220 [États gén. 1789. Cahiers,] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Douai. ] J.-B. Landrieu, J.-Baptisle Potier, J.-B. Thioler, André Fleury, André Lecoq, Martin Potier, Bernard Notre-Dame, Pierre Herboner, André Mida-voine, N, -J. Landrieux, M.-J. Vasseur, J.-À. Le-cœuvre. CAHIER Des plaintes, doléances et remontrances des habitants composant la communauté de Bouvignies en Flandre , pour être présenté en rassemblée guise tiendra par-devant M. le lieutenant général de la gouvernance de Douai le 30 mars 1789, en exécution des ordres du Roi pour la tenue des Etats généraux de ce royaume , au château de Versailles , le 27 avril suivant. Lesdits habitants pensent d’abord que, pour remplir le déficit qui se trouve au trésor royal, il serait utile et avantageux à l’Etat d’imposer à la taille et à toutes les charges -quelconques les biens et possessions des deux ordres du clergé et de la noblesse, ni plus ni moins que le tiers-état, qui se trouvera aussi, par ce moyen, déchargé du fardeau des charges publiques à cette proportion. Qu’il doit en être de même à l’égard de la consommation en denrées et en vivres, qui est immense parmi ces deux ordres, surtout en vin, bière, eau-de-vie, etc., et de les assujettir en conséquence aux impôts ordinaires comme le roturier, loin de les conserver dans leurs privilèges à cet égard, lesquels seront supprimés et anéantis pour toujours. Ils pensent aussi qu’il serait essentiel pour l’avantage des -peuples de permettre et laisser libre le commerce de toutes les espèces dans l’intérieur du royaume, et de province à province, sans aucune entrave,impôts ni droits quelconques. Qu’en conséquence il conviendra pareillement de supprimer tous les bureaux , les douanes , les commis et employés , tant ambulants que ceux qui sont aux portes des villes et en très-grand nombre et très-onéreux au public. Qu’il en est aussi de même des différents droits insolites que perçoivent les seigneurs et surtout les abbayes, tels que ceux connus sous le nom de droits seigneuriaux, mortemain, et tous autres de cette espèce, qui sont très-nuisibles et à charge au peuple. Qu’il en est pareillement de même de certains autres droits, tel entre autres celui de dîme sur les fruits de la terre, qui est également très-onéreux au cultivateur et le décourage souvent. Que si cependant Sa Majesté trouvait à propos de le laisser subsister, au moins ses peuples attendent de sa bienfaisance deux grâces à cet égard : celle de la réduction de ladite dîme à une petite quantité de gerbes, et celle de la payer en argent et non plus en nature. Qu’il serait aussi essentiel de supprimer pour toujours la corvée à bras et à chevaux dans toute l’étendue du royaume. Qu’il soit ordonné à tous les seigneurs, laïques et ecclésiastiques de restituer aux communautés d’habitants tous les marais, wareschaies, fligards et tous autres terrains qu’ils se sont appropriés et qui néanmoins appartenaient auxdites communautés, en justifiant pour celle-ci de leur propriété, soit par titre ou par la notoriété publique. Que comme lesdits seigneurs jouissent des droits de pêche, de chasse, de plantis dans leurs seigneuries respectives, il est juste aussi, par une conséquence naturelle qu’ils soient chargés de l’entretien des pavés, canaux et rivières qui traversent leursdites seigneuries, et non les habitants, à qui ces différents fardeaux sont une surcharge. Qu’il doit en être encore de même de l’édification, réparation et entretien des églises paroissiales et des clochers d’icelles, de même que de l’achat des ornements desdites églises, par la raison que ces charges incombent auxdits seigneurs comme étant inhérentes et attachées non-seulement à cette qualité, mais encore à celle de patrons et fondateurs. Que, par rapport à la communauté particulière des habitants soussignés, il serait à propos (vu qu’elle n’a point de loi complète dans son enceinte, ni même d’hôtel de ville, et qu’elle est obligée d’aller à Hasnon, qui est hors de la province de Flandre, pour plaider), il serait, dis-je, à propos d’ordonner à l’abbaye dudit Hasnon d’établir incessamment cet édifice public dans le lieu même de Bouvignies, et permis à la communauté de ce même lieu de nommer et créer ses officiers municipaux et de les renouveler à sa volonté, sans l’agrément ni participation de cette abbaye, qui sera privée de cette faculté pour l’avenir. Enfin lesdits habitants soussignés espèrent de la haute sagesse de Sa Majesté qu’elle confirmera la suppression des grands baillis des Etats de Lille, dont l’administration était ruineuse pour le peuple, et qu’elle confiera cette administration à une assemblée provinciale comme il se pratique maintenant dans l’intérieur du royaume. Telles sont les très-humbles doléances desdits habitants, qui seront présentées par ses députés en l’assemblée du 30 mars 1789. J.