442 [Étals gén. 1789. Cahiers.] . ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d'Aix.) perpétuelle; que tous magistrats et autres officiers attachés au fisc soient exclus desdits Etats; que la procure du pays soit désunied’avec le consulat de la ville d’Aix. Que les comptes de la province soient annuellement imprimés et envoyés dans chaque communauté. Que dorénavant la Provence députe aux Etats généraux et dresse ses cahiers de doléances dans les Etats de la province assemblés régulièrement et constitutionnellement, ou que chaque ordre, assemblé auxdits Etats, dresse ses cahiers, et députe particulièrement, dans des chambres séparées, suivant la réserve que Sa Majesté a faite, par son règlement du 2 mars 1789, des droits de la Provence, ou une nouvelle forme de convocation et déclaration aux assemblées d’Etats généraux qui suivront ceux de 1789. Art. 30 Enfin, déclarant au surplus, ladite assemblée, que, quant à tous autres objets, soit généraux pour le royaume, soit particuliers à cette province, elle se"réfère au cahier général qui sera dressé dans l’assemblée de la sénéchaussée d’Aix, soit en corps, et à ceux des autres sénéchaussées de la province, en tout ce qui ne choquera pas formellement, mais améliorera évidemment les articles les plus importants ci-dessus énoncés, approuvant, dès à présent, tout ce qui sera fait et arrêté ; et ainsi que dessus a été délibéré ; et ont signé tous les habitants sachant écrire. Signé Vera, maire-consul ; Boy ; D. Laforest ; lmbard ; Roman ; Gaston ; Gros ; Roux ; lmbard ; Aron ; Roux ; Palissier, fermier; Reyre ; Mille ; Raymond. Collationné par nous, greffier de la communauté de ce lieu de Vernègues. Signé Tertian, greffier; Laforest, viguier, lieutenant de juge. CAHIER Des plaintes et doléances de la communauté de Villeneuve-Coutelas (1). Les maire et consuls de la communauté de Villeneuve-Coutelas, pour satisfaire aux ordres de Sa Majesté, se sont occupés du cahier de doléances, qui doit être joint à ceux de la sénéchaussée, pour être le tout rédigé en un seul, et présenté à l’assemblée des Etats généraux. Conformément aux voeux des habitants de cette communauté, il sera très-respectueusement remontré: Art. 1er. Que, ne reconnaissant en France pour maître que le Roi, ce monarque bienfaisant, la justice ne doit être rendue qu’en son nom, et, par ce moyen, les abus qui se glissent dans l'administration de la justice des juridictions subalternes, et qui font la désolation des peuples, seront arrêtés. On peut exposer, sans craindre de blesser la vérité, qu’on ne trouve, dans la plupart des justices seigneuriales, qu’injustices , vexations, jugements iniques, rendus souvent par des individus ignorants, vendus à la créature du fief, et qu’un négociant ou ménager, tout honnête homme enfin qui ne joue pas, auprès des seigneurs, le vil personnage de courtisan, ne trouve plus de justice pour ses affaires; alors l’officier est suspect, celui qui le remplace est absent, il faut aborder, par force, la forteresse pour avoir une subrogation, et Monsieur n’est (1) Nous publions ce cahier -d’après un manuscrit des Archives de l'Empire jamais visible; le négociant se dégoûte, préfère perdre sa créance , abandonne son commerce, sa famille en souffre, et l’Etat, par une suite nécessaire, en diminue. Art. 2. Que la juridiction seigneuriale supprimée, les lods et demi-lods qui ont été donnés pour subvenir aux frais de la justice doivent l’être aussi ; ce droit estaccablant pour les tiers, et notamment pour le pauvre, qui, dans une mauvaise récolte, ou lui ayant été enlevée par le gibier, ne pouvant subvenir au payement des impôts et à la nourriture de sa famille, est obligé de vendre son bien pour satisfaire ses créanciers ; n’est-il pas criant, et de la plus grande injustice, que, pour se libérer, il soit forcé de donner au fief le sixième de son bien; on dit sixième, parce que la plupart des seigneurs ont su, par leur puissance et par leurs menaces, se l’adjuger à ce taux. Art. 3. Que le gibier nous cause des maux dans tous les terroirs des fiefs de Provence qui sont inappréciables ; que non-seulement ils ravagent toutes les productions, dévastent tous les champs, mais encore détruisent toutes les complantations en vignes et oliviers, et nous ravissent les moyens de satisfaire aux charges de la