SÉANCE DU 14 BRUMAIRE AN III (4 NOVEMBRE 1794) - N° 9 369 tyrannie avoient voués à la mort les patriotes vertueux et ecclairés... Qu’ils tremblent aussi les fripons et les dilapidateurs de la fortune publique pour qui le patriotisme ne fut que la sauvegarde du crime, s’ils échappent à la vengeance nationale, la honte et l’opprobre les suivront éternellement. Législateurs, investis de la confiance publique, continuez vos travaux, continuez d’affermir la République et de consolider le bonheur de la france et nous ne cesserons de vous proclamer les sauveurs de la Patrie. Vive la Convention nationale. Suivent 61 signatures. 9 La société populaire de Loudun, département de la Vienne, adresse à la Convention nationale les procès-verbaux de ses séances des 11 et 12 vendémiaire, auxquelles a assisté le représentant du peuple Chauvin. Ce représentant n’a entendu aucuns murmures, aucun reproche; il n’a trouvé aucun coupable, il n’a incarcéré personne, et les administrations n’ont éprouvé aucun changement. Cette société jure de rester inviolablement attachée à la représentation nationale et de périr plutôt mille fois avec elle que de s’en détacher jamais. Mention honorable, insertion au bulletin (17). [Le président de la société populaire de Loudun à la Convention nationale, le 25 vendémiaire an III ] (18) Liberté, égalité ou la mort. Citoyens réprésentans La société populaire de Loudun m’a chargé de vous envoyer les procès-verbaux de ses séances des 11 et 12 de ce mois, ensemble la nouvelle adresse de la société à la convention nationale et je m’empresse en républicain de vous les faire passer. Salut et fraternité. Arnault, président. [Extrait du registre des délibérations de la société populaire de Loudun des 11 et 12 vendémiaire an IIT\ (19) (17) P.-V., XL VIII, 184. (18) C 325, pl. 1410, p. 15. Bull., 14 brum. (suppl.). (19) C 325, pl. 1410, p. 16. Séance du 11 vendémiaire l’an 3e de la république française, une et indivisible. Liberté, Egalité ou la mort. Présidence d’Arnault Avril. La séance s’est ouverte par les cris de Vive la république. Ensuitte le citoyen Chauvin, réprésentant du peuple dans le département de la Vienne, est entré au milieu des plus vifs aplaudissemens, et des cris mille fois répétés de Vive la liberté, Vive la convention nationale ! Le réprésentant du peuple s’est placé auprès du président, où après avoir annoncé sa mission, il a fait un tableau rapide des principaux évenemens des 9 et 10 thermidor, des causes qui les avoient amenés et de la chute du dernier tyran ainsi que de ses complices. Il a demandé si les heureux effets de cette révolution avoient étés bien sentis dans cette commune; et a ajouté qu’il n’avoit pas lieu de le croire, d’après la lecture qu’il avait fait d’une adresse de la société à la Convention nationale et à touttes les sociétés de la république, dans laquelle il est dit que : « Partout l’aristocratie leve une tête insolente et partout le patriotisme est abbatu, etc. » Il a interpellé tous les membres de la société et nottament les signataires de l’adresse, de lui désigner quels étoient les patriotes opprimés, et quels étoient les aristocrates qui levoient insolement la tête, afin de le métré à même de punir les uns et de venger les autres, et il a terminé en disant que cette adresse ne pouvoit être l’ouvrage que d’un intrigant. A peine le réprésentant du peuple a fini que tous les membres de la société se lèvent spontanément et font entendre de touttes les parties de la salle la déclaration unanime que l’adresse dont il s’agit n’étoit pas comme on le disoit l’ouvrage de quelques intrigans, mais bien l’expression libre et générale des principes de la société ; principes qu’elle a toujours regardés comme purs et prouvés par les faits, ainsi que par une conduitte révolutionaire et soutenüe depuis l’époque de 1789. Après quoi le président de la société a porté la parole au réprésentant du peuple, en cès termes : « Citoyen Représentant, La société populaire de Loudun t’exprime par ses applaudissemens combien elle est satisfaite de posséder