(Assemblée nationale.] archives pari Plusieurs membres à droite : A Orléans ! à Orléans ! ( Rires et applaudissements à gauche.) M. le secrétaire : Suit un extrait du mémoire envoyé par la municipalité de Roanne au département : « Le sieur Goulard qui, sous prétexte de défaut de santé, avait obtenu un congé de l'Assemblée nationale, n’a cessé de tenir la chaire de vérité : il a annoncé, au commencement du carême, qu’il remplirait la station présente ; il a représenté comme une persécution contre l’Eglise les principes purs et constitutionnels qui sont décrétés, et il déclaré schismatiques les évêques nommés par les représentants de la nation... » Plusieurs membres à droite : C’est vrai ! Plusieurs membres à gauche : A l’ordre î M. le secrétaire continuant la lecture ..... « Il déclare que la hiérarchie de l’Eglise est interrompue, et que nos évêques n’étant plus les successeurs des apôtres, les sacrements qu’ils donneront seront nuis dans leurs effets. En un mot, il trouble et alarme les consciences. « D’après cet exposé, Messieurs, la mu nicipalité de Roanne, qui sait que le congé du sieur Gou-lard n’est fondé que sur le peu de santé qu’il a allégué et qu’il avait au moment où il l’a obtenu, mais qui est rétablie au point de lui permettre de monter trois fois par jour dans la chaire de vérité (Rires), la municipalité de Roanne a jugé, Messieurs, qu’il était de son devoir de solliciter auprès de l’Assemblée nationale le rappel de ce député, le bon ordre de la ville et la tranquillité dans les opérations qu’exigent les lois constitutionnelles sur le clergé. Ce document est signé du maire. M. Prieur. Vous venez d’entendre, Messieurs, qu’un représentant de la nation trahit à la fois son caractère et ses devoirs de citoyen, et que, sous le prétexte du rétablissement de sa santé, il va porter dans son pays les torches de la discorde. Il n’y a pas d’expression pour peindre toute l’atrocité d’une telle manière d’agir. Je demande qu’il soit mandé à la barre pour y rendre compte de sa conduite. ( Applaudissements à gauche et dans les tribunes.) M. Goulard se couvre de son inviolabilité pour exciter impunément des troubles en [méchant contre les lois, et les tribunaux paraissent arrêtés par cette inviolabilité et n’osent informer. C’est qu’ils entendent mal vos décrets; l’inviolabilité ne s’étend pas aux crimes contre l’ordre social que des représentants de la nation peuvent commettre hors de leurs fonctions; on doit informer contre eux aussi bien que contre les autres, s’ils commettent des délits, et leur inviolabilité doit cesser. ( Vifs applaudissements à gauche; murmures à droite.) M. "Voidcl. Dans des circonstances pareilles, vous avez mandé M. de Mirabeau le jeune, M. le cardinal de Rohan, non pas à la barre, mais seulement comme députés, pour vous rendre compte de leur conduite. Je demande que vous suiviez la même marche. Quant à l’inviolabilité attachée au caractère de député, elle ne regarde pas M. Goulard, comme curé de Roanne. Je demande donc qu’il soit informé des délits commis par le curé de Roanne et que, comme député, il soit tenu de venir reprendre ses fonctions. 1M Série T. XXIV. MENTAIRES. |22 mars 1791.] 289 M. Tronchet. L’Assemblée ne peut ordonner une information que lorsqu’il existe un commencement de preuves. Ici vous n’avez qu’une dénonciation. L’accusateur public lui-même ne pourrait informer qu’en demandant au maire s’il entend se rendre dénonciateur; vous devez donc vous borner à révoquer le congé. M. Prieur. Je retire ma motion M. de Murinais. Puisque M. Prieur retire son opinion, je ne veux pas relever les principes qu’il a avancés. Messieurs, vous devez vous contenter de mander M. Goulard à sa place de député à l’Assemblée nationale. Les municipalités sont commises pour maintenir l’ordre et la tranquillité; c’est donc à la municipalité à faire les démarches nécessaires et point à nous à les lui dicter. Tout ce que nous pouvons faire dans ce moment-ci est de