469 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [24 janvier 1791.J dès le mois prochain, il n’y aura pas vingt instances. « Le préambule est pour vous inviter à proposer à l’Assemblée qu’on adjuge aux juges conciliateurs le salaire d’un commis scribe. Il est impossible que le secrétaire tienne aux expéditions à donner, et, à défaut de ce secours, les honnêtes gens chargés du mandat honorable tendant à empêcher leurs concitoyens de se ruiner, se trouveraient forcés dans les”grandes villes à renoncer au métier. » Messieurs, j’ai été charmé de pouvoir vous dire cette bonne nouvelle; et, quant à la résolution à prendre, je supplie l’Assemblée de m’autoriser à renvoyer cela au comité de Constitution. (L’Assemblée décrète ce renvoi.) M. le Président fait part à l’Assemblée d’une lettre de M. de Lalonde, de l’Académie des sciences, à laquelle se trouve joint un mémoire sur l’Afrique. (L’Assemblée en ordonne le renvoi à son comité d’agriculture et de commerce.) M. lielen de la Ville-anx-BoIs. J’ai reçu de la commune de La Fère, département de l’Aisne, l’adresse suivante dont je vais donner lecture à l’Assemblée (1) : « Messieurs, vous avez fait entendre la voix delà raison, et la nation française est libre. Vous avez renversé d’une main hardie l’ouvrage de l’orgueil et du despotisme. Vous avez aboli les droits honteux acquis par l’usurpation, maintenus par la force et qui ne présentaient au peuple que l’idée flétrissante de la servitude; vous avez reconnu les droits éternels que la nature adonnés à tous les hommes, et posant les bases de notre Constitution sur des fondements inébranlables, vous avez rendu au titre de citoyen sa dignité, qu’un esclavage de 13 siècles semblait lui avoir ravie. « Voilà vos titres à la reconnaissance de ceux que l’amour de la patrie enflamme, de ceux qui connaissent le prix de la liberté, et qui, fiers d’exister actuellement sous un gouvernement qui la leur assure, vivront pour la maintenir, et sauront mourir pour la défendre. « 11 suffit de porter les yeux sur vos travaux pour apprécier les obstacles sans nombre que vous avez eu à surmonter; environnés de dangers toujours renaissants, vous les avez prévus et bravés, vous avez déjoué les manœuvres de l'intrigue; rien, enfin, ma pu lasser votre courage ; la pensée que vous travaillez au bonheur d’une grande nation vous a toujours soutenus, et, certes, rien ne pouvait arrêter des hommes pénétrés de cette sublime idée. « Recevez les hommages de la commune de La Fère, et son adhésion entière à vos décrets. Persuadée que la liberté consiste dans l’obéissance absolue aux lois émanées des représentants du peuple librement choisis, elle renouvelle aujourd’hui le serment qu’elle a prêté le 14 juillet dernier, d’être fidèle à la Constitution et de la défendre jusqu’au dernier soupir. « Nous ne pouvons, Messieurs, terminer cette adresse, sans vous faire connaître le patriotisme des ecclésiastiques fonctionnaires publics de cette commune. Ils se sont tous empressés de prêter (1) Nous empruntons ce document au journal Le Point - du-jour, t. XVIII, p. 343. authentiquement le serment de fidélité à la Constitution; plusieurs, même, avaient prévenu votre décret; nous rendons tous aujourd’hui solennellement hommage à leur patriotisme, que l’esprit de la religion qui les anime a plutôt affermi que détruit chez eux. » L’ordre du jour est la discussion du projet de décret sur les droits de traites, présenté par les comités d’agriculture et de commerce et des contributions publiques (1). M. Goudard, rapporteur (2). Messieurs, j’ai rendu compte des objets compris dans le tarif des traites qui avaient éprouvé quelques discussions dans les deux comités réunis d’agriculture et de commerce et des contributions publiques. Je demande à l’Assemblée s’il y a quelques membres qui aient des observations à présenter? M. Hairac. Messieurs, quoique