[Assemblée nationale.] sicien est parvenu à un grand âge et qu’il soit dans l’impossibilité de faire autre chose, ce n’est pas certainement l’intention de l’Assemblée de l’abandonner; il faut lui procurer un sort quelconque. Nous avons cru nous conformer aux principes reconnus de l’Assemblée, à l’humanité et à la justice, en vous proposant d’adopter ce qui suit : « Art. 23. Il pourra être accordé, sur l’avis des directoires de département et de district, aux ecclésiastiques, qui sans être pourvus de titres, sont attachés à des chapitres, sous le nom d’habitués perpétuels, ainsi qu’aux officiers laïques, organistes, musiciens et autres personnes employées pour le service du culte divin, et aux gagés des églises et chapitres réguliers et séculiers, un traitement soit en gratification, soit en pension, suivant le temps et la nature de leurs services, et eu égard à leur âge et à leurs infirmités : les appointements ou traitements accordés à chacun leur seront payés la présente année. » M. Regnand (de Saint-Jean d'Angely). Je réclame votre justice en faveur des ecclésiastiques qui étaient attachés aux évêques en qualité de secrétaires : ceux qui n’avaient que le traitement accordé par les évêques, vont se trouver absolument dénués de secours, car les évêques oe pourront plus les garder. Il y en a peut-être douze ou quinze. Je crois qu’il est de la justice de leur fixer un traitement, jusqu’à ce qu’ils aient une autre place. M. Imcas. 11 faut aussi assigner un traitement à tous les sacristains, enfants de chœur, sonneurs, etc.; c’est le meilleur moyen de priver la nation de toutes ses ressources. M. l’abbé Mougins. On peut imposer aux intéressés l’obligation de continuer leurs services si on en a besoin. M. l’abbé Mayet. Les critiques que soulève l’article ne sauraient prévaloir devant vous contre la justice. Plusieurs ecclésiastiques ont passé leur jeunesse attachés à des chapitres, dans l’attente d’un bénéfice; cet usage est suivi au chapitre de Lyon; entin la suppression du casuel prive de tout moyen d’existence des personnes qui n’en avaient point d’autre. (On demande à aller aux voix.) L’article est adopté en ces termes : « Art. 23. 11 pourra être accordé, sur l’avis des directoires de département et de district, aux ecclésiastiques qui, sans être pourvus de titres, sont attachés à des chapitres sous le nom d’habitués ou sous toute autre dénomination, ainsi qu’aux officiers laïcs, organistes, musiciens et autres personnes employées au service divin, aux gagés desdits chapitres séculiers et réguliers, un traitement, soit en gratification, soit en pension, suivant le temps et la nature de leurs services, et eu égard à leur âge et leurs infirmités : les appointements ou traitements ci-devant accordés à chacun leur seront payés la présente année. » M. Chasset. Le second article additionnel est ainsi conçu : « Art. 24. Tous ceux qui seront pourvus dans la suite d’offices ou emplois cesseront, dès ce moment, de jouir du traitement à eux accordé par les précédents décrets ; et dans le cas où ils se trouveraient de nouveau sans office ou emploi, [30 juin 1790.] §79 ils reprendraient la jouissance de leur traitement. » M. Martinean. Messieurs, si vous adoptiez l’article tel qu’il vous est proposé, vous favoriseriez la paresse. Je demande si un religieux à qui vous accordez, par exemple, un traitement de 900 livres, sans rien faire, ira prendre un vicariat où il aura moins qu’en ne faisant rien ? M. l’abbé Bourdon. L’observation de M. Martineau est parfaitement juste. Je demande qu'au cas où un régulier prendrait de l’emploi dans le ministère, il 11e puisse avoir moins que sa pension. M. Bouche. Je suis d’avis de conserver aux moines non la moitié, mais le tiers de leur traitement. Quant à la disposition qui porte : et s’il se trouve de nouveau sans emploi, il reprendra la jouissance de son traitement, j’en demande la suppression parce que s’il arrive que vous ayez affaire à un homme sans morale et sans mœurs, l’Assemblée ne peut consentir à gager éternellement le vice. M. Chasset. Un homme pareil serait poursuivi en justice réglée et déclaré déchu de tous ses droits. L’objection est donc sans valeur. M. l’abbé