339 (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 février 1791.1 nion entre différentes compagnies de la garde nationale. Intéressés à connaître toutes les inculpations clandestinement dirigées contre nous ; à nous justifier aux yeux de la nation et de st s augustes représentants, à dénoncer la pureté de nos principes, la lovauté de notre conduite, et à prouver que, fidèles à nos serments, nous nous sommes empressés d’exécuter et de faire exécuter les décrets de l’Assemhhe constituante, sanctionnés ou acceptés par le roi, nous officiers municipaux, nommons et dépuions M. Boyer, notre collègue, substitut du procure r de la commune, à l’effet de se rendre de suite à Paris, de nous y soutenir et défendre en corps ou en particulier auprès des députés de Nîmes à l’Assemblée nationale, de rendre compte de notre franche adhesion à tous les décrets de celte auguste diète; tics dangers que nous avons courus dans leur exécution, de ceux auxquels nous somuv s exposas dans l’exercice continuel de nos pénibles fu idious pour lesquelles nous avons saciifié jusqu’à nos plus chers intérêts, et en conséquence de faire ions manifestes, mémoires, adresses et tous autres écrits que M. Boyer jugera convenables et nécessaires pour mette en évidence nos vrais principes, notre attach ment inviolable à la Constitution, nos vœux et notre patriotisme; enfin, de p'ésenter un tabbau exact des (roubles qui ont agité notre ville, en remontant à leurs véritables causes. Fait à Nîmes, le 31 juillet 1790. Signé: Du Roure, Razoux, D. M. Former, Fer-rand-Demissul, Pontier, Grelleau, officiers municipaux. Extrait de l'acte signifié le 15 mai 17Q0 à la requête du procureur de la commune de Mmes à M. Brunei de La Bruyère , procureur du roi , en la sénéchaussée et présidial de Mmes. A été exposé à M. le procureur du roi, qu’il ne peut ignorer que le sieur Vidal se présenta chez lui, h er 14 mai, à environ 9 heures du soir, pour lui remettre un extrait en forme de la délibération prise par le conseil général de la commune de Nîmes le 13 du même mois, et que sur son refus et l’insistance du procureur de la commune, ce dernier lui dit qu’il voyait avec douleur que, dans une affaire aussi majeure, des actes d’huissier fussent provoqués, qu’il priait de nouveau M. le procureur du roi de dresser procès-verbal de ce qui venait de se passer, sous son offre de le signer et de rapporter le tout au conseil général de la commune: que M. le procureur du roi a insisté en ajoutant que ledit sieur procureur de la commune pouvait faire ce rapport verbalement; que ce dernier est sorti dans cet état à environ midi et demi ; et comme il désire de constater toos les faits ci-dessus rappelés, et de remplir ses fonctions avec autant d’exactitude qüe de zèle, à là requête dudit sieur procureur de la commune, j’ai offert à M. le procureur du roi un extrait en forme de la susdite dénonciation, avec déclaration qu’il luidénouceles faits contenus en icelle, qui sont : « Que des factieux projetèrent vers la fin du mois dernier d’exciter une querelle entre des citoyens, des bas-officiers et soldats du régiment de Guyenne, sous prétexte d’arracher à des volontaires des cocardes 'blanches qu’ils avaient toujours portées depuis la création de la légion. « Que quelques bas-officiers et soldats de ce régiment," malheureusement séduits, furent disposes par des liqueurs fortes à se livrer, le sabre à la main, à cette violence, ce qui eut lieu le dimanche, deuxième mai, sur le grand cours, vers les six heures du soir. a « Qu’au moment où l’action fut engagée, on tâcha d’attirer le régiment dans la querelle, en invitant les soldats à sortir des casernes et de la citadelle pour voler au secours de leurs camarades, et de les rendre ainsi complices, à leur insu, du massacre projeté. « Que des conspirateurs, postés dans les environs et armés, attendaient l’instant favorable pour se mêler parmi eux, et envelopper dans le massacre tous ceux dont ils voulaient se défaire. « Que comptant sur des secours étrangers, sollicités et promis, ils auraient sans doute porté leur s excès plus loin, si la vigilance des officiers municipaux, la fermeté et la prudence de MM. les olficiers du régiment de Guyenne n’avaient pas arrêté les progrès de l’insurrecti m, et si le cor ps du régiment, loin de se laisser entraîner, n’avait témoigné son indignation, et n’avait promis avec serment de livrer les coupables. « Que le 3 mai courant, une nouvelle émeute éclata sur la place des Récollets, alarma de nouveau les citoyens, et que les officiers municipaux s’y étant transportés pour faire cesser le désordre, un particulier tira deux coups de pistolet sur le groupe où ils étaient. « Qu’enfm pendant ces deux jours, des particuliers criaient dans les rue� que c’éiait le moment de couper la tête au maire, et de la promener par la ville au bo .t d’une baïonnette. » Sommant M. le procureur du roi de remplir les devoirs de sa charge, et à cet effet de faire administrer en témoins MM. Lacoste père, négociant ; Henri Lacoste; de Gueydon, capitaine de vabseau; Vumpère, greffier au bureau des hypothèques;' Turin, commis au greffe de la sénéchaussée; Chubaud, commis au contrôle ; le sieur Gastan, officier de la légion nîmoise; les sieurs Melquiqnd l’aîné, négociant; Gelse, négociant; Charles, le fils, négociant; offrant de faire administrer d’autres témoins lorsque ceux-là auront été entendus; offrant encore de se transporter chez M. le procureur du roi po m signer lu susdite dénonciation, à telle heure qui lui si ra indiquée; et eu refus ou défaut, par M. le procureur du roi, de faire le devoir de sa charge, il lui est protesté de tout ce que de droit, et lui ai baillé copie de cet exploit tout au long en lui offrant extrait en forme de la susdite délibération ; ledit Me Vidal ayant signé avec nous l’original et la copie, en parlant à la personne de M. de Brunei, trouvé dans son hôtel audit Nîtqes. Eu foi de ce, etc. QUATRIÈME ANNEXE. VÉRITÉS HISTORIQUES SUR LES ÉVÉNEMENTS ARRI-’ vés a Nîmes le 13 de juin et les jours suivants, publiées par le club des amis de la Constitution. Les événements qui ont affligé la ville de Nîmes le 2 de mai ont pour époque la publication du décret qui met dans les mains du district l’administration des biens ecclésiastiques. Les mal- 340 [Assemblée nationale.] heurs dont nous entreprenons le récit, et qui, le 13 de juin, remplirent cette ville de carnage et de deuil, ont commencé le jour même où l'on y apprit la suppression des chapitres et des abbayes. Dans l’intervalle de ces deux funestes époques, le fanatisme, le principal moyen des factieux, avait fait de nouveaux progrès, ou du moins s’était montré avec une nouvelle audace. Une délibération prise aux Dominicains, par les mêmes catholiques qui avaient signé celle