[Convention nationale.] soutiens de la République, des bienfaiteurs de Phumanité élèvera son âme, rabaissée jus¬ qu’ici près d’une foule de minutieux objets, rapetissés encore par les déclamations ridicules de leurs prôneurs emphatiques. Le spectacle enfin des arts utiles, honorés, des belles actions de tout genre couronnées, excitera en lui une noble émulation de perfectionner les uns et de mériter la glorieuse récompense des autres. C’est à vous, sages législateurs, que le peuple français est redevable de tant d’avantages, après avoir aplani toutes les inégalités qui lui fermaient la route du bonheur; vos mains hardies ont élevé, des débris entassés des sceptres, des écussons, des crosses, des diplômes, des cordons, des titres, de tous les fastueux entourages du despotisme et des aristocrates quelconques, cette montagne célèbre du sommet de laquelle vous avez fait pleuvoir sur lui une rosée vivifiante qui, le purgeant de toutes ses idées superstitieuses, de ses habitudes gothiques, de ses absurdes préjugés, qui, le régénérant en un mot, l’a rendu capable d’atteindre au comble de la gloire et de la prospérité. En mémoire d’un si grand service, jamais nos regards ne manqueront de se tourner respec¬ tueusement vers cette âme sacrée, et nos cœurs d’exprimer pour vous un sentiment tendre de reconnaissance, toutes les fois que, rassemblés dans ces fêtes patriotiques, dont l’institution n’est pas un de vos moindres bienfaits, nous célébrerons le culte immortel de la raison et de la liberté. Minée, président de V Administration du département. Le citoyen Bollet, représentant du peuple dans la 2e division militaire, écrit de Soissons le 10 fri¬ maire que tous les chevaux qu’il a levés sont bons et propres au service auquel ils sont des¬ tinés; que tous sont dans le meilleur état et de la meilleure tenue; il regrette que ceux de ces chevaux qui sont destinés aux charrois militaires soient confiés à l’Administration des charrois, qui les laisse tous périr de la morve ou d’inani¬ tion, qui ne les fait point panser ni traiter. H annonce qu’en exécution du décret du 27 bru¬ maire il va se rendre à l’armée du Nord, pour surveiller l’encadrement des hommes et des che¬ vaux dans les différents corps de cette armée. Il envoie la décoration militaire du citoyen Mer-lier, officier vétéran, colonel de la garde natio¬ nale de Cateau-Cambrésis, réfugié à Soissons, depuis que l’ennemi s’est emparé de son habita¬ tion, il recommande ce vieil officier, pour qu’il soit employé. Renvoyé au ministre de la guerre (1). Les représentants du peuple Laignelot et Le-quinio écrivent de Rochefort, le 8 frimaire, que le tribunal révolutionnaire établi dans cette com¬ mune, vient de livrer au glaive de la loi 10 offi¬ ciers du vaisseau V Apollon, venus à Rochefort pour préparer aux Anglais l’entrée de ce port. 2 autres officiers sont condamnés à la déporta-(1) Procès-verbaux de la Convention, t. 26, p. 385. 660 tion, et 8 à six mois de détention; il est prouvé par la procédure, qu’à Toulon les équipages brû¬ laient de se battre et que les états-majors et les officiers ont employé tous le3 genres de séduction et de perfidie pour rendre inutiles le courage et le civisme de nos braves matelots. Un instant avant l’exécution, la plupart des coupables s’exaspéraient contré le tribunal. « Vous avez tort, leur dit Crassous, frère d’un député et commandant en second du vaisseau V Apollon, nous méritons ce jugement, et vous devez vous rappeler que je vous ai prédit à Tou¬ lon que noire conduite ne pouvait nous mener qu’à l’échafaud. » Insertion au « Bulletin » (1). Suit la lettre des représentants du peuple dans le département de la Charente-Inférieure (2), Lequinio et Laignelot, représentants, à la Convention nationale. « Rochefort, le 8 frimaire de l’an II. « Citoyens nos collègues, « Enfin