dans son sein la réprésentation nationale. Elle te voit avec d’autant plus de plaisir que tu n’es pas venu icy précédé par la terreur : il nous semble même d’après les principes que tu viens de professer ici, que la justice ait devancé tes pas. Hé bien ! citoyen réprésentant, te voila dans nos foyers, te voilà au sein d’une société vraiment républicaine, au milieu du peuple assemblé, et par conséquent entouré d’une portion de la souveraineté que tu représente ; fais donc tout le bien que nous avons lieu d’attendre de toi? ici tu ne marcheras point sur des tombeaux! ici des victimes inocentes ne remüeront pas leurs cendres plaintives pour te dénoncer quelques robespiere, et 370 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE pour te demander vengeance au nom de la justice et de l’humanité. Tu verras avec satisfaction qu’ici la révolution s’est soutenue sans intrigues, sans factions, sans effusion de sang et surtout sans oppression du patriotisme. Oui, nous osons le dire, ici le vrai républicain a parlé, opiné, voté, respiré librement! la seule aristocratie, la seule malveillance ont été comprimées et il est une grande vérité qu’il faut te dire, c’est qu’en général l’esprit public de cette commune étoit mauvais : il y avoit beaucoup de nobles; il y avoit beaucoup de pretres, c’en étoit asséz pour corrompre le peuple et le porter à haïr une révolution qui en brisant ses fers, devoit assurer la félicité publique. Mais ces efforts coupables ont été vains : le peuple naturellement bon et facile à détromper, l’amour de la patrie, l’amour de la liberté n’étoient pas éteints dans tous les coeurs; ils se sont vivement communiqués, on s’est pour ainsi dire électrisés les uns les autres, et à force d’instructions, à force de surveillance, nous sommes enfin parvenus à maintenir parmi nous la Paix, le plus désirable de tous les biens. Ce n’a cepandant pas été sans faire quelques mécon-tens : les mesures de sûreté générale impérieusement commandées par les circonstances, et encore plus par la force de la loi, ont frappés quelques individus; mais qu’ils n’en accusent que la sévérité du gouvernement révolutionnaire car je présume trop bien de tous mes concitoyens pour me faire la moindre idée que l’intrigue, les factions, l’arbitraire, le caprice ou les passions aient donné lieu a quelques arrestations. D’ailleurs, il est un fait très important et que nous ne devons pas te taire, c’est qu’à cela près de quelques fonctio-naires publics destitués par on ne sait quels motifs, il y a très peu, ou même point du tout de patriotisme dans les maisons de détention. Ce n’est pas que nous voulions te persuader icy qu’il y ait beaucoup de grands coupables. Ce n’est pas non plus que nous cherchions à suspendre sur leurs têtes la justice nationale ; au contraire les réclamations de tous les détenus sont a ton tribunal, leur sort est désormais entre tes mains, mais on dit que tu est juste : voilà l’esperance des bons, comme voilà la crainte des mechans. Oui, citoyen réprésentant, on dit que tu est juste, nous aimons à le croire et cela suffit pour nous faire espérer que tu feras ton devoir, et que tu rempliras en vrai républicain la mission importante que tu as reçu de la convention nationale. Citoyen réprésentant j’en ai dit assés et je finis par t’inviter, au nom de la société populaire de Loudun, à occuper le fauteuil, et je t’offre de plus le baiser fraternel. » Aussitôt le réprésentant et le président s’aprochent l’un de l’autre et le baiser fraternel est donné, reçu et rendu aux grands applaudissements du peuple et avec les cris répétés de vive la République, vive la Convention. Au même instant le réprésentant du peuple occupe le fauteuil et le président se place à sa droite. Le citoyen Chauveau, membre de la société populaire de Poitiers obtient la parole et s’élève avec la plus grande force, contre l’adresse de la société de Loudun, il la peint comme l’ouvrage de factieux, de meneurs, d’intrigants et de contre révolutionaires, et apres avoir parlé longtemps dans un sens toujours opposé à l’adresse, il