ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [5 juillet 1791.] 764 JAssemblée nationale.] ficultés survenues dans l'affaire des Quinze-Vingts. M. l’abbé Royer, au nom du comité des rapports. Me sieurs, il s’agit de savoir si le décret du 15 avril dernier portant que l’hôpital desQuinze-Vmgts sera a iministté conformément à la loi du 5 novembre 1790, préjuge la conduiie qu’a tenue le département dans cette affaire. En conséquence du décret du 15 avril, les anciens administrateurs ou ceux qui l’étaient avant les décrets rendus par l’Assemblée nationale ont cru pouvoir faire assigner les administrateurs qui avaient été établis d’après les arrêts déclarés nuis par l’Assemblée nationale, et ils ont fait apposer les scellés sur les titres et papiers de l’administration. Ils ont suivi dans cette démarche les règles que semblait leur presreire le décret lui-même; ils ont cru que le décret annulant le-arrêts despotiqu s uui avaient fait passer à d’autres administrateurs l’administration qui leur avait été confiée, ils pouvaient revendiquer cette administration; qu’ils pouvaient faire assigner ces admi-nisteursqui étaient regardés commeintrus; qu’ils pouvaient faire apposer les scellés sur lesdits papiers et titres, mais après cette démarche, ils ont éprouvé une opposition qui a été portée au tribunal. Le tribunal a déclaré qu’ils étaient autorisés à faire lever les scellés, avec descriptions et deniers, titres et papiers. Opposition encore nouvelle, ordonnance du tribunal; et cette nouvelle ordonnance, sans rien préjudicier par rapport à la demande qui avait été formée par un mémoire du département, pour savoir si l’Assemblée nationale avait ou n’avait pas conservé au département le droit d’administrer immédiatement lesdits hôpitaux a ordonné que son premier jugement aurait son entier effet. Nouvelle opposition, ou pour mieux dire, on a agi à main armée ; on a forcé les frères de l’hôtel des Quinze-Vingts a recevoir les ordres des administrateurs que l’on avait réintégrés, au préjudice, à ce qu’il me semble, du décret. Voilà les moyens qu’emploie la partie qui soutient que les administrateurs du département n’ont pas pu, contradictoirement au décret, installer de nouveau les différents particuliers qui avaient la manutention de cette administration. D’un autre côté, les administrateurs du département prétendent qu’ils ont, en qualité de membres du département, le droit de veiller à l’amélioration des biens de l’hôpital des Quinze-Vingts, ainsi que de tous autres établissements qui peuvent être dans leur département, et de là ils concluent que l'autorisation qui leurest accordée, etl’inspec-tion qui leur est donnée par le décret, les autorise par là même à prononcer la destitution de ceux qui étaient en place avant le décret, et qu’ils avaient la faculté de réhabiliter comme ils Pont fait les dilférents particuliers auxquels ils ont confié l’administration des biens de l’hôpital des Quinze-Vingts. C’ett dans cet état que le comité des rapports a cru devoir déclarer que les administrateurs du département pouvaient destituer tel ou tel administrateur qui pourrait ne [pas convenir à la chose. Le comité des rapports, en adoptant cette mesure, m’a chargé de présenter son vœu à l’Assemblée nationale. Je n’ai pas eu d’autres éclaircissements. Je soumets la question à l’Assemblée nationale pour qu’elle prenne un parti définitif à cet égard. Plusieurs membres ; L’ajournement 1 M. Martineau. Je ne demande point à l’Assemblée de prononcer sur cette affaire sans avoir entendu un rapnort très détaillé; elle est néanmoins très simple en elle -même. Vous avez rendu, le 15 avril, un décret par lequel vous avez décidé que l’hôpital des Q linze-Vingts serait gouverné, aux termes du décret du 5 novembre 1790, suivant ses anciens statuts. Or, par le décret du 5 novembre 1790, vous n’avez rien changé à l’administration des hôpitaux, excepté dans le cas où les administrateurs étaient membres de certains corps qui n’existeront plus aujourd’hui; vous avez ordonné que les administrateurs en place, ceux qui ont été nommés à la place des anciens administrateurs par des arrêts du conseil, seraient tenus de rendre leurs comptes. Enfin, vous avez décrété que tous les arrêts du conseil, rendus postérieurement aux lettres patentes, portant vente de l’enclos des Qumze-vingis, étaient nuis et de nul effet; et en conséquence, vous avez autorisé les administrateurs, les administrés et les au res parties réclamantes à se pourvoir