ARCHIVES PARLEMENTAIRES. I * nivôse •» Il j 2i décembre 1 193 268 [Coureutioii nationale | et fait naître les remords dans l’âme vénale des Toulonnais. Le canon de Lyon a retenti dans la redoute anglaise. I)s fuient, mais les vents les contrarient. (On applaudit.) Voici la lettre que Fouclié nous écrit. Fouché, à Collot-d’ Herbois, son collègue et son ami, membre du comité de Salut public. « Et nous aussi, mon ami, nous avons contri¬ bué à la prise de Toulon en portant l’épouvante parmi les lâches qui y sont entrés, en offrant à leurs regards des milliers de cadavres de leurs complices. « La guerre est terminée et nous savons mettre à profit cette mémorable victoire; soyons ter¬ ribles, pour ne pas craindre de devenir faibles ou cruels; anéantissons dans notre colère et d’un seul coup tous les rebelles, tous les conspira¬ teurs, tous les traîtres, pour nous épargner la douleur, le long supplice de les punir en rois. « Exerçons la justice à l’exemple de la nature, vengeons-nous en peuple, frappons comme la foudre, et que la cendre même de nos ennemis disparaisse du sol de la liberté. « Que de toutes parts les perfides et féroces Anglais soient assaillis ; que la République entière ne forme qu’un volcan qui lance sur eux la lave dévorante; que Pile infâme qui produisit ces monstres qui n’appartiennent plus à l’humanité, soit à jamais ensevelie sous les flots de la mer ! « Adieu, mon ami, les larmes de la joie coulent de mes yeux, elles inondent mon âme. Le cour¬ rier part; je t’écrirai par le courrier ordinaire. « Signé : Fouché. « P. S. Nous n’avons qu’une manière de cé¬ lébrer la victoire : nous envoyons ce soir 213 re¬ belles sous le feu de la foudre. Des courriers extraordinaires vont partir dans le moment pour donner la nouvelle aux armées. « Que l’honorable William Pitt assemble donc maintenant le parlement britannique; que George demande des subsides aux communes indignées. Qu’ils leur présentent le tableau de leurs victoires ministérielles à Dunkerque, à Saint-Malo et à Toulon : (On applaudit.) qu’ils ouvrent donc ce parlement tant retardé, tant prorogé, et qu’ils lui disent confidentiellement l’or qu’ont dépensé tant d’infâmies, le sang qu’ont coûté tant de trahisons; mylords et mes¬ sieurs applaudiront sans doute, et peut-être enfin le peuple anglais se rappellera ce qu’il fut un jour, avant que l’illustre usurpateur lui re¬ donnât le fléau de la royauté. » Voici le projet de décret que le comité vous présente : « La Convention nationale, après avoir en¬ tendu le rapport du comité de Salut public, dé¬ crète : « Art. 1er. L’armée de la République dirigée contre Toulon a bien mérité de la patrie. « Art. 2. Il sera célébré dans toute l’étendue de la République une fête nationale, le 1er dé¬ cadi qui suivra dans chaque commune la pu¬ blication du présent décret. La Convention na¬ tionale assistera tout entière â cette cérémonie civique. « Art. 3. Les représentants du peuple près l’armée victorieuse à Toulon sont chargés de recueillir les traits d’héroïsme qui ont illustré la reprise de cette ville rebelle. « Art. 4. Ils décerneront, au nom de la Répu¬ blique, des récompenses aux braves citoyens de l’armée qui se sont fait remarquer par de grandes actions. « Art. 5. Le nom de Toulon est supprimé. Cette commune portera désormais le nom de Port de la 31ontagne. « Art. 6. Les maisons de l’intérieur de cette ville rebelle seront rasées. Il n’y sera conservé que les établissements nécessaires au service de la guerre et de la marine, des subsistances et approvisionnements. « Art. 7. La nouvelle de la prise de Toulon sera portée aux armées et aux départements par des courriers extraordinaires. » Ce projet de décret est adopté. Barère lit, et la Convention adopte l’adresse suivante ; Adresse de la Convention. « lies armes de la République sont encore une fois triomphantes. Toulon, qui s’était lâchement vendu aux Anglais, vient d’être repris sur eux par une armée qui a reconquis cette ville re¬ belle, à la pointe de la baïonnette, et suppléé, par sa bravoure, à l’insuffisance du nombre. Sol¬ dats de la République, voilà l’exemple que vous offrent, vos frères d’armes ! Permettrez-vous que les satellites des tyrans souillent plus longtemps le sol de l’égalité? La victoire n’est-elle pas tou¬ jours le prix de votre courage? Frappez donc; exterminez donc de vils esclaves qui ont cons¬ tamment pris la fuite, quand les enfants de la liberté ont voulu se mesurer avec eux. Déjà le lâche Anglais, battu sous les murs de Dunkerque et chassé de Toulon, est terrassé pour jamais. Les brigands de la Vendée, trois fois taillés en pièces en quinze jours, se trouvent cernés de toutes parts. Au Rhin, de nouveaux avantages ont en partie réparé les résultats d’anciennes trahisons qui ne laissent plus que Landau à se¬ courir; au Nord, Maubeuge est délivré. Soldats de la patrie, tant d’efforts et de succès sont votre ouvrage depuis trois mois ! Qu’attendez-vous pour terminer la campagne de la liberté par la ruine entière de3 tyrans? Saisissez cette arme si terrible pour eux; que, la baïonnette dans les reins, ils soient forcés de courir cacher leur honte dans leurs repaires; et la France, délivrée de ses ennemis, vous devra à la fois le bonheur que lui promet l’affermissement de la liberté, et la gloire d’avoir triomphé de l’Europe entière. » Le capitaine Fruler, venant de Constantinople et apportant des nouvelles de l’agent de la Répu¬ blique, montant un vaisseau grec, rend compte des maux qu’il a éprouvés et du combat qui a eu lieu contre les Anglais, qui voulaient s’emparer du bâtiment, quoique neutre : il annonce que le bâtiment a échoué. La Convention décrète qu’il en sera donné un autre au capitaine grec, et nomme Fruler pour commander un vaisseau de la République, en qualité de capitaine (1). (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 28, p. 86.