des Pénitents Blancs, annonçait la n ême disposition dans les esprits, et cette persévérance dans di s principes odieux à tous les bons citoyens ne présageait pas une paix de longue durée. Les troubles qui s’étaient élevés au moment de la tenue des assemblées primaires faisaient craindre de nouveaux désordres pour celle de l’assemblée électorale, et malheureusement la municipalité, déjà suspecte de connivence avec les ennemis du bien public, venait de donner plus de fondement à ces soupçons. Le 4 de mai, elle avait concédé aux sieurs François Froment et Folucher un terrain inculte, sous la seule condition n’en payer les charges; et c’est par cette concession que ces deux hommes, connus pour être les chefs du parti antipatriotique, les commissaires les plus actifs des assembées ténébreuses des pénitents et des jacobins, devinrent citoyens éligibles. Ils furent élus. Lès commissaires du roi ayant demandé aux officiers municipaux un local propre à l’assemblée électorale, ils furent très surpris de voir préparer l’église des Dominicains dominée par deux tours, d’où l’on communique à la maison du sieur Froment. Mais les commissaires du roi ayant réclamé la grande salle du palais, ils l’obtinrent par leur fermeté, et l’assemblée électorale s’ouvrit le 4 de juin. Le choix de l’église des Dominicains n’est pas le seul reproche qu’on eût pu faire aux officiers municipaux. Ils s’étaient opposés à la formation d’un camp que le dbbict de Sommières voulait assembler sur son territoire, hors de celui de Nîmes, pour protéger l’assemblée des électeurs et la secourir au besoin. Une délibération de notre municipalité, qui prenait les électeurs sous sa sauvegarde et répondait de leur sûreté, empêcha cette salutaire précaution, et livra rassemblée électorale à la fureur d’un peuple égaré (1). Dès la première séance, les électeurs virent le piège qui leur élan tendu. On cherchait à les fatiguer par de longs débats, à les intimider par des menaces, en un mot, à les mettre eo fuite et à les foi car d’aba donner à un petit nombre de malveillants la nomination des administrateurs du département. Four cet effei,dans l’imérieur, des querelles interminables, une opposition tumultueuse, faisant perdre un temps précieux, et munnuier une grande partie de l’assemblée. Au dihors, des gens armés de sabres, quoiqu’il fût défendu de l’être hors du temps de service, et (1) Cette délibération est du 31 mai 1790. Elle porte qu’il en sera envoyé des extraits à M. de Roux, maire de Sommicres; à M. Legrand , prieur et maire d’Au-jargue, président et commissaire, nommés par la délibération, et à M. de Bonafous, général du camp de Boissières, et leur déclare , ainsi qu’à tous ceux qui peuvent composer ce camp, ou tout autre, que le corps municipal les rend personnellement responsables des événements, qu’il prend d’ores et déjà MM. les électeurs sous sa sauvegarde spéciale, et leur promet d’employer tous les moyens qui seront en son pouvoir pour rendre leurs personnes inviolables. ]19 février 1791.] portant à leurs chapeaux des houppes rouges qu’tls avaient substituées à la cocarde blanche, lorsqu’enfin elle fat proscrit ■, entouraient sans cesse le palais, en embarrassaient les avenues, et excitaient des rixes dont le moindre inconvénient était de troubler l’assemblée. Un cabaret voisin, où ils étaient défrayés et où le sieur Descombiés, un de leurs chefs, allait fréquemment attiser leur fureur par des récits infidèles et par des gémissements hypocrites sur le sort de leur religion, qui ne cornait aucun danger, leur offrait un asile agréable qui ne contribuait pas peu à les attirer et à les retenir. Au milieu des justes craintes que causait leur attroupement, un sentiment de confiance dans les mesures prises par les commissaires du roi, empêchait les réclamations des électeurs. Ils savaient que des patrouilles considérables du régiment de Guyenne avaient été demandées, et ils voyaient qu’un détachement des dragons volontaires faisait le service à cheval, et dissipait, par sa seule approche, cette foule de mutins soudoyés. Cependant on apprit que les patrouilles des troupes réglées n’avaient pas lieu, que les officiers municipauxn’avaient requisque des piquets placés à la citadelle et aux casernes, prêts à marcher au besoin, et pendant que les dragons se portaient dans d’autres quartiers de la ville pour y maintenir le bon ordre, les électeurs, d’abord insultés par des propos menaçants, le fureni enfin par des voies de fait. Plusieurs se virent poursuivis par des hommes à poufs rouges, et eurent beaucoup de peine à éviter les coups de sabre qui leur étaient portés. Sur leurs plaintes à l’assemblée électorale, le sieur Laurens, officier municipal, et le sieur Vidai, procureur de la commune, se récrièrent et prétendirent que l’on voula t jef r des soupçons sur des gens in nocenis. Vainement les sieurs Creuset et Vésion, électeurs du canton d’Aimar-gues, et bien d’autres, attestaient par écrit que leur vie avait été en danger, rien ne pouvait décider ces magistrats à croire à des excès dont ils avaient élé cent fois les témoins, et qu’ils n’avaient jamais réprimés, en répétant qu'ils répondaient sur leurs têtes de la sûreté de l’assemblée électorale : ils espéraient câliner l’agitation qui éclatait dans tous les esprits, prévenir la translation de ce corps qu’on parlait déjà de transporter à Beaucaire, et surtout établir entre lai et la municipalité la correspon ance que les électeurs réunisne voulurent jamais avoir qu’avec les commissaires du roi. Mais l’indignation générale fut le prix de ces perlid'-s efforts; et ce sentiment se manifesta principalement contre le sieur Vidal, lorsqu’un membre de l’assemblée électorale se plaignant d’avoir été insulté et menacé, le procureur de la commune lui répondit : qu’il ne l’avait été qu’en qualité de particulier, et non en qualité d’électeur. Cependant, les justes soupçons que la correspondance des commissaires du roi avec las officiers municipaux communiquée par les premiers à l’assemblée électorale avait fait naître, fortifièrent les plaintes contre ces magistrats, et les réquisitions multipliées des agents du pouvoir exécutif écartèrent des environs du palais la foule importune et dangereuse qui Baser geait : elles mirent enfin en activité les patrouilles, qui jusqu’alors avaient été enfermées ; mais ce calme ne devait durer qu’un instant. Les vils suppôts des ennemis du bien public, ces légionnaires, distingués par la houppe rouge, ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 341 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 février 1791.] font publier au son du tambour que tous les gens e les sieurs Froment, Folacher et Descombiès,avec300 de leurs volontaires, faisaient feu sur le quai des Golquières et sur le perron de la salle