[27 février 1791.] [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 551 « avoir sa résidence à portée de l’Assemblée na-'< tionale, lorsqu’elle est réunie ..... » Tel serait le devoir du roi suivant votre comité. Mais si le roi manquait à ce devoir, qu’en arriverait-ii? Ecoutons loujours le comité. « Tout fonctionnaire « public, dit le même projet, article 9, tout fonc-« tionnaire public qui contreviendra aux dispo-« sitions du présent décret, sera censé avoir « renoncé, sans retour, à ses fonctions... » « ... En ai-je trop dit, Messieurs? Tout fonctionnaire public! pas un n’est excepté. Le roi est fonctionnaire public: le roi, en vertu de ce décret, sera tenu de résider à portée de l’Assemblée; s’il s’en éloigne, il contrevient au décret; s’il contrevient au décret, il est censé avoir renoncé, sans retour, à ses fonctions; mais les fonctions du roi sont de régner: donc, dans le cas prévu, la loi priverait le roi de sa couronne et l’en priverait sans retour. Et pour qu’on n’en doute pas, pour que l’application de ces premières et funestes expressions du 9e article à la personne du roi soit bien sensible, le comité distingue soigneusement cette personne sacrée des membres de sa famille; et «ceux-ci, nous dit-il, « seront censés de même, en cas de contraven-« tion, avoir renoncé personnellement et sans « retour à la succession au trône.» Seront censés « de même » ! c’est-à-dire de même que tout fonctionnaire public, de même que le roi, premier fonciionnaire public! «avoir renoncé personnel-« lement à la succession au trône! » c’est-à-dire de même que le premier fonctionnaire, à sa couronne ! et sans retenir! C’est-à-dire que les membres de la famille du roi seront soumis à la même fatalité que le chef. Tout cela, Messieurs, est-il assez clair? Le masque est-il enfin levé? Je défie l’esprit le plus subtil de répondre à ce raisonnement. « Et que vos rapporteurs nous rendent compte aussi de leurs nouvelles expressions. Que signifie leur affectation d’employer des termes inconnus au peuple, si ce n’est pas un artifice pour effacer, autant qu’il est possible, ses anciennes idées? Pourquoi nous parlent-ils sans cesse de la dynastie régnante, au lieu de nous parler de la maison régnante? Puisque vous empruntez les termes des Chinois, imitez donc leur profond respect pour leur souverain, qu’ils regardent, qu’ils aiment, qu’ils traitent comme leur père. Ma remarque, à cet égard, ne paraîtra pas indifférente aux hommes éclairés et de bonne foi. Il me reste à vous dire, Messieurs, car je n’ai nulle envie de rien dissimuler, que mes principes ne me permettent pas de proposer des décrets dans cette tribune. Si je pouvais y déroger, je vous engagerais à blâmer ie projet de votre comité de Constitution, comme étant directement contraire à la fidélité que nous devons au roi; mais je me contente de m’opposer à l’ajournement. L’ajournement supposerait le droit de traiter la question. J’ai démontré que vous ne Paviez pas, et j’espère que vous y penserez. Quoi qu’il en soit, je renouvelle, en finissant, ma déclaration. S’il arrive que le projet du comité soit accueilli, je proteste publiquement contre l’infidélité que vous aurez commise envers le roi, et je me retire. >» A ces mots, je descendis de la tribune. Le décret est connu. Signé : DüVAL D’EPRÉMESNIL. Paris, le samedi 26 février 1791. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. DE NOAILLES. Séance du dimanche 27 février 1791 (1). La séance est ouverte à onze heures et demie du matin. Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance d’hier, au matin , qui est adopté. M. Duport cède le fauteuil à M. de Noailles, nouveau président. Un de MM. les secrétaires fait lecture d’une pétition de la section des Quatre-Nations , qui soumet à l’Assemblée nationale la question de savoir si M. le cardinal de Montmorency-Laval, évêque de Metz et grand-aumônier de France, qui n’a pas prêté le serment exigé par la loi du 26 décembre, peut continuer à exercer les fonctions attachées à la place de grand aumônier. M. l’abbé Gouttes. Une telle place ne peut plus subsister dans notre nouvelle Constitution; elle n’est qu’une usurpation manifeste dans le clergé de France. J’en demande la suppression. M. Bouche. Le roi s’étant déclaré le chef et le protecteur delà Révolution, il n’est pas convenable qu’il ait auprès de sa personne des ecclésiastiques fonctionnaires publics qui n’ont pas prêté le serment décrété par l’Assemblée nationale et accepté par Sa Majesté. Aucun ecclésiastique, de quelque titre qu’il soit décoré, quelques fonctions qu’il remplisse auprès de la personne du roi, ne peut, ni ne doit se dispenser d’obéir à la loi et la moindre résistance est un acte par lequel il se dépose lui-même. Un membre à droite : Une pétition émanée d’une assemblée illégale ne peut un moment occuper l’Assemblée sans compromettre Sa Majesté. M. Bouche. Je prends cette affaire pour mon compte et sans vouloir engager une discussion sur cet objet, je me borne à demander que l’Assemblée nationale charge son comité ecclésiastique d’examiner la question de savoir si le roi peut ou non garder auprès de sa personne des ecclésiastiques qui ont refusé de prêter le serment et de proposer incessamment ses vues à ce sujet. (Cette motion est décrétée.) M. le Président donne lecture d’une lettre du maire de Paris , qui annonce que la municipalité a fait, le 24 de ce mois, l’adjudication définitive d’une maison louée 1,500 livres, estimée 24,000 livres et adjugée 35,400 livres; Et le 25, de trois autres maisons : la première louée 350 livres, estimée 6,000 livres, adjugée 15,100 livres; la deuxième louée 1,400 livres, estimée 19,000 livres, adjugée 36,200 livres; et la troisième louée 450 livres, estimée 2,300 livres, adjugée 9,400 livres. M. Bouche, au nom, du comité de vérification , (1) Cette séance est incomplète au Moniteur.