[Convention nationale.] AttCHIVKS PARLEMENTA1HKS. 2 nivôse an II 22 décembre 1793 128 ville; je vous assurais que les dix -neuf vingtième des citoyens en étaient consternés. Cet hom¬ mage que je rendais aux habitants d’Amiens, auxquels j’en dois un nouveau, leur a été rendu aujourd’hui par quatre de mes collègues, Vidalin, Bollet, Fremanger et Garnier, qui se trouvaient ici. Ils ont assisté à une fête donnée par tous les citoyens d’Amiens pour la planta¬ tion d’un nouvel arbre. Cette fête, faite le jour de la décade, fut célébrée au milieu des épan¬ chements de la fraternité; la cérémonie commen-mença par la translation à la commune du tronc de l’arbre qu’on avait eu la scélératesse de cou¬ per, ce tronc était couvert d’un drap noir; 9,000 hommes sous les armes et une musique de deuil accompagnaient le cortège. Arrivé à la commune on y déposa les restes de l’arbre et on en sortit un autre orné des couleurs nationales avec cette inscription : Les citoyens d’Amiens me défendront 'jusqu’à la mort. « Une musique triomphante changea tout à coup la scène, et les airs retentirent des cris mille fois répétés de : Vive la Convention ! Vive la Montagne! Des chansons patriotiques furent chantées jusqu’à ce que l’on fût parvenu au temple de la Raison où on planta le nouvel arbre; la Société populaire et les citoyens de la garde nationale vinrent inviter mes collègues et moi à jeter les premiers de la terre sur les racines de l’arbre. On entra ensuite dans le temple où l’on jura généralement haine aux tyrans, aux intrigants et aux fanatiques, on reconnut pour divinité la liberté, pour son autel la patrie, pour sa doctrine l’égalité et la frater¬ nité, pour ses commandements la défense de la patrie, le maintien des lois, le respect des personnes, des propriétés et le soulagement des pauvres et pour résultat la République une et indivisible. Voilà les sentiments de presque tous les citoyens d’Amiens. Le crime horrible commis en cette ville aura pu laisser une idée défavorable; mes collègues, qui signeront cette lettre, s’unissent à moi pour justifier, aux yeux de la République entière, les habitants de cette commune. « Vidalin; Bollet; Gaeniee (de la Meuse); Feemangee; Dumont. » Les représentants du peuple près les armées de l’Ouest et des Côtes de Brest rendent compte de la suite de leurs opérations depuis la victoire du Mans, et des mesures qu’ils prennent pour achever de faire tomber bientôt les restes des bri¬ gands de la Vendée sous les coups de la vengeance nationale. Insertion au « Bulletin » (1). Suit la lettre des représentants du peuple près es armées de l’Ouest et des Côtes de l’Ouest (2). Les représentants du peuple près les armées réunies de l’Ouest et des Côtes de Brest, au comité de Salut public de la Convention nationale. (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 29. (2) Archives du ministère de la guerre, armée de « Châteaubriant, le 29 frimaire, l’an II de la République française, une et indivi¬ sible. « Citoyens collègues, « Depuis notre départ de Laval, nous n’avons cessé de poursuivre les brigands, qui ont dirigé leur marche sur Ancenis pour y tenter le passage de la Loire. Les mauvais chemins, la pluie, le défaut de souliers, rien n’a arrêté nos brèves soldats. Déjà nous étions arrivés hier à Saint-Jullien (Saint-Julien de Vouvantes), distant d’ Ancenis d’une journée; chacun se félicitait de trouver le lendemain l’occasion de jeter les brigands dans la Loire, quand nous avons appris qu’ils avaient quitté ce poste pour se rendre à Nort. La partie de l’armée qui était en avant est retournée ce matin avec nous à Châteaubriant, pour être à portée de tomber de plus près sur les ennemis. Nous aurions bien désiré pouvoir vous donner des renseignements précis sur ce qui s’est passé à Ancenis, mais les rapports qui nous sont par¬ venus jusqu’à présent sont trop incertains