devant les tribunaux, contre les arrêts du conseil, qui avaient destitué les anciens administrateurs et qui en avaient établi de nouveaux. Ce sont, Messieurs, ces arrêts que vous avez annulés; il était clair que les administrateurs qui n’avaient pas d’autres titres que ces arrêts, étaient incapables d’administrer. Vous avez autorisé les anciens administrateurs à se pourvoir devant les tribunaux, et c’est ce qu’ils ont fait. Ils ont demandé trois choses : la première, que par provision ils fussent autorisés à mettre les scellés sur la caisse, les titres et papiers de l’hôpital; la deuxième qu’il fût fait défense à ces administrateurs établis par des arrêts du conseil, de s’immiscer davantage dans l’administration de l’hôpital, et la troisième, enfin qu’ils fussent rétablis dans leurs fonctions. Avant de former cette demande, les anciens administrateurs en ont prévenu M. le procureur général syndic du département. Us l’ont fait assigner pour être présent dans la contestation, et stipuler les intérêts des frères des Quinze-Vingts, en sa qualité d’administrateur général. Sur cela, Messieurs, les scellés ont été apposés. Différents jugements sont intervenus qui ont défendu aux nouveaux administrateurs de s’immiscer dans l’administration et ont réintégré les anciens administrateurs. C’est dans cette position que le département est venu former des oppositions dont il a été débouté ; puis il a demandé que les scelles fussent levés sans description ; il a fait (dus : contrevenant directement, daDS mon opinion, à votre décret du 15 avril dernier, il a destitué les nouveaux administrateurs et réintégré les anciens qui avaient été nommés par des arrêts du conseil que vous avez annulés. Voilà, Messieurs, ce qu’a fait le département, composé de citoyens trop honnêtes pour ne pas reconnaître qu’ils ont été induits en erreur. Il y a là des personnes qui ont vraiment intérêt à ce que les administrateurs établis par les arrêts du conseil restent en fonctions, et que les scellés soient levés sans description. Il y a eu des déprédations sans exemple dans l’administration de cet hôpital; et voilà ce qu’on veut dérober à la connaissance du public, voilà ce que l’Assemblée nationale a le plus grand intérêt à connaître. Je demande quel peut être, dans le point de droit, le motif du département de Paris ; il dit ; 765 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [S juillet 1791.] j’ai la surveillance des hôpitaux. Il a raison. De là il tire la conséquence qu’il a le droit de destituer et de réintégrer : je le nie, parce que, surveiller une administration n’est pas avoir le droit de lu faire-, mais quand il aurait le droit de destituer, certainement ce ne serait pas dans sa main un droit arbitraire et despotique. Autant aurait valu rester sous l’ancien régime. Ces administrateurs nouvellement établis par les tribunaux n’avaient encore exercé aucune fonction. Je demande que tout ce qui a été fait par le département soit regardé comme non avenu et que les parties continuent de procéder devant les tribunaux. M. Rœderer. L’on vous propose de décider un conflit élevé entre un tribunal et le département. Le département a produit ses observations, elles sont égarées; il faut que l’on instruise le département que son mémoire a été égaré; mais vous ne pouvez pas rejeter les mesures prises par le département sans l’avoir entendu. Je demande donc le renvoi au comité. M. Merle. J’ai fait un rapport sur l’affaire des Quinze-Vingts, qui fut suivi d’un décret. Il est survenu ensuite une nouvelle difficulté qui nécessite un nouveau rapport. Comme j'avais été chargé du premier, on a cru que je devais l’être du second ; mais un individu qui a pensé que je pouvais n’être pas de son avis, a cru que je devais me suspecter et on me le propose. Ma délicatesse ne m’a pas permis de m’occuper de cette affaire, et je déclarai dans le temps au comité que je ne m’en occuperais pas. Il ne m’a jamais été remis ni pièces relatives à cette nouvelle difficulté, ni aucun mémoire de la part du département. Plusieurs membres : Le renvoi au comité[l M. Gaultier -Biauzat. Comme l’Assemblée ne veut juger qu’en connaissance de cause, et que cependant cette affaire est très pressée, je demande qu’elle soit renvoyée à la prochaine séance du soir. (L’ Assemblée, consultée, décrète le renvoi de l’affaire des Quinze-Vingts au comité des rapports pour en rendre compte dans la séance de jeudi soir.) M. le Président lève la séance à neuf heures. FIN DU TOME XXVII.