448 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [23 juin 1791.) 11 y a trois inventaires, l’un de 1771, an autre de 1774, et un dernier de 1789. Nous récollions sur tous les trois, nous avons tout trouvé à l’exception d’un seul diamant de peu de valeur qu’on nous a dit être chez la reine; mais en échange il "j a beaucoup de diamants qui ne sont pas portés dans l’inventaire et qu’on nous a dit appartenir personnellement au roi et à la reine, de manière que nous avons lieu de croire qu’il n’y manque aucune chose essentielle. Cependant, ce n’est qu’un premier aperçu : nous avions un joaillier que M. Bion connaît; mais celui de la couronne n’y était pas. Si M. Thierry arrivede-main, nous commencerons demain notre opération avec la plus grande exactitude. (L’Assemblée charge son président d’écrire au directoire du département de Seine-et-Oise de donner les ordres nécessaires pour protéger le départ du sieur Thierry et le faire arriver à Paris en sûreté au dépôt du garde-meuble.) M. le Président. Messieurs, je reçois une lettre d’un citoyen de Paris dont la lecture sera sûrement agréable à l’Assemblée. Un de MM. les secrétaires fait lecture de cette lettre qui est ainsi conçue : « Paris, 22 juin 1791. « Monsieur le Président, « Le désastre auquel le départ du roi semble exposer l’Empire français doit justement alarmer tous les citoyens; mais la noble et courageuse fermeté de l’Assemblée nationale et les sages précautions qu’elle a prises dans une circonstance aussi fâcheuse, rétablissent absolument la plus douce sécurité dans les esprits : tout est prévu ; et chaque Français, en rendant grâces à la providence des mesures arrêtées par les pères le la patrie, n’a plus qu’à concourir de tout son pouvoir à leur exécution. « Afin de prévenir toute invasion, l’Assemblée a ordonné qu’il serait envoyé sur les frontières du royaume des gardes nationales, lesquels recevront une solde de 15 sols à compter du jour de leur rassemblement. Cette disposition ordonnée impérativement parles circonstances deviendrait une grande charge sur les fonds publics, si chaque Français, àqui il est possible de disposer de quelque portion de son revenu après l’acquit des impositions, ne payait encore son contingent pour cette grande et importante représentation, des raisons l’attachant à sa famille, ou ses affaires le mettant dans l’impossibilité de faire aucun service dans un poste aussi honorable ; pour quoi je suis chargé, Monsieur le Président, de vous prier de faire prévenir le comité militaire de la proposition que je me suis chargé de présenter à l’Assemblée pour la paye annuelle de 3 soldats de la patrie que les sieurs Ballard , imprimeur, Tanquerey, citoyen, et moi, nous obligeons de payer pendant tout le temps qu’il en sera besoin, et aux époques qui nous seront é indiquées. Nous nous flattons qu’un grand nombre de français qui, comme nous, ne peuvent avoir le honheur de payer, de leur personne le service qu’on doit à sa patrie, se sont empressés d’offrir leur cotisation patriotique pour soutenir les droits sacrés de la nation, notre sainte liberté, et pour repousser les atteintes de ces âmes viles, dévouées aux ordres arbitraires des despotes ennemis de l’humanité. (Vifs applaudissements.) « Je suis avec respect, Monsieur le Président, votre très humble et très obéissant serviteur. « Signé : RiffÉ, « Commis de l'administration des domaines , rue Percée-Saint-André-des-Arts , n° 15. » M. Démennier. Monsieur le Président, je demande que cette lettre soit imprimée et insérée dans le procès-verbal avec mention honorable. (Cette motion est adoptée.) (A deux heures, les membres de l’Assemblée qui avaient assisté à la procession de Saint-Ger-main-l’Auxerrois rentrent dans la salle des séances, escortés par un nombreux détachement de grenadiers de la garde nationale et de la gendarmerie, et