-B. Robert, J.-B. Baudry, Augustin Ventry, J.-B. Robert le jeune, J.-B. Dubois, J. -J. Lecœu-vre, J.-B. Heureq, A.-J. Simon, J. Baptiste Lecœu-vre, G. de Brabant, Philippe Licois, Charles-François Lecœuvre. DOLÉANCES ET PÉTITIONS Pour la communauté de Sin-Lebled. Art. 1er. Le retour périodique des Etats généraux de cinq ans en cinq ans. Art. 2. Nul impôt ni emprunt qui n’ait été consenti par les Etats généraux. Art. 3. La révocation des quatre grands baillis de la châtellenie de Lille et de l’intendant. Art. 4. Que tous les ans les communautés des campagnes choisissent toutes ensemble quatre députés d’entre elles pour faire partie des Etats de la province et avoir part à l’administration desdits Etats. Art. 5. Que l’impôt territorial en nature ne soit point établi, ni le terrage. Art. 6. La suppression du droit de garenne dès longtemps supprimé dans le Gambrésis. Art. 7. La suppression du droit de franc-fief que l’on ne paye pas dans le Cambrésis ni le Hainaut. Art. 8. Les communautés d’habitants remises et restituées dans tous les droits qu’elles peuvent avoir aux marais, monts, etc., et autres biens de pareille nature, et qu’elles ne soient plus tenues au partage par feu et par ménage de leursdits marais. Art. 9. Qu’il ne soit permis à personne , sous aucun prétexte que ce soit, de nuire à leur commerce, soit par la diminution , suppression des ruissoirs, etc., ou autrement. Art. 10. Que les dîmes et terrages soient affermés aux gens du lieu, afin que ce qui doit servir [États gén. 1789. Cahiers.} ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Douai.} 221 aux engrais des terres reste dans le lieu qui le produit et qui pourvoit ainsi à sa reproduction. Art. 1 1 . Qu’il n’y ait plus aucune espèce d’exemption de contributions pécuniaires, et que toutes, soit réelles, soit sur ces consommations ou autrement, soient payées également par les ecclésiastiques, nobles et tous autres, sans aucune exemp-I tion,ni même à prétexte que lesdits ecclésiastiques ou nobles feraient cultiver par eux-mêmes. Art. 12. Point d’arbres plantés dans les rivages qui seraient nécessaires au commerce. Signé à l’original : Thomas Sturq, Noël-Joseph Mouton, André Vau-drot, Jean-Baptiste Vallerieu, Mouton, Aimable de Gloquemant , Augustin Mouton, de Paris, P. -P. de Béve, Jean Dupont, Sébastien Lamercy, Antoine Loubey, François Havache, Millevil, Louis Goulois, Pierre Greré, Joseph Dupont, Louis Caf-fart, Beaucbamp, Charles Jacquart, Michel Guenet, Hubert Anache, Estoreb. REPRÉSENTATIONS Et doléances de la paroisse de Marquette en Ostrevent. 1° La dîme n’ayant été accordée auxministres de l’Eglise que pour en recevoir gratuitement le spirituel, il est bien dur pour une pauvre famille qui perd son soutien et toute sa ressource, souvent après avoir supporté les frais d’une maladie longue et dispendieuse, d’être encore obligée de se dépouiller d’une partie de son nécessaire pour rendre les derniers devoirs à ce qu’elle avait de plus cher; d’où il s’ensuit que les curés, avec une modique portion alimentaire, étant obligés pour fournir à leur existence de recevoir un certain salaire, passent dans l’esprit des peuples pour des exacteurs impitoyables, et les représentants d’un Dieu de miséricorde passent pour de cruels tyrans, tandis que les gros décimateurs jouissent paisiblement de la sueur de l’indigent. Le Roi devrait donc être supplié d’obliger les pourvus de dîmes de payer annuellement aux curés vingt-cinq sous par” chaque communiant jusqu’au nombre de mille, et au-dessus de ce nombre dix sous seulement, parce que quoique la besogne fût alors immense, cette rétribution, avec une honnête portion alimentaire qui pourrait être portée à 1 ,000 florins pour les pays bas où les denrées sont beaucoup plus chères, suffirait à un pasteur pour vivre selon son état. Gela posé, les curés administreraient gratuitement les sacrements, même celui du mariage; ils inhumeraient également, chanteraient une messe d’enterrement et feraient les cérémonies prescrites par le rituel, sans rétribution. 