vous ayez déterminé un ordre de discussion du tarif des traites, je ne crois pas que vous ayez prétendu exclure les observations que l’on peut faire sur le tarif en général. M. Rewbell. Je demande à faire une observation sur l’ordre de la discussion. Le tarif est une branche du revenu public trop compliquée pour pouvoir être approfondie dans les circonstances actuelles, où tout nous impose la loi de décréter un tarif provisoire quelconque et de laisser à l’expérience des législatures qui nous suivront le soin de réformer ce qui sera vicieux. Ainsi, je demande que la discussion ne porte pas sur l’ensemble du tarif. M. Goudard, rapporteur , donne lecture de l’article relatif aux charbons de terre, qui est aiusi conçu : Charbons de terre. « Les charbons de terre qui seront importés par les ports de l’Océan, depuis Bordeaux inclusivement, jusqu’aux Sables d’Olonne aussi inclusivement, et depuis Redon jusques et compris Saint-Valery-sur-Somme, payeront par tonneau de 2,200 livres, 6 livres. » Par les autres ports du royaume, 10 livres. » Importés par terre, par baril de 240 livres, 4 sous. » Les charbons nécessaires à l'approvisionnement des départements de la Meurthe, de la Meuse et de la Moselle, exempts. » M. Hairac. Dans son premier projet, le comité avait suivi les errements de l’ancien système, où l’on ne connaissait d’autre moyen de conserver, d’encourager l’industrie, que les prohibitions; mais, revenu de son erreur, il propose d’admettre en France des marchandises jadis prohibées, en les assujettissant à un droit d’entrée conforme aux principes du commerce, capable de favoriser les productions nationales, sans engourdir l’industrie. (1) Cette discussion n’est que mentionnée au Moniteur. (2) Voyez le rapport de M.Goudard, séance du 22 janvier 1191, p. 425 et suiy. 470 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [â4 janvier 1791.] Nous sommes arrivés, du moins je le crois, au moment où nos marchands, secouant la honte d’avoir été aussi peu industrieux, et d’avoir si mal profité de l’avantage que leur position leur donne sur les manufactures étrangères, ne voudront plus devoir à la fiscalité ce que l’ardeur et l’industrie peuvent leur procurer. Il est de fait qu’un manufacturier, occupé en partie et favorisé par la prohibition, ne se donnait aucune peine ni aucun mouvement pour étendre sa manufacture. Je proposerai quelques observations particulières sur le tarif. Cette discussion sera aride, mais il s’agit ici des manufactures, de l’intérêt de votre agriculture et de votre commerce ; et l’Assemblée sent depuis longtemps combien ces objets sont dignes de son attention; je me renfermerai dans la classification. Je commence par l’article du charbon de terre. Nous avons beaucoup d’excellentes mines de charbon dans plusieurs de nos anciennes provinces et particulièrement dans le bas Languedoc et dans le Quercy; ces mines ne sont point exploitées, quoique” susceptibles de l’être. Malgré les bonnes qualités de leurs charbons, ces exploitations ne sont point faites, parce que dans l’hiver les chemins qui conduisent à ces mines sont impraticables, et que dans l’été les eaux des rivières sont si basses qu’elles ne peuvent pas porter de bateaux. Ces deux inconvénients, auxquels on aurait pu remédier avec 600, 000 livres, s’opposent à la descente des charbons à Bordeaux où il s’en fait une très grande consommation. La ville de Bordeaux, ne pouvant se dispenser de se servir de charbon, en tire de l’Angleterre qui, par là, entretient une navigation de 200 vaisseaux destinés uniquement à les importer, et il sort annuellement pour cette fourniture, un million de Bordeaux qu’il serait très aisé de faire gagner aux provinces qui avoisinent cette ville. Il y a lieu de croire que l’Assemblée prendra ces objets en considération, lorsque le comité d’agriculture et de commerce lui fera