g|J4 [Assemblée nationale.1] ARCHIVES P AKLEMEN T AIRES . [10 ■septembre 1791.] Art. 4. « ITédtrcatfon du prince futur 'doit avoir surtout pour objet de nourrir en hii 'tous les sentiments et toutes les idées de légalité, de lui en donner toutes les habitudes, et de n’offrir à ses regards que des images qui lui retracent celte égalité précieuse, l’attribut le plue respectable de la nature humaine. Elle doit aussi le pénétrer d’un respect religieux pour les lois, et lui rendre si familiers les principes qui leur serv' nt de base, que nun seulement il devienne leur plus zélé défenseur, mais leur juge le plus éclairé. Art. 5. « Aussitôt que le prince futur sera sorti de la première enfance, il suivra régulièrement les cours d’une école publique désignée par le Corps législatif. Là, traité sans aucune distinction , comme les enfants des autres citoyens, c’est d?eux-mêmes qu’il recevra les leçons les plus importantes, celles de la morale et de l’art de vivre avec b s hommes. «Quand ses premières éîudes'seront terminées et que des piogrés véritables le re-dront digne de figurer p rmi l’élite de la jeunesse française, il prendra place au milieu d'elle, nans le lycée national, où son éducation s’achèvera dans le même espace de temps, suivant les mêmes formalités et aux frais du public, comme celle des autres élèves. Art. 6. « Le chef du pouvoir exécutif ne pouvant plus abandonner son poste ni même quitter le centre, d’où la force que la Constitution met dans ses mains imprime le mouvement à toutes les parties de la machine politique, on profitera du temps où l’héritier présomptif de la couronne ne sera pas encore s-rti de la classe des sim [îles citoyens, pour le faire voyager avec fruit, soit dans le pays qu’il doit gouverner, soit dans les Etats voisins, sur lesquels il lui sera sans doute avantageux d’avoir des connaissances précses et dont la vue peut lui fournir d’utiles objets de comparaison. » ASSEMBLÉE NATIONALE PRÉSIDENCE DE M. VERNIER. Séance du samedi 10 septembre 1701, au soir (1). La séance est ouverte à six heures du soir. Un de MM. les secrétaires fait lecture d’une adresse de la société des amis de la Constitution de Phalsbourg, qui attestent à l’Assemblée nationale le patriotisme du 17e régiment d’infanterie, ci-devant Auvergne, qui certifient son entière soumision à la loi du 25 juillet dernier, et assurent en conséquence que ce régiment est prêt à recevoir ceux de ses officiers qu’il avait, par erreur, renvoyés, leur promettant l’obéissance qui leur est due. M. Emmery. Messieurs, vous avez porté une loi contre les délits militaires : je ne pense pas que vous deviez vous jmêler d’en arrêter l’exécution ; mais, comme les sentiments exprimés dams cette adresse paraissent rendre toute voie ide rigueur fort inutile, je demande le renvoi de l’adresse qui vient d’être lue au comité militaire. Il la communiquera sans doirte ainroiaistoe et par là vous préviendrez des mesures de rigueur que vous vous voyez tou jours avec regrdt forcés de prendre. ( Applaudissements .) (L’Assemblée ordonne le renvoi de 'l’adresse au comité militaire.) Le même secrétaire dorme lecture d*tme adresse des membres composant le tribunal de commerce à Amiens , qui, pleins de reconnaissance pour l’Assemblée nationale, prote-tent d’être ausd rigides observateurs de la Constitution, qu’ils en sero> t les fidèles gardiens dans toutes les circonstances. Un de MM. les secrétaires fait lecture d’une note du ministre de la justice ainsi conçue : « Le ministre de fa justice tr nsmet à M. le président de l’Assemblée nationale la note des décrets d’aliénation de domaines nationaux, sur les minutes desquels il a signé l’ordre dVxpédier et sceller, en vertu des décrets des 21 et 25; juin dernier, savoir : « Aux municipalités de Gontest, d’ici, Rouen-sur-Bernai, Rouen, SainbLo,, Yarennes, Melun, Brioude, Saint-Amand, Valenciennes, Auch, Gi-ziat, Orgelet, Yesoul, Rami erviller, Beaulieu» Bléziers, Bras, Cette-Froin, Gonfolens, Donjon, Ecuroles, Flassens, Libourne, Longues. Mariol» Moutier-d’Haun, Saint-Claude, Saint-Maurice-des-Lions, Sainte-Terre, Ventouze, Barrau, Bouzan-court, Fronvi le, Laffrey, Lesignan, Moretel, Saint-Martin-e-Miséré , Saint-Maur , Saint-Urbain , Touvet, Villardbourg et Lancey. »> « Signé : M.