170 IConvention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j f. brumaire an H Extrait du procès-verbal des séances du conseil général du département de la Marne (1). Du j[_ dix-sept brumaire de Van second de la Éépu-| blique française, une et indivisible. Le conseil général du département, consi¬ dérant que la religion est le rapport immédiat de l’homme avec l’Etre suprême; Que le culte n’est que l’exercice extérieur de ce rapport; que l’exercice du culte n’konore pas l’Etre suprême qui est infiniment au-dessus de tous les hommages de sa créature; Qu’il n’est pas de l’essence de la religion que les objets qui servent au culte, soient d’une matière plutôt que d’une autre; Que l’auteur de la nature a manifesté sa toute-puissance, en tirant de la terre l’arbre qui la couvre de ses rameaux, comme en for¬ mant l’or et l’argent dans ses entrailles, et que par conséquent les vases qui servent à offrir des sacrifices à la divinité, ainsi que les autres ornements de ses temples, peuvent être d’argile ou dé bois, et que la superstition ne les avait formés de métaux précieux, que pour fasciner plus aisément les yeux de la multitude; Que l’humble église de l’habitant des cam¬ pagnes est le séjour du créateur, comme le fas¬ tueux temple de l’orgueilleux citadin; Que la patrie a besoin, pour soutenir les droits du peuple, de toutes les matières d’or, d’argent et de cuivre que la crédulité de nos aïeux avait inutilement accumulées dans les temples ; Après avoir entendu un administrateur pour l’absence du procureur général syndic, arrête : « 1° Que dans le mois, pour tout délai, qui suivra la publication du présent arrêté, les con¬ seils généraux de toutes les communes du dépar¬ tement enverront, dans leurs districts respec¬ tifs, toutes les matières d’or, d’argent et de cuivre, tels que chandeliers, croix, ciboires, calices, encensoirs, lampes, généralement tous les vases, ustensiles et autres objets servant au culte, ainsi que les figures dites de saints, et pourront/ les remplacer par des vases ou usten¬ siles de verre, de bois ou autres matières. « 2° Tous ces objets d’or et d’argent seront envoyés à fur et mesure à la Monnaie, et le cuivre restera en dépôt au district, jusqu’à ce que le Pouvoir exécutif lui ait assigné une destination. « 3° Les districts rendront compte au dépar¬ tement, à la fin de chaque décade, de l’exécu¬ tion du présent arrêté et du nombre de marcs d’or ou d’argent qu’elle produira. « 4° Les procureurs des communes qui, après le délai expiré, ne dénonceront pas les conseils généraux qui auraient refusé d’exécuter le pré¬ sent arrêté, seront réputés suspects et traités comme tels. « 5° Le présent arrêté sera imprimé, affiché dans toutes les communes, et adressé au comité de Salut public. Pour ampliation : Choiset, secrétaire général. L’ex-général Houchard écrit des prisons de la Conciergerie, et demande Qu’il lui soit permis, comme à Lamarlière, de faire entendre sur les lieux, par un juge de paix choisi par les repré¬ sentants du peuple, des témoins essentiels qui sont aux armées. Sur la proposition d’un membre [Levas¬ seur (1)], la Convention passe à l’ordre du jour (2). Suit la lettre de Houchard (3) : Houchard, à la Convention nationale. « Le 26 (sic) brumaire, l’an II de la République, une et indi¬ visible. « Représentants du peuple français, « [Un] soldat républicain demande les moyens de se justifier. J’ai repoussé 40 fois l’ennemi avec succès et je suis accusé; j’ai tué 3 géné¬ raux à l’afîaire de Honscoote et je suis accusé; j’ai pris 22 pièces de canon, et je suis accusé; j’ai fait lever le siège de Dunkerque, et je suis accusé; je n’ai jamais été battu, et je suis accusé; je suis réduit à prouver que je n’ai pu mieux faire et qu’il m’a été impossible de prendre 45,000 hommes avec 30,000 qui venaient de mettre en déroute 15,000 esclaves; que toute autre