Cfibert. L’article a besoin d’être modifié parce que les personnes à qui l’Assemblée accorde un traitement n’oseraient prendre de l’emploi, si elles couraient risque d’être privées de ce traitement. M. Martineau insiste pour l’adoption de son amendement. L’amendement est adopté et l’article est décrété dans les termes suivants : « Art. 24. Tous ceux auxquels il est accordé des traitements en pension de retraite, qui dans la suite seraient pourvus d’office ou emploi pour le service divin, ne conserveront que le tiers du traitement qui leur est accordé par Je présent décret, et ils jouiront de le totalité de celui attribué à la place dont ils rempliront les fonctions : dans le cas où ils se trouveraient de nouveau sans office ou emploi du même genre, ils reprendraient la jouissance de leur pension de retraite. » M. Chasset donne lecture des deux derniers articles additionnels. Ils sont décrétés sans discussion ainsi qu’il suit : « Art. 25. La moitié de la somme formant le minimum du traitement attribué à chaque classe d’ecclésiastiques, tant eu activité que sans fonctions, sera insaisissable. « Art. 26. Les administrations de département et de district prendront la régie des bâtiments et édifices qui leur a été confiée par les décrets des 14 et 20 avril dernier, dans l’état où ils se trouveront. En conséquence, les bénéficiers actuels, maisons, corps et communautés ne seront inquiétés en aucune manière, à raison des réparations qu’ils auraient dû faire; et, pour l’avenir, ceux qui conserveront la jouissance des bâtiments attachés à leur bénéfice seront tenus de toutes les réparations locatives seulement. » M. Chasset, rapporteur, dit que l’Assemblée aura à s’occuper maintenant de la partie relative aux patronages laïques. M. le Président annonce qu’une députation ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 58Q [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [30 juin 1790.] du district de Versailles demande à être admise à la barre afin de réclamer contre la conduite de la municipalité de Versailles qui est venue la veille soumettre à l’Assemblée l’élection d’un commandant général de la garde nationale. La députation est introduite. L’autorité de l’administration des districts est méconnu, dit-elle; vous devez la défendre; vos décrets sont violés, vous devez les venger : la garde nationale est outragée, vous devez la protéger. M. de Lafayette. ayant donné sa démission de commandant en chef de la garde nationale de Versailles, on a procédé, avec ordre et en suivant les règlements, à une élection pour lui donner un successeur. Les scrutins étaient faits dans toutes les compagnies; il s’agissait de leur dépouillement, lorsque la municipalité a réclamé et proposé de faire faire l’élection par les sections. L’administration de district, instruite de la contestation à laquelle cette réclamation donnait lieu, l’a renvoyée au département, qui s’en trouve en ce moment saisi. Cette conduite était la seule que vos décrets autorisassent... Un règlement, fait de concert entre la garde nationale et la municipalité, porte que le commandant en en chef, le commandant second et le major-général seront nommés dans les compagnies. Un de vos décrets a ordonné que tout ce qui concerne les gardçs nationales restera dans le même état, jusqu’à leur organisation : on s’est encore écarté de ce décret. Vous avez aussi ordonné que les municipalités auraient recours aux assemblées administratives : leur autorité a été méconnue. Que deviendra la Constitution, si ces assemblées sont avilies au moment qu’elles sont formées? Que ferez-vous, si quarante mille municipalités correspondent directement avec vous? Plusieurs membres demandent que le décret rendu le matin soit lu à la députation. Cette lecture est faite. M. Robespierre. Il est sans doute dans l’intention de l’Assemblée nationale de juger en connaissance de cause une affaire de cette importance. Toutes les parties n’ont point été entendues... On peut changer un décret rendu sur une affaire particulière, et qui n’est réellement qu’une simple décision : on le peut, surtout quand il a été obtenu sur un faux exposé... (Des murmures interrompent V opinant.) Il faut indiquer une autre