lAssemblée nationale.} ARCHIVES PARLEMENTAIRES. {15 mars 1791.} 107 réunissant celte dépense à toutes les autres, il en résulte un total de 260 millions; ce qui donne à dépenser pour chaque habitant, de tout âge et de tout sexe, par an, 433 1. 6 s. 8 d., et par jour, 1 1. 3 s. 8 d. 68/73. Dans cette dépense n’est pas comprise celle du loyer, qui monte en masse, au moins à 60 millions, et pour chaque individu, à 100 livres par an, c’est-à-dire à 5 s. 5 d. 2/3 par jour. Maintenant, puisqu’il se consomme à Paris, chaque année, une somme de 260 millions, il est évident que la ville de Paris jouit en masse au moins de 260 millions de revenu; car il est impossible, à la longue, de dépenser plus qu’on ne reçoit. Il est de plus très probable, et même certain, que les ouvriers, artisans, et en général presque tous les habitants de Paris, font chaque année quelques économies; que l’industrie parisienne, considérée dans son ensemble, fuit quelques bénéfices sur la balance de son commerce, soit avec les provinces, soit avec l’étranger. On peut juger de ces bénéfices et de ces économies par les placements qui se faisaient habituellement par les habitants de Paris dans les emprunts publics. En estimant ces économies à 40 millions par an, il en résulterait que la ville de Paris jouit de 300 millions de revenu. Cette somme totale est à peu près composée des sommes particulières ci-après : Revenu provenant des loyers des maisons ........................ 60,000,000 liv. Revenu provenant des intérêts et dépenses payés par le Trésor public ............... 140,000,000 Revenu des propriétaires de terre, de biens ruraux, de manufactures, etc .............. 100,000,000 timbrés ...................... 1,232,000 Quatre deniers pour livre de la vente des immeubles ....... 2,400 Droits de la poste aux lettres. 1 , 331,000 Caisse de Poissy ............ 1 ,016,000 Droits qui se perçoivent au profit des communautés de marchands ...................... 300,000 Portion du bénéfice de la loterie royale de France, à la charge de la ville de Paris ..... 8,166,697 Total ....... 70,000,000 liv. On voit encore par ce résultat, que la contribution des habitants de Paris était, sous l’ancien régime, de 118 I. 2 s. 7 d. 1/5 par an, pour cha-ue individu de tout sexe et de tout âge, c’est-à-ire, par jour, de 6 s. 5 d. 2/3. Ainsi, en dernier résultat, et en négligeant les fractions, chaque habitant de Paris, de tout âge et de tout sexe, dépensait chaque jour, l’un dans l’autre, loyer compris, 28 à 29 sous, dont plus de 6 sous tournaient au profit du Trésor public. La contribution de la ville de Paris était donc d’un cinquième environ, tant en contribution foncière que personnelle, et en droits sur les consommations. Cette somme paraîtra bien considérable, surtout si l’on considère qu’une partie des revenus de la ville de Paris ne parvient à ses habitants qu’après avoir acquitté l’imposition foncière dans les provinces. Total ........ 300,000,000 liv. De ces 300 millions, le fisc en retirait, dans l’ancien ordre de choses, environ le cinquième par les impositions et droits ci-après : Entrées de Paris, tant au profit du Trésor public, que de la ville et des hôpitaux ......................... 36,500,000 liv. Vingtièmes ................. 5,174,000 Capitation .................. 4,095,000 Portion de la taille et accessoires ........................ 429,873 Gabelle, déduction faite du prix marchand du sel ......... 3,500,000 Tabac, déduction faite du prix marchand .................... 3,300,000 Droits sur les cuirs et peaux, perçus par la régie générale... 174,000 Marque d’or et d’argent ..... 450,000 Cartes à jouer .............. 137,000 Papiers et cartons .......... 476,000 Amidon, poudre à poudrer.. 144,500 Droits domaniaux. Contrôle des actes, des exploits; petit scel, insinuations, centième denier, amortissement, franc-fief, usages et nouveaux acquêts, échanges, contre-échanges, etc. 1,650,000 Hypothèques ............... 300,000 Greffes, droits réservés dans les cours et tribunaux, amendes, etc ...................... 1,523,000 Formule, papier et parchemin ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. DE MONTESQÜIOU. Séance du mardi 15 mars 1791, au soir (1). La séance est ouverte à six heures et demie du soir. Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance de ce matin, qui est adopté. Un de MM. les secrétaires fait lecture des adresses suivantes : Adresse du district de Vendôme , qui annonce que tous les ecclésiastiques fonctionnaires publics du district, à l’exception de vingt seulement, ont prêtéle serment prescrit parlaloi du27 décembre. Adresse du directoire du département de l’Aisne; il demande que la connaissance des contestations qui peuvent s’élever sur la régularité des assemblées primaires de communes ne soit point attribuée aux tribunaux. Adresse des amis de la Constitution de la ville de Sainte-Foi; ils proposent à l’Assemblée de décré-l er provisoirement que chaque contribuable payera la moilié de ses anciennes impositions, sauf à déduire ensuite, sur la nouvelle, une somme équivalente à celle qui aurait été payée d’avance. Adresse de la Société des amis de la Constitution, séant à Versailles; ds proposent d’ordonner qu’il sera fait dans chaque département une cons-(1) Cette séance est incomplèto au Moniteur . 