province. Tous ces maux louchent encore de plus près le pauvre qui, n’ayant point ou presque point de fonds, est obligé de porter ses travaux dans des défrichements, aux terres éloignées, et là où il trouverait sa subsistance et celle de sa famille, à peine trouve-t-il la semence; le cultivateur se décourage, laisse les terres incultes, et va chercher sa vie dans le pays étranger. Tous les habitants, pleinement convaincus des vues bienfaisantes de Sa Majesté, attendent avec impatience la réforme de ces abus si criants et universels, en donnant droit de chasse à tout honnête homme pour délivrer les communautés du fléau le plus accablant, unique ressource pour redonner la vie aux pauvres. Art. 4. Que les droits de reconnaissance que les seigneurs forcent les communautés d’abonner pour de l’argent, ce qu’ils ne peuvent faire ni en conscience ni en justice, seront également abolis et anéantis, ne voulant reconnaître d’autre maître que notre souverain. Art. 5. Que tous les droits seigneuriaux quelconques qui tiennent les pauvres habitants de la campagne dans l’oppression et dans la servitude, et qui les exposent à tant de vexations, seront également abolis. Art. 6. Que toute banalité quelconque sera supprimée. Art. 7. Que les pensions féodales, taxes, censes et autres charges de pareil Je nature, seront ra-chetables à prix d’argent. Art. 8. Que MM. les députés aux Etats généraux porteront au pied du trône l’état de détresse dans lequel les malheureux habitants des villages se trouvent, par les impositions et charges auxquelles ils sont soumis, desquelles ils donneront à Sa Majesté une connaissance parfaite qui consiste : 1° En droits seigneuriaux, qui sont d’ordinaire: droit d’habitation ou bouages, qui est de deux ou trois panaux blé, ou seigle, ou avoine, pour chaque chef de famille ; droit d’albergue , puits et forge , etc. 2° Taxes qui est une espèce de dîme qui se paye jusqu’au dernier grain, à cause que les seigneurs sont plus craints que les ecclésiastiques. 3° Droits de lods exigibles jusque sur un tronc de bois, ne valant pas quelquefois 30 sous. 4° Demi-lods �payable, de dix en dix ans, sur [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d’Aix. J 443 tous les fonds de la communauté, maisons curiales, forges, hôtel de ville, propriétés. 5° Pensions féodales, plus ou moins grandes, banalités de fours, moulins, pressoirs, services en argent, obligation de travailler pour les possédant fiefs, en plusieurs en droits; de ce dernier article, que de vexations n’en résulte-t-il pas ! Combien de pauvres fiabilants couchés dans leurs misérables chaumières, ou occupés à des objets essentiels, tels que la moisson, n’ont-ils pas été forcés de les abandonner pour des travaux de fantaisie des seigneurs? 6° Dîmes ecclésiastiques, contre lesquelles le royaume entier réclame et demande la suppression. 7° Droits de paroisse, casuel, charges particulières des communautés, entretien des maisons curiales, logement des secondaires, églises, clochers et autres bâtiments généraux dont les seigneurs ne payent rien, même à raison de leurs biens roturiers ; payement pour droit de publication des bans de mariage, baptêmes, sépultures, deniers royaux, imposition du sel; les charges effrayantes de la province pour tant de chemins, et autres ouvrages accordés à la seule faveur. Tels sont les objets qui nous oppriment. Que reste-t-il, après cela, aux pauvres habitants des campagnes? Il est temps que l’on soit plus juste et plus raisonnable; on doit songer à leur soulagement; que la tyrannie enfin ait son terme, et qu’elle ne devienne pas la cause de sanglantes tragédies. MM. les députés aux Etats généraux sont priés de porter au pied du trône les doléances du pauvre peuple; il implore leur secours; le monarque bienfaisant les y invite, la justice, l’équité et leur état l’exigent. La présente assemblée a arrêté que, quant aux objets qui intéressent la généralité du royaume, les sieurs députés que le tiers-état aura élus pour assister et voter aux Etats généraux, seront expressément chargés d’y solliciter la suppression de tous les tribunaux inutiles et onéreux, une attribution à ceux d'un arrondissement de souveraineté jusqu’au concurrent d’une somme détrr-terminée, et l’abrogation de toute lettre attentatoire à la liberté du citoyen, et faculté à tout individu quelconque de concourir à tous les emplois militaires, bénéfices et charges attributives de noblesse. 