tentative eût été pernicieuse à la Répu¬ blique et eût exposé ses meilleurs défenseurs sans succès. Pour justifier ma conduite j’ai besoin de faire entendre des témoins essentiels qui sont aux armées; un accusé ne peut, sans doute, sous aucun prétexte, retarder son juge¬ ment, mais ne serait-il pas injuste de refuser à un soldat républicain de préparer ses preuves avant le jugement? « Citoyens représentants, je vous demande de m’accorder ce que vous avez cru ne pouvoir refuser à Lamarlière. Je vous demande de faire entendre, sur les lieux, par un juge de paix, choisi par les commissaires de la Convention, les témoignages que je crois indispensablement nécessaires à l’instruction de mon procès; je désire que cette information puisse se faire aussi à charge contre moi par le même moyen. Le citoyen irréprochable ne craint que les té¬ nèbres et je demande qu’il me soit permis d’en¬ tourer mes juges de toute espèce de lumière; ces demandes ne suspendent pas le cours de la justice, elles ne déplacent pas les braves soldats qui se battent pour la République. Lamar¬ lière l’a obtenu, et j’attends avec confiance la même justice. Houchard. Compte rendu du Moniteur universel (4). Houchard écrit à la Convention pour la prier de hâter son jugement, et de lui donner les moyens de faire éclater son innocence par le témoignage de ses frères d’armes. Il exprime son étonnement d’être accusé, lui qui a 40 fois repoussé l’ennemi avec succès, qui a pris 82 ca-(1) D’après les journaux de l’époque. (2) Procès-verbaux de la Convention , t. 25, p. 210. (3) Archives nationales, carton C 278, dossier 737. (4) Moniteur universel [n° 56 du 26 brumaire an II (samedi 16 novembre 1793), p. 226, col. 3]. D’autre part, le Mercure universel [26 brumaire an II (samedi 16 novembre 1793), p. 246, col. 1] et le Journal des Débats et des Décrets [brumaire (1) Archives nationales, carton C 279, dossier 756. [Con vention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. ) \\ Novembre T793 177 nons, tué 3 généraux à l’affaire d’Hondscoote, et délivré Dunkerque. On demande l’ordre du jour. Levasseur ( Sarthe ). J’appuie l’ordre du jour ; et je déclare que Houchard ne dit pas la vérité quand il avance avoir tué 3 généraux à Honds-coote. J’étais à cette affaire, et en revenant du combat, je vis Houchard caché derrière une haie. J’avais eu un cheval tué sous moi par un boulet de canon; une balle avait coupé le panache blanc de mon plumet; un biscaïen était venu percer ma selle. Si Houchard avait fait comme moi, la victoire aurait été bien plus considérable. Houchard est traduit au tribunal révolutionnaire, les témoins seront entendus, ils diront la vérité. Je demande l’ordre du jour. L’ordre du jour est adopté. Les membres du tribunal du district de Com¬ pïègne applaudissent au décret du 3 brumaire, qui a foudroyé l’exécrable chicane, en anéantis¬ sant tous les avoués. Insertion au « Bulletin » (1). an II, n° 422, p. 324) rendent compte de la lettre de Houchard dans les termes suivants : I. Compte rendu du Mercure universel. La Convention nationale entend la lecture d’une lettre de l’ex-général Houchard. (Suit un résumé de la lettre de Houchard que nous insérons ci-dessus d'après un document des Archives nationales.) Levasseur. Je demande à relever un fait. Hou¬ chard dit qu’il a tué trois généraux à l’affaire d’Hondscoote. Eh bien, cela est faux, car je trouvai Houchard caché derrière une haie pendant cette affaire, à laquelle j’ai eu un cheval tué sous moi d’un boulet de canon, mon panache brisé d’une balle et un biscaïen dans la selle de mon cheval. Si Hou¬ chard eût suivi mon exemple, la victoire eût été complète. Ainsi, je réclame l’ordre du jour. S’il est innocent, le tribunal révolutionnaire prononcera. (Applaudi. ) ; L’ordre du jour est adopté. II. Compte rendu du Journal des Débats et des Décrets. Houchard, ci-devant