pour pouvoir vous donner une idée positive de la tentative qu’ont faite les ennemis pour franchir la Loire. Les brigands, qui attachaient un grand prix à ce passage, l’ont essayé en fabriquant, avec des tonneaux, des barriques et des planches, des radeaux qui devaient les transporter sur l’autre rive; suivant les uns, ces radeaux ont été en¬ gloutis par le courant du fleuve, et les brigands qui les montaient ont été noyés; suivant les autres, un grand nombre d’entre eux ont passé, mais ont été accueillis à l’autre rive par nos troupes qui les ont fusillés et canonnés; suivant d’autres encore, une chaloupe canonnière les a attaqués au passage. Ce qu’il y a de certain, c’est que les brigands, pressés par notre cavale¬ rie et notre artillerie légère, ont abandonné cette entreprise et se sont portés sur Nort, où il n’y avait que 100 hommes qui n’ont osé sou¬ tenir l’attaque. Il paraît aujourd’hui qu’ils veulent se porter sur Redon pour se jeter dans le Morbihan. Nous apprenons de Rossignol, qu’il a fait partir des troupes pour garder ce poste, et l’ar¬ mée entière part demain matin pour les suivre. S’ils peuvent rencontrer sur leur route un obsta¬ cle qui les arrête un jour, c’en est fait d’eux. La victoire du Mans est complète et les brigands ne sont plus. On a entendu aujourd’hui une forte canonnade du côté de Nort : c’était notre avant garde qui était aux prises avec eux. Nous apprenons ce soir que le Morbihan est disposé à les exterminer, et nous espérons que notre dernière proclamation produira l’effet que nous devons en attendre. Nos soldats sont on ne peut mieux disposés et nous ne pouvons que compter sur de nouveaux succès. « L. Tukeeau; Peieue (de la Marne). « P. N. Nous apprenons par une lettre de lOuesl, carton 5/5. Bulletin de la Convention du 2e jour de la lre décade du 4e mois de l’an II (dimanche 22 décembre 1793). Moniteur universel [n° 93 du 3 nivôse an II (lundi 23 décembre 1793), p. 376, col. 1). Journal des Débals el des Décrets (nivôse an II, n° 460, p. 22). Aulard : Recueil des actes el de la correspondance du comité de Salut public, t. 9, p. 530. [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. J d/eembre " Francastel que le procureur général du dépar¬ tement de Mayenne-et-Loire s’est transporté auprès de vous pour retarder ou modifier l’exé¬ cution d’un arrêté pris à Saumur par notre collègue Turreau; cet arrêté, qui rappelle les dispositions du vôtre pour incendier dans la Vendée les fours, les moulins et les repaires des brigands, ne peut recevoir, dans ce moment surtout, aucune modification : elle serait con¬ traire à l’anéantissement de cette guerre infer¬ nale. « Prieur (de la Marne); L. Turreau. » Le représentant du peuple dans le département de l’Orne [Garnier (de Saintes)], rend compte de l’arrivée à Alençon du détachement de l’ar¬ mée du Nord, qui va fondre sur les débris des rebelles de la Vendée, à qui l’enthousiasme de la bravoure fait oublier les fatigues de vingt-sept jours de marche forcée. Il se plaint que la plu¬ part de ces intrépides défenseurs de la patrie manquent de souliers. Il appelle toutes les solli¬ citudes et toute la sévérité de la Convention na¬ tionale sur la conjuration des fournisseurs contre l’armée, comme sur un des crimes qui ont été plus funestes à la liberté. Insertion, par extrait, au « Bulletin », renvoi au comité de surveillance des marchés (1). Compte rendu du Bulletin de la Convention (2). Garnier de Saintes, représentant du peuple dans le département de l'Orne, à la Convention nationale. « Alençon, le 30 frimaire, l’an II de la République. « L’armée du Nord, citoyens collègues, est arrivée hier dans la commune d’Alençon; nous l’avons passée aujourd’hui en revue, mon col¬ lègue Laplanche et moi; nous lui avons lu votre décret du 27 de ce mois, et la proclamation du comité de Salut public. Quelques réflexions que l’amour