a fini par sommer le représentant du peuple de demander à la société les noms des rédacteurs, de ceux qui en avoient fait et appuyé la motion ainsi que des principaux signataires. La lecture de l’adresse est demandée par le représentant et la demande vivement applaudie par tous les membres de la société. Déjà un des secrétaires a lu la première phrase concüe en ces termes : « Partout l’aristocratie lève insole-ment la teste et partout le patriotisme est abbatu etc. » Cette phrase donne lieu de la part du représentant à des reproches très vifs envers la société. Il dit qu’elle ne semble avoir été faite que dans l’intention coupable de jetter de la défaveur sur les oppérations dans le département de la Vienne, et que par un effet qu’il ne pouvoit s’empêcher de lui attribuer, on avoit déjà dit à la Convention nationale que la contre révolution s’opéroit dans le département de la Vienne, par les nombreuses mises en liberté d’aristocrates et l’incarcération des patriotes. Ici la société se lève en masse et déclare qu’elle n’a jamais eu l’intention d’attaquer ni improuver les opérations faites par le citoyen Chauvin, représentant du peuple dans le département de la Vienne, et que les craintes qu’elle a déposé dans le sein de la Convention par l’adresse qui donne lieu à la discussion ne lui sont vendes que d’un excès d’amour pour la liberté et pour la prospérité de la République. Cette déclaration en satisfaisant beaucoup le représentant ne lui a pas suffi et appuyé du citoyen Chauveau, il a persisté à demander que la société se rétractât de la ditte adresse. Plusieurs membres s’y sont opposés avec énergie et sur la proposition d’un entre eux d’en supprimer ou corriger quelques phrases, la société a de nouveau exprimé que l’adresse était entièrement dans ses principes et que son voeu étoit de la maintenir telle qu’elle étoit et dans toute son contenu. Le président ayant obtenu la parolle, a parlé au représentant avec une énergie romaine, il a rapellé tous les principes de l’adresse, il les a soutenues avec cette franchise qui caractérise de vrais républicains, il a démontré que ces principes non seulement étoient bons et étoient les seuls professés par la Convention, mais encore que s’ils étoient mauvais, les intentions de la société étoient pures et n’avoient pour but que le bien public, il a rapellé à son appuy un arrêté de la société qui à la nouvelle de la conjuration de Marseille, avoit juré haine et guerre à touttes les factions, union et attachement inviolable à la Convention qu’elle reconnoissoit pour seul point de raliment des François. Il a rapellé une autre séance où à l’occasion d’une adresse d’Auxerre on avoit fait sentir les dangers de se détacher de la Convention pour se réunir aux Jacobins, qu’on avoit fait de nouveau le serment de ne recon-noitre que la Convention et passé à l’ordre du jour sur la lecture de l’adresse d’Auxerre ; enfin il a rapellé plusieurs séances où on avoit parlé SÉANCE DU 14 BRUMAIRE AN III (4 NOVEMBRE 1794) - N° 9 371 du citoyen Chauvin, représentant du peuple, avec la considération et le respect qui convient à la représentation nationale. Le président a déclaré qu’il étoit le rédacteur de l’adresse, que si elle étoit à refaire il la feroit encore et que si elle étoit à signer, il la signeroit de même; qu’il croyoit avoir fait le bien, avoir exprimé le voeu de la société et n’être pas sorti du cercle qu’elle lui avoit décrit par un de ses précédens arrêtés. L’orateur a parlé de lui et de la société dans la paix d’une conscience pure et avec le calme de l’innocence et de la vertu et il a fini par interpeller et provoquer les reproches que pouroient lui faire tous les citoyens présens à la séance, sans en excepter ceux qui avoient été détenus et qui se disoient vexés par des Robespiere. Les vifs aplaudissemens ont plusieurs fois interompus l’orateur et ont couronnés la fin de son discours ; aucuns reproches n’ont été faits et le citoyen représentant ému de cette scène majestueuse a déclaré a la société qu’il étoit satisfait et de ses principes