des spectacles. Ces dispositions ne sauraient être un effet du hasard : elles nortent le caractère d’une combinaison longtemps réfléchie, et la rapidité avec laquelle toutes les avenues de cette forteresse furent gardées par une double ligne de légion-naiies à houppes rouges, le soin qu’on avait eu de placer des troupes de ce parti près du corps des casernes où le parc d’artillerie était renfermé; enfin la compagnie qui barrait le chemin de la citadelle, le seul lieu où les patriotes pussent se procurer des munitions, tout autorise à penser que ces mesures étaient prises de très bo me heure, et que le plan avait été arrêté avantlejour de Faction. On doit observer que ce plan, qui semble n’êlre pas défensif, leur présentait le double avantage d’attaquer sans beaucoup de danger, et de laisser croire qu’ils avaient été attaqués ; mais personne ne fut la dupe de cet artilice, et ces furieux avaient déjà immolé plusieurs victimes, que les vrais citoyens n’étaient pas encore armés. Une partie de la garde à pied de la légion nîmoise, et dix dragons volontaires, résistèrent seuls pendant plus d’une heure aux efforts de ces scélérats. Cependant l’alarme s’était répandue dans toute la ville ; et sur le premier bruit des désordres, les commissaires du roi avaient requis la publication de la loi martiale; elle fut publiée vers les sept heures du soir par deux ofliciers municipaux, M VI . Ferrand-üemissol et l’abbé de Belmont, qu’on força de marcher. Un autre officier de la légion nîmoise s’était rendu à cet effet à la maison commune; il voulait engager MM. les ofliciers municipaux à requérir le régiment de Guyenne. Il ne frouva aucun d’eux, mais, après bien des recherches, il en découvrit un, caché derrière le lit d’un valet de ville, ces messieurs se rendirent devant les tours où commandaient Froment, Folacher et Descombiès, mais le drapeau rouge, loin d’être respecté, fut enlevé par des tiens de la forteresse. Le sieur Boudon, jeune citoyen actif, dragon courageux et zélé, l’unique espoir d’une famille honorable, qui marchait en tète de l’escorte, mourut cruellement assassiné à coup de fourche et de baïonnette. Il fut dépouillé de sa montre, de ses bijoux, et de tous le-effets précieux qu’il avait sur lui. On lui coupa même un doigt pour s’emparer d’une bague, et peut- 342 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES» [19 février lT91;j être découvrira-t-on que les chefs de ces scélérats leur avaient promis le pillage de la ville pour les retenir sous leurs drapeaux. Un second drapeau rouge eut le même sort que le premier, et les officiers municipaux qui le faisaient marcher devant eux, entre autres le sieur Pontier, ci-devant syndic du diocèse, se retirèrent aux casernes, où ils furent vainement requis par les commissaires du roi de faire sortir le brave et généreux régiment de Guyenne, déjà en bataille, et impatientée défendre les bons citoyens. La nuit suspendit le combat; mais les brigands profitèrent de cernom-ntde trêve pour faire des dispositions hostihs. Le 14* à la pointe du jour, on en ressentit l’etf t. Alors tous les patriotes prirent les armes, le sang recommença à couler, et si l’énergie des bons citoyens avait pris un ■ nouvelle activité, la fureur de leurs ennemis portait tout le caractère de la rage. En vain ils voyaient l’Esplanade se couvrir de troupes auxiliaires, arrivées de toutes les contrées voisines; en vain toutes les compagnies patriotes de la légion nîmoise gardaient avec activité l’intérieur de la ville, et veillaient à ce que les compagnies à pouf rouge ne s’en rendissent pas maîtresses, ils opposaient partout Une vigoureuse résistance. L’espoir d’un prompt secours et d’un renfort considérable soutenait leur audace; ils avaient envoyé à M. de Bouzzols les nommés Dupré et Lieutaud, deux de leurs plus dignes satellites, avec les lettres du sieur Froment et du sieur Descombiès, par lesquelles l’un, en sa qualiité de citoyen, l’autre, comme notable et promettant de faire ratifier sa réquisition par toute la municipalité, demandaient au commandant de la province de faire avancer le régiment du roi, dragons* en garnison à Lunel et à Sommièms; et ils osaient dire, les malheureux, que c’était pour empêcher les dragons protestants d’égorger les citoyens catholi jues; tandis qu’il est de fait que le poste de 10 dragons, mi-parti comme toute la compagnie, fut attaqué par plus de 200 travailleurs catholiques. Mais ces lettres ne parvinrent pas à leur destination ; la municipalité d'Uchan en lit arrêter les porteurs, et envoya sur-le-champ des troupes contre ceux qui les avaient écrites (1). C’est à l’aide de ces soldats citoyens et de bien d’autres, animés de la même ardeur, qu’on parvint à détruitv toutes les bandes extérieures des rebelles, et qu’à 3 heures apiès midi on n’avait plus guère à combattre que les gmis retranchés dans les tours des dominicains. Toutes les gardes nationales du département, à la distance de 18 lieues, étaient accourues au secours des patriotes, et ne se distinguaient pas moins par leur intrépidité, que par les plus tendres témoignages d’attachement aux bons citoyens. 'On vit même des gardes nationales du département de l’Hérault, telles que celles de Montpellier; de Ganges et de Massi largues, accourir en foule ; preuve louchante de burnou qui règne entre tous les Français depuis ia nouvelle division du royaume. Près de 1,500 hommes offraient leur secours, et les légions des pays catholiques, indignées qu’oti eût voulu mêler la religion dans une querelle dont l’intérêt personnel, l’attachement aux abus les plus oppressifs et le fanatisme le plus barbare étaient les seules causes, signalaient prmcipale-(1) On trouvera à la fin de la copie quelques pièces ustificatives. ment leur zèle. EU es attendaient avec irripatiénee qu’on les employât, lor-qu’une décharge de mdus-queterie partit à l’improviste ou couvent des capucins* blessa un grand nombre de ces étrangers, tua le sieur Massip, officier municipal de Salnt-Cosme, et mit un moment l’armée en dé-ordre. Sou ralliement fut pénible, parce qu’e'le était encore sans chef ; le seul qu’elle put alors reconnaître élait le major de la légion nîmese, car il était le seul officier supérieur qui restait à cette troupe, et depuis longtemps les amis dii trouble et dfe l’anarchie avaient fait tous leurs efforts pour empêch *r la formation d’un nouvel état-major. Ils uva eut malheureusement réussi, et M.de Saint-Pons qui, dès le premier mormmtde l’insürrectmn* avait, ainsi que le sieur Jourdan, son aide-major, manifesté une activité infatigable, et qui veillait à travers tous les dangers à la sûreté intérieure de la ville, et à l’emploi des troupes au dehors, ne se trouva point à l’Esplanade, au moment de cette attaque soudaine qui occasionné i.ne espèce de