444 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, [4 octobre 1790.] estime qu’ils s’étaient acquises, à l’avantage de leurs compatriotes qui, dans ces pays éloignés, ont très souvent besoin de secours, de soutien ou de correspondance. Ce sont les missionnaires qui ont donné lieu au commerce que la France a entrepris dans les pays orientaux et à la formation de la première Compagnie des Indes. Ce sont eux qui avaient obtenu du roi de Siam que les Français qui allaient fréquemment commercer ou hiverner dans le port de Mergui, dépendant de Siam, ne fussent point assujettis aux vexations des officiers siamois. Ils ont rendu une infinité de services de ce genre, en différents pays, aux commerçants de la nation. Aussi, l’ancienne Com pagnie des Indes, non seulement leur accordait le passage gratuit sur ses vaisseaux, mais elle leur faisait annuellement des gratifications considérables, Cette reconnaissance delà part d’une compagnie commerçante, annonce assez la grandeur des services qu’elle avait reçus et recevait des missionnaires. Dans ces derniers temps, en 1786, 1787 et 1788, leur procureur, résidant à Macao, a eu l’avantage de se rendre utile aux officiers et aux équipages de plusieurs vaisseaux français, expédiés vers ces plages, ou obligés d’y relâcher : c’est ce que peuvent attester les commandants et officiers des vaisseaux ou frégates le Castries, la Calypso , la Dryade , le Pandour , etc. Il n*a pas tenu à M. l’évêque d’Adran qui, en 1787, a amené à Paris le fils unique du roi de Cochinchine, de procurer à la France dans les Etats de ce prince, un port de la plus grande importance ; et si ses vues à ce sujet n’ont pas été secondées, il a du moins empêché qu’il n’ait été accordé à d’autres nations, malgré les instances et les offres qu’elles ont faites (1). Le commerce de Cochinchine a paru d’ailleurs si intéressant, que les habitants des îles de France et de Bourbon, dans leur assemblée du 3 septembre 1788, ont fait un arrêté où ils disent « que MM. les administrateurs en chef seront « suppliés de solliciter Sa Majesté, au nom de « la colonie, d’accorder à tous ses sujets la « liberté du commerce de la Cochinchine... Ce « royaume est celui de l’Asie qui fournit le « plus de denrées commerçables propres à « l’Europe.... de manière qu’elles suffiraient « seules à l’emploi d’un capital de quarante « millions, etc. » Tant de services importants que les missions étrangères ont rendus et continueront de rendre à la nation, tant en France que dans les Indes-Orientales, pourraient-ils ne pas leur assurer la protection et la bienveillance de l’Assemblée nationale? Que serait-ce donc si nous y ajoutions tant de milliers d’âmes que ces hommes vraiment aspostoliques convertissent à la foi et dont ils soutiennent la piété? Ces avantages ne sont-ils pas infiniment plus estimables que les modiques sommes que coûte cet établissement? Car, qu’en coûte-t-ii à la France pour entretenir non seulement les directeurs et les élèves qui sont au séminaire, mais encore les missionnaires dispersés en cinq ou six royaumes de l’Orient, qui sont actuellement au nombre de six évêques et de trente-huit prêtres français, chargés de six collèges, sans parler d’un nombre (1) Le capitaine Cook, Anglais, dans le 4e vol. in-8° de son dernier ouvrage, s’explique assez clairement sur les grands avantages qu’un établissement, à la côte de la Cochinchine, procurerait à la nation française en temps de guerre. de prêtres indiens et de catéchistes qu’il faut entretenir ou soulager? Il n’y a pour fournir à toutes ces dépenses que 65,000 livres de revenus, y compris des dîmes considérables, une gratification du roi de 15,000 et une du clergé de 1300 livres; encore faut-il observer que la plus grande partie des autres fonds sont des acquisitions faites des deniers et des épargnes des prêtres associés pour cette bonne œuvre. On ne confond pas ici avec les autres missions, celle de la côte de Coromandel, où il y a de plus deux évêques, dix-neuf missionnaires et un collège à Pondichéry, parce que cette mission, dont le roi a chargé les missions étrangères depuis quelques années, a un revenu particulier de 1,850 livres de rente sur le roi, comme il a été remarqué dans la déclaration faite à l’Hôtel de Ville. Que sont soixante et quelques mille livres pour l’empire de la France, si grand dans ses vues et si fécond dans ses ressources ? Pourrait-il être forcé de détruire, pour une somme si modique, un établissement aussi utile et aussi honorable à la religion, que glorieux et avantageux à l’Etat? un établissement unique; car il est le seul en France qui ait pour objet de porter la foi jusqu’aux extrémités de la terre et qui, par là, fasse bénir, par tant de différents peuples, la nation bienfaisante qui leur procure la connaissance de l’Evangile. Les avantages inestimables que cet établissement procure à la religion et à l’Etat avec des revenus si modiques donnent aux directeurs du séminaire des missions étrangères une ferme confiance que leur mission et leurs biens, qu’ils regardent comme étant et méritant d’être sous la protection spéciale de la nation , leur seront conservés et que leur entreprise, que son objet doit rendre si précieuse, sera perpétuée. Ce sera pour tous les membres de cette association, un nouveau motif de rendre à la nation et à tous leurs compatriotes, avec plus de zèle que jamais, tous les services dont ils seront capables. Tous, directeurs et missionnaires, adresseront au ciel les vœux les plus fervents pour la prospérité du royaume et le bonheur de Nosseigneurs de l’Assemblée nationale. M. d’Harambure. Si la nation se chargeait des établissements de charité, répandus dans le royaume, cela entraînerait de grandes difficultés et de grandes dépenses. Je crois qu’il vaudrait mieux décréter que chaque municipalité se chargera de ses pauvres. M. Populus. L’article 