et de la pureté de ses intentions, et d’après les témoignages d’estime et d’affection qu’elle venoit de lui donner, il a laissé à la franchise et à la prudence de ses membres le chois des moyens de reparer le tort que cette adresse auroit pu lui faire dans l’esprit de ses concitoyens. Il a passé de suitte à l’épuration des autorités constituées de cette commune, l’appel nominal a été fait de chacun des membres qui les composent. Aucunes plaintes, aucunes réclamations n’ayant été faites contre eux et des applaudissemens genereux leur ayant été accordés, le représentant a vu avec la plus grande satisfaction que le peuple étoit content de ses magistrats et il s’est empressé de les maintenir dans leurs fonctions respectives. Un membre ayant obtenu la parolle observe que peut-être quelques citoyens timides, quelques mécontens, quelques aristocrates n’ont pas osé élever la voix pour faire des réproches aux fonctionaires publics et il demande que le réprésentant du peuple réçoive chez lui réproches et dénonciations. Le réprésentant répond qu’il ne reçoit aucune dénonciation chèz lui, surtout des aristocrates qui n’avoient pas sa confiance, que si on avoit quelques plaintes ou quelques reproches a faire cela devoit être publiquement, qu’au plus si on lui en adressoit chèz lui, il les apporterait au sein de la société, pour s’assurer au milieu des vraix républicains de l’usage qu’il devoit en faire. Vivement applaudy. A l’apel des membres du comité révolutio-naire, le citoyen Diotte Maillou a représenté que n’ayant pas vingt-cinq ans il ne pouvoit d’après la loi sur la nouvelle organisation des comités, continuer ses fonctions, pour quoi il a offert sa démission, qui motivé sur les dispositions de la loi, a été acceptée. Le réprésentant du peuple après avoir retracé les dangers de perpétuer les pouvoirs dans les mêmes mains, a rapellé que conformément à la loi ci-dessus énoncée les membres des comités révolutionaires doivent être renou-vellés en partie tous les trois mois, pourquoi il a engagé la société à lui indiquer des hommes révolutionaire pour lui faire connoitre les sujets les plus propres à remplacer les membres du comité sortant par le voeu de la loi. Sur le champs la société a unanimement indiqué les citoyens : Tardissons fils, commissaire, Fabry, fils ainé, Mauléon Dumontier, Poirier, agent national, Arnault Avril, administrateur, Proult, aîné, et Wiard, gendarme. Tous lesquels ont été invités à se trouver le lendemain a onze heures du matin, chez le citoyen représentant du peuple, pour lui présenter, la liste des membres en remplacement, lesquels seront proposés et nommés dans la séance suivante. Les citoyens Bastand, fils, Diotte fils et le Vial, tous les trois ex-pretres et membres de cette société ont dans des vues d’utilité publique renoncé à touttes fonctions pendant la durée du gouvernement révolutionnaire, ils ont témoigné combien ils s’estimaient heureux d’avoir été a même de faire avec succès la guerre aux fanatiques et de concourir au triomphe de la raison et de la philosophie ; ils ont enfin protesté qu’aucun sacrifice ne leur couteroit, touttes les fois qu’il serait question du bien public et a l’instant le citoyen Diotte fils a fait sa démission de ses fonctions de membre du conseil général de la commune et d’officier public et Bastand des mêmes fonctions qu’il exercoit dans la commune de Nueil-sur-Dive, vivement applaudi. Le réprésentant leur a témoigné combien il étoit satisfait de ce généreux dévouement; et sur la proposition d’un membre, arrête que mention honorable en serait fait au procès verbal. Un autre membre a demandé que le patriotisme de ces trois citoyens étant réconnu, ils fussent excepté de l’exclusion prononcée par l’opinion publique contre les ci devant castes. Passé a l’ordre du jour. On a proposé en suitte qu’extrait du procès verbal de la séance de ce jour fut envoyé a la Convention nationale. Le réprésentant du peuple s’y est opposé et a conclu a l’ajournement, adopté. Un membre a demandé au réprésentant la liberté d’un de ses parents