déroute. Elle cessa pourtant, et lepre 1er effort des corps des volontaires réunis se porta sué les capucins. On demanda à fouiller la maison de ces religieux; mais sous prétexte qu’ellé avait été visitée le matin, ils refusèrent de l’ouVrir. Leur porte fut enfoncée. On trouva chez eux des gens armés, des arums, des habits de femme, un gra' d nombre de libelles incendiaires dont ils étaient depuis longtemps soupçonnés d’être les colporteurs, et une foule d'autres objets qui portèrent au comble la fureur, déjà très grande des volontaires dont on avait blessé les compagnons. Les cellules furent dévastées, là pharmacie brisée, la sacristie saccagée, et ia mort donnée à 5 capucins et à 4 scélérats réfugiés chez eux. Mais le grenier d’abondance de la ville, placé dans le cloître, lut respecte, la manufacture de d'aps est intacte, la bibliothèque ne fut pas touchée, bon n’entra pas dans l’église, et le prOrès-verbai dressé par M. le curé de Saint-Castor, proüve invinciblement qu’o 1 ne s’est rendu coupable d’aucune profanation. Un ciboire seul, enlevé de là sacristie par un brigand venu à la suite des généreux patriotes de Sommières, lui fut repris par eux, remis au greffe criminel de Nîmes, elle voleur livré à toute la rigueur des lois. 11 est un autre fait qui ne doit pas être omis : quand on vit que la maison des capucins allait être attaquée, on jeta des fenêtres de bdrgent àü peuple in ligné, dans IVspoir sans doute que la cupidité prévaudrait sur la colère ; mais ce nouvel attentat ne servit qu’à faire éclater le désintéressement et l’honneur d’un tambour du régiment de Guyenne; il ramassa 12 livrés, et vint les déposer sur le bureau de l’assemblée électorale, comme un argent impur qui ne devait pas soüillef ses mains. Pendant l’expédition faite aux capufcins, la même cause produisait ailleurs le mè ne eflét : des coups de fusil tirés dans là vide et dans lés faubourgs, ayant blessé ou tué de bons citbyeûs, les maisons d’où ces coups étaient partis furent livrées au pillage malgré la résistance des officiers, et l’on y détruisit plus que bon n’y vola. C’est ainsi entre autres que furent ravagées les maisons de M. l'abbé Cabanel, notable, et celle de M. l’abbé Bragouze, curé de la paroisse de Saint-Paul, chez lequel on trouva, dans un puits, des fourches, des fusils et des sabivs. Toutes ces scènes d’horreur ne se passèrent pas sans effusion de saug. On massacrait tous les coupables qui tombaient sous la main ; mais aucun [Asseûiblée ttàllôhâib.j ARCHIVES ÛÀRLfeMENtAlftES. [19 février lT9i:J 843 dëë chefs de subit alors la peiné qu’il 'm'éditait ; : lëê tr< is principaux enfermés dans les tours dés dominicains faisaient toujours bonne cdütënance, et l’on Se persuada enfin que lé canon pourrait seul les réduire. Des gardes nationales furent donc commandées pour le service de l’artillerie ; mâis pour arriver au parc qui la renfermait, il faiblit vaincre une troupe enUertiie qui en défendait rapproché. UÜ détachement dës diverses légions étrangères, mêlées avec celle de Nîmes, Soutint courageusement son feU,etta mit bientôt en fuitë. Le canon fût alors braqué contre les tours ; mais, avant d’employer cette a�hie terrible, on reçut de MM. Frdment, Folacber et Desronlbiès, une lettre adresséë au cbmmâhdunt du régiment dé Guyenne pour la communiquer aux volontaires etrangers, dans laquelle ils s’intitiliënt : les capitaines de la légion nlrnoise , commandant les tours du Châteaû, et du l’on crut remarqu r à travers l’insolence de ledrs propositions quelque envie de çapildler; d’après cette idée, on leur porta des paroles de i aix : line pareille démarche ne les empêcha point de continuer le feu de leur nlons-pueterie, cë Iqiii rendit impossible le sticcès de la négociation. 11 fallût bien employer l’efFort du canon; 11 le fut avec succès par tes soins de M. d’Aubry, capitaine aü corps royal d’artillerie, qui, dès le grand matin, s’était porté dans tous les lieux où il ÿ avait dü danger; qui, malgré le feu continuel deà tours dont le sëbvice des bâtteriës était fort incolhmodë,et par lequel beaucoup de monde était mis hors de ëëiübàt, et malgré l'inexpérience des personnes qui furent employé as à la manœuvré des pièces, après avoir rempli tout à la Ibis les fonctions dangereuses d’ofticier et de Silnplë canonnier, parvint ërifin à déldafcr leà rebelles de la forteressë qu’ils Occupaient, les obligea à Së retrancher dans la maison du Sieur Fi o-mëtit, et mérita, par cë service Déportant, d’être nommé le lendemain colonel pârticülier de la lë-ion tiîidbisè, et cotntiiaudant général dës gardes atidtiàles confédérées. Les malheureux qü’ii aVait chassés de lëur poste, et qui s’étaient réfugiés dans letlr dernier âsilë, demandèrent bientôt à capituler. On n’exigea d’eux que la restitution de tdütes leufs armes, et leurs chefs en otage, en ietir promettant même de lès mettre sous là sauve garde de la loi. Ces conditions ne plurent pas sans doüte à ces chefs insensés; car un second refus de leur part fut lë Seül frtiit de cette seconde négociation. G’eSt alors que quelques légionnaires de divers cantons, s’étant réutlis sous les ordres du siëlir Ri-cÜufd de Glarënsâe, tirent une brèche ali rempart auquel est adbssée la maison Üu siéür Froniënt, et la prirent par escalade, malgré la résistance des assièges. Ils en tirent un grand carnage; mais Fromelit, Folâchër Pt Deseombiès échappèrent à là mort et à la recherche de leurs Vainqueurs. La maison du premier fût pillée, ët l’on y trouva des preuves multipliées du plus horrinle des complots : des libellés, des armes, dés hiutlitidns, des tablés dé proscri ptioii, dés fagots destinés, suivant l’aveli de plusieurs prisonniers, à iiicen-dier le tliib dés ami§ dé la Constitution. Voilà ce que recelait lë principal repaire de cës BHg.mds. far cette prise importante se termina lâ funeste joürnéedù 14; celledu lendetbainnefuLpourainsi dire, consacrée qü’à la vengeam e, mais son règne lui trop prolongé, et les lois et l’humanité y furent trop souvent outragées. Cependant, avant la fin du jour, le sang avait cessé de couler, et les prisons commençaient à se remplir. Beaucoup d’in-foCUinés; séduits par des chefs criminels, y ont tr'ouvë leur sâlüt; mais 11 htot espérer qu’un châtiment juridique y attend F s coupables. Qu’bu se peigne, âu milieu de tant de désordres, la situation doülo'nrfeüsè de l’assemblée électorale; ellé eût KesOiil d’tln grand 'codrage ; on va voir Si elle sut en rttdnttvr. La séance venait d’êirë levée; le dimanche, quand l’âlarme se répandit. LeS électeurs étaient dispersés, et beaucoup furent exposés aux dangers les plus immüients; plusieurs même furent grièvement blessés, et presque aucun ne put rentrer dans sâ inaisori. Mais quand lé lundi matin le président Fit publier, à son de trompe, que