70 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [31 juillet 1191.1 lesquels ces derniers ont formé leurs établissements provisoires. Art. 2. « La base du loyer sera, pour le passé, fixée selon la valeur locative, et pour l’avenir au denier 25 de la valeur estimative des lieux où les corps administratifs et judiciaires tiennent leurs séances, et le montant en sera payé par les ad-* ministrés et justiciables, à partir de la date du délai fixé par le décret du 7 février dernier, qui sera au surplus exécuté en tout son contenu. Art. 3. « Les corps administratifs sont responsables, en leurs propres et privés noms, de l exécution du présent décret, et comme tels tenus de toutes les indemnités envers la nation, et en conséquence obligés d’en payer le montant aux receveurs des domaines nationaux, et à tous autres qu’il appartiendra, sans en pouvoir rien réclamer contre les administrés et justiciables. » (Ce décret est adopté.) M. Fréteau-Saint-«J ust , au nom du comité diplomatique, Messieurs, ce n’est pas pour répandre de vaines terreurs que je demande la parole ; mais il est juste que la nation qui, dans ce moment-ci, est obligée de veiller elle-même à l’exécution de toutes les mesures de sûreté qu’elle a prises, sache au vrai dans quelle position elle est, et ce qu’il peut y avoir à craindre du côté des puissances étrangères. Le comité diplomatique m’a chargé de vous lire une dépêche de Ra-tisbonne, et de l’authenticité de laquelle on ne peut pas douter, car elle est officiellement dans nos mains. Cette dépêche est du 21 juillet et est ainsi conçue : « Le collège électoral et le collège des princes se sont rapprochés, et il a résulté de leurs principes fondus ensemble, une sorte de conclusion préparatoire, par lequel les ministres impériaux ont été requis d’envoyer un commissaire à l’empereur, avec prière d’aider la diète de ses conseils, et d’ordonner l’armement des cercles dans le plus court délai. « L’incident qu’on n’avait pas prévu, et qui a paru nécessiter une forme différente de celle qu’on s’était d’abord proposé, ne retardera la disposition finale que le temps indispensable pour recevoir de nouveaux ordres. Tout est disposé pour les revêtir du caractère d’avis de l’Empire. > Nous avons aussi d’autres avis que je ne crois pas devoir vous communiquer, parce que nous ne les avons pas d’une manière officielle, mais qui mettent la nation dans la nécessité de s'armer sérieusement et effectivement sur plusieurs de ses frontières. Je demande donc, Monsieur le Président, que l’Assemblée veuille bien décréter que le ministre de la guerre et le ministre de l’intérieur seront tenus de venir de jour à autre, c’est-à-dire au moins de deux jours l’un, rendre compte à l’Assemblée de l’exécution des décrets qu’elle a portés pour la sûreté du royaume, pour ! organisation de l’armée et sa prompte activité, pour le rassemblement des gardes nationales; et a cet égard, Messieurs, il est nécessaire qne vous sachiez que, faute d’accord et d’entendement entre les différents exécuteurs de vos ordres, il y a beaucoup de mesures qui s’exécutent d’une manière inexacte, partielle, incompatible. Par exemple, pour vous citer quelque chose que toute l’Assemblée sentira, et dont les départements doivent être également frappés, il a été ordonné par l’Assemblée que 97,000 gardes nationales se mettraient en mouvement. Vous avez dû croire que le camp de gardes nationales qui est actuellement dans la plaine de Grenelle, et que beaucoup de citoyens s’étonnent d’y voir encore en bon ordre au milieu de toutes les tentatives et de tous les pièges, vous avez cru, dis-je, que ce camp ne serait là que peu de jours, qu’il y avait été mis en vertu d’ordres certains. J’ai demandé hier encore à minuit à M. Duportail si c’était de son ordre que le camp était fermé, s’il savait quand les troupes qui l’occupaient sortiraient; s’il savait quand s’établirait le cordon que vous avez voulu former entre Paris et les frontières, et le point de rassemblement sur la Meuse. Il m’a répondu, comme U a déjà fait plusieurs fois : Je ne sais pas. (Murmures.) Un membre : Qu’est-ce que c’est que ce ministre-là? M. Fréteau-Saïnt-Jnsl, rapporteur. J’ai demandé à M. le commandant de la garde nationale parisienne si c’était de sou ordre que ce camp était formé; il m’a répondu devant tous les ministres et bien précisément, non. J’ai demandé de quelle autorité il existait un rassemblement ainsi formé