108 {Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. cription volontaire de 3,000 citoyens. Ces citoyens s’équiperont à leurs dépens; niais, en temps de guerre, jl s seront indemnisés des frais qu’exige l’activité du service. Ensuite ils prient l'Assemblée de presser l’exécution ponctuelle du décret concernant l’avancement dans les troupes de ligne. L’Assemblée applaudit au zèle patriotique des amis de la Constitution, séant à Versailles, et renvoie leur adresse aux comités militaire et de Constitution. Adresse des administrateurs composant le directoire du département du Pas-de-Calais ; ils envoient à l’Assemblée l’état général des contrôleurs, employés et commis de la régie générale des droits sur l’eau-de-vie en la ci-devant province d’Artois, existant au 20 février 1791. Ils recommandent à l’Assemblée ces hommes, dont le sort leur a paru vraiment digne de commisération. Adresse des marins et matelots de la ville de Dieppe; ils demandent la cessation et l’abandon des travaux commencés pour la confection d’un nouveau port, et ils sollicitent la réparation de leur port actuel. (L’Assemblée renvoie cette adresse au comité d’agriculture et de commerce, pour lui en être fait rapport incessamment.) Un membre annonce que le sieur Mentelle, connu avantageusement par plusieurs ouvrages de géographie, a fait hommage à l’Assemblée des deux cartes, dont l’une, des départements et des districts du royaume, est as-ujettie aux observations astronomiques, l’autre présente la comparaison des anciennes divisions du royaume avec les nouvelles, décrétées par l’Assemblée nationale. (L’Assemblée ordonne qu’il sera fait, dans son procès-verbal, une mention honorable de l’hommage du sieur Mentelle.) M. le Président. Messieurs, vous avez ordonné que le président des catholiques de Nîmes et les signataires des délibérations d'Uzès, mandés à la barrepar les décrets des 17 juin et 23 novembre derniers, , seraient admis aujourd'hui et entendus. Je demande à l’Assemblée si elle exige que je lui donne connaissance, avant de les faire entrer, de ce que je me propose de leur dire. Un grand nombre de membres : Non ! non ! M. le Président. Je vais, en conséquence des ordres de l’Assemblée, les faire introduire. Je demande le plus grand silence et le plus grand ordre. (Les mandés sont introduits à la barre.) M. le Président. Tandis que les représentants du peuple français affermissaient la liberté de leurs concitoyens sur les bases éternelles de la raison, de la justice et du droit naturel, des écrits répandus sous votre nom les représentaient comme des factieux. Tandis que le modèle des rois se montrait digne de régner sur un peuple libre, ces mêmes écrits supposaient que le sceptre échappait de ses mains et qu’au milieu d’un peuple qui le chérit, il ne jouissait pas pour lui-même de la liberté dont il a si solennellement reconnu les droits. C’est ainsi qu’abusant du bienfait de la Constitution, du droit de vous assembler que vous tenez d’elle, vous vous en serviez pour la détruire. L’Assemblée nationale, toujours affligée lorsque sa justice la condamne à être sévère, ne pouvait IIS mars 1791.] ignorer ni souffrir de semblables écarts. La notoriété publique les lui dénonçait; les erreurs d’un bon peuple en ont été la suite; et cependant elle n’a pas voulu se fier à l’évidence ; elle a voulu vous entendre. Par son décret du 17 juin, elle vous a mandés : vous avez méconnu son autorité, ou plutôt celle de la nation qu’elle représente. Les malheurs multipliés de votre patrie sont venus accuser son indulgence. Par son décret du 23 novembre, elle a usé de tous ses droits, non pour vous punir, mais pour vous forcer à venir lui rendre compte de votre conduite. Si vous fûtes abusés, abjurez de funestes erreurs, en voyant un peuple heureux par son roi, et un roi heureux par son peuple. L’Assemblée nationale m’ordonne de vous lire ses décrets des 17 juin et 23 novembre : Décret du 17 juin 1790. « L’Assemblée nationale, sur le rapport qui lui a été fait, au nom de son comité de recherches, de deux délibérations de quelques particuliers se disant les citoyens catholiques de Nîmes, des 20 avril dernier et 1er de ce mois, ainsi que d’une autre délibération de quelques particuliers d’Uzès se disant les citoyens catholiques d’Uzès en adhésion à celle du 20 avril, et en date du 2 mai dernier. « Considérant que lesdites délibérations contiennent des principes dangereux et propres à exciter des troubles et des dissensions dans le royaume, a décrété et décrète que les sieurs La-piërre, Michel, Vigne, FoLcher, Robin, Froment, Velut, François Fauve, Ribens, Melquiou aîné et Fernel, qui ont signé, en qualité de président et de commissaires, la première de ces délibérations ; les sieurs de Gueydon, barou de la Réivanglade et Gaussard, qui ont signé la seconde en qualité de président et de commissaires, ont signé celle des particuliers, se disant les citoyens catholiques d’Uzès, en date du 2 mai, seront mandés à la barre de l’Assemblée, pour y rendre compte de leur conduite, et que provisoirement ils seront privés des droits attachés à la qualité de citoyens actifs. » Décret du 23 novembre 1790. « L’Assemblée nationale, après avoir ouï le compte que lui a fait rendre son comité des rapports, rie l’adresse du directoire du département du Gard, du 5 de ce mois, relative à la ville d’Uzès; « Décrète : « ..... que le roi sera prié de donner des ordres pour qu’à défaut par les commissaires des soi-disant catholiques de Nîmes et d’Uzès, d’obtempérer, dans le délai de huit jours après la notification du présent décret, à celui du 17 juin dernier qui les mande à la barre, ils y soient conduits par la force publique. » Maintenant, Messieurs, parlez. L'orateur des délégués de Nîmes et d'Uzès. Messieurs, c’est eu exécutioa de vos décrets sanctionnés par le roi, que nous nous présentons aujourd’hui devant vous. La pureté de nos intentions devait nous trau-