de la patrie nous suggérait ont ému l’âme de ces braves républicains. Des cris long¬ temps prolongés de Vivent la République et la Convention nationale! ont retenti dans les airs, L’enthousiasme de la bravoure leur a fait oublier les fatigues de 27 jours de marche forcée, et ils se délassaient, en défilant, à chanter l’Hymne de la liberté. « Ces intrépides soldats sont la plupart sans souliers; ils nous en demandaient, et nous n’en¬ tendions pas de sang-froid les réclamations des défenseurs de la patrie. « Eh bien, disaient plu¬ sieurs d’entre eux, si tu ne peux pas nous en donner, ce n’est pas la faute de la Convention nationale; nous marcherons nu-pieds, et nous ne nous en battrons pas avec moins de cou¬ rage (3). » (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 29. (2) Supplément du Bulletin de la Convention du 2e jour de la 1” décade du 4e mois de l’an II (di¬ manche 22 décembre 1793). Moniteur universel [n° 93 du 3 nivôse an II (lundi 23 décembre 1793), p. 376, col. 1], (3) Applaudissements, d’après le Mercure univer¬ sel (3 nivôse an II , t. 35, p. 43, col. 2),. l'e SÉRIE. T. LXXXII. « Il faut vous le dire, citoyens collègues, il est peu de crimes dont les suites aient été plus funestes à la liberté que ceux de la conjuration des fournisseurs contre l’armée. J’ai vu des souliers livrés à Caen, qui n’ont pu conduire des volontaires à Alençon; et, lorsque j’en ai fait l’examen, j’ai trouvé de l’écorce d’arbre placée entre la semelle, qui n’était cousue qu’avec un fil brûlé et qui déchirait en touchant le cuir. Ce qu’il y a de plus affligeant dans ces délits, c’est que la difficulté de découvrir les coupables les rend presque impunis. « Décrétez donc, citoyens collègues, que cha¬ que cordonnier sera tenu d’appliquer son nom et celui de sa commune sur l’intérieur du quar¬ tier du soulier; cette précaution assurant la connaissance de l’auteur de l’ouvrage, assurera nécessairement celui du délit, et dès ce moment la fraude cessera, les souliers seront de bonne qualité; ils dureront, et l’armée, qui en consom¬ mera moins, ne sera plus réduite à en manquer. « Salut et fraternité. « Garnier (de Saintes). » Le citoyeh Vallet offre à la Convention un fusil et deux pistolets que l’art a rendus précieux. Il désire que le don qu’il dépose sur l’autel de la patrie puisse servir de récompense nationale pour le premier soldat républicain qui entrera dans la ville de Toulon, pour en punir les cou¬ pables habitants et en chasser les brigands étran¬ gers. La Convention nationale acceptant le don ci¬ vique qui lui est présenté par le citoyen Vallet, trésorier de la commune de Paris, décrète que ces armes seront données, à titre de récompense nationale, au soldat de l’armée républicaine, sous les murs de Toulon, qui entrera le premier dans les murs de cette ville rebelle (1). Suit le texte de la lettre du citoyen Vallet, d’après un document des Archives nationales (2). « Paris, ce 1er nivôse de l’an II de la Répu¬ blique française, une et indivisible. « Citoyen Président, « Possesseur depuis longtemps d’un fusil, de deux pistolets que l’art a rendus précieux, j’ai senti qu’il n’appartenait qu’à la Convention d’honorer cette offrande civique. « Au moment où tous les citoyens s’em¬ pressent de porter leurs armes pour les défen¬ seurs de la République, j’ai espéré que le don que je dépose sur l’autel de la patrie pourrait servir de récompense nationale pour le premier soldat républicain qui entrera dans l’infâme Toulon pour en punir les coupables et en chasser les brigands étrangers. « Dans un pays hbre tout soldat peut devenir général, et c’est à un soldat que j’ose destiner ces armes. Puisse la Convention, en acceptant ce don patriotique, en confirmer la destination, « Vallet. » (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 29. (2) Archives nationales, carton C 287, dossier 864 . 9