son rapport sur les mines du royaume. Le comité propose un droit de 6 livres sur le charbon par tonneau de 22 quintaux, jusqu’à ce que les choses aient changé de face, et que nos mines soient en une activité réeile. On doit regarder le charbon de terre comme matière première nécessaire à nos raffineries, à nos verreries, à la forge. Je demande donc à cet égard que le droit soit supprimé ou du moins soit extrêmement réduit : à ce litre nous devons avoir la préférence. On doit d’ailleurs déterminer le poids en tout ou en partie autrement que par tonneau de 22 quintaux. Je demande, en conséquence, que l’on change aussi la manière de percevoir sur cette marchandise. M. Goudard, rapporteur. Nous avons pensé que l’augmentation du droit sur le charbon favorisait l’exploitation de nos mines, sans empêcher nos manufactures de e’en fournir pour leur besoin. M. Haïra©. Je répondrai à M. le rapporteur qu’il n’est pas ici question de l’intérêt des mines, et que d’ailleurs il n’y a pas de mines qui fournissent du charbon de terre à Bordeaux. Î\I. Roussillon. J’observe à M. Nairac qu’il se trompé en disant qu’il n’y a pas de mines qui fournissent de charbon à Bordeaux, et que ce serait nécessairement détruire cette exploitation que de vouloir supprimer le droit modique de 6 livres imposé sur le charbon venaût de l’étranger. Le comité s’est attaché à mesurer ce qui convenait à nos manufactures et à l’exploitation de nos mines. Dans l’Albigeois, il est très vrai qu’il y a des mines de charbon même très abondantes; mais l’exportation à Bordeaux ne peut se faire commodément parce que la rivière n’est pas navigable. Vous ne pouvez encourager vos manufactures qu’en adoptant le plan du comité. M. Goudard, rapporteur. L’opinion de M. Nairac ne me paraît pas fondée, parce qu’il est fort aisé de mesurer la contenance des bâtiments et de l’évaluer à 2,200 livres par tonneau. Dans la différence du droit, nous avons distingué les provinces qui peuvent être facilement approvisionnées d’avec celles, dont l’approvisionnement coûte beaucoup de frais de transport. C’est pourquoi, d’une part, nous avons mis le droit à 6 livres et, de 1 autre côté, à 10 livres. Nous proposons même d’exempter les départements de la Meurthe et de la Moselle, parce qu’ils ne pourraient pas être approvisionnés de charbon sans des frais considérables. (L’article du comité est adopté.) M. Goudard, r apport êur, donne lecture de l’article relatif aux soies : Soies de toutes sortes. « Soies grèges, de toute nature, étrangères ....................... »> 1. i0 S. « Soies ouvrées, de toute nature , étrangères ........................ 1 » « Soies teintes, de toute nature, étrangères ....................... 1 « « Soies grèges doubles ou dou-pions ............................ » 5 « Fleurets ou filoselles .......... » 8 » « Cocons et bourres de soie ..... exempts . « N. B. La sortie de toutes ces soies continuera, provisoirement d’être prohibée à l’exception des soies à coudre teintes, dont la sortie sera exempte de tout droit. » M. Goudard, rapporteur. Quoique les soies étrangères soient nécessaires à nos manufactures, nous avons cru devoir les assujettir à un impôt modique, car on se rappelle que les soies payaient 22 sols. Seulement nous observons que l’Assemblée doit prendre en considération les torts que cela peut occasionner à la ville de Lyon qui avait payé, comme je l’ai déjà dit dans mon rapport, 18 millions pour ce droit. M. Germain. J’applaudis aux. dispositions de notre comité; je voudrais seulement que les fleurets qui s’emploient dans les étoffes communes soient réduits à 5 sols. (L’article du comité est adopté.) M. Goudard, rapporteur , donne lecturè des articles relatifs aux huiles; ils sont décrétés comme suit : Huiles de poissons . « Les huiles venant de tous autres pays que les Etats-Unis d’Amérique continueront d’être pfo-hibées;