que la vérité en abjurant le mensonge et l’erreur. Des républicains ne doivent-ils pas être jaloux de se voir devancés par les belles actions, montrons-nous assez sages pour ne plus nous livrer à des préjugés qui pourraient détruire notre liberté et les jouissances les plus douces qu’un nouvel ordre social nous pré-(1) Archives nationales, carton C 294, dossier 978. [Convention nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. H" nivôse an il 55 I 21 décembre 1793 pare, par les intentions perfides de ceux qui les gouvernent. Que tous les Français n’aient plus qu’un culte, celui de la raison et de la vérité, La Con* vention nationale vient, par son décret du... brumaire, d’appliquer les fonds provenant des églises et presbytères des communes qui auraient renoncé au culte, à l’éducation publique et au soulagement de l’humanité souffrante. Quatorze cent mille livres au moins que produiraient ces ventes dans le district lui procureraient ces établissements. C’est à vous, pères et mères infortunés qui ne pouvez donner que l’être à vos enfants, de profiter du bienfait que la loi accorde ; une ins¬ truction publique que la Convention nationale s’occupe d’établir en ce moment, donnera à vos enfants ce que la misère vous contraignit de leur refuser. Vous mêmes, après avoir consacré vos jours aux travaux pénibles des champs, trouverez les hospices bienfaisants ouverts pour vous rece¬ voir ; là, vos maux seront adoucis et vous ne serez plus en proie à l’idée déchirante d’être privés des moyens d’exister, lorsque les forces vous abandonneront. Vous ne traînerez plus votre misère avec humilité aux injures des saisons, et votre existence ne dépendra plus de la com¬ passion de vos semblables. Le malheur sera res¬ pecté et la vieillesse et la vertu honorées. Ces actes d’humanité et de sensibilité, frères et amis, ne sont-ils pas préférables à tout ce qu’on peut exprimer? Déjà nous voyons avec une douce satisfaction les communes de Mont-fort-le-Brutus, des Mesnuls, Maurepas, Boin-ville, Goussonville, Elancourt, Trappes, Thoiry, Neauphle-la-Montagne, Bazoches, Beyne et Méré s’empresser d’apporter les fers, les cuivres et argenteries, ressources immenses qui ser¬ vaient au fanatisme et à la superstition et coo¬ pérer à ce bonheur en renonçant à un culte qu’ils ne conçoivent pas, pour ne suivre que celui de la raison. Ce n’est qu’en parlant le langage de la raison, de la vérité et des mœurs qu’on se fait entendre. Puissent tous nos frères imiter leur exemple, c’est, en abhorrant les préjugés et en ne recon¬ naissant que l’empire des vertus et des lois que nous nous rendrons dignes d’être républicains et frères. Pour expédition : Bonnin, vice-président; L’Hermitte, secrétaire. Les citoyens et citoyennes de Villefavard, dis¬ trict du Dorât, département de la Haute-Vienne, annoncent qu’étant, le 20 brumaire, réunis en assemblée générale, au nombre de 546, ils ont accepté de nouveau la Constitution. Ils jurent de n’oublier jamais les journées mémorables des 31 mai, lGr et 2 juin. Ils prient la Convention de leur permettre de démolir le château de l’ex-noble Pouthe-Deneuil, émigré. Mention honorable, insertion au « Bulletin » et renvoi au comité chargé de recueillir les pro¬ cès-verbaux de l’acceptation de la Constitu¬ tion (1). (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 4. Les administrateurs du district de Nantua annoncent qu’ils envoient au département l’ar¬ genterie des églises et des émigrés de leur dis¬ trict, pesant 91 marcs 5 onces 21 deniers Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1) . Suit la lettre des administrateurs du district de Nantua (2). Les administrateur du directoire du district de Nantua, au citoyen Président de la Conven¬ tion nationale , à Paris. « Nantua, le 23 frimaire de l’an II de la République française, une, indivisible et démocratique. « Nous t’envoyons extrait de l’arrêté que nous avons pris le 14 de ce mois, dans lequel sont détaillés les effets d’or et d’argent pro¬ venant des églises supprimées et des émigrés de ce district, pesant ensemble 91 marcs 5 onces 21 deniers. Nous faisons passer cette argenterie au département en deux caisses bien ficelées et cordées. « Fais part de cet envoi à la Convention nationale. « Salut et fraternité. « Jaulet; Beanchet; Vanel; B. Dblilia, président; Vuillakd, secrétaire. » Extrait du procès-verbal des séances du directoire du district de Nantua (3). Du quatorze frimaire, l’an deux de la Répu¬ blique française, une et indivisible. Vu le procès-verbal dressé par les citoyens Amand Reydellet et Honoré Revoux, anciens administrateurs, le 29 juillet 1791 (vieux style), contenant divers objets de vermeil et argent qui avaient été conservés pour le culte d’après la loi du 3 mars de la même année et déposés dans les mains du citoyen Laporte, curé; Vu celui d’inventaire dressé le 30 novembre 1792 par les citoyens François Vanel et Valen¬ tin Duport, administrateurs, duquel il résulte que différents effets de la même matière compris en l’article 53 se trouvent déposés au secréta¬ riat de ce district; Vu encore celui dressé le 10 juillet 1793 par les citoyens Étienne Blanchet, administrateur, Benoît Bertrand et Joseph Laporte, commis¬ saires nommés par arrêté de ce directoire du 27 mai précédent pour faire la distribution entre les différentes églises des ornements, linges, etc., autres que ceux réservés par la loi, duquel il résulte qu’il a été distrait et laissé dans une commode de la sacristie dë l’église paroissiale de Nantua, quatre chasubles com¬ plètes en étoffe de soie, travaillées en argent et en or avec des galons fins en or. Le directoire du district de Nantua, considé¬ rant qu’il est de l’intérêt de la chose publique de jeter au creuset des meubles dont l’usage ne (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 4. (2) Archives nationales, carton C 293, dossier 96j0. (3) Archives nationales, carton C 293, dossier 960.