la-justice du peuple vient de frap¬ per les scélérats qui s’étaient rendus ici sur le vaisseau Y Apollon pour préparer l’entrée du port aux Anglais et le leur livrer comme ils avaient contribué à leur livrer Toulon. Le tri¬ bunal révolutionnaire vient de condammer à mort dix officiers de ce vaisseau, et le Vengeur du peuple en a délivré la République; tous les marins, tous les ouvriers du port et quelques officiers sont allés les prendre et les ont escortés d’une double haie jusqu’au lieu de l’expiation; l’air a retenti des cris de Vive la République! à la chute de chaque tête, et des chants patrio¬ tiques et des Vive le tribunal ont rendu un juste hommage aux membres qui le composent ; nous saisissons cette occasion pour en rendre un très authentique à Hugues, l’accusateur public, excellent jacobin dont le civisme, les talents et l’activité se trouvent au degré le plus désirable; nous la saisissons encore pour rendre justice à l’un de nos collègues qui se trouve en ce moment au milieu de vous, c’est Crassous, député de... Nous l’avons beaucoup vu à La Rochelle où. il présidait la Société populaire, et où il réunit le suffrage de tous les patriotes, nous nous croyons assez certains de son civisme pour ne pas douter qu’il eût lui-même, s’il avait été juge, voté la mort de son frère, comman¬ dant en second du vaisseau V Apollon, et qui vient de tomber sous la hache de la loi. « Il est prouvé, par la procédure, qu’à Toulon tous les équipages brûlaient de se battre, et que (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 26, p. 385. (2) Bulletin de la Convention du 5e jour de la 2e décade du 3e mois de l’an II (jeudi 5 décembre 1793). Archives nationales, carton G 283, dossier 799. Moniteur universel [n° 76 du 16 frimaire an II (vendredi 6 décembre 1793), p. 309, col. 2]. Aulard : Recueil des actes et de la correspondance du comité de Salut public, t. 9, p. 32. Mercure universel [16 frimaire an II (vendredi 6 décembre 1793), p. 250, col. 2]. ARCHIVES PARLEMENTAIRES, f � j�maire ( 5 décembre 1/93 ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j « 670 �Convention nationale.] les états-majors et les officiers, en nn mot tous les messieurs soldés par Pitt. ont employé tous lés genres de séduction et de perfidie pour rendre inutiles le courage et le civisme des braves matelots de la République. Ce que nous venons de voir nous confirme ce que nous avons tou¬ jours cru, que les sans-culottes sont vertueux et que le crime est à ceux qui les commandent et qui ont singé le patriotisme pour arriver aux honneurs. « Un instant avant l’exécution, la plupart des coupables s’exaspéraient contre le tribunal. Vous avez tort, s'est écrié Grassous, nous méritons le jugement et vous devez vous le rappeler ; je vous ai prédit à Toulon que notre conduite ne pouvait nous mener qu'à l'échafaud. Ces paroles mémorables sont la meilleure preuve, sans doute, que le tribunal a bien jugé, et l’on doit con¬ fesser qu’il remplit parfaitement sa mission. Deux autres officiers sont condamnés à la dé¬ portation, et huit à six mois de détention. « Laignelot; Lequinio. » La Société montagnarde de Lectoure écrit qu’elle vient de célébrer une fête et d’élever un obélisque à la mémoire de Marat. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1). Suit la lettre d'envoi du procès-verbal de la fête civique qui a eu lieu à Lectoure (2). La Société montagnarde de Lectoure, départe¬ ment du Gers, à la Convention nationale. « Lectoure, le 29e jour de brumaire de la 2e année de la République française, une et indivisible. « Citoyen Président, « La Société montagnarde de Lectoure vient de célébrer une fête et d’élever un obélisque à la mémoire de Marat, martyr de la liberté; elle a arrêté d’envoyer à la Convention natio¬ nale le procès-verbal de cette cérémonie. « Les membres