2° En conséquence de l’article précédent, le Roi devrait être supplié de décharger les peuples de toute reconstruction et entretien d’édifices, et dans le cas qu’il fallût reconstruire une église qui aurait fabrique, on pourrait accorder aux décimateurs les revenus des biens de l’Eglise pendant dix ans au moins en cas qu’ils fussent considérables, sauf à eux à payer pendant ce temps pain, vin, luminaire et les autres choses nécessaires à la célébration des terribles mystères. 3° Les pauvres villageois, plus accoutumés à la culture d’un champ qu’à l’intrigue des procès, laquelle réunit nécessairement des coutumes et formalités différentes, le Roi serait supplié d’introduire un code de loi uniforme pour tout le royaume , les enfants d’un même père devant partager également sa bénigne influence ; ou au moins il serait supplié d’établir une réforme dans la justice afin que la forme ne l’emportât plus sur le fond , comme cela arrive souvent , et qu’un procès ne fût pas au même tribunal plus de trois mois ; ces dispositions empêcheraient la ruine d’honnêtes familles. 4° Le Roi serait supplié de ne point introduire l’impôt territorial en nature comme tendant à décourager l’agriculture, et que l’on voit dans les pays où il y a terrage, le peuple ne voyant plus d’un bon œil l’effet de ses sueurs passer en mains étrangères, car dans ce cas il est privé d’un quart de sa dépouille : huit gerbes pour la dîme, huit pour le terrage et huit pour l’ouvrier ; on pourrait donc, pour suppléer à cette taxe, établir à la rasière une imposition fixe, partager les terres en trois classes, afin qu’une terre d’un meilleur rapport et d’une culture moins dispendieuse fût plus chargée qu’une terre qui ne rapporte qu’à force de dépense et d’engrais. Un système contraire décourage le cultivateur et porte préjudice au bien de l’Etat, en faisant négliger la culture des petites terres ; en conséquence, les impositions ne devraient être faites ni à raison de la population, ni à raison de la grandeur des terroirs, mais bien à raison de la bonté du sol ; et pour éviter toute fraude, on aurait recours au mesurage. 5u Le monarque serait supplié d’introduire partout des assemblées provinciales ; cette forme de gouvernement décharge beaucoup les peuples et enrichit l’Etat, puisque , moyennant 8 deniers de la livre, l’argent est porté dans les coffres du Roi, ce qui a lieu en Picardie, au lieu que dans un pays d’Etats, 8 sous suffisent à peine. La raison qu’apportent les partisans des Etats pour l’appui de leurs opinions, c’est que les membres de cette administration étant en plus petit nombre et par conséquent plus unis (vis unita fortior), sont plus capables de résister à la cupidité du Roi et de ses ministres ; mais a-t-on quelque chose de semblable à craindre de la part d'un monarque français ? Us apportent encore pour raison que le gouvernement des Etats est plus paisible ; cela est vrai, parce que les grands savent captiver les petits, qui ont toujours des intérêts à ménager, ce qui ne peut arriver quand le nombre du tiers-état est grand. D’ailleurs le tiers-état est souvent choisi par la noblesse, et ceux qui le composent sont , pour l’ordinaire , créatures des grands, comme on peut le voir dans les Etats du Hainaut. 6° L’agriculture devant particulièrement fixer l’attention du souverain, il serait supplié de ne pas permettre que ce qui est donné en décime ar le peuple d’une paroisse passât en vertu d’un ail dans une autre paroisse. Cette pratique prive le terroir d’une partie des fruits qui doivent lui être rendus, tout le monde sachant que les terres ne peuvent rapporter sans engrais. 7° Le villageois étant occupé de la culture de ses terres et de la gestion d’affaires qui demandent sa présence , payant d’ailleurs avec exactitude les charges de l’Etat, le Roi serait supplié de l’exempter des corvées et autres démarches qui gênent l’agriculture par une absence forcée, ou au moins de l’indemniser, comme c’était la coutume dans la paroisse soussignée lorsqu’elle était sous l’administration des Etats de Flandre. 8° L’état-major de la ville de Bouchain ayant soi-disant droit à une cinquantaine de voitures pour se procurer son chauffage, met encore des entraves à l’agriculture, ou s’il se contente d’une certaine somme comme il fait, il impose une nouvelle charge à un peuple zélé à la vérité, pour soutenir les charges de l’Etat, mais qui supporte avec