11 est inouï que le tiers-état étant la source des lumières où la noblesse et le clergé, en général, puisent les premiers principes de toute connaissance, soit privé de fournir au Roi, à l’Eglise et à la magistrature, tant de braves gens de mérite, que la nation c’est-à-dire le tiers-état, fournit. D’y réclamer sur tant de vénalité d’offices; que les charges quelconques de la magistrature ne seront données qu’à vie et au mérite, dans une assemblée générale de chaque province; que le tiers 11e pourra être jugé que par ses pairs; d’y réclamer, en outre, l’abolition de tout droit de circulation dans l’intérieur du royaume, et notamment le reculement des bureaux de traites sur les frontières. Les députés, au nom de la communauté, chargeront MM. les députés aux Etats généraux de dénoncer au Roi et à toute la nation française les protestations des possédants fiefs provençaux, soit celle du 21 janvier prise contre le rapport au Roi, par M. le directeur général, ce brave ministre, ange tutélaire de la nation, et toutes les autres protestations qui portent directement contre le vœu du monarque, et celui des communes de France. Quant aux affaires particulières de la province, Rassemblée charge exprès les représentants en Rassemblée de la ville d’Aix, de demander au meilleur des rois la convocation générale des trois ordres de la province pour former la constitution du pays. Qu’il soit permis aux communes de se nommer un syndic avec entrée aux Etats, de s’élever contre la perpétuité de la présidence, et contre la permanence de tout membre inamovible, ayant, en l’état des choses, entrée auxdits Etats; de requérir l’exclusion, aux mêmes Etats, du magistrat et de tout officier attaché au fisc, comme aussi de réquérir la désunion de la procure du pays du consulat d’Aix, l’admission du gentilhomme, non possédant fief, et du clergé du second ordre, l’égalité des voix pour l’ordre du tiers contre celles des deux premiers ordres, tant dans les Etats que dans la commission intermédiaire, et surtout l’égalité de contribution pour toutes les charges royales et locales, sans exception d’aucuns, et nonobstant toute possession ou privilège quelconque. L’impression annuelle des comptes de la province, dont envoi sera fait à chaque communauté; que la répartition des secours que le Roi accorde au pays, ensemble de l’imposition de 15 livres par feu, affectée à la haute Provence, sera faite dans le sein des Etats. Que les Etats provinciaux seront chargés de nommer des commissaires, de l’ordre du tiers, pour visiter les titres des communautés pauvres et vexées, et de porter au pied du trône les oppressions des malheureux ; que les mêmes Etats seront chargés de soutenir les procès que les possédants fiefs ont la cruauté de leur intenter, après en avoir fait examiner les motifs ; comme enfin d’établir que les communautés seront obligées de soutenir les procès que lesdits possédants fiefs pourront intenter aux habitants en particulier, après le même examen que dessus. Déclarant, au surplus, Rassemblée, que, quautà tous autres objets, soit généraux pour leroyaume, soit paiticuliers à cette province, elle s’en réfère au cahier de doléances qui sera dressé d’après le vœu de la prochaine assemblée, soit encore à celui que l’ordre du tiers déterminera, lors de sa réunion pour l’élection de ses députés aux Etats généraux; approuvant, dès à présent, tout ce qui sera arrêté dans Rassemblée qui sera tenue en la ville d’Aix, le 2 du mois d’avril prochain. Ainsi que dessus, il a été délibéré, et les habitants n’ayant point signé, àcause qu’ils sont illettrés, à Regane, dans l’hôtel de ville, le 22 mars 1789. Signé Jean, lieutenant de juge; Joseph Jean, député ; J. -P. Jean, député. CAHIER Des doléances , plaintes et remontrances de la communauté de ce Heu de Vinon , viguerie de Barjols, sénéchaussée d'Aix en Provence , r édigé par nous, maire et consuls, habitants et chefs de famille de ladite communauté , assemblés ce 15 mars 1789, en conformité des lettres du Roi pour la convocation des Etats généraux du royaume, dont la tenue est fixée au 27 avril prochain (1). Le Roi nous donne la liberté de nous plaindre; (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire.