404 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [16 août 1790.] M. l’abbé Gouttes. L’improbation d’un jurisconsulte anglais nous est assez indifférente parce que nous ne sommes pas Anglais et que nous n’avons pas besoin des lois anglaises. M. Rewbell. M. l’abbé Maury ne ménage point l’Assemblée et lui manque volontiers de respect. M. l’abbé Maury. Si lorsqu’on dit la vérité à l’Assemblée, on lui manque de respect, je suis coupable. Pour moi, j’estime que ce serait trahir sa gloire que de ne pas lui signaler les erreurs qu’elle peut commettre de bonne foi et je crois que je lui témoigne un respect plus sincère que celui de ses flatteurs en l’empêchant de tomber dans l’injustice. M. Boutteville-Dumetz . Je demande à répondre aux erreurs que vient d’avancer l’académicien abbé Maury. (On rit). M. Malouet. Je veux présenter une seule observation. Une faut pas argumenter de la signification du mot jury en Angleterre, par rapport à ce qui se passe chez nous. Le comité de la marine, en adoptant le mot, n’a pas entendu lui donner les conséquences qui en découlent pour les Anglais. M. Duport. Je ne sache point qu’on ait fait venir un jurisconsulte très éclairé d’Angleterre. Je connais un jurisconsulte anglais célèbre qui convient de la sagesse de ce que nous venons de faire en France. M. Goupil. Des circonstances particulières ont peut-être déterminé le comité de la marine ; je m’en rapporte à lui. Mais lorsqu’on veut vous faire entendre qu’il est de l’essence de la procédure par jurés, de n’être point écrite, je proteste. On vous a fait entendre que c’est dans l’intérêt de la justice que la procédure ne doit pas être écrite parce que lesjurés se déterminent sur l’altération ou l’état paisible de la physionomie, sur la contenance de l’accusé ; peut-on interpréter équitablement la contenance et la physionomie d’un homme que l’inquiétude, la bonté d’être accusé feraient si souvent prendre pour un coupable? Si cette méthode atroce était admise, Suellesconséquences inévitables n’aurait-elle pas? n juré tiendrait dans ses mains le sort de l’accusé; un juré pourrait assassiner légalement et il serait impuni. Oui, l’impunité serait assurée par ce moyen au juré. Qui pourrait, en effet, lui dire qu’il n’a pas jugé sur des preuves suffisantes quand un démenti de sa part confirmerait la sentence qu’il aurait rendue ? Si nous interrogeons la jurisprudence anglaise, nous trouvons des jurés accusés de prévarication, des jurés iniques. S’ils ne sont pas incapables de prévariquer, comment introduire parmi nous cet ordre monstrueux de procédure qui ne laisserait subsister aucune trace du crime commis au nom de la loi? Je vais plus loin, ce juré aura entendu les témoins. Un malheureux accusé aura succombé sous le témoignage d’un scélérat et vous lui enlèveriez, par l’institution projetée, ce grand succès pour l’humanité, de découvrir la fausseté du témoignage sur lequel il aurait été condamné?... Ce peude mots et vos réflexions, Messieurs, vous empêcheront sans doute que l’on prononce sur la vie d’un accusé sans qu’il en reste des traces et un monument écrit des preuves qui auront été alléguées contre lui. Je conclus à ce que la procédure par jurés soit écrite. (Cet amendement est mis aux voix et adopté.) M. de Lachèze. Je propose de laisser à l’accusé la faculté de choisir un défenseur. (Cet amendement est adopté.) M. de Champagny. Par suite des résolutions que l’Assemblée vient de prendre, les articles en discussion doivent être refondus. Voici la nouvelle rédaction que nous avons l'honneur de vous soumettre : «Art. 8. La requête en plainte ayant été répondue d'un soit fait ainsi qu'il est requis , sera remise à l’officier chargé du détail, et le commandant de vaisseau procédera à la formation du jury, en indiquant sur le rôle de quart, dont ne sera pas l'accusé, un nombre double de chaque grade, dont il sera loisible à l’accusé de récuser la moitié; l’accusé pourra, s’il le veut, choisir un défenseur. « Art. 9. La récusation ayant été exercée par l’accusé, ou dans le cas où il y renoncerait, le jury s’étant réduit au nombre de sept par la voie du sort, s’assemblera sur-le-champ, et le lieutenant chargé du détail procédera en sa présence à l’audition des témoins, confrontation et interrogatoire de l’accusé. « Art. 10. La procédure ainsi faite en présence du jury sera rédigée par écrit et annexée au rôle d’équipage. » M. le Président met successivement aux voix ces trois articles. Us sont adoptés. La séance est levée à dix heures du soir. PREMIÈRE ANNEXE A LA SÉANCE DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE DU 16 AOUT 1790. DÉCRET sur l'organisation judiciaire, du 16 août 1790, sanctionné par lettres patentes du 24 du même mois. Titre Ier. — Des arbitres. Art. 1er. L’arbitrage étant le moyen le plus raisonnable de terminer les contestations entre les citoyens, les législatures ne pourront faire aucunes dispositions qui tendraient à diminuer soit la faveur, soit l’effi cacité des compromis. Art. 2. Toutes personnes ayant le libre exercice de leurs droits et de leurs actions, pourront nommer un ou plusieurs arbitres pour prononcer sur leurs intérêts privés, dans tous les cas, et en toutes matières sans exception. Art. 3. Les compromis, qui ne fixeront aucun délai dans lequel les arbitres devront prononcer, et ceux dont le délai sera expiré, seront néanmoins valables, et auront leur exécution, jusqu’à ce qu’une des parties ait fait signifier aux arbitres qu’elle ne veut plus tenir à l’arbitrage. Art. 4. Il ne sera pas permis d’appeler des sentences arbitrales, à moins que les parties ne [Assemblé® nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES . [10 août 1790.1 105 se soient expressément réservées par le compromis la faculté de l’appel. Art. 5. Les parties qui conviendront de se réserver l’appel, seront tenues de convenir égale-lement par le compromis, d’un tribunal entre tous ceux du royaume auquel l’appel sera déféré, faute de quoi l’appel ne sera pas reçu. Art. 6. Les sentences arbitrales dont il n’y aura pas d’appel seront rendues exécutoires par une simple ordonnance du président du tribunal du district, qui sera tenu de la donner au bas ou en marge de l’expédition qui lui sera présentée. Titré IL — Des juges en général. Art. 1er. La justice sera rendue au nom du roi. Art. 2. La vénalité des offices de judicature est abolie pour toujours; les juges rendront gratuitement la justice et seront salariés par l’Etat. Art. 3. Les juges seront élus par les justiciables. Art. 4. Ils seront élus pour six années ; à l’expiration de ce temps, il sera procédé à une élection nouvelle, dans laquelle les mêmes juges pourront être réélus. Art. 5. Il sera nommé aussi des suppléants qui, selon l’ordre de leur nomination, remplaceront, jusqu’à l’époque de la prochaine élection, les juges dont les places viendront à vaquer dans le cours des six années. Une partie sera prise dans la ville même du tribunal, pour servir d’assesseurs, en cas d’empêchement momentané de quelques-uns des juges. Art. 6. Les juges élus et les suppléants, lorsqu’ils devront entrer en activité après la mort ou la démission des juges, recevront du roi des lettres patentes, scellées du sceau de l’Etat, lesquelles ne pourront être refusées, et seront expédiées, sans retard et sans frais, sur la seule présentation du procès-verbai d’élection. Art. 7. Les lettres patentes seront conçues dans les termes suivants : « Louis.... les élec-« teurs du district de.. . nous ayant fait présenter « le procès-verbal de l’élection qu’ils ont faite, « conformément aux décrets constitutionnels, de * la personne du sieur.... pour remplir pendant « six années un office de juge du district de ..... « nous avons déclaré et déclarons que ledit « sieur ..... est juge du district de.... qu’honneur « doit lui être porté en cette qualité, et que la « force publique sera employée, en cas de « nécessité, pour l’exécution des jugemens aux-« quels il concourra, après avoir prêté le serment « requis, et avoir été dûment installé. » Art. 8. Les officiers chargés des fonctions du ministère public seront nommés à vie par le roi, et ne pourront, ainsique les juges, être destitués que pour forfaiture dûment jugée par juges compétents. Art. 9. Nul ne pourra être élu juge ou suppléant, ou chargé des fonctions du ministère public, s’il n’est âgé de 30 ans accomplis, et s’il n’a été pendant 5 ans juge ou homme de loi exerçant publiquement auprès d’un tribunal. Art. 10. Les tribunaux ne pourront prendre directement ou indirectement aucune part à l’exercice du pouvoir législatif, ni empêcher ou suspendre l’exécution des décrets du Corps législatif sanctionnés par le roi, à peine de forfaiture. Art. 11. Ils seront tenus de faire transcrire purement et simplement, dans un registre particulier, et de publier, dans la huitaine, les lois qui leur seront envoyées. Art. 12. Ils ne pourront point faire de règlements ; mais ils s’adresseront au Corps législatif toutes les fois qu’ils croiront nécessaire, soit d’interpréter une loi, soit d’en faire une nouvelle, Art. 13. Les fonctions judiciaires sont distinctes, et demeureront toujours séparées des fonctions administratives : les juges ne pourront, à peine de forfaiture, troubler, de quelque manière que ce soit, les opérations des corps administratifs, ni citer devant eux les administrateurs pour raison de leurs fonctions. Art. 14. En toute matière civile ou criminelle, les plaidoyers, rapports et jugements seront publics ; et tout citoyen aura le droit de défendre lui-même sa cause, soit verbalement, soit par écrit. Art. 15. La procédure par jurés aura lieu en matière criminelle ; l’instruction sera faite publiquement et aura la publicité qui sera déterminée. Art. 16. Tout privilège en matière de juridiction est aboli : tous les citoyens, sans distinction, plaideront en la même forme, et devant les mêmes juges, dans les mêmes cas. Art. 17. L’ordre constitutionnel des juridictions ne pourra être troublé, ni les justiciables distraits de leurs juges naturels par aucunes commissions, ni par d’autres attributions ou évocations que celles qui seront déterminées par la loi. Art. 18. Tous les citoyens étant égaux devant la loi, et toute préférence pour le rang et le tour d’être jugéétantune injustice, toutes les affaires, suivant leur nature, seront jugées lorsqu’elles seront instruites, dans l’ordre selon lequel le jugement en aura été requis par les parties. Art. 19. Les lois civiles seront revues et réformées par les législatures; et il sera fait un code général de lois simples, claires et appropriées à la Constitution. Art. 20. Le code de la procédure civile sera incessamment réformé, de manière qu’elle soit rendue plus simple, plus expéditive et moins coûteuse. Art. 21 . Le code pénal sera incessamment réformé, de manière que les peines soient proportionnées aux délits ; observant qu’elles soient modérées, et ne perdant pas de vue cette maxime de la déclaration des droits de l’homme, que la loi ne peut établir que des peines strictement et évidemment nécessaires. Titre III. — Des juges de paix. Art. 1er. II y aura dans chaque canton un juge de paix et des prudhommes assesseurs du juge de paix. Art. 2. S’il y a dans le canton une ou plusieurs villes ou bourgs dont la population excède deux mille âmes, ces villes ou bourgs auront un juge de paix et des prudhommes particuliers. Les villes et bourgs, qui contiendront plus de huit mille âmes, auront le nombre de juges de paix qui sera déterminé parle Corps législatif, d’après les renseignements qui seront donnés parles administrations de département. Art. 3. Le juge de paix ne pourra être choisi que parmi les citoyens éligibles aux administrations de département et de district, et âgés de 30 ans accomplis, sans autre condition d’éligibilité. 406 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, [16 aoflt t790.] Art. 4. Le juge de paix sera élu au scrutin in-1 dividuel, et à la pluralité absolue des suffrages, par les citoyens actifs réunis en assemblées primaires. S’il y a plusieurs assemblées primaires dans le canton, le recensement de leurs scrutins particuliers sera fait en commun par des commissaires de chaque assemblée; il en sera de même dans les villes et bourgs au-dessus de huit mille âmes, à l’égard des sections qui concourront à la nomination du même juge de paix. Art. 5. Une expédition de l’acte de nomination du juge de paix sera envoyée et déposée au greffe du tribunal de district. L’acte de nomination et celui du dépôt au greffe tiendront lieu de lettres patentes au juge de paix. Art. 6. Les mêmes électeurs nommeront, parmi les citoyens actifs de chaque municipalité, au scrutin de liste et à la pluralité relative, quatre notables destinés à faire les fonctions d’assesseurs du juge de paix. Ce juge appellera ceux qui seront nommés dans la municipalité du lieu où il aura besoin de leur assistance. Art. 7. Dans les villes et bourgs dont la population excédera huit mille âmes, les prudhommes assesseurs seront nommés en commun par les sections qui concourront à l’élection d’un juge de paix ; elles recenseront à cet effet leurs scrutins particuliers, comme il est dit en l’article 4 ci-dessus. Art. 8. Le juge de paix et les prudhommes seront élus pour deux ans, et pourront être continués par réélection. Art. 9. Le juge de paix, assisté de deux assesseurs, connaîtra avec eux de toutes les causes purement personnelles et mobilières, sans appel jusqu’à la valeur de 50 livres et à charge d’appel jusqu’à la valeur de 100 livres ; en ce dernier cas, ses jugements seront exécutoires, par provision, nonobstant l’appel, en donnant caution. Les législatures pourront élever le taux de cette compétence. Art. 10. U connaîtra de même sans appel jusqu’à la valeur de 50 livres, et à charge d’appel, à quelque valeur que la demande puisse monter ; 1° Des actions pour dommages faits, soit par les hommes, soit par les animaux aux champs, fruits et récoltes ; 2° Des déplacements de bornes, des usurpations de terres, arbres, haies, fossés et autres clôtures, commises dans l’année, des entreprises sur les cours d’eau servant à l’arrosement des prés, commises pareillement dans l’année, et de toutes autres actions possessoires; 3° Des réparations locatives des maisons et fermes ; 4° Des indemnités prétendues par le fermier ou locataire pour non-jouissance, lorsque le droit de l’indemnité ne sera pas contesté, et des dégradations alléguées par le propriétaire ; 5° Du payement des salaires des gens de travail, des gages des domestiques, et de l’exécution des engagements respectifs des maîtres et de leurs domestiques ou gens de travail; 6° Des actions pour injures verbales, rixes et voies de fait pour lesquelles les parties ne se seront pas pourvues par la voie criminelle. Art. 11. Lorsqu’il y aura lieu à l’apposition des scellés, elle sera faite par le juge de paix, qui procédera aussi à leur reconnaissance et levée, mais sans qu’il puisse connaître des contestations qui pourront s’élever à l’occasion de cette reconnaissance. Il receyra les délibérations de famille pour la nomination des tuteurs, des curateurs aux agents et aux enfants à naître, et pour l’émancipation et la curatelle des mineurs, et toutes celles auxquelles la personne, l’état ou les affaires des mineurs et des absents pourront donner lieu pendant la durée de la tutelle ou curatelle; à charge derenvoyer devant les juges de district la connaissance de tout ce qui deviendra contentieux dans le cours ou par suite des délibérations ci-dessus. Il pourra recevoir, dans tous les cas, le serment des tuteurs et des curateurs. Art. 12. L’appel des jugements du juge de paix, lorsqu’ils seront sujets à l’appel, sera porté devant les juges du district, et jugé par eux en dernier ressort à l’audience, et sommairement, sur le simple exploit d’appel. Art. 13. Si le juge de paix vient à décéder dans le cours des deux années de son exercice, il sera procédé sans retard à une nouvelle élection; et dans le cas d’un empêchement momentané, il sera suppléé par un des assesseurs. Titre IV. — Des juges de première instance. Art. 1er. Il sera établi en chaque district un tribunal composé de cinq juges, auprès duquel il y aura un officier chargé des fonctions du ministère public. Les suppléants y seront au nombre de quatre, dont deux, au moins, seront pris dans la ville de rétablissement, ou tenus de l’habiter, Art. 2. Dans les districts où il se-trouvera une ville dont la population excédera cinquante mille âmes le nombre des juges pourra être porté à six, lorsque le Corps législatif aura reconnu la nécessité de cette augmentation, d’après les instructions des administrations de département. Ces six juges se diviseront en deux chambres qui jugeront concurremment, tant les causes de première instance, que les appels des jugements des juges de paix. Art. 3. Celui des juges qui aura été élu le premier, présidera; et dans les tribunaux qui se trouveraient divisés en deux chambres, le juge qui aurait été élu le second, présiderait à la seconde chambre, Art. 4. Les juges de district connaîtront en première instance de toutes les affaires-person-- nelles, réelles et mixtes, en toutes matières, excepté seulement celles qui on t été déclarées ci-dessus être de la compétence des juges de paix, les affaires de commerce dans les districts où il y aura des tribunaux de commerce établis, et le contentieux de la police municipale. Art. 5. Les juges de district connaîtront en pre* mier et dernier ressort de toutes affaires person-uelleset mobilières, jusqu’à la valeurde 1 ,000 livres de principal, et des affaires réelles dont l'objet principal sera de 50 livres de revenu déterminé, soit en rente, soit par prix de bail. Art. 6, En toutes matières personnelles, réelles ou mixtes, à quelque somme ou valeur que l’objet de la contestation puisse monter, les parties seront tenues de déclarer, au commencement de la procédure, si elles consentent, à être jugées sans appel, et auront encore, pendant tout le cours de l’instruction, la faculté d’en convenir ; auquel cas les juges de district prououceront en premier et dernier ressort. Art. 6. Lorsque le tribunal de district connaîtra, soit en première instance à charge d’appel, soit de l’appel des jugements des juges de paix, il pourra prononcer au nombre de trpis juges ; et lorsqu'il connaîtra dans tous les autres cas en der� Assemblée nationale.J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [16 août 1790.1 i07 nier ressort, soit par appel d’un autre tribunal de district, ainsi qu’il sera dit dans le titre suivant, soit au cas de l’article 5 ci-dessus, il pourra prononcer au nombre de quatre juges. Titre V. — Des juges d'appel. Art. 1er. Les juges de district seront juges d’appel les uns à l’égard des autres, selon les rapports qui vont être déterminés dans les articles suivants. Art. 2. Lorsqu’il y aura appel d’un jugement les parties pourront convenir d’un tribunal entre ceux de tous les districts du royaume, pour lui en déférer la connaissance; et elles en feront au greffe leur déclaration signée d’elles, ou de leurs procureurs spécialement fondés. Art. 3. Si les parties ne peuvent s’accorder pour le choix d’un tribunal, il sera déterminé selon les formes ci-dessous prescrites. Art. 4. Le directoire de chaque district proposera un tableau des sept tribunaux les pius voisins du district, lequel sera rapporté à l’Assemblée nationale, arrêté par elle, et ensuite déposé au greffe et affiché dans l’auditoire. Art. 5. L’un des sept tribunaux au moins sera choisi hors du département. Art. 6. Lorsqu’il n’y aura que deux parties, l’appelant pourra exclure péremptoirement, et sans qu’il puisse en donner aucun motif, trois des sept tribunaux composant le tableau. Art. 7. Usera libre à l’intimé de proposer une semblable exclusion de trois des tribunaux composant le tableau . Art. 8. S’il y a plusieurs appelants ou plusieurs intimés consorts, ou qui aient eu, en première instance, les mêmes défenseurs, ils seront respectivement tenus de se réunir et de s’accorder, ainsi qu’ils aviseront, pour proposer leurs exclusions. Art. 9. Lorsqu’il y aura eu en première instance trois parties ayant des intérêts opposés, et défendues séparément, chacune d’elles pourra exclure seulement deux des sept tribunaux du tableau. Si le nombre des parties est au-dessus de trois jusqu’à six, chacune d’elles exclura seulement l’un des sept tribunaux. Lorsqu’il y aura plus de six parties, l’appelant s’adressera au directoire de district qui fera au tableau un supplément d’autant de nouveaux tribunaux de district les plus voisins, qu’il y aura de parties au-dessus du nombre six. Art. 10. L’appelant proposera dans son acte d’appel l’exclusion qui lui est attribuée, et les autres parties seront tenues de proposer les leurs par acte au greffe, signé d’elles ou de leurs procureurs spécialement fondés, dans la huitaine franche après la signification qui leur aura été faite de l’appel ; et à l’égard de celles dont le domicile sera à la distance de plus de vingt lieues, le délai sera augmenté d’un jour pour dix lieues. Art. 11. Aucunes exclusions ne seront reçues de la part de l’appelant après l’acte d’appel de la part des autres parties après le délai prescrit dans l’article précédent. Art. 12. Lorsque les parties auront proposé leurs exclusions, si des sept tribunaux du tableau il n’en reste qu’un qui n’ait pas été exclu, la connaissance de l’appel lui sera dévolue. Art. 13. Si les parties négligent d’user de leur faculté d’exclure en tout ou en partie, ou si, eu égard au nombre des parties, les exclusions n’atteignent pas six des sept tribunaux du tableau, il sera permis à celle des parties qui ajopfnpra la première sur l’appel, de choisir celui des tribunaux non exclus qu’elle avisera ; et en cas de concurrence de date, le choix fait par l’appelant sera préféré. Art. 14. Nul appel d’un jugement contradictoire ne pourra être signifié ni avant le délai de huitaine, à dater du jour du jugement, ni après l’expiration de trois mois, à dater du jour de la signification du jugement faite à personne ou domicile : ces deux termes sont de rigueur, et leur inobservation emportera la déchéance de l’appel ; en conséquence, l’exécution des jugements qui ne sont pas exécutoires par provision demeurera suspendue pendant le délai de huitaine. Art. 15. La rédaction des jugements, tant sur l’appel qu’en première instance, contiendra quatre parties distinctes: Dans la première, les noms et les qualités des parties seront énoncés; Dans la seconde, les questions de fait et de droit qui constituent le procès, seront posées avec précision ; Dans la troisième, le résultat des faits reconnus ou constatés par l’instruction, et les motifs qui auront déterminé le jugement, seront exprimés ; " La quatrième enfin contiendra le dispositif du jugement. Titre VI. — De la forme des élections. Art. 1er. Pour procéder à la nomination des juges, les électeurs du district convoqués par le procureur-syndic se réuniront au jour et au lieu qui auront été indiqués par la convocation; et après avoir formé l’assemblée électorale dans les formes prescrites par l’article 24 de la première section du décret du 22 décembre dernier, ils éliront les juges au scrutin individuel et à la pluralité absolue des suffrages, Art. 2. Ceux des électeurs nommés par les précédentes assemblées primaires, qui se trou� vent membres des corps administratifs, pourront participer, comme électeurs, à la nomination des juges. Art. 3. Lorsqu’il s’agira de renouveler les juges après le terme de six ans, les électeurs seront convoqués quatre mois avant l’expiration de la sixième année, de manière que toutes les élections puissent être faites, et les procès-verbaux présentés au roi deux mois avant la fin de cette sixième année. Art. 4. Si, par quelqu’événement que ce puisse être, le renouvellement des juges d’un tribunal se trouvait retardé au delà de six ans, les juges en exercice seront tenus de continuer leurs fonc tions, jusqu’à ce que leurs successeurs puissent entrer en activité. Titre VII. — * De V installation des juges. Art. 1er. Lorsque les juges élus auront reçu les lettres patentes du roi, ils seront installés en la forme suivante : Art. 2. Les membres du conseil général de la commune du lien où le tribunal sera établi, se rendront en la salle d’audience et y occuperont le siège. Art. 3. Les juges introduits dans l’intérieur du parquet prêteront, à Ja nation et au roi, devant les membres du conseil général de la commune IQg [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES» [16 août 1790.] pour ce délégués par la Constitution, et en présence de la commune assistante, le serment de maintenir , de tout leur pouvoir , la Constitution du royaume , décrétée par V Assemblée nationale et acceptée par le roi , d’être fidèles à la nation , à la loi et au roi , et de remplir, avec exactitude et impartialité, les fonctions de leurs offices. Art. 4. Après ce serment prêté, les membres du conseil général de la commune, descendus dans le parquet, installeront les juges; et au nom du peuple prononceront, pour lui, l’engagement de porter au tribunal et à ses jugements le respect et l'obéissance que tout citoyen doit à la loi et à ses organes. Art. 5. Les officiers du ministère public seront reçus, et prêteront le serment devant les juges, avant d’être admis à l’exercice de leurs fonctions. Art. 6. Les juges de paix seront tenus, avant de commencer leurs fonctions, de prêter le même serment que les juges, devant le conseil générai de la commune du lieu de leur domicile. Titre VIII. — Du ministère public. Art. 1er. Les officiers du ministère public sont agents du pouvoir exécutif auprès des tribunaux ; leurs fonctions consistent à faire observer, dans les jugements à rendre, les lois qui intéressent l'ordre général,etàfaire exécuter les jugements rendus : ils porteront le nom de Commissaires du roi. Art'. 2. Au civil, les commissaires du roi exerceront leur ministère, non par voie d’action, mais seulement par celle de réquisition dans les procès dont les juges auront été saisis. Art. 3. Ils seront entendus dans toutes les causes des pupilles, des mineurs, des interdits, des femmes mariées, et dans celles où les propriétés et les droits, soit de la nation, soit d’une commune, seront intéressés ; ils sont chargés, en outre, de veiller pour les absents indéfendus. Art. 4. Les commissaires du roi ne sont point accusateurs publics; mais ils seront entendus sur toutes les accusations intentées et poursuivies suivant le mode que l’Assemblée nationale se réserve de déterminer. Ils requerront pendant le cours de l’instruction pour la régularité des formes, et avant le jugement pour l’application de la loi. Art. 5. Les commissaires du roi, chargés de tenir la main à l’exécution des jugements, poursuivront d’office cette exécution dans toutes les dispositions qui intéresseront l’ordre public; et en ce qui concernera les particuliers, ils pourront, sur la demande qui leur en sera faite, soit enjoindre aux huissiers de prêter leur ministère, soit ordonner les ouvertures de porte, soit requérir main-forte lorsqu’elle sera nécessaire. Art. 6. Le commissaire du roi, en chaque tribunal, veillera au maintien de la discipline et à la régularité du service dans le tribunal, suivant le mode qui sera déterminé par l’Assemblée nationale. Art. 7. Aucun des commissaires du roi ne pourra être membre des corps administratifs, ni des directoires, ni des corps municipaux. Titre IX. — Des greffiers. Art. 1er. Les greffiers seront nommés ausreutin et à la majorité absolue des voix par les juges qui leur délivreront une commission, et recevront leur serment. Ils ne pourront être parents ni alliés au troisième degré des juges qui les nommeront. Art. 2. Il y aura en chaque tribunal un greffier, âgé au moins de vingt-cinq ans, lequel sera tenu de présenter aux juges et de faire admettre au serment un ou plusieurs commis, également âgés au moins de vingt-cinq ans, en nombre suffisant pour le remplacer en cas d’empêchement légitime, desquels il sera responsable. Art. 3. Les greffiers seront tenus de fournir un cautionnement de 12,000 livres en immeubles, qui sera reçu par les juges. Art. 4. Ils serontnommésàvie/etnepourronfêtre destitués que pour cause de prévarication jugée. Art. 5. Le secrétaire-greffier, que le juge de paix pourra commettre, prêtera serment devant lui, et sera dispensé de tout cautionnement : il sera de même inamovible. Titre X. — Des bureaux de paix et du tribunal de famille. Art. 1er. Dans toutes les matières qui excéderont la compétence du juge de paix, ce juge et ses assesseurs formeront un bureau de paix et de conciliation. Art. 2. Aucune action principale ne sera reçue au civil devant les juges de district, entre parties qui seront toutes domiciliées dans le ressort du même juge de paix, soit à la ville, soit à la campagne, si le demandeur n’a pas donné, en tête de son exploit, copie du certificat du bureau de paix, constatant que sa partie a été inutilement appelée à ce bureau, ou qu’il a employé sans fruit sa médiation. Art. 3. Dans le cas où les deux parties comparaîtraient devant le bureau de paix, ildressera un procès-verbal sommaire de leurs dires, aveux ou dénégations, sur les points de fait : ce procès-verbal sera signé des parties, ou à leur requête il sera fait mention de leur refus. Art. 4. En chaque ville où il y aura un tribunal de district, le conseil général delà commune formera un bureau de paix, composé de six membres choisis pour deux ans, parmi les citoyens recommandables par leur patriotisme et leur probité, dont deux au moins seront hommes de loi. Art. 5. Aucune action principale ne sera reçue au civil dans le tribunal de district, entre parties domiciliées dans les ressorts de différents juges de paix, si le demandeur n’a pas donné copie du certificat du bureau de paix du district, ainsi qu’il est dit dans l’article 2, ci-dessus; et si les parties comparaissent, il sera de même dressé procès-verbal sommaire par le bureau de leurs dires, aveux ou dénégations sur lespointsde fait; lequel procès-verbal sera également signé d’elles, où mention sera faite de leur refus. Art. 6. La citation faite devant Je bureau de paix suffira seule pour autoriser les poursuites conservatoires, lorsque d’ailleurs elles seront légitimes; elle aura aussi l’effet d’interrompre la prescription, lorsqu’elle aura été suivie d’ajournement. Art. 7. L’appel des jugements des tribunaux de district ne sera pas reçu, si l’appelant n’a pas signifié copie du certificat du bureau de paix du district où l’affaire a été jugée, constatant que la partie adverse a été inutilement appelée devant ce bureau, pour être conciliée sur l’appel, ou qu’il a employé sans fruit sa médiation. Art. 8. Le bureau de paix du district sera en même temps bureau de jurisprudence charitable, chargé d’examiner les affaires des pauvres qui s’y présenteront, de leur donner des conseils, et de défendre ou faire défendre leurs causes. [Assemblée nationale.] 109 ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 116 août 1790.1 Art. 9. Le service qui sera fait par les hommes de loi dans les bureaux de paix et de jurisprudence charitable, leur vaudra l’exercice public des fonctions de leur état auprès des tribunaux, et le temps en sera compté pour l’éligibilité aux places de juge. Art. 10. Tout appelant dont l’appel sera jugé mal fondé, sera condamné à une amende de 9 livres pour un appel du jugement des juges de paix, et de 60 livres pour l’appel d’un jugement du tribunal de district, sans que cette amende puisse être remise ni modérée sous aucun prétexte. Elle aura également lieu contre les intimés qui n’auront pas comparu devant le bureau de paix, lorsque le jugement sera réformé ; et elle sera double contre ceux qui, ayant appelé sans s’être présentés au bureau de paix, et en avoir obtenu le certificat, seront par cette raison jugés non-recevables. Art. 11. Le produit de ces amendes versé dans la caisse de l’administration de chaque district, sera employé au service des bureaux de jurisprudence charitable. Art. 12. S’il s’élève quelque contestation entre mari et femme, père et fils, grand-père et petit-fils, frères et sœurs, oncles et neveux, ou entre alliés aux degrés ci-dessus, comme aussi entre les pupilles et leurs tuteurs pour choses relatives à la tutelle, les parties seront tenues de nommer des parents, ou, à leur défaut, des amis ou voisins pour arbitres, devant lesquels ils éclairciront leur différend, et qui, après les avoir entendus et avoir pris les connaissances nécessaires, rendront une décision motivée. Art. 13. Chacune des parties nommera deux arbitres ; et si l’une s’y refuse, l’autre pourra s’adresser au juge qui, après avoir constaté le refus, nommera les arbitres d’office pour la partie refusante. Lorsque les quatre arbitres se trouveront divisés d’opinion, ils choisiront un surarbitre pour lever le partage. Art. 14. La partie qui se croira lésée par la décision arbitrale, pourra se pourvoir par appel devant le tribunal du district, qui prononcera en dernier ressort. Art. 15. Si un père, ou une mère, ou un aïeul, ou un tuteur a des sujets de mécontentement très graves, sur la conduite d’un enfant ou d’un pupille dont il ne puisse plus réprimer les écarts, il pourra porter sa plainte au tribunal domestique de la famille assemblée au nombre de huit parents les plus proches, ou de six au moins, s’il n’est pas possible d’en réunir un plus grand nombre; et, à défaut de parents, il y sera suppléé par des amis ou voisins. Art. 16. Le tribunal de famille, après avoir vérifié les sujets de plainte, pourra arrêter que l’enfant, s’il est âgé de moins de 21 aos accomplis, sera renfermé pendant un temps qui ne pourra excéder celui d’une année, dans les cas les plus graves. Art. 17. L’arrêté de la famille ne pourra être exécuté qu’après avoir été présenté au président du tribunal du district, qui en ordonnera ou refusera l’exécution, ou en tempérera les dispositions, après avoir entendu le commissaire du roi chargé de vérifier, sans forme judiciaire, les motifs qui auront déterminé la famille. Titre XI. — Des juges en matière de police. Art. 1er. Les corps municipaux veilleront et tiendront la main, dans l’étendue de chaque municipalité, à l’exécution des lois et des règlements de police, et connaîtront du contentieux auquel cette exécution pourra donner lieu. Art.2. Le procureur de la commune poursuivra, d’office, les contraventions aux lois et aux règlements de police; et cependant chaque citoyen, qui en ressentira un tort ou un danger personnel, pourra intenter l’action en son nom. Art. 3. Les objets de police confiés à la vigilance et à l’autorité des corps municipaux sont : 1° Tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques; ce qui comprend le nettoiement, l’illumination, l’enlèvement des encombrements, la démolition ou la réparation des bâtiments menaçant ruine, l’interdiction de rien exposer aux fenêtres ou autre partie des bâtiments qui puisse nuire par sa chute, et celle de rien jeter qui puisse blesser ou endommager les passants, ou causer des exhalaisons nuisibles ; 2° Le soin de réprimer et de punir les délits contre la tranquillité publique, tels que les rixes et disputes accompagnées d’ameutements dans les rues, le tumulte excité dans les lieux d’assemblées publiques, les bruits et attroupements nocturnes qui troublent le repos des citoyens ; 3° Le maintien du bon ordre dans les endroits où il se fait de grands rassemblements d'hommes, tels que les foires, marchés, réjouissances et cérémonies publiques, spectacles, jeux, cafés, églises et autres lieux publics; 4° L’inspection sur la fidélité du débit des denrées qui se vendent au poids, à l’aune ou à la mesure, et sur Ja salubrité des comestibles exposés en vente publique; 5° Le soin de prévenir par les précautions convenables, et celui de faire cesser par la distribution des secours nécessaires, les accideuts et fléaux calamiteux, tels que les incendies, les épidémies, les épizooties, en provoquant aussi dans ces deux derniers cas l’autorité des administrations de département et de district ; 6° Le soin d’obvier ou de remédier aux événements fâcheux qui pourraient être occasionnés par les insensés ou les furieux laissés en liberté, et par la divagation des animaux malfaisants ou féroces . Art. 4. Les spectacles publics ne pourront être permis et autorisés que par les officiers municipaux. Ceux des entrepreneurs et directeurs actuels, qui ont obtenu des autorisations, soit des gouverneurs des anciennes provinces, soit de toute autre manière, se pourvoiront devant les officiers municipaux, qui confirmeront leur jouissance pour le temps qui en reste à courir, à charge d’une redevance envers les pauvres. Art. 5. Les contraventions à la police ne pourront être punies que de l’une de ces deux peines, ou de la condamnation à une amende pécuniaire, ou de l’emprisonnement par forme de correction, pour un temps qui ne pourra excéder trois jours dans les campagnes, et huit jours dans les villes, dans les cas les plus graves. Art. 6. Les appels des jugements en matière de police seront portés au tribunal du district, et seront exécutés par provision, nonobstant l’appel et sans y préjudicier. Art. 7. Les officiers municipaux sont spécialement chargés de dissiper les attroupements et émeutes populaires, conformément aux dispositions de la loi martiale, et responsables de leur négligence dans cette partie de leur service. 110 [Assemblée nationale.! ARCHIVÉS PARLEMENTAIRES. [16 août 1790. Titre XII . — Des juges en matière de commerce. Art. 1er. Il sera établi un tribunal de commerce dans les villes où l’administration de département, jugeant cet établissement nécessaire, en formera ia demande. Art. 2. Ce tribunal connaîtra de toutes les affaires de commerce tant de terre que de mer, sans distinction. Art. 3. 11 sera fait un règlement particulier, pour déterminer, d’une manière précise, l’étendue et les limites de la compétence des juges de commerce. Art. 4. Ces juges prononceront en dernier ressort sur toutes les demandes dont l’objet n’excédera pas la valeur de 1000 livres. Tous leurs jugements seront exécutoires par provision, nonobstant l’appel, en donnant caution, à quelque somme ou valeur que les condamnations puissent monter. Art. 5. La contrainte par corps continuera d’avoir lieu pour l’exécution de tous leurs jugements; s’il survient des contestations sur la validité des emprisonnements, elles seront portées devant eux, et les jugements qu’ils rendront sur cet objet seront de même exécutés par provision, nonobstant l’appel. Art. 6. Chaque tribunal de commerce sera composé de cinq juges; iis ne pourront rendre aucun jugement, s’ils ne sont au nombre de trois au moins. Art. 7. Les juges de commerce seront élus dans l’assemblée des négociants, banquiers, marchands, manufacturiers, armateurs et capitaines de navire de la ville où le tribunal sera établi. Art. 8. Cette assemblée sera convoquée huit jours en avant par affiches et à cri public, par les juges-Gonsuls en exercice dans les lieux où ils sont actuellement établis, et pour la première fois par les officiers municipaux, dans les lieux où il sera fait un établissement nouveau. Art. 9. Nul ne pourra être élu juge d’un tribunal de commerce, s’il n’a résidé et fait le commerce au moins depuis cinq ans dans la ville où le tribunal sera établi, et s’il n’a trente ans accomplis : il faudra être âgé de trente-cinq ans, et avoir fait le commerce depuis dix ans pour être président. Art. 10. L’élection sera faite au scrutin individuel et à la pluralité absolue des suffrages ; et lorsqu’il s’agira d’élire le président, l’objet spécial de cette élection sera annoncé avant d’aller au scrutin. Art. 11. Les juges du tribunal de commerce seront deux ans en exercice. Le président sera renouvelé par une élection particulière tous les deux ans ; les autres juges le seront tous les ans par moitié. La première fois, les deux juges qui auront eu le moins de voix, sortiront de fonctions à l’expiration de la première année; les autres sortiront ensuite à tour d’ancienneté. Art. 12. Les juges de commerce, établis dans une des villes d’un district, connaîtront des affaires de commerce dans toute l’étendue du district. Art. 13. Iians les districts où il n’y aura pas de juges de commerce* les juges de district connaîtront de toutes les matières de commerce et les jugeront dans la même forme que les juges de commerce; leurs jugements seront de même sans appel jusqu’à la somme de 1000 liv., exécutoires nonobstant l’appel au-dessus de 1000 lit. en donnant caution, et produisant dans tous les cas la contrainte par corps. Art. 14. Dans les affaires qui seront portées aux tribunaux de commerce, les parties auront la faculté de consentir à être jugées sans appel, auquel cas les juges de commerce prononceront en premier et dernier ressort. Articles complémentaires. » Art. 1er. Les articles décrétés jusqu’à présent sur l’organisation judiciaire seront présentés à l’acceptation et sanction du roi, et il sera supplié d’en faire faire incessamment l’envoi aux corps administratifs, aux municipalités et aux tribunaux. » Art. 2. Aussitôt que les directoires du département les auront reçus, ils les feront publier et les enverront, sans retard, aux directoires de district. » Art. 3. En chaque district, le procureur-syndic convoquera les électeurs dans la huitaine de la réception des décrets, et indiquera le jour pour l’élection, de manière qu’il y ait au moins huit jours francs entre le jour de la convocation et celui de l’assemblée des électeurs. » Art. 4. L’Assemblée nationale se réserve de distinguer dans les articles ci-dessus, les dispositions qui sont constitutionnelles, de celles qui ne sont que réglementaires. » DEUXIÈME ANNEXE A LA SÉANCE DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE DU 16 AOUT 1790. PROJET DE rapport à faire à l' Assemblée nationale, proposé au comité d'agriculture et de commerce , par M. Hell, député de Hagueneau * membre dudit comité et l'un des trois commissaires pour la rédaction du code rural (1). Sans instruction, sans lois et sans justice, point de liberté, point de Constitutioii. Sans liberté et sans Constitution, point d’agriculture, point d’industrie. Sanâ agriculture et sans industrie, point dô commerce, point de prospérité. Messieurs, Yotre comité d’agriculture et de commerce ùë s’est point dissimulé l’importance du travail dont vous l’avez chargé. La France étant un royaume agricole, les pTe* miers soins du comité ont été dirigés vers l’économie rurale : il a senti que, pour la tirer de l’inertie dans laquelle elle languit, il fallait commencer par former un code rural qui ait pour base la liberté, la propriété et la sûreté publiques et individuelles, pour objet la plus grande perfection possible de l’agriculture, dé l’industrie et du commerce, et pour moyens (i) Ce projet a été lu par M. Hell à la session de la Société royale d’agriculture du 5 juillet 1790; le 7, aux Six commissaires qu’elle a nommés; le 16 août, au comité d’agriculture et de cummerce. {Noie de t auteur.)