detenu plutôt comme égaré que comme coupable ; il a motivé sa demande sur la nombreuse famille du detenu qui n’est qu’un artisan, et dont les travaux sont essentiels à la subsistance de sa femme et de ses enfants. Ajourné jusqu’à la connoissance des faits qui ont donné lieu a son arrestation. Le président ayant la parolle a dit que dans une précédente séance il s’étoit élévé une grande discussion sur ce que la société de Poitiers avait refusé de viser le diplôme d’un membre de celle de Loudun, et qu’elle avoit refusé de fraterniser avec lui sous le pretexte mal fondé que nous étions tous des contre révolutionnaires, qu’on proposa de rompre avec la société populaire de Poitiers et qu’il si opposa par la raison qu’il croyoit la société de Poitiers mal instruite des principes que nous professions 372 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE et que plus éclairée sur notre compte, elle ne tarderoit pas à renouer avec nous d’estime et de fraternité. Pourquoi il a invité le réprésentant du peuple a déclarer à la société de Poitiers quels étoient les vrais principes et les intentions de la société populaire de Loudun. Sur quoi le citoyen Chauveau a dit qu’il se chargoit de détromper sur notre compte la société populaire, quelle n’avoit eu que l’erreur d’un moment et quelle s’empresseroit sans doute de renouer avec des frères qui n’ont cessé de bien mériter de la patrie. Le réprésentant du peuple a promis d’en faire autant. Applaudi. Un membre a demandé le rapel des citoyens exclus de la société sous le nom de septem-bristes. Opposition de plusieurs membres à cet égard. L’ordre du jour sur la question est proposé et adopté. Le réprésentant instruit du mode adopté par la société pour l’épuration de ses membres, a fait sentir le vice d’une épuration faite par un comité dans l’ombre du mistère. Un membre a eu occasion de parler à cet égard et a dit que dans le principe les épurations se faisoient publiquement et a la tribune, mais que par la suitte, s’etant élévé de grands débats, des querelles particulières et beaucoup de desordres, on avoit été obligé de créer un comité d’épuration dont les membres avoient été impassibles et qu’il ne s’étoit fait aucune injustice. Le réprésentant a paru satisfait de cette explication, et a neammoins fini par proposer que l’épuration fut faite désormais comme ci-devant publiquement et à la tribune par apel nominal. A l’instant le citoyens Tallet fils exclus lors de l’épuration a vivement réclamé la justice de la société. Grande discussion à cet égard et renvoyé à faire droit lors de l’épuration générale qui aura lieu incessemment. Chauveau a dit qu’on ne pouvoit mieux terminer cette séance que par une chanson patriotique et sur l’air de la carmagnole ; il l’a chanté aux grands applaudissemens de l’assemblée et tous les membres en ont répétés le refrein avec les plus vifs transports de la joye. Le réprésentant du peuple et le président se sont renou-vellés le baiser fraternel. Partout les cris de vive la liberté, Vive la République, vive la Convention nationale se sont fait entendre; et la séance s’est levée à 10 heures du soir après le serment civique. Arnault, président, Levieil, secrétaire. Séance du 12 vendémiaire 3e année républicaine. Présidence d’Amault Avril. La séance s’est ouverte par les cris de Vive la Convention, aussitôt a paru le citoyen Chauvin, réprésentant du peuple. Les applaudissemens l’ont conduit depuis l’entrée de la salle jusqu’au bureau, ou il a reçu le baiser fraternel de la part du président qui lui a cédé le fauteüil. Lecture a été faite du procès-verbal de la séance d’hier et la rédaction en a été adoptée. On a lû à la société un arrêté du réprésentant du peuple relativement aux détenus provisoirement mis en liberté pour cause de maladie. Vivement applaudi, et renvoyé au comité révolutionaire pour son éxécution. Le réprésentant a dit que s’il y avoit quelques patriotes détenus et opprimés qu’il étoit du devoir des républicains de les réclamer. Personne n’a demandé la parolle à cet égard. Il a demandé en suitte quel