séance pour juger, après avoir entendu toutes les parties. ( Les murmures recommencent.) J’insiste, parce qu’à la surprise qui a été faite à votre religion, se joignent des considérations très importantes. Les réclamations ne se sont élevées qu’au moment où l’on allait nommer la personne élue. On reconnaît ici l’intrigue et les passions particulières. M. Regnaud (de Saint-Jean d'Angely). Je ne sais rien qui annonce dans la municipalité de Versailles des passions particulières. Ce motif ne devrait pas vous déterminer, quand ces passions seraient connues, à plus forte raison quand elles ne le sont pas. Je crois que le décret de ce matin est suffisant. Il né statue ni sur les demandes de la municipalité de Versailles, ni sur les atteintes que l’assemblée de district expose avoir été faites à ses droits et à ceux de la garde nationale. 11 donne aux passions le temps de s’éteindre, et assure la tranquillité publique. Le commandant en second est digne de la confiance de Ja garde nationale et de celle de tous les citoyens. Il me semble que c’est le cas de passer à l’ordre du jour. M. le Président à la députation : L’Assemblée nationale prendra en considération la pétition du district de Versailles : elle vous permet d’assister à sa séance. M. Arthur Dillon rend compte , au nom du comité des rapports, de l'affaire de la colonie de Tabago. M. Arthur Dillon. Je viens, au nom de votre comité, vous présenter un projet de décret relatif à l’affaire de l’île de Tabago. L’article 3 exige une observation préalable. Cet article porte que les lois anglaises continueront à être exécutées comme par le passé. Lors de la conquête de cette île, les lois anglaises furent provisoirement conservées. Les ministres n’ayant pris aucune mesure à cet égard, les habitants de la colonie ont demandé à attendre la constitution que devait leur donner l’Assemblée nationale. Voici le projet de décret : « L’Assemblée nationale, sur le compte qui lui a été rendu par son comité des rapports des malheurs arrivés à Tabago par l’incendie totale du Port-Louis, et de la situation désastreuse où se trouve cette colonie, décrète : 1° que son président se retirera par devers le roi, pour le supplier de donner ses ordres pour faire les armements, et prendre les mesures nécessaires pour la sûreté et la subsistance des colonies; 2° Sa Majesté sera suppliée de faire faire un état exact des pertes essuyées dans l’incendie du Port-Louis, afin que l’Assemblée puisse prendre en considération les secours à donner à cette colonie; 3° L’Assemblée décrète que les lois anglaises actuellement existantes à Tabago continueront à être observées, jusqu’à ce qu’il en ait été autrement ordonné, quand l’assemblée coloniale légalement constituée aura transmis le vœu de la colonie, conformément aux décrets des 8 et 28 mars dernier ; 4° Attendu que sous l’ancien régime, tous les habitants formaient une garde bourgeoise, l’assemblée coloniale est autorisée à supprimer toutes compagnies de volontaires, et à ordonner à chaque volontaire de se retirer dans la compagnie de la garde nationale de la paroisse de sa résidence; enfin, Sa Majesté sera suppliée d’ordonnertoutes les mesures nécessaires pour découvrir et faire punir les auteurs et instigateurs des troubles, et d’en prévenir de pareils à l’avenir. M. Robespierre. Je ne puis me dispenser d’observer qu’aucun membre ne connaît assez les faits pour se décider dans une occurrence aussi importante. Je prie l’Assemblée de considérer quelles pourraient être les conséquences d’un décret par lequel le pouvoir exécutif serait indéfiniment autorisé à faire un armement pour secourir une colonie dont vous ne connaissez pas l’état. (Il s'élève beaucoup de murmures. — On demande à aller aux voix). Si cette considération ne vous touche pas, si vous ne voulez pas réfléchir sur les intentions du gouvernement dans nos relations extérieures, si vous ne voulez pas qu’on puisse impunément faire une guerre étrangère, si vous ne voulez pas que je vous dise que ce ne sera point par une proposition directe qu’on cherchera à engager la guerre, mais par des propositions et des démarches détournées, dont l’effet sera d’autant plus sûr qu’il sera éloigné; si vous