précédés de la musique militaire faisant entendre l’air de : Ah! ça ira. Ils sont accueillis par de vifs applaudissements.) M. Alexandre de Beauharnais, président , reprend le fauteuil. M. le Président. J’ai deux propositions à faire à l’Assemblée : la première est de recevoir le serment de M. Drumont, lieutenant général de la 15e division des troupes de ligne, qui demande à être admis à le prêter aujourd’hui et qui n’a pu venir hier. La seconde vous est adressée par le détachement de grenadiers qui a accompagné l’Assemblée à la procession, qui vient de la reconduire et que vous venez de si bien accueillir; ces grenadiers demandent, avant de se retirer, à prêter aussi le serment. (Applaudissements.) M. Drumont, lieutenant général de la 15e division des trouves de liane, est introduit à la barre. M. le Président lit la formule du serment. M. Drnmont. Je le jure. (Les grenadiers de la garde nationale lèvent la main et répètent tous : Je le jure! au milieu des vifs applaudissements de l’Assemblée; la musique reprend l’air : Ah! ça ira, et le détachement se retire de la salle). M. de Bouthillier. Je n’ai pu me trouver hier à l’Assemblée, lorsque mes camarades ont prêté le serment dont vous avez décrété la formule. Animé des mêmes sentiments qu’eux, je m’empresse de suivre leurs traces et je demande à le prêter aujourd’hui. M. le Président lit la formule du serment. M. de Bouthillier. Je le jure. M. le Président. Une députation du conseil général de la commune de Paris, qui a des nouvelles très intéressantes à communiquer à l’Assemblée, demande à être admise à la barre (Oui 1 oui !) (La députation est introduite.) L'orateur de la députation s’exprime ainsi : Messieurs, le conseil général de la commune, actuellement assemblé, vient de recevoir à l’instant une lettre adressée à la municipalité de Paris; elle est datée de Sainte-Menehould, le 22 juin 1791 ; le courrier qui est présent à la barre l’a apportée. [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [23 juin 1791.] 449 Voici cette lettre : « Sainte-Menehould, le 22 juin 1791, « Messieurs, j’ai l’honneur de vous annoncer que le roi, la reine et la famille royale sont partis d’ici à 2 heures du matin pour se rendre à Châlons et de suite à Paris. Le roi et la reine m’ont fait promettre qu’il ne leur arriverait aucun accident ni dans leur route, ni dans leur arrivée à Paris, non plus qu’aux personnes de leur suite. Je leur ai promis et j’en ai répondu sur ma tête; pour les en assurer, je les ai accompagnés et leur ai promis de ne pas les abandonner dans toute la route. « Je vous prie de vouloir bien prévenir les citoyens delà capitale et j’espère que vous voudrez bien prendre toutes les mesures convenables et toutes les précautions nécessaires pour que notre promesse soit accomplie, que la tranquillité publique ne soit pas troublée. « J’aurai l’honneur de vous avertir du moment de leur arrivée autant que cela me sera possible. « J’ai l’honneur d’être, etc ..... « Signé : Baudin, envoyé de la municipalité. » Aussitôt que le conseil a reçu cet avis, il n’a eu rien de plus pressé que de nommer trois de ses membres pour venir apporter cette lettre à l’Assemblée et prendre ses ordres. M. le Président. L’Assemblée nationale voit avec satisfaction votre empressement à lui communiquer ce qui peut intéresser le bien public; elle vous engage à donner avec le même zèle tous vos soins pour la tranquillité de la capitale. M. Démeunier. Je demande que le directoire du département de Paris soit tenu de se concerter dans le plus court délai possible avec le maire et le commandant général de Paris sur les précautions à prendre pour assurer le retour du roi et de sa famille. Un membre : L’Assemblée a rendu un décret sur cette matière dans la séance d’hier. ( Oui ! oui !) M. Démeunier. Si vous pensez que votre décret d’hier