à la porte de Paris et dans une position qui, certainement, n’est pas favorable au système d’instruction, de développement et d’énergie que vous voulez entretenir. Il paraît que ce rassemblement est prématuré et provoqué par le département de Paris, certainement dans les meilleures vues, mais enfin sans concert avec le commandant de la garde nationale de Paris, sans concert avec les ministres chargés de l’exécution de vos décrets militaires. (Murmures.) J’ai poussé plus loin mes questions, comme je le devais, et j’ai demandé au ministre de la guerre s’il était aussi mal informé de ce qui concernait le rassemblement de la garde nationale dans les départements. Il m’a répondu que cela était vrai et trop vrai, et qu’il ignorait absolument où en était cette mesure. (Murmures.) En entendant ce récit, yous vous étonnez sans doute, et j’en ai été étonné moi-même de voir qu’il existe aussi peu de rapprochements, aussi peu de relations et d’harmonie entre les administrations de départements et le ministère; de voir que le ministre de la guerre, à qui appartient la défense du royaume, ne soit pas instruit de ce qui se passe dans les départements, en exécution de vos décrets et des ordres qu’il doit avoir donnés. Rien de plus affligeant que cette incurie, que cette dissonance et cette divergence de mesures. Je propose que les ministres soient tenus de venir régulièrement tous les jours (Murmures.), ou tous les deux jours à une heure fixe, à deux heures par exemple, pour rendre compte de ce qu’ils saveDt de l’exécution de vos décrets, même pour vous informer de la partie des nouvelles du dehors qui doit être communiquée officiellement à l’Assemblée, car il y a beaucoup de décrets dont l’exécution est arriérée. Il ne faut pas que nous ignorions, par exemple, dans un moment où le salut de l’Etat repose uniquement sur le rétablissement delà discipline militaire, la lenteur que l’on met dans la nomination des chefs de corps. Il y a, et c’est le chiffre le plus modéré, il vasoixante colonels ànom-mer; le nombre des lieqtenauts-colonels est beaucoup plus grand; il y a deux régiments où le [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. (M juillet 1791.1 71 commandement est entre les mains des sous-of-ficiers, car dans ces régiments il n’y a pas actuellement un seul officier. {Murmures.) On a dit à côté de moi que ce récit est exagéré ; j’atteste la bonne foi et la probité de ceux des membres du comité militaire qui en sont convenus avant-hier et hier avec moi; j’atteste les déclarations de plusieurs bons citoyens qui, ayant parcouru les départements, ont rapporté que l’indiscipline de plusieurs garnisons n’existe que parce que le ressort de la discipline manque parce qu’il n’y a point de chefs. (Murmures.) On peut s’étourdir sur les suites de cet état de choses, mais vous avez chargé les ministres et vos comités militaire et diplomatique de remplir auprès de vous, dans cette partie, les fonctions de la royauté, et nous sommes spécialement chargés de veiller à l’exécution des lois. Dans un moment où, s’il n’y a pas de véritable danger, il y a au moins des dispositions hostiles à craindre et à repousser, c’est à nous à provoquer votre attention sur ces détails. Je demande donc, Monsieur le President, qu’on veuille bien mettre aux voix et décréter la motion que j’ai faite sur la venue périodique des ministres dans l’Assemblée, pour rendre les comptes nécessaires. Je vous déclare que ce n’est point de mon chef que je vous fais cette proposition. Le comité diplomatique croirait manquer au premier de ses devoirs s’il ne vous avertissait pas ; et c’est en son nom que je vous parle. M. de Broglie. Je suis éloigné de m’opposer à la proposition de M. Fréteau, qui me paraît convenable dans les circonstances et avantageuse sous tous les rapports ; mais je crois devoir rendre compte à l’Assemblée de quelques faits qui répondront à M. Fréteau. Il a parlé de la multiplicité des régiments qui se trouvent sans officiers supérieurs. Le fait est vrai, mais dans ce moment on s’occupe à y nommer. (Murmures.) Cette nomination a dû être précédée par un rapport du comité militaire que fera demain M. Emmery, tendant à indiquer la forme du remplacement de tous les officiers dont les emplois sont vacants dans l’armée, car il serait trop long d’y appliquer la forme ordinaire du concours. J’ajoute, Messieurs, que pour le moment actuel, les mesures qui ont été ordonnées par