-L.-F. DüPORT. » Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance du vendre ai 9 ‘septembre au soir, qui est adopté. M. de lîoufflers, au nom du comité d'agriculture et de commerce , propose un article additionnel au titre 1er du décret adopté dans la séance d’hier au soir (1) et relatif aux récompenses nationales à accorder aux inventions et découvertes en tous genres d'industrie. Cet article, tendant à ce que te ministre de l’intérieur soit autorisé à distribuer des secours provisoires aux artistes indigents dont les travaux auraient obtenu l’approbation de l’Académie des sciences, est mis aux voix dans les termes suivants : Art. 13. « En attendant que TA-ssemblée nationale ait statué sur IVrgan'isation du bureau ne consultation des arts et métiers, elle autorise le ministre de l’intérieur à distribuer jusqu’à la ‘concurrence de la dixième partie des fonds affectés auxuiies récompenses, en secours provisoires» depuis lOOjusqn’à 3U0ii vres aux artistes indigents dont les travaux, constatés par les corps administratifs, auront obtenu des approbations authentiques ne l’Académie des sciences, et lesdits secours seront en déduction nés gratifications qui pouiraieùt être accordées à ces mêmes ar-(I) Cette séance est incomplète au Moniteur. (1) Voir ci-dessus, page 402. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. listes, strrTavis du bureau de consultation des ! -arts et métiers . » (Adopté.) i ‘One députation de la municipalité et des gardes nationales de Chasseley et autres paroisses du dé-yartement de Rhône-et-Loire , inculpée, dans l’affaire de la dame veuve Guillin, est introduite à la barre. Vorateur de la députation s’exprime ainsi : 'Messieurs, La 'majesté de ces lieux, la présence des pères de la patrie, la nature de mon sujet, la conscience de ma faiblesse, tout m’inspire une juste crainte. Il faut que le zèle de la justice ait sur mon âme 110 irrésistible empire pour que j’ose, malgré L force de ces considérations, élever la voix sous ces voûtes encore retentissantes des accen s douloureux d’une mère éplorée dont ma sensibilité partage les mille et une douleurs, mais dont mon devoir est de dévoiler les mille et une calomnies. Le sieur Gudiin a été tué par un peuple furieux ; après sa mort, son corps mis en pièces a été jeté au feu, sa maison a été incendiée, son mobilier est devenu la proie et des flammes et de quelques brigands; tel est, dégagé de toutes circonstances partiales, le fait qui a déterminé à nous députer vers l’Assemblée nationale. Ce fait révoltant, la dame Guillin i’a dénoncé au tribunal du distiict et de la campagne de Lyon : il ne lui a pas suffi de s’être ainsi pourvue légalement; elle a porté sa plainte dans le sanctuaire de la patrie qu’elle n’a pas craint de souiller par tout ce que le mensonge et la haine ont d’atroce et de sédui ant. Dans le tableau astucieux que cette dame a présenté, elle a, d’un côté, paré son époux des livrées du patriotisme, de la douceur et de la bienfaisance ; de l’autre, ceux qu’elle a voulu signaler d’être les auteurs de leffrajante catastrophe du 17 juillet, elle les a chargés de toute la scélératesse et même de l’anthropophagie; elle a peint le sieur Guillin bon époux, bon père, bon citoyen. Je ne scruterai point fa vie du sieur Guillin de Montet, comme mititaire, époux et père. Sous les deux derniers points de vue, si j’écoutais la voix du peuple, je ne serais peut-être point son apolo-giste. Décemment et politiquement la veuve devait à son époux un tribut d’éloges; et si le militaire méritait, non récompense mais punition, c’est à la perversité du ministère de son temps qu’il siérait d’adtesser ce reproche. Je laisse dune à part l’officier couvert de blessures, l’époux et le père pour n’occuper du soi-disant bon citoyen. Le sieur Guillin était, dit-on, .bon citoyen ; il respectait toutes tes autorités. Cependant cet homme s’était, armé en guerre, et certes ce n’était pas pour soutenir la première dis autorités, celle ae l’Assemblée nationale : on avait vu manier dans la cave de son château plusieurs petits canons, connus sous le nom ne gueulards , et? barils de poudre; il s?