étoit le genre de délits de trois ou quatre sans-culotte dont on sollicitoit la liberté. Plusieurs membres s’expriment à cet égard; on rapelle les faits, des éclaircis semens résultants des informations sont donnés; la société est suffisamment instruite et à l’unanimité elle déclare en âme et conscience qu’elle est intimement convaincue que les quatres individus dont il s’agit n’ont pas agi dans des intentions contre-révolutionnaire, mais plus tôt comme égârés, contraints et forcés. A l’instant le réprésentant s’empresse d’après le voeux du peuple de rendre a la liberté ces quatre citoyens qui sont tous nommés : Marian, jardinier, Route, journallier, Gaschet, menuisier, Cassegrain, tailleur d’habits. Grands applaudissemens; et cris unanimes de Vive la République. Icy le réprésentant fait part du résultat de ses opérations sur l’organisation des autorités constituées de cette commune, il en lit la liste nominative, tous les membres qui n’ont point changés sont admis à l’aclamation générale et aux grands applaudissemens de l’assemblée. Ensuitte le Réprésentant observe que la société ne paroit pas très nombreuse, et qu’il intéresse d’autant plus au bien public d’y appe-lér tous les patriotes et bons citoyens qui n’en sont pas membres, que les fonctionaires publics étoient presque toujours pris au sein de la société, si la société restoit toujours composée de peu de citoyens, on concentreroit par cela même le pouvoir dans les mêmes mains. Il a fixé les regards de la société sur leurs épurations passées, a demandé qu’on les révisât, il a parlé sur l’exclusion des septembristes et a fait sentir la nécéssité de l’union, de la fraternité et de la justice. Un membre a demandé qu’on renvoyât à discuter sur le mode d’épuration et sur le rapel des membres exclus à une autre séance, vu l’im-posibilité de délibérer à raison du mélange des membres de la société avec les citoyens qui n’en étoient pas. Un membre a proposé qu’on s’occupât du mode d’épuration dans le délai d’une décade, il a été arrêté sur la proposition d’un autre membre qu’on s’en occuperoit des demain. Arrêté que la société se fera réprésenter les anciennes listes pour procéder à l’épuration nouvelle qui se fera publiquement et à la tribune. Sur une motion il a été arrêté que la société telle quelle est actuellement composée, s’épu-reroit elle même, avant de rapeler les citoyens exclus ou autres citoyens qui demanderoient à être admis, et que tout citoyen quelconque sera SÉANCE DU 14 BRUMAIRE AN III (4 NOVEMBRE 1794) - N° 9 373 reçu à faire des reproches à celui qu’on épurera. Mais que les seuls sociétaires prononceront sur l’admission. Un membre a demandé que les procès-verbaux des séances d’hier et d’aujourd’hui fussent envoyés à la Convention nationale. Un autre membre en apuyant la motion a dit que la société ne devoit pas s’en tenir là, il a conclu à ce que la société écrivit à la Convention en forme d’adresse pour énoncer clairement les principes de la société, son attachement inviolable à la Convention nationalle, qu’elle réconnoitra toujours pour seul et unique point de ralliement; et que dans son adresse du 3e jour complémentaire de l’an 2e son intention a d’autant moins été d’attaquer les oppé-rations du réprésentant du peuple Chauvin dans le département de la Vienne, que la justice parait avoir été la base de sa conduite, et que dans la commune de Loudun il a fait le bien et rempli son devoir en vrai républicain. Applaudi et arrêté. Les citoyens Proult et Arnault, président ont été nommés pour la rédaction de l’adresse. Le citoyen réprésentant a déclaré a la société qu’on l’avoit fortement prévenu contre la commune de Loudun, qu’à la lecture de son adresse, il avoit éprouvé quelques mouvemens d’indignation et, qu’il avoit devancé de quelques jours son voyage dans cette commune, à fin de connoitre les coupables, et remetre les citoyens dans les principes et dans l’ordre ; mais qu’il se félicitoit de plus en plus d’un raprochement qui l’a mis à même de connoitre les vrais principes et les intentions pures de la