rappeler M. Goulard et c’est à quoi je borne mou opinion. M. Barnave. Un des caractères de l’inviolabilité des membres de l’Assemblée nationale est que, dans l’exercice de leurs fonctions, ils ne soient justifiables que del’Assemblée; mais quant aux délits qu’ils peuvent commettre contre l’ordre public, hors de leurs fonctions, ils sont justifiables des tribunaux, qui ont le droit d’informer à leur égard et de faire toutes les instructions nécessaires. Seulement, avant le décret de prise de corps, les tribunaux doivent mettre l’information sous les yeux du Corps législatif, qui déclare s’il y a lieu ou non à accusation. En conséquence, l’Assemblée nationale doit adopter un considérant très bref et déclarer que l’inviolabilité des députés, relativement aux délits qu’ils peuvent commettre hors l’exercice de leurs fonctions, n’empêchant pas les tribunaux d’informer contre eux et les obligeant seulement de mettre les informations sous les yeux du Corps législatif, afin qu’il déclare s’il y a lieu ou non à accusation contre le membre accusé, l’Assemblée a passé à l’ordre du jour. (Applaudissements .) Je n’entends pas dire par là que l’Assemblée ne doit pas rappeler le membre qui est inculpé et je crois qu’elle doit le rappeler dans le délai qui sera fixé. Plusieurs membres : Aux voix! aux voix! L’Assemblée consultée, rend le décret suivant : « L’Assemblée nationale, ouï la lecture d’une lettre des administrateurs composant le directoire du département de Rhône-et-Loire, et d’une pétition de la municipalité de la ville de Roanne, décrète que M. Goulard, l’un de ses membres, absent par congé, se rendra à ses fonctions dans le délai de huit jours après la réception de la lettre du Président, que le directoire dudit département sera chargé de lui faire remettre par ladite municipalité de Roanne; et au surplus, considérant que l’inviolabilité des représentants de la nation, relativement aux délits commis hors de leurs fonctions, n’empêche point les tribunaux d’informer sur ces mêmes délits suivant les formes ordinaires, cette inviolabilité les obligeant seulement de soumettre, avant le décret, les informations au Corps législatif, qui seul a le droit de déclarer qu’il y a lieu à accusation contre un de ses membres, l’Assemblc passe à l’ordre du jour. » Un de MM. les secrétaires donne lecture d’une 19 290 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [23 mars 1791.] lettre du président de l'assemblée électorale du département de la Seine-Inférieure, qui annonce que M. Verdier, curé de Choisy-le-Roi, ayant rétracté l’acceptation qu’il avait faite de sa nomination à l’évêc.hé ce ce dépari ement., le nouveau choix des électeurs est tombé sur M. Charrier de La Roche, député de Lyon à l’Assemblée nationale. La séance est levée à neuf heures et demie. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. DE MONTESQUIOU. Séance du mercredi 23 mars 1791, au matin (1). La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin. Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance d’hier, au soir, qui est adopté. Un de MM. les secrétaires fait lecture d’une lettre du procureur général syndic du département du Calvados , qui annonce que les électeurs réunis ont nommé pour évêque du département, M. Gervais, curé de Saint-Pierre de Caen, vieillard dont les mœurs et l’extérieur rappellent le temps des Apôtres, et pour membre du tribunal de cassation, M. Rroeardde Clermont. La même lettre annonce que les électeurs procèdent à la nomination des officiers du tribunal criminel, et que déjà M. d’Aigremont a été élu président de ce tribunal. M. Darnaudat. Messieurs, l’assemblée électorale du département du Calvados, d’après la lettre dont lecture vient de vous être donnée, est décidée à procéder à l’élection des officiers qui doivent composer le tribunal criminel. Cette disposition est entièrement opposée aux décrets de l’Assemblée... Voix diverses : Non! non! — Oui! oui! M. Darnaudat... qui renvoient