général , détenu à la Con¬ ciergerie, écrit à la Convention. Il sollicite le moyen de se justifier. Il demande à jouir, comme Lamar-lière, de la faveur de pouvoir faire entendre, par des juges de paix choisis par les représentants du peuple, les témoins qu’il a dans les armées de la République. Dans sa lettre, Houchard rappelle ses services et s’étonne d’avoir été accusé. On demande l’ordre du Jour. Levasseur. J’appuie l’ordre du jour et je déclare à la Convention que Houchard lui en impose, quand il lui dit qu’il tua trois généraux à l’affaire de Honds-coote. J’étais de cette affaire, j’y étais à la tête d’une colonne; mon cheval y fut tué d’un coup de canon; mon panache blanc y fut coupé d’une balle, et une balle de biscaïen atteignit la selle de mon cheval. Si Houchard eût été près de moi, comme il le devait, notre victoire eût été plus complète qu’elle ne le fut; mais je le trouvai, à mon retour, couché der¬ rière une haie. Je demande l’ordre du jour sur ses demandes. Le tribunal révolutionnaire est chargé de le Juger, et j’espère qu’il fera son devoir. La Convention passe à l'ordre du jour. (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 210. lre SÉRIE. T. LXXIX. Suit la lettre des membres du tribunal du dis¬ trict de Compiègne (1) : « Législateurs. « L’Assemblée constituante a réorganisé l’ordre judiciaire et elle a consacré les plus funestes abus. Elle voulait que la justice fût prompte et elle a embarrassé la marche de la procédure. Elle la voulait gratuite et elle a remplacé 20,000 procureurs par 60,000 avoués. O vous, bienfaiteurs de l’humanité, géants républicains, salut ! Votre loi du 3 brumaire a foudroyé l’exécrable chicane; elle a rallié la justice à la raison et à la philosophie. « Courage, intrépides Montagnards, continuez vos glorieux travaux, encore quelques efforts et vous touchez votre but ; le bonheur du peuple est affermi. Il repose sur des fondements à jamais inébranlables : la liberté et l’égalité. Le 22 brumaire de l’an II de la République française, une, indivisible et impérissable. « Les membres du tribunal du district de Compïègne. « Baudin; Delarue; Mornier; E.-D. Moüit, président; J.-A.-M. Delà vallée, commissaire national; Thirial, greffier; Poulain. » Le représentant du peuple Bo écrit de Reims, le 23 brumaire, que les cloches de cette ville s’acheminent pour Metz et vont] se changer en bouches à feu. Toute l’argenterie des églises se ramasse, et va prendre des formes plus républi¬ caines à la maison de la Monnaie. Environ 300 milliers de fer, détachés de la seule église ci-devant cathédrale, se rendent aux ateliers de Paris, pour être transformés en fusils. Les four¬ rages destinés aux armées, qui s’avarient jour¬ nellement dans de mauvais magasins, sont logés majestueusement dans la cathédrale; deux autres églises servent de manège. Le même représentant envoie un panier con¬ tenant 51 marcs 5 onces 1 gros d’argenterie de luxe, et 7,259 liv. 10 s. en argent, à face royale, donnés à la patrie, savoir : 99 livres par le citoyen Martin, lieutenant-colonel du 20e régiment de chasseurs à cheval; 20 liv. 10 s. par le citoyen Gasnier, commissaire des guerres à Reims, et le surplus, par le citoyen Pinon, tanneur dans la même ville, avec un bon pour 10,000 livres de cuirs à prendre chez lui. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (2). Suit la lettre de Bo, représentant du peuple près V armée des Ardennes (3) : Le représentant du peuple près l'armée des Ar¬ dennes, à la Convention nationale. « Reims, ce 23 brumaire, l’an II de la Répu¬ blique française, une et indivisible. « Citoyens mes collègues, « Vous apprendrez avec intérêt les progrès de la raison dans la ville de Reims. Le patrio-(1) Archives nationales, carton C 279, dossier 756. (2) Procès-verbaux de la Convention, t. 25, p. 210. (3) Archives nationales, carton G 278, dossier 737. 12