société, où, d’après les fausses impressions qu’il avoit réçües, il ne s’attendoit pas à trouver tant d’union, d’énergie et de fraternité, et surtout aucuns coupables, ny personnes à punir. L’union parmi les patriotes, la foy des serments républicains; la hayne contre touttes les especes de factions, voilà les avis fraternels que donne le réprésentant du peuple avant de quitter la société, très applaudy. Le président de la société lui a répondu : Citoyen réprésentant, nous croyons facille-ment que la calomnie t’avoit prévenu contre nous, il y a long temps quelle nous lance des traits, mais tu vois combien ils sont impuis-sans. Nous devons te déclarer aussi qu’on avoit cherché à nous prévenir contre toy. Des méchants te peignoient à nos yeux comme un modéré, comme une homme favorisant les aristocrates et accueillant les patriotes avec dédain. Voilà le tableau qu’on nous faisoit de toi, mais ne crois pas que nous nous soyons laissé surprendre, nous avons vu le piège et l’avons évité ; on vouloit nous lancer contre la réprésentation nationale, mais de vrais républicains savent le respect qui lui est du. Il nous suffisoit que tu fusse envoyés par la Convention, faire le bien dans nôtre departement pour que tu fus investi de toutte notre confiance. Aussi ils ont été atté-rés, les méchans, quand ils ont entendu de quelle manière favorable on parloit de toi dans cette tribune. En te rendant justice nous avons fait notre devoir. Tu es venu parmi nous et nous sommes parvenu à nous connoitre les uns les autres. S’il s’est élévé quelques nuages entre la réprésentation nationale et la société ; il n’a falu qu’un seul instant pour les dissiper, il n’a falu que developer nos principes, pour te convaincre qu’ils étoient les mêmes que les tiens, il n’a falu que te montrer nos intentions pour te prouver qu’elles étoient pures. Ces grandes discutions ont été avantageuses pour tous, puis qu’il en est résulté une réciprocité d’estime, de considération et d’attachement. Tu dis que tu es content de nous, et bien nous te déclarons franchement que nous sommes contents de toy. Vas, citoyen réprésentant, redis partout dans les departemens ou tu passeras que les citoyens de Loudun sont de vrais enfans de la liberté, et qu’ils n’ont jamais cessé de bien méritter de la patrie. Tu emportes, dis-tu, une idée avantageuse de nous, et nous nous conserverons de toy un heureux souvenir, car tu nous laisses des traces de ta justice, reviens quand tu voudras ; tu trouveras toujours parmi nous de l’union, de la fraternité, de la franchise, des principes et une énergie vrayment républicaine. Réçois en partant un adieu fraternel et le baiser républicain vivement applaudi. Les cris de joie et d’allégresse se renouvellent on n’entend de touttes parts que Vive la République, vive la Convention nationale. Le citoyen Chauveau prend l’engagement d’instruire la société de Poitiers de tout ce qui s’est passé dans les séances d’hier et d’au-jourdhui et de la convaincre combien la société de Loudun se rend de plus en plus digne d’elle ; il a terminé par chanter sa chanson civique. La séance s’est levée et on s’est porté en masse vers l’arbre de la liberté, danser la carmagnole, hommes et femmes, viellard, et enfans, tous pèle mêle. Pour extrait conforme. Arnault, président, Levieil, Diotte Maillou, secrétaires. [La société populaire de Loudun à la Convention nationale, s. rf.] (20) Liberté, Egalité ou la mort. Citoyens Réprésentans Le citoyen Chauvin réprésentant du peuple dans le département de la Vienne est venu dans notre commune et y a terminé ses opérations. Il a rendu la justice, et a pleinement fait son devoir, en vous déclarant ce fait nous faisons le notre. Il vous rendra compte de nos principes, ils sont tels qu’il n’a entendu contre nous aucuns murmures, aucuns réproches, qu’il n’a trouvé aucuns coupables, qu’il n’a incarcéré per-sones, et que les administrations n’ont éprouvés aucuns changemens. Vive la République. Citoyens réprésentans nous vous déclarons que (20) C 325, pl. 1410, p. 17. Bull., 14 brum. ; M. U., XLV, 253.