composant la Société monta¬ gnarde de Lectoure, J. B. Lafont, président. » Procès-verbal de la fête de Marat célébrée par les sans-culottes de Lectoure le 23 brumaire de Van II de la République française, une et indivisible (3). La Société montagnarde de Lectoure, voulant laisser aux races futures un témoignage écla¬ tant de son amour pour Marat, l’ami du peuple, jalouse d’élever à ce grand homme un monument durable qui rappelât à la postérité (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 26, p. 386. (2) Archives nationales, carton C 285, dossier 833. (3) Ibid. ses vertus et sa gloire et lui montrât qu’à l’exemple d’Athènes et de Rome, ceux qui servent leur patrie et meurent en la défendant ont droit à sa reconnaissance et à sa mémoire, avait arrêté dans une de ses séances qu’un obélisque où seraient inscrits ces mots : A Marat, l'ami du peuple, serait élevé dans le lieu le plus apparent de la ville. Déjà le monu¬ ment s’offrait aux regards de tous les répu¬ blicains français et le jour indiqué pour célé¬ brer ses vertus était arrivé. A midi, la générale bat et les hommes, les femmes, les petits enfants, les vieillards, tous abandonnent leurs maisons et leurs travaux, tous s’empressent de venir pleurer sur la tombe de leur ami. Déjà une foule de citoyens et de citoyennes couvrait la place d’armes, lieu du rassemblement; le signal est donné et chacun se place. A deux heures, la marche commence et s’ouvre par un tambour major suivi de quatre tambours couverts de crêpe; deux sapeurs avec un air mâle et fier précèdent dix hommes armés de piques qui s’avancent sur une ligne de front; marchent ensuite douze jeunes vierges vêtues de blanc avec une écharpe noire et une branche de cyprès à la main : leur tendre âge et la candeur peinte sur leur front offrent (sic) l’innocence et la vertu. Elles sont suivies de douze vieillards vénérables dont les cheveux blancs expriment le respect; un d’eux porte une bannière surmontée du bonnet de la liberté et sur laquelle sont inscrits ces mots : Nous avons assez vécu puisque la liberté triomphe. Douze jeunes garçons tenant dans leurs mains des couronnes et des branches de chêne fer¬ ment ce cortège intéressant. Les corps constitués sont placés après, sépa¬ rés les uns des autres par un intervalle de dix pas, la municipalité est à leur tête, le tri¬ bunal judiciaire, le district et le comité de surveillance la suivent. Quatre membres de chaque corps constitué viennent ensuite portant une urne sur laquelle on lit cette inscription : Ici reposent les cendres de l'ami du peuple. Du sommet de l’urne, s’élèvent des branches de cyprès ceintes d’une couronne de chêne, elle est posée sur une planche couverte d’un linge blanc parsemé de larmes et jonché de feuilles de cyprès et de chêne. Le commandant de la garde nationale et celui du bataillon de la première réquisition, l’épée nue à la main, sont placés aux deux côtés. La Société populaire vient ensuite ayant à sa tête son président couvert du bonnet de la liberté et portant dans ses mains un joug brisé, signe de la liberté conquise; des groupes d’hommes et des jeunes filles la suivent : on voyait des femmes portant dans leurs braB le gage de leur amour, leurs enfants chéris, elles semblaient dire : Marat, voici ceux qui vengeront un jour ta mort; c’est pour servir comme toi la patrie que nous leur donnons notre lait; puissent -ils trouver une mort aussi glorieuse s’il existe encore des tyrans. O vous, amis sensibles ! qu’un spectacle aussi touchant eût attendri vos cœurs si vous aviez été témoins de ces scènes délicieuses ! La marche était fermée par la gendarmerie, et deux haies de piquiers, pris tant dans la garde nationale que dans le bataillon, ceignaient l’enceinte. Le cortège traverse toute la ville dans le plus grand silence et à pas lents ; on n’entendait