l’Assemblée sont exécutées, au moins en partie. La commission du génie et de l’artillerie chargée de veiller à la défense des frontières et de faire faire les ouvrages nécessaires, est choisie, et M. Luckner est appelé par le ministre pour commander en chef dans les départements de Franche-Comté et d’Alsace. (Applaudissements.) M. de Rocham-beau ayant demandé à faire relever les camps retranchés entre Maubeuge et Givet, les ordres sont donnés pour cela, et les fonds sont expédiés. Quant à la levée des gardes nationales et à la correspondance nécessaire qui doit exister à ce sujet entre le ministre de la guerre et les administrations de département, le silence de votre décret a arrêté le ministre. Depuis longtemps l’Assemblée a senti, et le ministre a senti lui-même, l’inconvénient de mettre en général, sans explication ni réserve, les gardes nationales du royaume dans les mains du ipouvoir exécutif. Il faut donc que cette levée s’opère par le concours des départements et en vertu d’un décret du Corps législatif; il faut ensuite qu’un ordre du ministre indique remplacement et les chefs militaires qui devront les commander. Voilà le point où nous en sommes : les départements ont dû nommer des commissaires pour effectuer la levée des 300,000 hommes dernièrement ordonnée, et subsidiairement la levée de 97,000 hommes décrétée sur le rapport de M. de Lameth ; mais je ne crains pas de vous dire, Messieurs, que malgré le zèle que les départements apporteront dans leurs opérations, il y aura toujours de petites difficultés locales d’exécution. Je ne m’étends pas sur les moyens que l’Assemblée nationale doit prendre en cette circonstance; mais j’ai l’honneur de l’assurer que si, particulièrement dans les départements et frontières du Nord, depuis Dunkerque jusqu’à Belfort, il n’est pas pris par elle de mesures immédiates, si elle ne donne à des commissaires spéciaux les pouvoirs nécessaires pour lever sur le-champ ces difficultés locales, de manière qu’ils soient, en quelque sorte, responsables devant l’Assemblée de la promptitude avec laquelle on enrôlera les gardes nationales, et de leur emplacement dans des eudroits convenablement choisis, cette mesure souffrira beaucoup de retard. Si la correspondance avec le ministre est nécessaire, s’il faut lui écrire pour prendre une décision sur chaque point, sur chaque incident secondaire, j’ose prédire à l’Assemblée qu’il est impossible que ses derniers décrets s’exécutent avec la célérité désirable. M. Fréteau-Saint-Just. Je prends acte de ce que vient de dire M. de Broglie relativement à M. de Rochambeau. Hier, je communiquai au ministre de la guerre des procès-verbaux de divers districts voisins de Maubeuge, par lesquels il est constaté qu’ils ne savaient pas s’il y avait un commandant sur cette frontière. Le3 différends, qui naissent à tout moment du voisinage des troupes autrichiennes et des nôtres, seraient réglés par quelqu’un, et il ne serait pas nécessaire qu’un membre du comité diplomatique, que cela ne devrait pas regarder, remît au ministre de la guerre, au bout de 8 jours, des pièces que ce ministre a déclaré hier, dans l’assemblée des ministres, ne pas connaître. Je demande donc que l’Assemblée décrète ma motion comme indispensable pour l’éclaircissement de ce fait, et de beaucoup d’autres très intéressants. M. Rewbell. Pour vous prouver que ripn n’est plus urgent que d’avoir toujours l’œil ouvert sur nos frontières, et surtout du côté de la Suisse, je vous rappellerai le décret par lequel vousavèz ordonné l’envoi d’un commissaire pour se concerter avec le prince-évêque de Bâle. Eh bien ! Messieurs, le ministre ne veut envoyer personne. Il a même dit que depuis la suspension du pouvoir royal, le prince-évêque de Bâle ne reconnaîtrait pas le caractère d’un envoyé qui n’aurait de pouvoirs que de la part du ministre ou de l’Assemblée nationale. Il est donc clair que vous rendez des décrets, et que les ministres ne trouvent pas les moyens de les faire exécuter. Cependant j’assure que cette exécution est très facile : on n’a qu’à la faire appuyer par le général Luckner, et je donne ma parole d’honneur que tout ira bien. M. d’André. En appuyant la proposition de M. Fréteau, et en demandant, par amendement, que les ministres soient invités aujourd’hui même, j’ajouterai qu’il faut encore prendre une autre précaution : elle est relative a ce qu’a dit M. de Broglie. Il n’y afpas un mouvement assez