pourvoit suffisamment aux circonstances, je demande qu’il soit inséré dans le procès-verbal; qu’après avoir entendu la lecture de la lettre qui vient de vous être communiquée, l’Assemblée n’a pas statué sur les dispositions demandées, parce qu’elle avait pourvu dès la veille aux précautions que la municipalité et le directoire du département avaient à prendre. (Cette dernière proposition est adoptée.) Un membre : Le directoire du département de Paris a reçu le décret de l’Assemblée à 2 heures du matin; il s’est concerté sur-le-champ avec la municipalité de Paris; toutes les précautions sont prises. (L’Assemblée ordonne de consigner ces détails dans le procès-verbal.) M. Muguet de Manthou. 11 est extrêmement important que le décret que vous avez rendu hier pour l’envoi de commissaires dans les départements frontières soit exécuté sur-le-champ. Vos commissaires ne sont pas encore partis, parce qu’ils ont pensé que peut-être il y aurait lieu à d’ultérieures instructions. Je crois qu’il serait essentiel que les commissaires arrivassent dans lre Série. T. XXVII. les départements au moment où l’on annoncera le départ du roi et je demande qu’il leur soit enjoint de partir sur-le-champ. (Cette motion est adoptée.) M. de Menou. J’ai l’honneur d’annoncer à l’Assemblée qu’il m’a été remis dans l’instant par M. le commandant général de la garde nationale parisienne une lettre qui lui a été adressée par la société des amis de la Constitution de Valenciennes. Cette lettre est la même que celle qui vous a été adressée et dont vous avez entendu la lecture. M. le Président. En raison de la fatigue de l’Assemblée et de la nécessité où seront un très grand nombre de membres de veiller la nuit prochaine, je suppose de suspendre la séance pour 2 heures. ( Oui ! oui!) (La séance est suspendue à deux heures ; elle est reprise à cinq heures du soir.) M. Danchy, ex-président , prend place au fauteuil et fait lecture d’une lettre de MM. Barnave , Pétion et de La Tour-Maubourg, ainsi conçue : « À la Ferlé-sous-Jouarre, le jeudi 23 juin 1791, à 9 heures du matin. Monsieur le Président, « Nous apprenons que le roi et les personnes qui l’accompagnent ont passé la nuit dernière à Châlons, où ils ont été conduits et escortés par une armée de gardes nationales, accourus des départements voisins au moment où la nouvelle de la présence du roi à Varennes s’y est répandue : nous espérons le joindre ce soir. Nous avons donné sur notre passage les ordres les plus précis pour la sûreté et la tranquillité de son retour, et nous avons été parfaitement secondés par les dispositions des citoyens. Partout, l’impression du départ du roi a été la même qu’à Paris. La contenance du peuple a été tranquille et fière. Nous n’avons cessé de recueillir les témoingnages de sa confiance et de son respect pour l’Assemblée nationale. ( Applaudissements .) « Nous avons l’honneur d’être, M. le Président, vos très humbles serviteurs. « Signé : Pétion, La ToüR-Mau-bourg, Barnave. » M. Rewbell. Les ennemis publics comptaient que le roi, en se retirant dans un département que l’on a peint comme contre-révolutionnaire, se verrait bientôt entouré d’une armée de mécontents : la France s’est montrée, et elle est sauvée -les 'gardes nationales se sont conduites avec le plus grand patriotisme. Mais, comme les ennemis de la patrie pourraient encore exciter les troubles, il est important de faire imprimer sur-le-champ la lettre de MM. les commissaires, et de l’envoyer dans tous les départements. (L’Assemblée décrète cette impression et cet envoi.) (La séance est suspendue à cinq heures et demie; elle est reprise à six heures.) M. le Président. Messieurs, voici une lettre que je reçois à l’instant ; elle est du directoire du département de Seine-et-Marne. Un de MM. les secrétaires donne lecture de cette lettre qui est ainsi conçue ; 29