l’assemblée allait se tenir, les deux tiers de ses membres Se réunirent âu palais, et leur premier dévoir fut de juref de né point se séparer que toutes les opërâiions iie fussent terminées. Là plus importante ët la plus pressante, sans douté, était d'ériger line autorité dans une ville sans administrateurs : lamUnicipalltéétaitcomme anéâhtie; à pëine parut-il 2 dfe ses officiers. Le procureur de lâ commune avait disparu dès le commencement de la güërre, et son substitut depuis longtemps n’dsâit pas même se montrer. L’armée n’avait point de chef, 11 fallut pourvoir à la subsistance dé 15,000 hommes, à la défense de la cité et à FattâqUé dés ennemis; la confusion était à redouter plus que ledr fureur meurtrière; et si rassemblée électorale n’avait saisi le tiinon dans ce moment d’orage, c’en était peut-être fait de ta ville de NîmeS. Un comiië militaire et dé subsistance fut nommé par le corps deS électeurs; les membres en furent pris datts son sein, parmi lès citoyens les plus recommandables pat léür sagesse et parleur expérience. On y joignit M. d’Aubry, les personnes qui testaient de la municipalité; et MM. les commissaires dd roi; M. de Ghabaud-Latour, électeur de la Ville dé Nîmes, lieutenant-colonel au corps royal de génie, militaire consommé par plus de 45 ans de service, employé dans l’Etat pour les commissions les plus délicates, et citoyen distibgué par son amour éclairé pbür la Constitution, fut nommé président de ce cons< il. Dès ce moment, Foi dre seuibla prêt à renaître. Ce coibité â’ëtopressa d’aübrd de pourvoir à la subsistancé de l’armée : des sentinelles furênt placées chez Chaque boulanger, pour les obliger à faire 8 tournées par jour; on s’assura, par de semblables précautions, de l’dbtivité continuelle des moulibs et de ['approvisionnement de la boucherie. De leur côté, tous les citoyens se faisaient un dëvoir dë fournir aUx troupes étrangères les vivres et les rafraîchissements qu’ils pouvaient avoir dans leur maison. Enfin, des communautés Voisines, celles dé Saint-Gilles et de Massillar-gues, envoyèrent des cohVois de pain et d’autres munitions de bouche, qui prévinrent toutes les âlahmes sur là subsistance des citoyens et de leurs nombreux défenseurs. En même temps, tdÜS les officiers de l’armée s’assemblaient poür nommer üti état-major général et uü état-major particulier de la légion nîmoise (1). Un règlement sage fut arrêté, et la discipline tout â coup iritrodüite parmi les volontaires. On pourvût aussi à ledr logëtnënt. On décida que 3,000 étrangers seraient gardés jus-(1) M. d’Aubry, commandant général de la Fédération. M. d’Azemar, major général de la, cavalerie. M. de Serres de Montpellier, chevalier Üë èàint-Lbui» major gétioral de Pinfantéfië. 344 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. |19 février 1791.] qu’à la fin du mois de juin ; que la légion nîmoise serait réformée sur l’ancien plan, réduite à 24 compagnies, purgée de tous les factieux qui y étaient entrés par violence, et que leurs armes leur seraient enlevées. Ces dernières dispositions furent arrêtées après la victoire, et la dernière fut exécutée sur-le-champ. On fouilla paisiblement, par l’ordre des officiers municipaux, chez les capitaines des compagnies à houppes rouges. On s’empara des armes, des munitions, et l’on en fit autant dans plusieurs autres maisons suspectes. La précaution ne fut point vaine : de la poudre et des balles furent trouvées chez bien des gens, depuis longtemps soupçonnés d’en receler, et surtout chez le nommé Gas, ce cabaretier dont il a été fait mention, et l’un des plus vils suppôts de cette horde de scélérats, dans la cave duquel on trouva un baril de poudre. Il voulut opposer quelque résistance à ceux qui fouillaient sa maison; mais il fut massacré et cinq de ses compagnons, qui, des toits de son logis, tiraient sur les sentinelles de l’assemblée électorale, subirent la même deslinée. L’assemblée électorale adopta avec empressement la proposition qui lui fut faite le mardi matin, par l’un de ses membres, de sortir en corps au milieu d’un détachée ent du régiment de Guyenne précédé par un drapeau blanc, et d’aller recommander à toutes les troupes assemblées, la modération, la clémence et l’humanité. Cette démarche éclatante eut un grand succès, et la promesse de livrer à la justice des coupables dont toute l’armée demandait la lête, commença à calmer la fureur des soldats, et sauva la vie* à beaucoup de misérables. Fidèle à son serment, l’assemblée électorale ne discontinua jamais ses travaux. Grossie à chaque instant par beaucoup de ses membres qui la rejoignaient, le lundi elle ne quitta pas la salle de ses séances, et les électeurs ne vécurent que de pain et d’eau. Le mardi, plus calme, l’assemblée presque complète, vit arriver dans son sein les sieurs Laurens, officier municipal, et Vidal, procureur de la commune, ce dernier déguisé en soldat; tous les deux étaient cachés depuis le dimanche dans la maison du sieurGas, cantinier de l’armée à houppes ronges; et découverts ensuite dans une maison inhabitée, ils furent sauvés par le courage et lagénérositéd’un capitaine de la légion nîmoise, et mis par lui sous la sauvegarde du corps électoral. 11 les prit sous sa protection ; mais, se croyant sans doute trop voisins des prisons, ils s’échappèrent. Le mercredi 16, tous les esprits étaient calmés, et chacun se préparait avec joie à la grande fédération qui devait avoir lieu. C’était, sans doute, un beau spectacle de voir 12,000 hommes sous les armes, rangés avec le plus grand ordre, et animés des mêmes sentiments. Ce fut surtout un beau moment que celui où le serment civique fut prêté, où des chants d’allégresse et de victoire se firent entendre, et où le corps électoral, ombragé des drapeaux du régiment de Guyenne et de ceux de chaque légion, joignit l’expression de ses vœux et de ses engagements, à celle de tant de généreux défenseurs de la patrie, jurant de mourir pour la Constitution et pour leur roi. Pouiquoi le souvenir du passé vint-il empoisonner celte fêle? Pourquoi de nouvelles alarmes en virent-elles troubler les douceurs? Des coupables avaient pris la fuite, et, jusque dans leur désastre, fidèles à leur système, ils répandirent dans les campagnes, dès longlemps préparées à recevoir défaussés impressions, que les protestants de Nîmes y avaient égorgé les catholiques; qu’on avait ravagé tous les couvents, profané toutes les églises, immolé tous les prêtres, et foulé aux pieds les choses les plus saintes. Les complices d’une aussi absurde, imposture la propagèrent de tout leur pouvoir; et, presque au même instant, tous les villa®' s qui s’étendent à l’est de la ville vers le Rhône et vers le Gardon, furent armés pour secourir leurs frères qu’on leur disait massacrés, et leur religion qu’on leur assurait