cette élection au temps auquel on procédera à l’élection de la législature prochaine. Les électeurs du département du Calvados n’auraient donc pas dû procéder à l’élection du président ni des autres membres du tribunal criminel. Je demande, en conséquence, que M. le Président écrive au département de se conformer au décret et de retarder l’élection de ces officiers. M. Regnaud (de Saint-Jean-d’ Angély). Il est certain que loisqu’on proposa d’elire le directeur du juré et l’accusateur criminel, l’Assemblée nationale se refusa à rendre le décret sans lequel on ne peut pas faire ces élections, et quel. Duport, rapporteur, observa très justement alors qu’il était indispensable, avant de procéder à cette élection, d’avoir une instruction qui pût diriger dans la manière de faire cette élection. Je demande donc que M. le Président soit chargé de renvoyer cette lettre au ministre de l’intérieur afin qu’il prévienne l’administration du département qu’elle ne peut pas faire procéder à cette élection. (L’Assemblée, consultée, charge son président de renvoyer la lettre du procureur général syndic du département de Calvados, au ministre de l’intérieur, pour qu’il prévienne le directoire de ce département que les électeurs n’auraient pas dû procéder à l’élection des membres du tribunal criminel, avant d’y être autorisés par un décret de l’Assemblée nationale, sanctionné par le roi.) Un de MM. les secrétaires donne lecture d’une lettre des administrateurs du directoire du département de la Haute-Saône, qui annoncent que l’assemblée électorale a nommé pour évêque de ce département, M. Flavigny, curé de Vesoul. Un de MM. les secrétaires donne lecture d’une lettre de M. François d’Escars, député de Ghâtel-lerault, ainsi conçue: « Le 16 mars 1791. « Monsieur le Président, M. Descourtils de La Groie, mon suppléant, me mande que le comité de vérification refuse de reconnaître ses pouvoirs pour l’admettre à ma place dans l’Assemblée, parce que le procès-verbal ne fait pas mention de ma démission. « J’ai cependant eu l’honneur de vous mander, le 22 décembre dernier, que j’avais envoyé aux membres de la noblesse de la sénéchaussée de ChâtePerault ma démission du titre et des fonction-- de député aux Etats généraux qui m’avaient été conférés par eux. « Cette lettre a été lue à l’Assemblée le 31 janvier. Sur la motion faite par un membre on a décidé de passer à l’ordie du jour. D'après cela, je me regarde comme dégagé et je ne vois aucune raison qui puisse empêcher mon suppléant de me remplacer. « Je suis, Monsieur le Président, etc.. « Signé: FRANÇOIS D’ESCARS. » Plusieurs membres : L’ordre du jour ! Un membre: La seule difficulté qu’il y eut, lors de la première lettre de M. d’Escars, c’est qu’il ne nommait pas de suppléant. M. Voidel. La difficulté n’était point que M. d’Escars ne nommait point de suppléant; elle consistait en ce qu’il disait dans cette lettre, comme dans celle-ci, qu’il donne sa démission des Etats généraux, et qu’il n’y a plus d’Etats généraux; qu’il en a prévenula ci-devant noblesse, et qu’il n’y a plus de noblesse ; et qu’en conséquence il n’est pas possible de ne pas passer à l’ordre du jour. (L’Assemblee, consultée, passe à l’ordre du jour.) Un de MM. les secrétaires donne lecture d’une lettre de plusieurs particuliers détenus dans les prisons de Nîmes. Cette lettre est ainsi conçue : « Monsieur le Président, les soussignés, détenus dans les prisons de Nîmes pour les événements malheureux arrivés en cette ville les 13, 14 et 15 juin, vous représentent respectueusement que, par un décret solennel rendu par les représentants de la nation le 26 février, sanctionné par le roi Je 2 mars, publié et enregistré dans une audience extraordinaire le 14 dudit mois devant le tribunal des juges de district, il est décrété que les prisonniers actuellement détenus serontincessamment misen liberté ; que, néanmoins, contre toute justice et soumis-(1) Cette séance est incomplète au Moniteur.