était muni de 2 grusses pièces d’artilleiie ; il avait pratiqué des Contre-murs. 11 était bon citoyen; il respectait toutes tes autorités. Cependant il tenait chez lui des assemblées de 60 à 80 pe'sounes suspectes; ceiendant il avait souffert que sa femme témoignât, par ses danses, la joie qu’il partageait avec elle de l’évasion du roi; cependant on l’avait ouï complaisamment dire, le jour même de la désertion du ‘premier fonctionnaire public : bon, le moment est venu où j’aurai le plaisir de me laver les mains €ans le sang des paysans. [10 septembre 1791 ] 555 Un membre : Ce n’est pas vrai. (Murmurer, ) Vorateur de la députa’lion... Xe sieur Guillin était, dit-on, bon citoyen ; il rompait avec les indigents, le pain qu’il recevait de l’Etat. Cependant cet homme tirait indistinctement sur les gens et sur les bestiaux qu'il trouvait sur ses terres; repei dant il avait exhumé tes cadavres encore fumants du cimetière de Polemieux, dont il stetait emparé, et les avait fait transporter dans ses fonds pour les bonifier. (Murmures.) M. le 'Président. L’orateur voudra bien se renfermer dans les bornes les plus étroites de son affaire. M. Orastenay. Il est un fait; c’est qu’il a été assassiné. Pourquoi nous vient-on faire l’apologie de cet assassinat? Vorateur de la députation... Gependant le sieur Guillin tolérait que son épouse refusât de vendre les blés vieux, sous l’alarmant prétexte que le feu né tarderait pas à brûler les récoltes ; cependant on a trouvé chez lui 80 petits sacs remplis d’étoupes et de soufre, qui ne pouvaient, ce me semble, servir qu’à incendier les habitations voisines et les blés d’alentour. (Murmures.) Voilà, Mes-ieurs, l’honnête, le parfait citoyen, soumis à toutes les autorités, 1e sensible et généreux patriote, le vertueux Guillin dont la charitable épouse a livré les membres à la canniba-listie de 30 paroisses! Décorer 1e sieur Guillin. des couleurs ou civisme et ne la générosité, son épouse de l’héroïsme conjugale et maternelle; faire contraster la débilité de la vieillesse, tes larmes de la jeunesse et de la beauté avec ‘la force et la fureur de la multitude, transformer cette multitude en une horde de cannibales que rien ne fléchit lors même qu’on lui cède ce qu’elle exige, lorsqu’elle n’a lieu de se plaindre d’aucune injure, achever la peinture par un repas de chair humaine, c’était là le coup de maîtru, c’est l’œuvre du méchant adroit qui tâche de couronner 1e crime du triomphe. Deux intérêts divers mais coalisés ont concerté l’exposé fabuleux de la mort du sieur Guillin de Montet, de l’incendie et du pillage de sa maison : la dume Guillin avait en vue une pension qui lui échappait : le génie officieux qui, pour elle, a tenu le pinceau, a fait, en habite ennemi de la Constitution, son profit de l’heureuse occurrence : services rendus à la patrie, vertus publiques et privées, charité, bienfaisance, borné, douceur, patriotisme, vous a-t-il fait dire, tout honorait le sieur Guillin : et 3Ü paroisses coalisées l'ont coupé par lambeaux, et ses membres déchirés, elles les ont engloutis dans un horrible repas : voyez d’après cela l’excès des calomnies des persécuteurs de la dame Guillin ; voyez à quelle espèce vous avez conlié tes intérêts du peuple, à des anthropophages à des mangeurs de corps humaine Quelle liberté, juste ciel I Hâtez-vo is ae r< nchaîner le peuple français, hât» z-vous de res susciter le despotisme, car mieux vaut porterie joug que de servir de pâture à des bêtes féroces. Oui, tel a été 1e but du récit mensonger dont on a affligé vos cœurs paternels : on a voulu, tout en surprenant un sacrifice à votre compassion, vous inspirer le regret de nous avoir traités en citoyens dignes de ta liberté. Je me regarde donc dans la conscience non seulement comme le vendeur de nos commettants, n ais en quelque sorte comme celui de notre sainte Constitution