perdue. Plusieurs personnes connues ont, dans cette circonstance, signalé leur zèle fanatique ; on en a vu à Bouillargues, village de la banlieue, soulever les habitants dont on aigrissait depuis longtemps les esprits. Le lundi, on en a vu à Man-duel, autre village voisin de la ville, exciter au meurtre des paysans crédules et superstitieux; on eu a vu, sur le chemin d’Arles, intercepter la lettre par laquelle la municipalité de cette ville offrait pour celle de Nîmes, au club des amis de la Constitution des secours d’hommes, de munitions et de vivres (1). Par une suite de ces perfides manœuvres, il se commit de grands excès dans les campagnes; plusieurs personnes y furent massacrées, sans d’autres forma ités que cette question : êtes-vous protestant? Sur l’affirmative on était égorgé, et c’est ainsi que périrent, et le sieur Hugues, près le village de Manduel devant lequel il passait, et le sieur Peyre, jeune homme qui lavait tranquillement de la laine à une lieue de la ville, et le sieur et la dame Noguier, tués dans leur propre maison à Courbessac, et le sieur Blan-cher, jardinier, âgé de près de 70 ans, qui allait faucher son fourrage; tous citoyens paisibles et désarmés, et victimes du fanatisme le plus barbare. Mais la rage des assassins se tourna principalement contre une famille respectable (2) et nombreuse de la ville de Nîmes, quia de grandes propriétés dans cette contrée, et qui, depuis près d’un siècle, nourrit une grande partie de ses habitants. Elle était alors presque entièrement réunie à la campagne; elle fut avertie qu’elle allait être poursuivie; elle prit la fuite; mais bintôt elle se vit attaquée par une troupe effrénée de villageois en armes. Un vieillard déplus de 80 ans et son fils aîné, furent assassinés sans pitié sous les yeux de l’épouse et des deux filles de ce dernier; et ces femmes infortunées ne durent Lur salut qu’à un hasard presque miraculeux. Un autre vieillard de 75 ans, frère de celui qui venait d’être massacré, ses trois filles, deux de leurs parentes ou amies, quatre enfants, dont le plus âgé n’a que 6 ans, et quatre femmes qui les servaient n’échappèrent non plus à la mort, que par un de ces coups imprévus de la destinée, qui confond quelquefois la méchanceté des hommes, et déconcerte leurs coupables projets. Cependant l’alarme s’était déjà répandue au loin, et la ville de Nîmes était menacée de l’irruption d’un grand nombre de paysans, connus par leur attachement à la Constitution, mais cruellement trompés sur les intérêts de leur religion. Tout concourait à les entretenir dans leur erreur, et les avis des fuyards, et les instigations des mal intentionnés, et l’exagération des récits, (1) On trouvera la pièce justificative à la fin. (2) La famille Maigre. 345 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 février 1791.) et les pleurs de quelques religieux fugitifs, et les alarmes de leurs curés. Et contre qui venaient combattre ces malheureux que le fanatisme et l’hypocrisie osaient tromper aussi grossièrement ? Contre une multitude de bons catholiques de Nîmes qui avaient travaillé, de concert avec les protestants, à l’avancement delà Constitution ; contre la légion de Montpellier, troupe généreuse et sensible, qui a volé au secours des bons citoyens sans s’informer de leur culte ; contre les volontaires catholiques de Sommières, d’Aimargues, de Saint-Gill s, du Vigan et de tant d’autres lieux, où, confondusavec des protestants, ils vivent en amis et en frères, parce qu’ils aiment également la loi de l’Etat et la personne sacrée de leur roi, et que, s’ils ont des opinions religieuses différentes, ils suivent une morale commune, contre ces fermes appuis de la cause publique descendus de leurs montagnes, ou venus de la Gardonenque pour combattre les ennemis de la Constilution ; enfin contre ces braves ecclésiastiques qui n’ont pas craint de partager les périls des généreux légionnaires de leurs cantons (1). Détrompez-vous, peuples aveuglés; consultez les électeurs que vous honorâtes de votre confiance, ils vous diront que la religion n’est pour rien dans nos troubles; ils vous diront que, dans l'assemblée électorale, composée de 526 membres, une majorité de plus de 400, dont plus de la moitié est catholique, a toujours été opposée à une centaine ce malveillants �parmi lesquels même il se trouvait des protestants . Ils vous diront que les vrais catholiques demandaient qu’on flétrît, par une adresse rigoureuse, ces délibérations des soi-disant catholiques de Nîmes, d'Uzès et d’Alais, qui ont excité l’indignation de toute la France. Et vous, prudents et généreux habitants de Beaucaire, vous qui avez retenu cette foule qui courait à sa perte pour un intérêt imaginaire, et qui avez épargné à la ville de Nîmes de nouveaux massacres et de nouvelles douleurs; vous aussi, sage vicaire de Bellegarde, qui dessillâtes les yeux de vos ouailles un moment aveuglées, qui les désarmâtes par vos instances et les contîntes par votre courage; vous tous enfin, dont la foi ne saurait être suspecte, parlez, dites à vos voisins ce que vous pensez de l’origine de nos malheurs; et qu’ils apprennent, par votre exemple, à ne s’armer que pour la Constitution, qui est la plus sûre sauvegarde de la religion. Enfin, que les ennemis de la Révolution, que ceux qu’on lui suscite, que ceux qu’un égare, viennent voir parmi nous l’un des plus beaux effetsdupatriotismeetde la liberté; qu’ils viennent au club des amis de la Constitution, dans cette société patriotique, où les hommes de toutes les religions sont indistinctement admis, ils y verront les familles des malheureux que nos désordres ont plongés dans la misère(2), amis ou ennemis, catholiques et protestants, tous également secourus, également appelés au pariage des bienfaits de l’assemblée patriotique de Marseille et des amis de la Constitution de Nîmes; 50 charges de blé.envoyéesendon par ces généreux Provençaux (1) Nous avons reconnu parmi eux, M. Solier, prieur de Cologne, M. Brémond , curé d’Anduze, M. Boulet , curé du Puechredon, M. Chabert, curé de Boissière, M ..... , curé de Castelneau. Nous regrettons de ne pas savoir les noms des autres curés qui ont manifesté un patriotisme aussi rare. (2) On compte qu’environ 200 personnes ont été les victimes de nos désordres : on ne peu �évaluer avec exactitude le nombre des blessés. pour le soulagement des infortunés de notre ville ; plus de 6,000 livres déjà destinées au même usage; voilà ce qu’a produit la conformité des principes et des sentiments, parmi des hommes qui n’ont pas les mêmes opinions religieuses. La bienfaisance et le patriotisme doivent désormais nous rapprocher, et il n’est personne sans doute qui ne regarde comme son frère, le citoyen, quel que soit d’ailleurs son culte, qui exerce ces deux vertus. Nous