9 a, comme l’article Ier, une tendance manifeste à l’aliénation des biens des hôpitaux et des collèges. Je soutiens qu’il n’est ni politique ni moral de vendre ces biens. M. Moreau. La question des collèges et des hôpitaux est trop importante, elle touche de si près à l’ordre public, qu’elle doit faire l’objet d’un examen détaillé et minutieux. M. Martineau. Je demande la question préalable sur celte partie de l’article. M. Chasset. La proposition du comité est très conforme aux principes constitutionnels. En effet, la nation étant chargée de ses pauvres et de l’éducation publique peut, sans blesser la justice, distribuer lesbiens destinés à l’éducation et à l’indigence. [5 octobre 1790.] [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. Un grand nombre de membres persistent à réclamer la question préalable. On observe, d’autre part, que ce qui concerne l’ordre de Malte et les autres ordres religieux ou militaires a été renvoyé à un comité spécial et qu’il y a lieu d’attendre son rapport. M. Merlin se rend l’interprète du vœu de l’Assemblée et réduit l’article aux termes ci-dessous : Article premier. « L’Assemblée nationale décrète qu’elle entend par biens nationaux : « 1° Tous les biens des domaines de la couronne ; « 2° Tous les biens, des apanages ; « 3° Tous les biens~du clergé; « 4° Tous les biens des séminaires diocésains. » L’article, ainsi rédigé, est mis aux voix et adopté. La séance est levée à dix heures du soir. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. EMMERY. Séance du mardi 5 octobre 1790, au matin (1). La séance est ouverte à 9 heures du matin. M. Goupilleau, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance d’hier au matin. M. Vieillard {de Sainl-I.ô), secrétaire, lit le procès-verbal de la séance extraordinaire d’hier au soir. Ces procès-verbaux sont adoptés. M. le Président fait donner lecture d’une lettre du président du département des Bouches-du-Rhône qui dénonce un discours prononcé devant le Parlement d’Aix, le 27 septembre dernier. Cette affaire est renvoyée au comité des recherches. M. Treilhard observe qu’au commencement de l’article 5 du titre II du projet de décret du comité ecclésiastique sur le traitement des religieuses, on devait lire ces mots : il sera accordé, au lieu de ceux-ci : il pourra être accordé. (L’Assemblée décrète cette modification.) M. Gossin, au nom du comité de Constitution. Le décret sur l'organisation judiciaire renferme une disposition par laquelle les districts qui ont une population de 50,000 âmes peuvent nommer 6 juges pour leur tribunal, sauf la confirmation de l’Assemblée nationale. Le district de Lyon demande à jouir de cette faveur et nous vous proposons, en conséquence, le décret suivant : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport du comité de Constitution sur la pétition du directoire du département de Rhône-et-Loire, décrète que les tribunaux des districts de la ville de Lyon et de la campagne, séants en cette ville, seront composés de six juges. » (Ce décret est mis aux voix et adopté.) M. Paul Nairac. Bordeaux se trouve dans un cas semblable à celui de Lyon, Je réclame que les deux villes soient traitées de même. Cette proposition est accueillie et le décret suivant est rendu : « Le tribunal de district de la ville de Bordeaux sera composé de six juges. » M. de Macaye, député du Pays de Labour. Si sous l’ancien régime, dans un temps appelé du despotisme, les réclamations étaient écoutées et accueillies, si des ministres qualifiés du nom de tyrans revenaient souvent sur leurs pas et ré voquaient les ordres qu’ils avaient donnés, à plus forte raison dois-je me flatter que les législateurs de la France, hommes qualifiés du nom de pères de la patrie, voudront bien écouter et accueillir favorablement les représentations que je vais avoir l’honneur de leur faire, au nom de tous les Basques français et d’une grande partie du Béarn. Par un décret rendu à la séance d’hier au matin, sans que la question eût été annoncée et mise à l’ordre du jour, vous avez fixé à la ville de Pau l’assemblée du département des Basses-Pyrénées. Si la sévérité, si la rigueur de vos principes veulent que vous ne reveniez pas sur un décret déjà rendu, je vous observerai que cette même sévérité, cette même rigueur de vos principes et le respect que vous leur devez, exigent encore plus impérieusement que vous ne vous écartiez pas de la loi, que vous vous êtes faite, de choisir le lieu le plus central pour chef-lieu de chaque district ou de chaque déparlement. {On interrompt. M. le président prie M. de Marcaye de se résumer.) Pour me rendre au vœu de l’Assemblée et satisfaire son impatience, je me dispenserai d’entrer dans des détails qui me paraissent cependant indispensables, et je terminerai mon opinion en lui proposant l’alternat entre Pau et Bayonne. M. Gaultier de Bianzat, demande qu’on passe à l’ordre du jour. — Cette proposition est fortement appuyée. M. de Maeaye. 11 est à craindre, si l’on commande en tyrans, qu’on ne soit obéi comme le sont les tyrans, c’est-à-dire forcément. (L’Assemblée passe à l’ordre du jour.) M. le Président. Le rapporteur du comité colonial m’a fait prévenir que de nouvelles pièces, relatives à l’affaire de Saint-Domingue, ayant été remises au comité, il est nécessaire de prolonger à lundi l’ajournement du rapport. (Il ne s’élève aucune opposition .) M. d’Estourmel présente une pétition des officiers municipaux de Cambrai, tendant à faire traiter les possesseurs d’offices de judicature en Cambrésis, comme ceux d’Artois, Flandres et Hainaut. L'Assemblée en ordonne le renvoi à son comité de judicature. M. le Président. Le comité militaire demande la parole pour faire un rapport sur les adjudants généraux et les aides de camp (1). (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. (1) Ce rapport n’a pas été inséré au Moniteur.