venons de présenter le récit fidèle des faits principaux qui ont acquis la notoriété publique; la procédure commencée à la requête du ministère public portera jusqu’à l’évidence la vérité de ces détails historiques. Nous pouvons même avancer que les trames odieuses et les complots perfides des ennemis de la Constitution seront dévoilés. Attendons avec confiance les résultats des informations juridiques. Les magistrats qui en sont chargés y apportent le zèle le plus empressé, la vigilance la plus exacte, la justice la plus sévère. Déjà nous les avons vus affronter les plus grands périls, voler avec courage et avec ardeur sur tous les lieux où les crimes multipliés rendaient ledanger plusimminent, constater les corps de délit et consacrer les instants du sommeil à éclairer leur justice. Ils ont acquis des droits à notre reconnaissance, ces magistrats vertueux, et les noms de MM. Fajon et Brunei de La Bruyère, seront cités avec ceux des juges les plus digne s de l’estime publique. L’heureux succès de la Révolution qui s’est opé rée dans la ville de Nîmes prépare à ses habitant des jours fortunés. Notre garde nationale, sou les auspices de ses nouveaux chefs, et soumise un nouveau régime, veillera à la sûreté de se concitoyens : des administrateurs vertueux e honorés entretiendront dans nos murs la paix e la concorde; et nos généreux voisins, toujours prêts à nous secourir, seront l’effroi des ennemis de la Constitution, s’il en existe encore dans nos contrées. La garde nationale ayant paru désirer une manifestation publique de son respect pour la religion, son conseil d’administration adoptant la proposiiion de M. d’Aubry, colonel, a délibéré qu’il sera célébré, les dimanches et fêtes, une messe pour la garde nationale, qui sera dite dans l’église des Carmes, par M. Boucarut, prêtre vraiment patriote, que ce conseil a choisi pour aumônier de la garde nationale. Enfin, le club des amis de la Constitution a délibéré, dans sa séance du 27 de ce mois, qn’il serait célébré le jeudi suivant, dans la même église, un service solennel pour ceux qui ont péri dans cette révolution. PIÈCES JUSTIFICATIVES. Copie de la lettre de M. Descombiês à M. de Bouzzols. I. ADRESSE. A Monsieur le marquis de Bouzzols, commandant de la province de Languedoc , chez M. d’Eyga-liers, à la Grand'Rue , à Montpellier. Monsieur, les dragons protestants ont attaqué, 34B [Afeiëfflbléë flàtiôhale.] ftfteHIVËS �ÂALEMENTAlkES. [19 février 179i.j sür les 6 heiires du soir, les catholiques ; pîü-siears ont été tués et beaucoup dé blessés; le désordre est affreuk, l’alarmé est générale; le drapeau rouge à été repoussé et arraché des mains du municipal; et la münicipa'ité est dispersée. Vainement ai-jé cliérthé à me conéetter avec un d’eux ; ils Se sont retirés âprëS avoii' fait ce qu’on peut attendre de magistrats patriotes et généreux. 11 est cependant absolument nécessaire de ramener l’ordre dans la tille; et le seul moyen qu’il y ait, c’est de nous donner uti secoués assez fort pou<- éii imposer aux ennemis dé la paix, quels qu’ils soient. Je vous prie donc, Monsieur, eti ma qualité de notable de la municipalité et vu lés circonstances, de vouloir envoyer, sans perdre Un seul mOttieht, un ordre au régiment du roi, dragons, pdür sé rendre en bi tte ville. Je m’oblige de faite approuver ma réquisition par toute la municipalité ; et comme citoyen et bon Français, j’ai l’honrteur de vous assurer, Monsieur, qUe la présence de ce régiment ramènera tous les esprits à la paix et fera finir tous les malheurs arrivés et prêts à ?e renouveler, desquels jë ne ptiis àvbir l’bunneur de vous donner encore iib détail circonstancié. Je suis avec respect, etc. Signé : DbsGOMBiÈs, aücien pagë du roi, notable et électeur. II. Copie d’une lettre clu sieur Froment ; capitaine de la compagnie n° 39; Exprès-, ADRESSE A Monsieur , Monsieur le marquis de Bouzzôls , commandant en second de là provitibe de Languedoc , à Montpellier. Monsieur, vainement j’ai réclamé jusqu’à ce jour IVinement des compagnies catholiques , malgré l’ordre c;ue vous avez bien Voulu m’accorder; les officiers municipaux ont crû qu’il ët dt de la prudence de retarder la livraison des fusils jusqu’apiès l’assemblée électorale. Aujourd'hui les dragons protestants ont attaqué et tué plusieurs de nos catholiques désarmés. Voüs pouvez juger du désordre et de l’alarme qui régnent dans la ville. Je vous supplie, eu ma qualité de citoyen et de bon Français, d’envoyer de suite un ordre au régiment du roi, dragons, pour venir mettre le bon ordre dans la vil e et en imposer aux. ennemis delà paix. La municipalité est dispersée, personne n’ose sortir des maisons, et si elle ne vous fait aucune réquisition dans le moment, c’est que chacun de ses membres tremble pour ses jours et n’osé se montrer. On a sorti deux drapeaux rouges, et les officiers municipaux, sans gardes, ont été obligés de se réfugier chez de bons patriotes. Quoique simple citoyen, je me permets de réclamer auprès de vous, parce que je pense que les protestants ont déjà envoyé dans le Vaunage et la Gardonnenque poür demander des secours, et que 1 arrivée des fanatiques de ces Contrées exposerait tou> les bons Français à être égorgés. Daignez avoir égard à ma demande, je l’attends de votre bonté et de voire justice. Jé suis avec respect, Monsieur, vôtre très humble et très obéissant serviteur. Signé : Froment, Gapitaine dé la compagnie n° 39. HI. Copie d’un certificat. .Nous, soussigné, notable de la municipalité de Nîmes et électeur, prions tous ceux qui sont à prier» de, lai-ser librement passer les nommés Dupré et Lieutaud, habitants de la ville de Nîmes, pour aller porter une lettre à M. le commandant (je. la province, pour les affaires du roi et de l’Etat. En foi de quoi nous avons signé le présent. A Nîmes, cé 13 juin 1790. Descombiès, notable et électeur. Je certifie que lesdits Dupré et Lieutaud sont habitants et légionnaires de Nîmes. En foi de quoi leur ai délivré le présent. FromenTj capitaine de la légion nîrùoise. IV. A Monsieur le commandant des troupes de ligne , pour communiquer aux légionnaires campés à l’Esplanade. Monsieur; on vient de nous dire que vous proposez la paix. Nous l’avons toujours désirée, et jamais nous ne l’avons troublée. Si ceux qui sont la cause des désordres affreux qui régnent dans la ville veulent mettre fin à leur coupable conduite, nous offrons d’oublier le passé et de vivre en frères. Noüs sommes, avec toute la franchise et la loyauté de bons patriotes et de vrais Français, vos très humbles serviteurs. Les capitaines cle la légion Wtrà'oise , commandant les tours du bhaléau. Nîmes, le 14 juin 1790, à quatre heures du soir. V RAPPORT fait par M. Magnan, un des valets de la ville d’Arles , du message qui lui avait été donné par M. le maire de la même villa Je soussigné André Magnan, valet de Ville au service de la commune d’Arles, certifie que hier, à 8 hëtlres du soir, je fus commandé par M. le rüâire de la ville d’Arles, d’aller à Nîmes porter une lettre à l’adresse des membres du club des amis de la Constitution ; qu’étant parti tout de suite à cheval, j’arrivai à Bellegardeà 10 heures moins 1/4, où je descendis à l’auberge du Lion d’or , soupai et restai jusqu’à 3 heures du matin, époque à laquelle je poursuivis ma route; qu’étant arrivé au devant du château de Vendar-gues, je trouvai un poste d’environ 10 hommes armés de différentes pièces, qui me demandèrent qui j’étais, où j’àllâis, à qtibi jë satisfis [Assemblée nationale.] 347 ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 février 1791;] avec vérité. Le commandant de ce poste me demanda ensuite si je ne portais point de papiers, je répondu que j’é ais muni d’un pa sei ort de ia municipalité d’Arl que je lui montrai, et sur ce que j’y étais qualifié de valet de ville, ils observèrent que vraisemblablement j’étais porteur d'autres papiers qu’ils m’obligèrent de représenter : à quoi je souscrivis en livrant mon port f uilie dans lequel se trouvait la lettre à l’adresse du club, dont ils s’emparèrent , en me disant qu’il fallait que j’alla�e à un château peu éloigné, qbe j’appris bientôt être celui de La Coste dd Belle-Vue, oü se trouvait M.dé La Baulme, officier municipal deNîme-. Arrivés ce châteaü, je trouvai un autre po.Ae d’environ 40 hommes, quadfié, s» Ion ce que j’euten As; de Poste du Pont d'Arles. Le cumibandadt de ce poste m’ordonna d’atterld'e que M. de La B mime lût levé. Une demi-heure après sb présenta un prêtre qu’on me dit être le curé de Boullargues, qui me demanda de lui remettre la lettre dont j’étais portelir et qu’on m’avait rendue dans la rou'e. Je lui observai qu’on m’avait promis de me faire parler à M. de La Baulme pour la lui montrer; et, sur cette observation, ce prêtre trie dit de monter avec lui à son appartement. Arrivé au premier palier de l’escalier; je trouvai Mraè de La Baulme qui m’enlevâ la lettre, après m’avoir ordonné de la lui faire voir, et m’ordonna d’at-tendre.23 minutes après parut M. de la Baûlmé, en m’invitant d’entrer dans un cabinet, et me disant qu’on allait adresser à M. le chevalier d’Antoneile, maire d’Arl s, uneréponsè à la lettre dont j’étais porteur ; que cette réponse serait faite par le capitaihedu poste ; ils entrèrent alors dans un second cabinet et me dirent de descendre. Quelque teulps après on me Ht remonter et ou me lut la lettre adressée à M. le chevalier d’Antonelle; et pendant qu’on 'a lisait, j’aperçus sur uu bureau la lettre adressée ad club des amis de la Constitution, ouverte et dépliée au point que je lus distinctement la smnatuie de M. le chevalier d’Atnonel e. Je descendis alors pour retournera Arles; et au inomedt où j’allais prendre mon cheval, l’officier commandant me redemanda la lettre adressée à M. le chevalier d’Antoti'ile, en me disant qu’od avait oublié d’y insérer quelque chose; j’auendis q mlque temps et bientôt se présentèrent M. de La Baulme, le même officier, trois ou quatre abbés et plusieurs personnes armées; étayant prié l’officier de me rendre la lettre adressée à M. le chevalier d’Antonelle, M. de La Baulme répondit que cela n’était pas nécessaire; mais sur ma représentation que je serais exposé a des reproches on me donna ïe certificat dont la teneur suit : « Je certifie que le porieur de la lettre de » M. le chevalier d’Antonelle a été arrêté par la * troupe qui était de garde au Pont d’Arles, et « que cette lettré sera envoyée à Ni nies par l’of-« ticier de garde* et que le porteur a été invité « de retourner à Arles. Le quinze juin mil sept « eeut quatre-vingt-dix. » Signé: La Baulme. Après quoi, je fus prendre mon cheval et m’en retournai en cette ville d’Arles, où je suis arrivé à midi et demi et où j’ai tout de suite dressé le présent procès-verbal, auquel restera annexé le susdit certificat, pour ie tout 'servir et valoir ce que de raison. En foi de quoi, à Arles, le quinze juin mil sept cent quatre-vingt-dix. Magnan, valet de ville à Arles; Nous soussignés, maire et officiers municipaux de cette ville d’Arles; certifions et attestons que le nommé Atldré Magnan, valet de ville au service de la commune d * cette ville; a dicté eu notre présence le procès-verbal ci-déssus au secrétaire greffier qui l’a rédigé sous sa dictée, et qu’il l’a signé tout de suite, après l’avoir lu et relu, et y avoir persisté. En foi dé quoi, à Arles; lë quinze juin mil sept cent quatre-vingt dix. Signé: ie chevalier, d’Ântonellë, maire ; Eyminy;. Imbert; Maurel; RousseU Bmt; Meyer; Baudessêau; officiers münieljjaux; Gaùtlieaume, su bstitut subrogé du P. D. L.C. Frahrony, major de là garde nationale d’Arles, témoin du récit; Boülouvàru, capitaine des dragons d’Arles, Baprachin, témoin du récit dudit Magnan ; Magnan, v. let de ville à Arles; Constant, secrétaire-greffier. Pdr le club des amis de la Gdnstitutidn ; ÀùBRY, président , Gourbis, Vincent Plaucuut, J. Pieyre le fils, Hébert le fils, secrétaires. cinquième Annexe. déclaration de quelques députés de la ci-devant sénéchaussée de nimes ( Soustelle , Chamboii, Voulland )* relative a UN LIBELLE INTITULÉ ; MÉMOIRE DU MASSACRE DES CATHOLIQUES DE NIMES. Nous soussignés, députés de la ci-devant sénéchaussée do Nimes, aujourd’hui déparlement du Gard; à i’Assembiée nationale; ayant appris qu’on avait imprimé et distribué à Lyon un écrit incendiaire et calomnieux intitulé: Mémoire du massacre des catholiques de Nîmes et signé Froment, nous déclarons et avertissons le public: Que l’auteur de ce mémoire, aujourd’hui réfugié à Turin, a été décrété au corps comme l’ün des auteurs et instigateurs des troubles excités à Nîmes; qu’à une violente haine contre la Constitution, à un fanatisme offre é, il joignait des motifs de vengeance contre les négociants de Nîmes, la plupart protestants, sur la plainte desquels son père avait été décrété de prise de corps par la cour des aides pour fait de falsification des registres des impositions ; Que la première de ses démarches fut de se lier à d’autres particuliers pour former des compagnies entièrement composées de catholiques, première source des maux, de la ville de Nimes, mesure perfide dont le b it était d’échauffer les esprits, sous prétexte de religion (1); Qu’au mois de mars, et sept jours après la fameuse molion de Dom Gerle, les capitaines de ces compagnies et d’autres ennemis de la Révolution ou séduits par eux signèrent les délibérations (1) Ces compagnies étaient composées de journaliers hors d'état d’acheter les habits verts qui leur furent faits et dont les besoins ne leur permettaient pas de se asser de leur travail ou d’un salaire pbur lë ebih-èaâfer.